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2 avril 2025
Femmes
CHALLENGE AND INNOVATION FORUM, NDÈYE FATOU MBOUP MÉDAILLÉE DE BRONZE AU QATAR
"Chaleureuses félicitations à notre jeune compatriote Ndèye Fatou Mboup, de Initiative Prospective Agricole et Rurale (IPAR), pour sa médaille de bronze au Challenge Innovation Forum du Qatar.
"Chaleureuses félicitations à notre jeune compatriote Ndèye Fatou Mboup, de Initiative Prospective Agricole et Rurale (IPAR), pour sa médaille de bronze au Challenge Innovation Forum du Qatar. Je félicite aussi l’Institut supérieur de Management (ISM) dont la lauréate est une diplômée", exulte le chef de l’État, Macky Sall, sur twitter.
Diplômée en Big Data au Digital Campus de ISM, Ndeye Fatou Mboup, qui représentait le Sénégal, s’est d’abord classée dans le Top 5, dans la catégorie Smart Agriculture, avant de remporter, au finish, la médaille de bronze, 3ème prix du concours, derrière la Malaisie et la Suède.
À 23 ans, Ndèye Fatou Mboup est chef de projet/programme - Responsable innovation et TiC à l’IPAR. Elle est également une entrepreneure en série spécialisée dans la création de solutions numériques pour la résolution de problèmes mondiaux (basés sur les ODD).
Elle a déjà été lauréate du Challenge des 1000 entrepreneurs d’Afrique, lors du sommet Afrique-France / Ville Durable en 2020. Elle a aussi remporté le concours national pour le Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI), organisé par le ministère des télécommunications et de l’économie numérique - finaliste SMSI mondiale organisé par l’IUT (WSIS Prizes)
Le Challenge and Innovation Forum (CIF) Qatar 2021 a réuni, du 7 au 11 novembre 2021, les 100 meilleures inventions sélectionnées sur plus de 6 mille candidatures venues des quatre coins du globe. Parmi les participants figuraient seulement deux africains.
LES SIGNARES OU LA MÉMOIRE MALMENÉE DES MÉTISSES QUI ONT RÉUSSI
Rencontre avec Aminata Sall qui, grâce à son musée, lutte pour que ces illustres femmes ne soient pas réduites à des élégantes tropicales dont de lointaines et séduisantes doublures agrémenteraient les visites de ministre
Aminata Sall ne s'en cache pas: elle demande "pour quoi faire" à quiconque approche son musée dans le nord du Sénégal pour piocher dans la spectaculaire collection de robes traditionnelles qu'il recèle.
Un professeur lui avait répondu que ces tenues renvoyant à l'histoire unique des femmes métisses de Saint-Louis serviraient lors d'une remise de diplômes.Elle lui a dit: "Si c'est juste pour le décor, je ne vous les loue pas", relate-t-elle dans son bureau aux fenêtres ouvrant sur le fleuve Sénégal, non loin des réserves sombres dans lesquelles une centaine de toilettes théâtrales or, grenat ou vert d'eau attendent l'occasion de sortir de leurs cartons.
Aminata Sall est la conservatrice d'un musée dédié à l'histoire et aux traditions.Elle fait aussi partie d'une association qui préserve la mémoire de Saint-Louis et de certaines de ses filles illustres, les signares.
Elles sont un certain nombre comme elle à faire en sorte que, malgré les siècles, les signares soient reconnues comme des femmes entreprenantes et souvent puissantes, et non pas réduites à des élégantes tropicales dont de lointaines et séduisantes doublures agrémenteraient les visites de ministre.
Il y a une "perte de sens", déplore la conservatrice.
L'ascension des signares épouse l'histoire de Saint-Louis, poste créé par des Français au XVIIème siècle, devenu un important comptoir du commerce de la gomme arabique, de l'or, de l'ivoire et des esclaves, et la capitale de l'ensemble colonial français en Afrique de l'Ouest.
A Saint-Louis ou plus au sud, sur l'île de Gorée, émerge alors un groupe à la croisée des cultures européennes et africaines, métissage longtemps distinctif de Saint-Louis, "laboratoire d'une nouvelle société différentielle" selon l'Unesco qui a inscrit la ville au patrimoine mondial.
A l'époque, les arrivants européens se mettent en ménage avec des autochtones.Certaines sont des esclaves que leur maître affranchit.Ils ont des enfants métis.Le "mariage à la mode du pays" s'institutionnalise, bien que réprouvé par l'Eglise, et sert d'ascenseur social.
- Un rituel sorti de l'oubli -
Des fortunes métisses se constituent, par le truchement de l'héritage, et grâce à l'opportunisme de ces femmes que les maris avaient associées à leurs affaires.
Apparaît un "nouveau mode de vie qui n'a rien à voir avec la tradition sénégalaise", selon les mots de la chercheuse Aissata Kane Lo.Les témoignages locaux et les récits de voyageurs dépeignent une bourgeoisie féminine agissante.A heures fixes, les signares sortent faire étalage d'un raffinement synthétisant traits européens et africains.
A partir du milieu du XIXème, l'empreinte des signares s'estompe sous l'effet de l'abolition de la traite, de la colonisation qui défavorise le commerce local, et des transformations sociales.
Marie-Madeleine Valfroy Diallo, 73 ans, journaliste, actrice, entretient la flamme.A la tête d'une société de production, elle a tiré de l'oubli en 1999 le fanal, fête populaire saint-louisienne qui aurait pour origine la procession des signares à la lumière des lanternes.
Depuis, "tout le monde vient et nous dit: +ah!on a une grande fête, on a des hôtes de marque, est-ce que Marie-Madeleine peut nous envoyer des signares+", revendique-t-elle.
Lors du fanal, les signares chatoient parmi les figurants en costume, robes cintrées au-dessus de la taille, bouffantes en dessous, parées de fronces, de voiles et de dentelles, avec la coiffe et le châle assortis.
Cet engouement fait travailler les artisans de la place.
Ndéye Diop Guissé, 42 ans, deux fois vainqueure du concours national des couturiers, confectionne des robes de signares sur commande, en plus de ses activités de styliste.Elle recrute comme mannequins les jeunes femmes qu'elle forme par ailleurs à la couture dans son modeste atelier d'un quartier populaire.
- "Un patrimoine" -
"Nous sommes vraiment fières de mettre ces tenues", dit l'une d'elles, Awa Marie Sy, après avoir consacré beaucoup de minutie et d'excitation à s'apprêter pour une démonstration sur les anciens quais de Saint-Louis.
"Ces tenues étaient portées par nos aïeules, qui étaient comme des reines, aimables, accueillantes, toujours le sourire au visage", dit-elle.
Des mots propres à piquer la conservatrice Aminata Sall."Les gens oublient ou font semblant d'oublier.Il faut qu'ils comprennent qu'elles ont joué un grand rôle, comme les colonisateurs.On ne peut pas l'effacer, c'est l'histoire", s'enflamme-t-elle.
Les signares ont inspiré Léopold Sédar Senghor, le musicien Youssou Ndour et des stylistes contemporaines.
Mais "seuls quelques notables s’en réclament encore.A Saint-Louis, mis à part le costume folklorisé à l’occasion d’événements culturels ou politiques, la mémoire des signares a disparu", dit l'universitaire Aissata Kane Lo.
"Il reste quelques noms (de signares), d'autres ont disparu parce qu'il y avait beaucoup de filles", relate Ariane Réaux, une hôtelière qui propose des conférences sur les signares et des mariages à la mode du pays dans son établissement au bout d'une étroite langue de sable entre océan et fleuve.
"Il y a beaucoup de choses que les gens ne comprennent pas trop", concède-t-elle.Mais elle rapporte une fascination répandue pour la rencontre impossible de deux mondes il y a des siècles de cela.
"C'est pas du spectacle, c'est un patrimoine, les signares.Cela fait partie d'une histoire entre la France et le Sénégal.Rien de tel ne s'est produit ailleurs", dit-elle.
KOLDA-SÉDHIOU, PLUS DE 68 % DES FILLES MARIEES TROP TOT
Le Réseau des jeunes pour la promotion de l’abandon des mutilations génitales féminines et des mariages d’enfants est en tournée de sensibilisation dans les régions de Sédhiou et de Kolda
Le Réseau des jeunes pour la promotion de l’abandon des mutilations génitales féminines et des mariages d’enfants est en tournée de sensibilisation dans les régions de Sédhiou et de Kolda. Ses membres comptent sur les leaders coutumiers, culturels, etc., pour que l’âge de mariage des filles soit revu.
A travers son programme de sensibilisation pour la santé et droits des femmes, adolescents et enfants : ‘’saam xalei -yi, dolell ji guen-yi’’, le Réseau des jeunes pour la promotion de l’abandon des mutilations génitales féminines et des mariages d’enfants (RJPA-MGF/ME) organise, depuis avant-hier, des rencontres de plaidoyer avec les parlementaires, les leaders politiques, religieux et coutumiers, des régions de Kolda et Sédhiou pour le relèvement de l’âge du mariage. L’objectif est de les informer des dispositions des conventions et textes réglementaires sur les mariages d’enfants, le cadre légal et réglementaire. Les organisateurs souhaitent également échanger avec les participants sur l’importance de promouvoir l’abandon des mariages d’enfants dans ces deux régions.
Dans ce sens, il est important que les leaders politiques de ces deux régions soutiennent leurs actions pour mettre fin aux mariages d’enfants.
Lors de cette activité, la coordinatrice de la boutique de droit de Sédhiou a rappelé qu’au Sénégal, les avancées notées dans le cadre de la protection des femmes et des filles contre toutes formes de violence, l’abandon des violences basées sur le genre (VBG) demeure une question importante dans les politiques de l’Etat et des collectivités locales. Les mariages d’enfants, selon Joséphine Ndao, constituent une forme de VBG très répandue au sein des communautés. En effet, selon elle, l'enquête démographique sénégalaise (EDS) de 2017 a révélé que les mariages d'enfants continuent de menacer l'avenir de cette couche, avec une prévalence nationale de 33 %. Il est démontré que plus de 8,5 % des filles sont mariées avant l’âge de 15 ans et 26,4 % de filles moins de 18 ans ont contracté des grossesses.
Par ailleurs, il est également noté que la prévalence du phénomène des mariages d’enfants varie selon les localités. Les régions les plus touchées sont Kolda (68 %), Tambacounda (57 %), Diourbel (46 %) et Kaolack (39 %). L’enquête révèle, en outre, que le phénomène est plus accentué en milieu rural (49,3 %) qu’en milieu urbain (16,9 %) et est plus courant dans les ménages pauvres, renseigne Mme Ndao.
‘’Il faut aussi souligner qu’au Sénégal, ce sont les filles qui sont plus affectées que les garçons par ce fléau. Ce dernier provoque des effets néfastes sur la santé reproductive et psychologique des victimes. Bien que le Sénégal ait ratifié le protocole de la Charte africaine des Droits de l’homme et des peuples relatifs aux droits des femmes en Afrique, communément appelée le Protocole de Maputo qui stipule que l’âge du mariage pour les filles est de 18 ans, la loi nationale ne l’a pas encore prise en compte. Au vu de tout cela, il est essentiel de mettre en œuvre des stratégies de lutte afin de protéger les femmes et les filles contre ces faits qui freinent leur développement. Ainsi, pour amener les parlementaires et les leaders politiques à booster le processus visant à abandonner les mariages d’enfants, il est nécessaire, voire primordial de s’appuyer sur le plaidoyer qui est une forme de communication d’influence. En effet, faire des activités de plaidoyer auprès de ces décideurs constitue une stratégie pour apporter un changement durable pour l’élimination des mariages d’enfants’’, a soutenu la juriste.
‘’Pour les défis, il faut s’assurer que le gouvernement…’’
‘’La Constitution qui garantit l’égalité et la liberté de tous les hommes dit que les hommes et femmes sont égaux en droit. La Loi 99-05 du 29 janvier 1999 portant modification de certaines dispositions du Code pénal, réprime l’excision, le harcèlement sexuel et les violences conjugales. La loi n°2005-18 du 5 août 2005, relative à la santé de la reproduction, stipule que la santé de la reproduction est définie comme le bien-être général, tant physique, mental que social de la personne humaine, pour tout ce qui concerne l’appareil génital, ses fonctions et son fonctionnement. Une réforme de la législation est en cours, l’AJS (Association des juristes sénégalaises) a été associée à la réflexion au cours d’un récent atelier sur la question, organisé par l’Etat du Sénégal qui envisage d’accorder aux associations le droit de se porter partie civile. Une association qui correspond aux critères qui seront retenus pourra déclencher une procédure en justice en cas de violation des droits des femmes, ou des enfants (droit à l’intégrité physique, à la santé…)’’, a indiqué la juriste.
Elle est d’avis qu’il faut contraindre la communauté à se mobiliser pour empêcher des pratiques condamnées par la loi et favoriser leur répression. C’est ainsi seulement, selon elle, que ‘’le silence ou l’indifférence n’aura plus droit de cité’’, car la loi ne suffit pas. ‘’Il faut que les populations comprennent les enjeux, pour adhérer à la justesse des arguments et abandonner l’excision par exemple. Pour les défis, il faut s’assurer que le gouvernement (ministères de la Justice, de l’Education, de la Famille et de la Santé) maintienne sa volonté de lutter contre l’excision, que les parlementaires comprennent les enjeux et fassent le plaidoyer pour l’abandon de l’excision auprès des habitants de leur circonscription ou base électorale. Il sera aussi question de veiller au maintien des acquis des lois de 1999 et de 2005, de vulgariser les lois et en utilisant l’approche droits humains’’, a souhaité Joséphine Ndao, hier à Sédhiou.
REPRESENTATIVITE DES FEMMES, ONUFEMME SATISFAIT DE L'AUDIT DU MINISTERE DE L'INTERIEUR
Le Sénégal est une bonne école en Afrique dans le domaine de l’institutionnalisation du genre dans les politiques publiques. C’est ce qu’assure la Directrice régionale d’ONUFEMMES en Afrique de l’Ouest et du centre, Oulimata Sarr
Le Sénégal est une bonne école en Afrique dans le domaine de l’institutionnalisation du genre dans les politiques publiques. C’est ce qu’assure la Directrice régionale d’ONUFEMMES en Afrique de l’Ouest et du centre, Oulimata Sarr, qui a assisté à l’atelier de restitution de l’audit genre du ministère de l’Intérieur. Elle a magnifié la représentativité des femmes dans ce département que dirige, Antoine Félix Diome. « Le Sénégal a réussi le pari d’avoir une représentativité des femmes dans les sphères de décision dont l’Assemblée nationale », a-t-elle souligné ce vendredi.
Au niveau du ministère de l’Intérieur, la DAGE est dirigée par une femme. Dans cette direction également, 25% des membres de l’équipe sont des femmes. Elles sont, par ailleurs, majoritaires dans les postes de coordination et d’assistance. Au niveau du Secrétariat général, il y a 4 femmes chefs de service, soit 55%.
Cette représentativité des femmes est également visible dans l’administration territoriale. L’audit genre initié par l’ONU Femmes a souligné la présence d’une femme gouverneur, qui officie dans la région de Fatick, mais aussi de 9 femmes adjointes gouverneur contre 19 hommes.
Dans les départements, on enregistre 4 femmes préfets contre 41 hommes. « Il me plaît de rappeler que la prise en charge des besoins spécifiques des femmes et des filles est d’une importance capitale dans les réponses de l’Etat pour améliorer les conditions de vie des populations, mais également assurer la sécurité des personnes et des biens. En effet, les femmes et les filles représentent plus de 50% de la population et en constituent donc la majorité. S’inscrire ainsi dans une trajectoire d’émergence signifie prendre en compte les besoins spécifiques de chaque groupe social dans la mise en œuvre des politiques publiques », a déclaré le ministre de l’Intérieur, Antoine Félix Diome, qui a présidé la cérémonie de restitution.
Il a également rappelé « l’augmentation du nombre des femmes dans les corps traditionnellement dédiés aux hommes, notamment la police, les sapeurs-pompiers, l’administration territoriale. Ce qui constitue une avancée notable à saluer ».
JE ME SUIS SENTIE EMPRISONNÉE
Sa disparition volontaire en janvier en France, où elle étudie, a provoqué un tsunami médiatique au Sénégal. Dix mois plus tard, Diary Sow publie un roman sur une jeune femme prenant la fuite, afin de répondre aux critiques et se réapproprier son histoire
"Je pars" raconte celle de Coura, Française d'origine sénégalaise qui décide d'échapper à sa vie.Elle quitte Paris sans prévenir personne, puis revient des semaines plus tard, changée à jamais.
"Disparaître, certains en rêvent.Elle l'a fait", souligne Robert-Laffont, un important éditeur français, qui publie le livre, faisant de la confusion entre le réel et l'inventé un croustillant argument de vente.Une courte vidéo de promotion montre l'autrice faisant sa valise, avant de s'éclipser dans la nuit.
Car Diary Sow a connu une expérience similaire en janvier dernier.Un demi-mois de "pause", selon son expression, ayant mis aux aguets les autorités sénégalaises, jusqu'au président Macky Sall, qui donna des instructions pour qu'on la retrouve.
"Mon expérience m'a beaucoup inspirée" pour donner du corps au personnage principal, "mon alter ego", explique-t-elle à l'AFP, refusant toutefois de raconter sa longue fugue, un moment "strictement personnel"."Je ne suis pas Coura et elle n'est pas moi", insiste-t-elle.
Si Coura a grandi riche, Diary Sow a connu une enfance humble, sur la petite côte sénégalaise, où elle est née il y a 21 ans.Contrairement à son héroïne, l'écrivaine put toutefois compter sur un père aimant, décédé l'an dernier, "qui me disait d'élever la voix au lieu de la brimer", se souvient-elle.
- "Butin de guerre" -
"S'il était resté vivant, je ne pense pas que tout ceci serait arrivé", observe la longiligne jeune femme au regard intense, dont le parler ciselé, toujours précédé de courts instants de réflexion, dénote une grande maturité.
Brillante, Diary Sow est couronnée deux fois meilleure élève du Sénégal, en 2018 et 2019, une distinction aussi prestigieuse que commentée dans ce pays pauvre ouest-africain.
Le bac en poche, cette boursière d'excellence part étudier dans une prestigieuse classe préparatoire scientifique parisienne.Elle publie en 2020 un premier roman, renforçant sa notoriété nationale.
Mais en janvier dernier, Diary Sow s'éclipse, ne donne plus de nouvelles à quiconque.Une enquête pour disparition "inquiétante" est ouverte en France.Le Sénégal craint le pire, jusqu'au sommet de l'Etat.
"On a eu l’impression d’avoir perdu un butin de guerre, un trophée", se souvient Zoubida Fall, autrice de nouvelles sénégalaise."Au milieu de Paris, on voyait des gens la chercher avec des pancartes : +On cherche la meilleure élève du Sénégal+.Il n'y avait même pas son nom."
Lorsque l'étudiante réapparaît, les commentaires affluent, souvent "vils", poursuit Mme Fall : "Quand dans notre société on prend quelqu’un en exemple et ce quelqu’un sort des clous, nous avons des réactions qui peuvent être extrêmement violentes."
- Se "réinventer" -
Le poète sénégalais Amadou Lamine Sall se veut moins clément.Diary Sow "a pris du plaisir à être connue, à être photographiée.Elle se prêtait à ce jeu, donc elle en paie le prix", tranche-t-il, quand d'autres lycéens primés au Sénégal "n'ont pas connu ces aventures".
Et de citer Mohamed Mbougar Sarr, meilleur élève de terminale du pays en 2009, qui après "beaucoup de travail", s'est vu décerner début novembre le prestigieux Prix Goncourt français : "Si elle prend le temps de travailler, peut-être pourra-t-elle aussi devenir dans vingt ans un grand écrivain."
Mais la Sénégalaise, qui dit être parfois arrêtée dans la rue par des compatriotes lui affirmant qu'elle "ne vaut rien", ne veut pas attendre.
"Je pars" est en ce sens une réponse romancée aux critiques."J'ai écrit ce bouquin pour régler quelques comptes", reconnaît la jeune femme "emprisonnée par l'opinion des autres", dont l'identité a selon elle "tellement été déformée qu'(elle) n’arrive plus à coller à ce personnage".
Alors Diary Sow veut "choquer".Elle fait découvrir à Coura sa sensualité, quand l'on discourt rarement sur l'intimité féminine au Sénégal."J'ai voulu provoquer de la répulsion, de l’incompréhension, du dégoût, peu m’importe tant que ce n’est pas de l’indifférence."
Elle espère ainsi, au rythme des frasques de Coura, "réinventer" sa vie.Et d'oser : "Peut-être qu’un jour je parviendrai à être celle qui définit ma propre image."
AWA CHEIKH MBENGUE VEUT UNE REFORME DE L’ARTICLE 277 DU CODE DE LA FAMILLE
Pour éviter d’autres drames comme celui impliquant le Dr Palla PAYE
L’article 277 du code de la famille sénégalais qui stipule que «durant le mariage, l’autorité parentale est exercée par le père en qualité de chef de famille» doit être réformé. C’est l’avis de Awa Cheikh Mbengue, membre du Conseil Economique, Social et Environnemental (Cese) et représentante de la Diaspora d’Espagne. Pour gagner ce combat, elle demande à toutes les associations féminines de se joindre à elle.
Awa Cheikh Mbengue reprend sa croisade contre l’article 277 du code de la famille sénégalais qui prévoit que «durant le mariage, l’autorité parentale est exercée par le père en qualité de chef de famille. En conséquence, l’autorisation parentale doit être signée par ce dernier».
C’est l’affaire du Dr Palla Paye, le médecin qui a tué ses trois enfants avant de se suicider, qui a poussé le membre du Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE) et représentante de la diaspora d’Espagne à reprendre ce combat. Selon elle, cet article enlève pratiquement à la mère toute responsabilité sur son enfant.
Réclamant ainsi la réforme de l’article 277 du Code de la famille sénégalais, elle précise que «cette disposition, qui donne le droit exclusif à l’homme est à l’origine de tragédies au sein des familles, notamment celles établies à l’étranger».
La troisième secrétaire élue des membres du bureau du Cese pense que l’article 277 du Code de la famille est en porte-à-faux avec la Charte fondamentale notamment sur le principe de l’égalité des citoyens devant la loi. «Je mène un combat depuis des années visant à modifier les dispositions sur l’autorisation parentale. La Constitution autorise toute femme sénégalaise à donner la nationalité à son fils, mais l’article 277 du Code de la famille, interdit à la femme de donner l’autorisation parentale à ce dernier», se désole-t-elle, rappelant qu’aujourd’hui, beaucoup de femmes abandonnées ou en instance de divorce butent souvent sur l’autorisation parentale quand elles souhaitent faire un passeport à leurs enfants ou simplement voyager avec eux. «Trois mères de familles sénégalaises tuées en Espagne»
Pour Awa Cheikh Mbengue, le drame survenu à Sacré-Cœur avec la mort de Dr Falla Paye et de ses enfants doit pousser les autorités à accélérer la réforme. «Ici, en Espagne que je connais pour y avoir passé plus de trois décennies, et dans pratiquement partout dans le monde, les femmes sénégalaises en souffrent beaucoup. Par exemple, après le divorce, l’homme prend l’autorisation parentale comme arme. En général, ce sont les enfants qui sont les principales victimes. Si la femme peut donner une nationalité à son fils, elle doit pouvoir exercer l’autorisation parentale sur ce dernier», indique la représentante de la diaspora d’Espagne. Pour que le combat réussisse, Awa Cheikh Mbengue lance un appel à toutes les associations féminines du pays et de la diaspora à adhérer à ce combat afin de «mieux protéger le sexe faible».
D’après elle, « pas moins de trois femmes sénégalaises ont été tuées en Espagne, dont le dernier cas remonte au mois de novembre 2019».
par Awa Ngom Diop Telfort
UNE SI LONGUE LETTRE
On constate bien tard et avec tristesse que la lettre de Falla Paye n'est que la suite fatale de celle de Mariama Bâ. Car les profondes mutations génèrent toujours de terribles conséquences. Et au virage des changements de dynamique, ça passe ou ça casse
À l'entame, je m'incline solennellement devant les corps de ces trois merveilleux bouts de chou, assassinés par un géniteur indigne, démentiel, suicidaire. Pour le repos de leur âme je prie, et présente mes condoléances à toutes celles et à tous ceux qui les ont connus et aimés.
Le drame est absolument chargé et insoutenable. Mais tandis que des plumes furieuses se déchaînent à juste raison, et déversent leur bile sur l'acte et son coupable, je voudrais, pour un instant, me détacher du tumulte émotionnel et des prises de parti « basées sur le genre ».
Me concentrer plutôt sur le fait de société. Pour mettre les pieds dans la marmite. Et replacer les dés sur l'échiquier. En m'intéressant froidement à l'outil. Qui n’est autre qu’une correspondance. Pour le parallèle peu banal qu’il évoque. Et analyser son empreinte sociologique. Car tout est là.
Indispensable dès lors de remonter à la source. Pour interroger l'histoire. Et servir la postérité. En revisitant une graine semée antan, sous la plume immense de Mariama Ba, dans son roman épistolaire. Intemporel dilemme de la femme africaine contemporaine.
Ainsi, en 1979, dans "Une si longue lettre", Mariama Bâ écrivait : « Nous étions tous d’accord qu’il fallait bien des craquements pour asseoir la modernité dans les traditions. Écartelés entre le passé et le présent, nous déplorions les « suintements » qui ne manqueraient pas… Nous dénombrions les pertes possibles. Mais nous sentions que plus rien ne serait comme avant. Nous étions pleins de nostalgie, mais résolument progressistes. »
Comme une prémonition, Mariama avait tout consigné dans sa correspondance à Aïssatou. Où elle esquissait les contours d’une société qui réajustait ses atours. Évoquant déjà les signes précurseurs. Qu’aucun patriarche n’avait pris le temps de décoder, ni aucun sociologue la peine de modéliser.
Pourtant quelque part, cette graine allait germer. Car le texte avait fait écho. Dans les têtes et dans les cœurs de ces mères qui, à pas de velours, avaient décidé de changer le sens du vent. Elles se mirent alors à chuchoter aux oreilles de leurs filles. Plaçant en elles le défi de la relève. Leur disant que le premier mari était le diplôme. Guidant leurs pas vers la lumière. Avec comme unique pouvoir leur espérance, et leur foi. Nouées de crainte et d’incertitude. Priant pour qu’un jour, leurs filles puissent faire face. Qu’un jour, ces filles n’aient pas à subir les fils de ceux, qui ne les avaient pas laissé, elles, exprimer leur potentiel. Qu’un jour, comme Aïssatou, elles puissent allègrement tourner le dos, déployer des ailes et prendre l’envol. Exhiber leurs diplômes et leurs fiches de salaire. Loger à leurs propres frais. Endosser les charges familiales, scolaires et domestiques. Conduire des voitures payées à leur solde. Dépenser des sonnantes et des trébuchantes sans affecter la DQ. Un jour, assumer, « prendre leurs responsabilités ».
A l’aune de la réussite, elles se tiendront comme des ananas : droites et la tête haute, ornée d’une couronne. Celle de l’accomplissement. Car elles savent désormais que cela prend autant de mains pour nouer un pantalon que pour attacher un pagne.
Et si tout se passe comme prévu, le mari sera nécessaire, mais pas indispensable. Un accessoire. Pour compléter le tableau et se conformer, parce que « dieukeur sakk leu ». Par contre et surtout, il leur fallait faire des enfants. Pour connaître l’amour. En dépit de celui du bonhomme. Pour avoir la chance d’en donner et d’en recevoir. Comme elles-mêmes en avaient donné et reçu de leur progéniture.
Acté !
La si longue lettre de Mariama devenait ainsi un outil de référence. Même pour celles qui ne savaient pas lire. Pour que l’angoisse et l’incertitude changent enfin de camp. Pour faire de leurs filles des boucliers. Et défier les coups qu’elles n’avaient pas pu esquiver, et ceux qu’elles avaient dû ravaler. Faire de leurs filles des roseaux, une espèce résiliente. De cette trempe déterminée qui plie, mais ne rompt pas, même quand les coups sont épouvantables.
Une si longue lettre pour finalement « oser l'avenir ».
Et tout s'éclaire en lisant la trop longue lettre de Falla Paye. Mince. Ça saute aux yeux, quand on prend conscience. De leur impréparation à la rupture volcanique qui s’opérait sous leur nez. Hélas !
Car personne n’avait pris le temps de les mettre à niveau. Eux. Confortablement installés dans une domination mâle qui filait tout droit à l'obsolescence. Hélas ! Vautrés sur leurs lauriers, ils ne les ont pas vu venir. Celles qui, avec assiduité, apprenaient à leur arriver à la cheville et à l’épaule. Pensant d’elles qu’elles étaient juste le sexe faible. Car on ne leur avait jamais avoué que le sexe fort n’existe pas. On ne leur avait pas non plus enseigné que la complémentarité est le socle viable du tissu social et des questions conjugales. Qu’elle seule [la complémentarité] donne le pouvoir d'enjamber les obstacles, de résister aux secousses, et à l’usure.
On constate alors bien tard et avec tristesse que la lettre de Falla Paye n'est que la suite fatale de celle de Mariama Bâ. Car les profondes mutations génèrent toujours de terribles conséquences. Et au virage des changements de dynamique, ça passe ou ça casse.
Espérons qu'en décryptant ces deux si longues lettres, ils comprendront. Et qu'en s'y attelant avec assiduité, ils réaliseront, qu’ils accepteront. Que désormais les dés ont tourné. Que les « craquements » ont commencé. Et que les « suintements » ne manqueront pas.
Pourvu seulement que cela ne se fasse PLUS JAMAIS au détriment de la vie de nos enfants !
Par Fama Diagne Sene
«POURQUOI J’AI ECRIT SUR AIDA MBODJI»*
En écrivant, cet ouvrage j’ai pensé du fonds du cœur à toutes les femmes du monde, qui ont su marquer l’histoire par leur prise de position courageuse pour faire entendre leurs voix
En écrivant, cet ouvrage j’ai pensé du fonds du cœur à toutes les femmes du monde, qui ont su marquer l’histoire par leur prise de position courageuse pour faire entendre leurs voix, face à l’oppression politique.
Elle se nomme Aïssatou Mbodj, plus connue sous le nom d’Aida Mbodj, la lionne du Baol ! Quel beau surnom, pour une grande dame, de cœur et d’esprit, dont le franc parler, le courage et l’énergie ont marqué plus d’un sénégalais ! Elle nous a fait rêver, applaudir et scander le nom de « Abdoo Woor », « Ma carte ma caution » ou encore « And Saxal Ligey », avec la force électrique qui a drainé sur son courant, des centaines de milliers de voix pour plébisciter son candidat.
Pour Bambey, d’où lui vient son nom de guerre « la lionne du Baol », l’amour des populations envers Aida est indescriptible. Elle est plébiscitée, estimée et adulée par toute la population, y compris ses opposants politiques. Même les petits enfants portent son nom et son image au plus profond de leurs cœurs, comme la représentation d’une belle personne, agréable à voir, souvent assise dans un superbe véhicule qu’elle n’hésite pas à garer devant les domiciles des plus démunis pour apporter à la famille, son soutien et son réconfort, lors d’événements heureux ou malheureux. Moi-même, plus d’une fois, lorsque habillée en grand boubou de valeur, et au volant de mon véhicule en route vers l’université, j’ai été prise pour cible à Bambey, par des groupes d’enfants, âgés entre six et huit ans, qui criaient en me voyant: - « Ah, c’est Aida Mbodj ! Voici Aida Mbodj ! Aida ! Aida ! »
Pour eux, toute personne bien habillée et circulant dans un véhicule, ne pouvait être que la lionne du Baol ! A Bambey, certaines personnes, surprises par l’ampleur de la sympathie qui lie Aida Mbodj et la population, disent que la lionne du Baol, a mis une potion magique dans les eaux du grand puits qui alimente la ville et qui a fait naître dans le cœur de chacun, une solide amitié que rien ni personne ne pouvait éteindre.
Le puits est tari depuis plusieurs décennies mais cette amitié résiste à tout comme si en vérité, il ne s’agissait que d’un attachement profond, d’une population qui sait rendre à son dirigeant, le retour de son affection indéfectible. Aida Mbodj est donc l’idole des Bambeyois. Elle leur a donné tout ce qu’elle possède et même ce qu’elle n’a pas en vérité, demandant autour d’elle, des appuis çà et là pour faire de Bambey et environ, Ngoye, Ndondol, Ndangalma, etc., un miroir éclatant qui reflétait sa vision pure de la politique, qui n’est en réalité que la gestion des affaires publiques, nécessitant une tactique, une stratégie et une diplomatie. Elle a su faire parler de la ville, comme ses prédécesseurs, du nom de Pierre Senghor, le grand frère du président Léopold Sédar Senghor ou Djibril Sène, du parti socialiste, une terre de conciliation et de bien-être.
Aida a été ministre, puis ministre d’état sous le Président Abdoulaye Wade, chargée de la femme, de l’enfance et des organisations féminines et la première femme, présidente du groupe parlementaire du Parti démocratique sénégalais, à l’assemblée nationale. Pour chaque mandat, elle a su puiser dans ses ressources profondes, une force nouvelle pour impulser les choses, lustrer et magnifier le poste qu’on lui confiait, comme si elle était, la première personne à occuper cette station politique. Aida a été présidente du Conseil départemental de Bambey en 2014, mettant à terre tous ses antagonistes qui géraient des budgets ministériels et des fonds de campagne colossaux. Elle est présidente du mouvement politique Alliance Nationale pour la Démocratie And Saxal Ligey et députée de ce même groupe pour la 13e législature, élue le 30 juillet 2017. Lorsqu’elle a accepté de se confier dans cet ouvrage, premier livre autobiographique sur elle et son parcours politique, j’ai été honorée. Parce que j’ai toujours suivi Aida Mbodj dans ses moindres mouvements politiques.
Elle est une femme de conviction, connue pour sa liberté de pensée et ses prises de positions courageuses aux moments les plus incertains de notre histoire politique. Elle est née dans la pure tradition walo walo, éduquée par des parents conservateurs qui ont su lui inculquée très tôt, les qualités africaines portées hautement par les bracks du walo, à savoir : le Mugn, le Ngor, le fit et le kersa. Elle porte en elle la fierté et l’ambition d’agir au nom de ceux qui n’ont pas droit à la parole, ceux qui n’en n’ont pas accès, exclus de fait par un système de sélection et de rebuffade. En étant choisie par Aida, pour écrire sa biographie, je n’ai que des mots de bonheur pour réaliser ce beau projet, d’abord pour la femme qu’elle est, ensuite pour toutes les causes justes qu’elle défend nuit et jour. Ce livre est un tribut de valeurs et de vertus, de douleurs et de joies à léguer aux générations d’ici et d’ailleurs, aux femmes politiques ou épouses au foyer et aux Hommes, tout court. Aida est une héroïne qui a su marquer l’Histoire de notre pays.
Au-delà de la grande amitié qui nous lie toutes les deux et mon admiration pour sa beauté rayonnante de Walo walo, je lui porte une chaleureuse sympathie pour tout ce qu’elle représente pour les femmes sénégalaises, en particulier ; et pour tous les hommes politiques en général. C’est un ouvrage qui retrace sa vie son enfance, ses convictions sociales et politiques. J’espère vivement qu’elle sera mieux connue et appréciée à travers cette biographie.
*Fama Diagne Sene, Aida Mbodji, la lionne du Baol, biographie,
L'AFRIQUE A AUSSI EU SES FÉMINISMES ET ELLE NE LE DOIT PAS À L'OCCIDENT
Dans Féminismes africains, une histoire décoloniale (éd. Présence Africaine), l’universitaire sénégalaise Rama Salla Dieng questionne des militantes sur leurs combats - ENTRETIEN
Le Monde Afrique |
Coumba Kane |
Publication 07/11/2021
Qu’est-ce qu’être féministe aujourd’hui en Afrique ? Comment les militantes s’organisent-elles face au recul des libertés et à la montée des fondamentalismes ? Dans Féminismes africains, une histoire décoloniale (éd. Présence Africaine), la Sénégalaise Rama Salla Dieng, maîtresse de conférences à l’université d’Edimbourg (Ecosse, Royaume-Uni), fait témoigner une quinzaine de féministes influentes issues des diasporas et du continent, Maghreb inclus.
Votre essai esquisse une mosaïque de féminismes à travers l’Afrique et ses diasporas. Quels combats ont-ils en commun ?
Rama Salla Dieng La lutte contre le patriarcat est évidemment au cœur de leurs luttes, mais nombre d’interviewées s’attaquent également aux pouvoirs politiques en place accusés de perpétuer une violence politique héritée du colonialisme. Ce combat s’incarne par exemple dans la figure de Stella Nyanzi, une anthropologue et féministe ougandaise, incarcérée plusieurs mois en 2017 pour avoir publié un poème fustigeant le président Museveni au pouvoir depuis trente-cinq ans.
Cependant, cette approche décoloniale ne résume pas leur engagement. Celles que j’ai interrogées ne cherchent pas seulement à s’ériger contre ceux qui détiennent le pouvoir, mais plutôt à trouver des formes de créativité pour incarner leurs combats et réaliser leurs aspirations féministes. Elles n’en sont plus à tenter de convaincre de leur humanité. D’où l’importance qu’elles accordent à l’art, à la solidarité, à l’amour révolutionnaire et au droit au plaisir.
J’ai aussi constaté l’accent mis sur la santé mentale. C’est une notion centrale pour ces militantes. Contrairement à leurs aînées, elles politisent la question du repos, à l’image de l’Egyptienne Yara Sellam.
Des fractures existent également au sein des mouvements féministes africains. Où se situent-elles ?
Tout d’abord, il faut noter la forte dimension panafricaine des organisations féministes du continent. En 2006, une centaine de militantes réunies à Accra au Ghana a élaboré une Charte des principes féministes pour les féministes d’Afrique dans le but de faire converger leur lutte contre le patriarcat. Il existe par ailleurs des alliances transnationales qui fédèrent les différentes organisations, comme le Réseau de développement et de communication des femmes africaines (FEMNET) et le Fonds africain pour le développement de la femme (AWDF) basé au Ghana.
Mais force est de constater qu’aujourd’hui tous les courants féministes ne se situent pas au même point et, parfois, des controverses éclatent entre eux. Il y a quelques années, une féministe kényane a raillé, en ligne, les militantes d’Afrique francophone au motif qu’elles ne limiteraient leurs combats qu’à la sphère domestique et aux rapports hommes-femmes. Cela avait suscité une vive polémique.
Au Sénégal par exemple, les mouvements féministes traditionnels se battent pour la révision du Code de la famille et la reconnaissance des droits égaux entre les hommes et les femmes, conformément à la Constitution. Leur lutte se focalise aussi sur l’application de la parité et le droit à disposer de leur corps, dont l’avortement médicalisé.