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28 novembre 2024
Femmes
LA SCIENCE NE DOIT PAS ÊTRE L'APANAGE DES SEULS GARÇONS
Dès le début de la propagation de la pandémie de Covid-19, Shine to Lead a apporté son soutien aux lauréates de la cohorte de ses recrues 2019/2020 en leur faisant notamment bénéficier de cours en ligne en mathématiques.
Au plus fort de la crise du coronavirus, marquée par l’état d’urgence et la suspension des cours, le décrochage scolaire a été noté chez des apprenants, en l’occurrence chez les filles des milieux défavorisés. C’est dans ce contexte que l’association SHINE TO LEAD Jiggen Jang/ Tekki a profité pour déployer un programme de renforcement de capacité en ligne de plus d’une centaine de jeunes lycéennes dans les matières scientifique de août à septembre 2020. Un programme qui a eu un franc succès, suscité un grand engouement et beaucoup intéressé les participantes. Dans cet entretien avec AfricaGlobe.net, la chargée de communication de l’association explique l’objectif de ce programme, son déploiement, les résultats obtenus les perspectives d’une telle initiative.
Clara, Fanahimanana, Shine to Lead a organisé un programme de cours de vacances et de développement du Leadership 100% digital en faveur des jeunes filles scolarisées issues de milieux défavorisés. Pouvez-vous revenir sur le contexte social de cette initiative ?
La fermeture des établissements scolaires a en effet causé un ralentissement de l’économie, affectant lourdement les ménages modestes. De nombreuses jeunes filles se sont retrouvées en décrochage scolaire à cause des difficultés pour certains établissements de pouvoir assurer la continuité pédagogique, d’un accès à la technologie très limité ou encore d’une sollicitation dans les tâches ménagères plus fréquente qu’en temps normal. Dans ce contexte difficile, les lauréates de l’association Shine to Lead ont pu bénéficier de cours en ligne dans les matières essentielles. Les retours très positifs de nos lauréates bénéficiant de cet accompagnement nous ont motivés à porter nos actions au niveau national en déployant un programme à plus grande échelle, sur toute l’étendue du Sénégal. Ce programme avait pour objectif majeur de permettre aux jeunes filles à potentiel de combler les lacunes liées aux longs mois de fermetures des établissements scolaire et de réduire au maximum le décrochage scolaire à la rentrée 2020-2021.
Quels ont été les critères de sélection puisque vous aviez reçu environ 1500 candidatures et n’aviez retenu qu’une centaine de filles seulement ?
Ce programme était destiné aux jeunes filles scolarisées en classe de Seconde et Première de série Scientifique à travers tout le Sénégal. Cette attention particulière pour la série scientifique est un choix délibéré d’encourager les filles à embrasser des carrières scientifiques pour combler le gap par rapport aux garçons.
En clair, un appel à candidature a été lancé en ligne au début du mois de juillet via des publications sponsorisées sur les médias sociaux de Shine to Lead, avec un ciblage appuyé vers les régions à faible taux de connectivité. Les jeunes filles étaient invitées à répondre à un certain nombre de questions, via un formulaire en ligne : ville, moyenne générale, matières dans lesquelles elles souhaitaient le plus combler des lacunes, leur motivation pour intégrer le programme, etc. Nous nous sommes basées sur leurs réponses pour effectuer les sélections.
Nous en avons retenu 127 au total pour nous assurer que le programme serait de qualité et qu’il se déroulerait dans les conditions optimales. Il a constitué une forme de test et nous savons désormais que nous pouvons le déployer à bien plus grande échelle, avec le soutien de davantage de partenaires.
Quels étaient les objectifs du programme ? Ont-ils été atteints ?
L’un des objectifs majeurs du programme était de permettre aux filles de combler leurs lacunes, voire d’anticiper sur les prochains programmes, en participant à des cours intensifs en ligne dans les matières essentielles : Maths, PC, SVT, Français et Anglais. Les participantes ont été réparties en 4 classes (2 classes de Seconde et de classe de Première S) et ont bénéficié chacune de 35 heures de cours.
Cet objectif est atteint car plus 85% des participantes ont déclaré avoir rattrapé leur retard, dans la fiche d’évaluation finale. Le second objectif était de contribuer à développer leur leadership. Les filles ont beaucoup apprécié les talks inspirants que nous avons organisé chaque semaine. Je peux citer pour exemple celui organisé avec la scénariste et réalisatrice Kalista Sy sur le thème de la confiance en soi ou encore celui organisé avec la journaliste Rokhaya Diallo. Elles ont aussi pu participer à un concours de poésie et à un concours de dessin.
Enfin, lors de la session de clôture du premier volet du programme, nous avons tous été particulièrement émus, à travers les différents témoignages, de ressentir le lien très fort et l’esprit de solidarité qui s’est créé entre les participantes issues de 14 régions du Sénégal et qui ne se connaissent finalement que virtuellement.
On peut donc dire que les résultats ont dépassé vos attentes. C’est bien cela ? Quid du suivi ?
Le programme a dépassé nos attentes, avec une moyenne de 4,5/5 de satisfaction du programme par les participantes. Nous allons reprendre le programme pour les mêmes bénéficiaires à partir du 12 octobre et afin de répondre favorablement à la demande des filles de pouvoir achever leurs programmes avant la rentrée 2020/2021 prévue en novembre. Par ailleurs, les participantes les plus méritantes et assidues seront intégrées à la cohorte 2020/2021 de notre programme de Bourse d’excellence Shine to Lead / Jiggen Jang Tekki.
Manifestement c’est la première initiative du genre pour l’association «Shine to lead». Quelle évaluation en faites-vous ?
Depuis 2018, nous sélectionnons chaque année des jeunes filles de banlieue dakaroise ayant des contraintes financières, d’excellents résultats scolaires et un potentiel en leadership. Nous mobilisons des fonds pour financer leurs études et des frais annexes tels que les frais de transport et de subsistance. Elles bénéficient également d’un accompagnement personnalisé à travers un programme de mentorat.
Dès le début de la propagation de la pandémie de Covid-19, nous avons apporté notre soutien aux lauréates de notre cohorte 2019/2020 en leur faisant notamment bénéficier de cours en ligne en mathématiques. Ce qui est nouveau avec le programme déroulé du 10 août au 11 septembre, c’est que nous avons pu impacter davantage de filles, issues des 14 régions du Sénégal.
Puisque l’initiative est venue en pleine crise sanitaire du Covid-19, quel sera l’avenir de cette initiative après la crise du Covid-19, dans 1, 2, 3 ans ? Va-t-elle se poursuivre ?
Nous avons pour ambition de poursuivre ce programme sous une autre forme durant l’année scolaire, en impactant un nombre encore plus important de jeunes filles brillantes et méritantes sur tout le territoire du Sénégal.
Quels sont les difficultés que vous avez rencontrées pendant la conduite de ce programme?
Ce programme n’aurait pu être possible sans le soutien de personnes de bonne volonté, nos partenaires, la mobilisation de toute l’équipe de Shine to Lead, les professeurs ayant délivré les cours ainsi que toutes les personnes inspirantes ayant participé chaque samedi à nos talks diffusés sur en direct sur notre page Facebook. Au début du programme, il a fallu que les participantes comme les professeurs se familiarisent avec la plateforme Zoom sur laquelle les cours se sont déroulés. Les professeurs ont dû également reprendre des chapitres des programmes déjà vu durant l’année scolaire, afin d’homogénéiser le niveau des classes et adapter le contenu de leurs cours.
D’autres projets à venir pour « Shine to lead » ?
Nous avons pour ambition de déployer notre programme de bourse et de mentorat dans davantage de villes du Sénégal. L’expérience tirée de ce programme nous conduira naturellement à le poursuivre sous une autre forme durant l’année scolaire, comme évoqué.
Un mot sur Shine to Lead Jiggen Jang / Tekki
Nous défendons une cause noble essentielle : celui de l’accès dans des conditions favorables à l’éducation pour les jeunes filles au Sénégal. Ces propos de Nayé Anna Bathily, la fondatrice de cette initiative résument bien ce qui nous anime au quotidien : “ Toutes les populations ne sont pas pareillement exposées au risque de déscolarisation. Les jeunes filles sont particulièrement vulnérables face aux crises, en particulier lorsqu’elles elles viennent de milieux défavorisés. (…) Cette crise est une occasion de remettre en question notre système scolaire et de le rendre plus juste, inclusif et performant.”
Propos recueillis par Rachad Moussa – (AfricaGlobe Dakar)
FUNMILAYO RANSOME-KUTI, UNE YORUBA FIÈRE ET SANS PEUR
Leader politique, elle s'est levée contre les injustices faites aux femmes de sa région avant d'œuvrer à l'indépendance du nigeria. Elle devient un personnage public tout en élevant ses quatre enfants, dont le fameux musicien et chanteur Fela
Funmilayo Ransome-Kuti était la première figure féministe du Nigeria pendant la première moitié du XXe siècle. Leader politique, elle s'est levée contre les injustices faites aux femmes de sa région avant d'œuvrer à l'indépendance de son pays. Mariée à un enseignant et révérend anglican, Funmilayo Ransome-Kuti s'affranchit des conventions de l'époque. Elle devient un personnage public tout en élevant ses quatre enfants, dont le fameux musicien et chanteur Fela.
« Savoir se faire respecter. » Ce slogan résume la vie de Funmilayo Ransome-Kuti. Née en 1900, cette Yoruba est la première fille de la colonie du Nigeria à être scolarisée. Après des études en Angleterre, Funmilayo Ransome-Kuti lance les premières organisations politiques féminines. Pour Nike Ransome-Kuti, sa grand-mère reste un modèle. « Je crois qu'elle était féministe mais pas dans le sens le plus moderne. Vous savez qu'elle était juste une femme et chez le Yoruba, les femmes sont des personnalités très fortes. Ma grand-mère était un personnage fort. Elle était disciplinée, courageuse, forte d'esprit et avec une volonté de fer. Elle était prête à mourir pour ses idées. »
SURPLOMBER LE COVID-19 AU NOM D’UN COMBAT PERMANENT
EXCLUSIF SENEPLUS #SilenceDuTemps - C’est pour tenir ferme à l’idéal que j’ai basculé dans un autre registre du langage : la longue chanson dédiée à mon continent dont le destin ne se noue pas forcément aux évolutions d’une crise sanitaire
#SilenceDuTemps - J’avais, lorsque le nouveau Coronavirus avait dévasté nos cœurs en nous arrachant des êtres chers, signé quelques papiers, dont un hommage à Papa Diouf, dirigeant sportif de renommée mondiale. L’horizon incertain dans la grisaille des jours, j’écrivais pour faire face à mes peurs. J’écrivais pour inspecter un certain universel : le temps du monde était subitement dissous dans l’instant identique de son arrêt. Partout, le nouveau Coronavirus avait effacé les frontières et fait voler en éclats les nations pour nous exposer à nos fragilités communes, nos solitudes, nos angoisses. Affaissés, nos repères traditionnels : riches et pauvres, nord et sud, développés et sous-développés. La mort qui rôde rendait vains ces parallélismes. On le sait : rien ne peut être tiré d’un tel universel plutôt mortifère. Dès lors que le même sinistre s’installe sous le sceau d’une pathologie, j’ai pensé que les discours pessimistes ou optimistes n’avaient plus de sens. En revanche, il fallait juste faire face au nom de l’idée de justice qui, elle, depuis des millénaires, est increvable. J’ai préféré alors vivre à l’abri de l’idéal inscrit dans la figure de l’éternité d’un combat, plutôt que dans la croyance d’un après qui bouleverserait tout, surtout pour le continent africain. Pour ma part, une crise sanitaire imposerait plutôt quelques réformes dont on sait qu’elles n’ont pas la vocation de changer le monde. C’est donc pour tenir ferme à l’idéal, au principe affirmatif d’un pari, que j’ai basculé dans un autre registre du langage : la longue chanson dédiée à mon continent dont le destin ne se noue pas forcément aux évolutions d’une crise sanitaire. Il s’agissait, ainsi, de réaffirmer la permanence d’un combat et d’être ferme contre la tristesse des jours de terreur. J’ai plongé alors dans les moments de l’Afrique qui se dresse au-delà de la crise sanitaire. J’ai creusé pour retrouver de grandes voix dont le compagnonnage, lorsque l’incertitude et l’angoisse sont la règle, nous rappelle à notre devoir de vigilance, de lucidité et de courage. C’est donc au cœur de la crise sanitaire que j’ai écrit et publié ce texte mis en scène dans une vidéo réalisée par mon ami Pape Faye et ses équipes.
Afrique
À David Diop Mandessi qui nous montré les chemins de la poésie
La nuit traverse Dakar
flots de vagues nuageuses
échouées au loin des corniches
dans les sombres eaux de l’occident empli de vieux soleils
Doucement éclot le soleil de Gorée
l’aube enveloppe les clameurs océanes
halo de transparence
éclat de vie humide rayonnant
Surgit des abysses bleues
des ombres parties loin
dont les ombres sont toujours là
la pointe de l’Afrique qui hume de ses nasales millénaires
les spectres lointains
les souffles du monde
Surgit des échos de quatre cents ans de viol
mon matin de Cap Vert
bordé de silence
mon matin paré de mots neufs
de mots lueurs dans les allées sombres du temps
mon matin habité
ensorcelé
subjugué
matin debout de l’Afrique rebelle
Je suis cette voix qui rugit au soleil naissant des décisions cruciales
je suis l’Afrique mandésienne
au bout du rêve ample
de nos héritages pluriels
Nos générosités ont été bien défaites
je sais mais nous tenons au songe qui surprend
sentinelles de nos mémoires imparfaites
Je suis cette voix des gésines émancipatrices,
juché sur le toit du temps
je suis l’aube des terres colonisées
des lueurs florales du genre humain
je suis le cri primordial
la promesse initiale
je suis sapiens
je suis birrimien, éthiopien
je suis égyptien, saharien
je suis sahélien, nubien
je suis antique si ancien aux fond des brouillons précambriens
Je suis l’Afrique
au dos rebondi dressé
et au geste de baiser salé debout
humant les écumes des marées éperdues
de son nez épaté
debout
depuis les débris antiques
les éruptions volcaniques
les épreuves pyramidales
debout…
Je suis la clameur aurorale
des saisons de migrations sauvages
je suis l’anté
je suis le pré
je suis l’archéo
le paléo
je suis le commencement
le surgissement
le vagissement
comme les désirs aveugles les nuits de noces
Je suis le survivant des crimes contre l’humanité
debout dans le cœur des traites négrières
dans le cœur des annexions barbares
des apartheids ignares
des néocolonialismes périmés
je suis l’étrange des mondialisations capitalistes
le paria des démocraties inertes
dans le chœur mortuaire de représentations piégées
je suis le rire vivant
sauvage
banania
le sourire incandescent
puissant
qui illumine les poussées populaires
les révoltes atrabilaires
les colères salutaires
Je suis la terre
je suis le nouveau prolétaire
à l’assaut des sanctuaires mortifères
je suis la gueule sinistrée des midis échoués
dans l’abîme de l’Atlantique ensanglanté
dispersés par les vents de sables qui aveuglent les espoirs
anéantis dans les enclaves mortelles de l’Occident barricadé
je suis la sombre dépouille des jeunesses volées mais…
Je suis la vie
je suis la conscience des obstinations sourdes
je suis le petit matin du monde
je suis la furie aveugle des fureurs océanes
je suis le nègre gisant sur les plages
après les longues traversées du désert
de la mer
des enclaves
des lois meurtrières
je suis la jeunesse éclopée du monde
la laideur des marges
je suis la cendre des libertés incendiées
la cendre brûlante qui répand l’odeur âcre de l’égalité de la justice de la liberté
je suis le nègre des îles insurgées
le nègre des récits piétinés
le nègre négro des champs de coton de sucre
sur les routes
dans les caravelles primitives
Je suis le nègre des champs d’arachide
le nègre des plongées minérales
le nègre des refus séculaires
attentif au bout du petit matin à l’éclat ébène de corps tatoués
je suis le nègre aléatoire
le guérillero improbable …
Mais c’est le jour des résurrections
le jour des surrections
des insurrections triomphantes
le jour des noces enflammées
Je suis la force de vie qui monte
qui grimpe vers les altitudes inouïes
je suis l’increvable
l’inoxydable aussi loin
aussi longtemps que je remonte
dans le temps
Je suis l’Afrique des résistances intactes
des mémoires tenaces
je suis Chaka
je suis Samory
je suis Kimpa
je suis Biko
je suis Lumumba
je suis Funmilayo
je suis Mandela
je suis Cabral
je suis Zingha
je suis Machel Samora
je suis Kum’a Mbape
je suis Tamango
je suis Alinsitoye
je suis Louverture
je suis Lamine Senghor
je suis Nder au féminin
Nder en flammes du refus des oppressions
Nder des belles reines poétesses épiques des vers imprescriptibles
« Mourir libres plutôt que vivre soumises »
Dans la fièvre des tranchées de peine et de tendresse
je suis le poète des soleils nocturnes
je suis l’écho au présent de cette puissance stellaire aux noms inédits
moloyse
mandessi
labou tansi
u tamsi
césaire
senghor
damas
depestre
roumain
Et vous poètes invisibles des nuits de clair de lune
dont la voix seule est si clairement audible
conteurs de mes épopées immémoriales
Heureux ceux n’oublient point
qui savent vivre dignement
et connaissent du cœur le dictionnaire des prescriptions
heureux ceux qui écoutent les bruits de fonds de la scène du temps
qui se dressent pour la gloire
sur les chemins escarpés de la justice
heureux ceux qui savent ce qu’est le moment décisif
et montent au front du présent pour sculpter l’avenir selon leur volonté
Heureux les libres systématiques
les égaux du monde nouveau
de l’Afrique scintillante de mots nouveaux
Je sais bien
la vie est parsemée de pistes enchevêtrées
labyrinthes
dédales
sans haltes
je ne sais quel sentier risquer
mon rage me perd mais je défie les horizons ouverts
je sais que l’Afrique est en gésine
fruit des vigueurs tendues
de nos élans éperdus
croiser les indices
au hasard des détours
sur ces chemins qui ne mènent nulle part
je te suivrai alors terre mère
ombre de ton nombre
comptant les pas des surprises jusqu’aux confins de l’espoir
des signes constellés de ta silhouette
Au plus étroit des sentiers toujours tenir aux lueurs à venir
lors même avons-nous scruté la belle étoile
attentifs au ciel si clair
le long des nuits sombres
les symphonies n’éclairaient plus les sillons sinueux de nos rugissements
alors je puiserai au grenier vif les mots rebelles
et tresser le poème de nos combats impératifs
et les mots insoumis à l’assaut des citadelles rances
qui crient les péans égalitaires
des mots clairs
des mots Césaire
des mots Sédar
des mots Tansi
des mots Mandessi
des mots Mongo
des mots Thiong’o
des mots Dépestre
des mots Damas
des mots Fanon
des mots Anta Diop
des mots Soyinka
des mots Afrique pour sûr.
El Hadj Hamidou Kassé est philosophe de formation. Romancier, poète, essayiste, il a exercé en tant que journaliste dans le secteur privé et le service public. Ancien directeur général du Soleil, Kassé a publié, entre autres, Les Mamelles de Thiendella (Grand Prix de la République pour les lettres, 1995), Les Nuits de Salam, Les emblèmes du désir. Dans son élan poétique, il est un chantre de la beauté et de l’espoir.
MATERNITÉ ET VIE PROFESSIONNELLE, LE DOULOUREUX DILEMME
Elles reprennent le boulot avec un cœur lourd, deux mois après la naissance de leur enfant. Elles, ce sont les mères salariées au Sénégal. Parfois obligées de choisir entre l'emploi et le bébé, plusieurs préfèrent abandonner travail et rêve d’indépendance
C’est avec un cœur lourd qu’elles reprennent le boulot, deux mois après la naissance de leur enfant. Elles, ce sont les mères salariées au Sénégal. Obligées parfois de choisir entre leur emploi et leur bébé, elles sont nombreuses à préférer abandonner travail et rêve d’indépendance. A défaut d’une rallonge de leurs congés, elles réclament des crèches dans les lieux de travail.
Fatoumata Baldé et Khadija Thiam ont certes des trajectoires différentes, mais elles sont liées par un destin similaire. Parce qu’elles sont femmes, elles ont perdu leur emploi dans presque les mêmes circonstances. Obligées de choisir entre le travail et leur nourrisson, elles ont eu le dilemme de leur vie. Si beaucoup de femmes parviennent à allier les deux, elles n’ont pu le faire et ont été contraintes de se mettre en veille pour ne pas dire un terme à leur carrière.
Aujourd’hui, quand elles y pensent, ces braves dames en veulent au Code du travail sénégalais qui, estiment-elles, ne prend pas en compte suffisamment les conditions de vie des nouvelles mamans.
Ressortissante de Kolda, Fatoumata travaillait comme superviseur dans un incubateur de startup. Elle vit seule dans le quartier traditionnel de Yoff, loin de sa belle-famille qui crèche dans la banlieue, précisément à Tivaouane Peulh. Toute seule avec un nourrisson de moins de 3 mois dans les bras, la jeune dame était appelée à rejoindre le boulot, huit semaines seulement après la naissance de son bébé, conformément aux dispositions du Code du travail. C’était mission quasi-impossible. Elle décide alors de jeter l’éponge et de se consacrer à son foyer et à son nourrisson, après deux ans de service.
Elle témoigne, d’un air empreint de regret : ‘’Mon expérience de maman me pousse à demander aux autorités de mieux réglementer le Code du travail, en ce qui concerne les congés de maternité. Il est impossible, pour quelqu’un qui a porté un enfant pendant neuf mois, avec tous les risques, toute la fatigue de la grossesse et les complications, de reprendre le travail deux mois après l’accouchement. Personnellement, j’ai failli y passer. J’étais fatiguée physiquement et mentalement atteinte. Je pense aujourd’hui qu’il faut un projet de loi en ce sens pour aider les femmes.’’
Aujourd’hui, des mois ont passé, le petit bout de bois de Dieu grandit, mais Fatoumata Baldé, elle, peine encore à oublier. Elle plaide pour une révision des dispositions législatives prenant en charge la condition des femmes en âge de procréer. Lesquelles, soutient-elle, souffrent en silence, après la joie de la maternité. ‘’Quand on commence à faire des enfants, on devient perplexe, parce que les congés sont insuffisants. Je suis venue de la Casamance et je n’ai pas une personne de confiance à qui confier un nourrisson de 2 mois. Et si je reprends, je ne pourrai pas être productive au bureau, parce que je n’aurai pas l’esprit tranquille’’, laisse-t-elle entendre dans un débit posé.
‘’J’étais obligée d’emmener mon fils en cachette au bureau’’
Pour sa part, Khadidja Thiam a essayé, par tous les moyens, de trouver une solution à ce casse-tête. Mais sans succès. Elle a finalement pris la décision douloureuse de tout jeter à l’eau, après la venue au monde de son deuxième enfant. Ex-caissière dans une banque de la place, elle raconte sa mésaventure, à la première expérience. ‘’J’ai pleuré le premier jour de la reprise, car mon bébé ne voulait pas dormir et n’arrêtait pas de larmoyer, mais j’avais un collègue compréhensif qui tolérait mes retards’’, indique-t-elle.
Seulement, au bout de quelque temps, ils ont été reversés dans un service de transfert d’argent. Une mutation qui a rendu les choses plus complexes, parce que, dit-elle, il fallait travailler des journées entières. ‘’A 4 mois, mon bébé souffrait d’une pathologie et devait subir une circoncision. Par conséquent, je devais m’occuper de lui. Et là, j’étais décidée à tout risquer pour prendre soin de lui. Je suis alors restée une semaine sans aller au travail. Il fallait que je me sacrifie, malgré les mises en garde de mes supérieurs. Ensuite, lorsque j’ai déménagé à la Médina, j’emmenais secrètement mon enfant au bureau, faute de bonne ou de nounou’’.
Malgré tout, Khadija a tenu bon. Elle a réussi difficilement à allier ses deux rôles. Pour sa deuxième grossesse, elle a eu moins de culot. En plus de supporter ses nombreux soucis de santé, la jeune dame n’avait plus de force pour endurer les remontrances de son supérieur. Elle rapporte : ‘’J’étais prête à le trainer en justice, en cas de renvoi. J’ai accouché à 37 semaines de grossesse par césarienne et j’ai perdu trois semaines de mon congé, car je n’étais pas à terme. Finalement, j’ai démissionné à six jours de la fin de mes congés, à cause de tous ces antécédents. J’ai alors décidé de me lancer dans le commerce en plein temps et mettre en place ma boutique.’’
Ce calvaire, elles sont nombreuses, les femmes, à l’avoir enduré. Madame Thiam se remémore l’expérience de sa mère, enseignante, qui a été obligée de sevrer ses enfants au bout de deux mois, pour reprendre service dans les régions. ‘’Une fois, elle avait décidé d’emmener une de mes sœurs dans les régions où elle était en service. Mais le bébé était tombé malade à cause de la chaleur. Elle a été évacuée par hélico. On a toujours un problème de conscience dans ces cas-là, car un enfant a besoin d’amour maternel, alors qu’on veut être indépendante financièrement et s’épanouir dans un travail, mais ce n’est pas évident’’, regrette la caissière.
‘’Ma mère a sevré ses enfants au bout de deux mois’’
Si elles sont nombreuses à s’en sortir, beaucoup d’autres ont le stress de se retrouver dans la situation de Khadija et de Fatoumata. La plupart trouvent insuffisantes les six semaines prénatales et huit semaines postnatales prévues dans le Code du travail sénégalais. A défaut d’un rallongement de quelques mois supplémentaires, elles ont initié une pétition sur les réseaux sociaux, pour exiger le respect strict de ces 14 semaines.
Au fait, d’après ces plaignantes, beaucoup de femmes en état de grossesse ne bénéficient pas de l’intégralité de leurs congés, car si elles accouchent avant le terme prévu, elles perdent des semaines.
Pour Rokhaya Ba Diagne, initiatrice de la pétition, les femmes ont tellement l’habitude de vivre ces situations que la question est devenue banale. La jeune maman de 31 ans explique les raisons de sa démarche : ‘’Certaines femmes enfantent par césarienne avec toutes les complications que cela comporte. Elle passe par la suite des nuits blanches, à la naissance du bébé. Et si tout se passe bien, elles sont appelées à retourner au bureau à un mois et 25 jours. Peut-être que certaines peuvent être performantes et compétentes tous les matins, mais personnellement, je ne peux pas. Il se pose aussi le problème de la garde du nourrisson. Ce qui fait que nos journées sont partagées entre le bureau et la maison’’, argue la responsable de distribution dans une compagnie de la place.
Son bébé de 2 mois dans les bras, Mme Diagne le câline et le serre tendrement de temps à autre. La jeune maman au teint noir précise que son premier combat, à travers cette pétition, n’est pas l’augmentation des congés de maternité, mais plutôt le respect des trois mois et demi prévus par la loi. Néanmoins, elle pense qu’il serait important de voir économiquement ce qui est possible en matière d’augmentation. ‘’Le report, par contre, est déjà pris en compte. Donc, il doit être acté. Ce qui doit faire l’objet de discussion, c’est de voir économiquement combien de semaines postnatales on peut accorder à la femme. J’ai vu dans la nouvelle convention collective qu’ils permettent de prendre des congés sans solde. On est au Sénégal, ce n’est pas tout le monde qui peut se le permettre. Je pense que ce procédé n’est pas la solution, parce que toutes les femmes vont retourner travailler, elles ont besoin de leur paie’’, soutient-elle.
Les femmes divisées sur les solutions
Pour Khadija, la meilleure solution reste le rallongement des congés de maternité à, au minimum, six mois. Mais son point de vue n’est pas partagé par beaucoup de femmes professionnelles. Plusieurs d’entre elles se disent qu’avec un rallongement, les femmes risquent d’être lésées sur le marché du travail, d’autant plus qu’elles peinent déjà à s’insérer.
Toutefois, pour Fatoumata, il ne s’agit que d’une question de volonté étatique, tout en reconnaissant que ça peut être un couteau à double tranchant. ‘’Les entreprises peuvent, durant ces mois, trouver un remplaçant à la femme ; il peut être un collaborateur en interne ou un stagiaire. A défaut d’avoir ses six mois, on peut envisager peut-être quatre’’, plaide-t-elle.
Dans tous les cas, souligne Khadidja Thiam, il s’agit là d’une véritable question à régler. Bien qu’elle ait signé la pétition, elle pense que ce n’est pas la solution. ‘’Il y a des journées comme celle du 8 mars qui devait servir à prendre en charge ces préoccupations. Malheureusement, à ces occasions, les femmes sont plus préoccupées par le folklore et les festivités, alors que les doléances ne sont jamais prises en compte. Je peux comprendre les six semaines avant, mais pour les huit semaines après, c’est minime et avec ça, on nous conseille l’allaitement exclusif jusqu’à six mois’’.
Elle s’empresse toutefois de déclarer : ‘’Il faut cependant savoir que les femmes auront moins de chance d’être recrutées. Elles sont déjà discriminées dans le milieu du travail, leurs conditions font qu’elles ne sont pas compétitives dans plusieurs postes.’’
Implantation de crèches dans les structures
A défaut de l’allongement des congés de maternité, certaines signataires de la pétition sont favorables à l’implantation des crèches dans leurs structures de travail. C’est le cas de Fatoumata Baldé. La ressortissante de la Casamance reste persuadée que l’Etat doit mener une politique pour aider les grandes entreprises où les femmes sont plus actives à avoir des crèches d’entreprise. ‘’Si j’ai un nourrisson et que je n’ai pas un congé de quatre mois, je peux être tranquille, si je dépose mon bébé à coté de mon lieu de travail et passer à la pause pour le voir. On sera beaucoup plus productives et motivées au bureau. Nous ne pouvons pas étudier durant des années, avoir des diplômes supérieurs et se retrouver dans des situations inconfortables’’.
Aujourd’hui, elle se retrouve à la maison parce qu’elle n’avait pas une autre alternative. ’’J’ai été obligée de démissionner, car je n’ai personne à qui confier mon enfant. Mon état de santé n’était pas des meilleurs. La seule solution était d’arrêter et je suis obligée de reprendre à zéro et de chercher un autre travail. Ce qui n’est pas intéressant avec toutes les charges et responsabilités’’, se désole-t-elle.
Elle trouve paradoxale que nos autorités militent pour l’emploi, alors qu’il existe des femmes exclues du système, malgré leur riche parcours. Un avis qu’elle partage avec Woury Faye. L’enseignante plaide plutôt pour le recrutement des nounous dans les grandes écoles. ‘’Ce sera des espaces pour les femmes travailleuses qui pourront de temps à autre passer voir leurs enfants et être poche d’eux. Dans ces cas, les femmes seront plus productives, car elles auront l’esprit tranquille et ce sera possible de pratiquer l’allaitement exclusif’, narre-t-elle.
Cependant, pour Rokhaya Ba Diagne, cette option présente plusieurs limites. L’initiatrice de la pétition fait remarquer à ce propos que la plupart des entreprises se trouvent en ville, alors que certaines salariées habitent dans la banlieue dakaroise. ‘’Ce serait plus simple pour l’entreprise d’augmenter les jours de congés que de mettre en place des crèches. Il faut d’abord voir comment se fera la répartition. Est-ce que l’entreprise va supporter une partie ou la totalité des charges ? Car la crèche coûte cher’’, s’interroge-t-elle. Le deuxième problème est, d’après Mme Diagne, relatif aux complications du transport en commun qui risquent d’être insupportables quotidiennement pour les nourrissons. A cela s’ajoutent, d’après son analyse, les perturbations liées aux risques d’abus durant les heures d’allaitement. ‘’Il pourrait y avoir cette avancée plus tard, mais pour le moment, je pense qu’il est préférable de laisser la femme une semaine ou deux de plus chez elle. C’est plus soutenable économiquement et également moins risqué’’.
En attendant, elle invite à une démarche collégiale, afin d’obtenir gain de cause dans ce combat.
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JUMELLES BACHELIÈRES À TREIZE ANS, ELLES RÊVENT DE GÉNIE CIVILE
Aminata et Rama Diaw, nées le 8 octobre 2007, viennent de décrocher leur diplôme à Yeumbeul, banlieue populaire de Dakar, dans leur lycée, réputé comme un établissement d'excellence
Leur père s'est battu pour leur faire sauter des classes à l'école, et deux jumelles sénégalaises ont accédé à la notoriété dans leur pays en réussissant leur bac à l'âge de 13 ans.
Une telle réussite à cet âge est inédite au Sénégal. Le record était détenu depuis 2019 par un élève de 14 ans. Auparavant, il fallait avoir au moins 17 ans pour passer les épreuves, selon l'office national du bac.
Aminata et Rama Diaw, nées le 8 octobre 2007, viennent de décrocher leur diplôme à Yeumbeul, banlieue populaire de Dakar, dans leur lycée, réputé comme un établissement d'excellence. Dans la même classe, elles ont réussi au premier tour dans une série scientifique, avec les sciences de la vie de la terre pour dominante.
"Nous étions stressées. Nous devions réussir pour notre famille, surtout notre père qui a tout fait" pour qu'elles en arrivent là, explique timidement Aminata en recevant des journalistes de l'AFP chez elle avec sa soeur, leur mère Marie Dial Diop Diaw et leur père Demba Diaw.
Celui-ci, administrateur civil à la retraite, affirme s'être "rendu compte qu'elles avaient une intelligence précoce". Il leur a fait sauter des classes et donner des cours à la maison.
Les nouvelles bachelières disent attendre le résultat du concours d'entrée dans une école polytechnique réputée à Thiès (ouest) pour pouvoir suivre une formation en génie civil, comme leur père.
L'Etat sénégalais leur a offert une bourse pour des études en classe préparatoire à l'étranger mais leur père dit avoir décliné, en invoquant leur jeune âge et le précédent de Diary Sow.
La disparition de Diary Sow, distinguée meilleure élève du Sénégal en 2018 et 2019 et inscrite en classe préparatoire au prestigieux lycée parisien Louis-Le-Grand, avait mis le Sénégal en émoi début 2021. Elle était réapparue au bout de plusieurs jours, avait évoqué des raisons personnelles, et est depuis revenue au Sénégal.
Le président Macky Sall a salué la performance des jumelles bachelières mardi à Dakar lors d'une cérémonie, destinée à récompenser les meilleurs élèves du Sénégal, dont elles étaient ses "invitées spéciales".
"L'Etat vous apportera tout le soutien nécessaire à la poursuite de vos études", a-t-il promis.
La rançon de la précocité ? "Nous ne pouvons plus être tranquilles. Tout le monde nous suit. C'est bizarre", confie Aminata.
par Amy Sakho
EN AFRIQUE, LES LOIS DU PATRIARCAT EMPÊCHENT LES FEMMES DE VIVRE
Au Sénégal, le Code de la famille consacre la hiérarchie des sexes, l’infériorisation et l’asservissement des femmes. Les juges sénégalais choisissent d’ignorer les traités internationaux afin de ne pas créer de précédents qui pourraient léser les hommes
Le Temps Afrique |
Amy Sakho |
Publication 14/08/2021
Le droit de nuire en premier aux femmes et aux enfants. C’est la description résumée la plus conforme aux diverses expériences vécues par les femmes qui réclament le secours de la loi. C’est ce droit dissimulé dans le droit que nous, juristes et militantes, affrontons quand nous accompagnons les requérantes. Pour les femmes et les enfants, le patriarcat est, de façon concrète, un ensemble de lois faites pour les empêcher de vivre et les priver du secours de la loi.
Si le patriarcat n’a pas commencé avec le droit, c’est pourtant le droit qui le consolide. Depuis 1972, nous vivons au Sénégal sous un Code de la famille plein de dispositions discriminatoires à l’encontre des femmes, voire, pour certaines, ségrégatives. Cela alors que ceux qui font les lois et ceux qui les appliquent savent non seulement que l’égalité est un fondement et un principe du droit, mais encore que la famille établit l’égalité femme-homme de façon solide et durable.
Donc le droit consacre ce que la famille cultive, à savoir la hiérarchie des sexes, l’infériorisation, la subordination et l’asservissement des femmes.
L’article 111 du Code de la famille fixe l’âge minimum du mariage à 18 ans pour le garçon alors que la fille peut être mariée à 16 ans et même avant, si tel le décide le président du Tribunal de grande instance à qui la loi donne pleins pouvoirs à travers ce que le Code appelle «la dispense d’âge». La loi refuse de promettre à l’adolescente la même chance qu’au garçon, à la fois dans la vie et dans le ménage une fois mariée. D’ailleurs, la notion de «puissance maritale» qui figure dans l’article 152 du Code lève les doutes sur ce qui attend cette jeune fille. En effet, seul le mari a la qualité de chef de famille. Qu’est-ce donc qu’un pouvoir impossible à exercer?
Avoir voix au chapitre
En 2013, avec l’AJS (Association des juristes sénégalaises), nous avons accompagné une femme sur un différend de lieu de résidence. Le monsieur avait décidé d’aller vivre dans une autre ville du pays. La dame ne voulait pas déménager sur un coup de tête et risquer de bouleverser l’équilibre du foyer. Les enfants allaient à l’école à Dakar, ils y avaient leurs attaches, elle aussi, elle y avait un commerce. Elle n’arrivait pas à faire entendre raison à son époux et la discussion s’envenimait.
Comme, systématiquement, il lui opposait que son devoir d’épouse était de le suivre où qu’il veuille aller, elle est venue nous consulter. Cette femme en détresse venait chercher le secours de la loi pour avoir voix au chapitre, mais nous devions lui dire ce que nous révélons à toutes celles qui nous sollicitent pour des cas similaires, à savoir que la loi leur refuse justement son secours.
POINT DE MIRE SENEPLUS - Dépasser la simple cartographie des obstacles au développement. Mettre en avant les actions fédératrices. Décoloniser la pensée, l’action publique et individuelle. Approfondir ainsi le processus qui mène à la décolonialité
SenePlus publie ci-dessous la préface de l’ouvrage collectif "Enjeux 2019-2024, Sénégal, réflexions sur les défis d’une émergence" publié aux éditions L’Harmattan sous la direction de René Lake. L’une des dédicaces de ce recueil d’essais indique clairement l’orientation général de ce texte : "À tous les Sénégalais et amis du Sénégal qui ambitionnent des choix nouveaux afin de tourner le dos à la gestion de la misère pour une exploration commune de toutes les voies endogènes de développement harmonieux basé sur le bon sens collectif".
Où pose-t-on le pied pour aller vers le développement ? À la fourche du sentier tracé dans la savane aride, dans quelle direction s’engager pour déboucher sur l’émergence ? Au-delà des mots, des slogans et des vœux pieux, comment enfourcher le cheval de bataille pour la construction d’un futur collectif qui nous sorte de l’attentisme dans lequel nous engluent les prétextes de l’histoire d’hier et ceux de la misère d’aujourd’hui ? Les campagnes électorales offrent l’opportunité de voir fleurir toutes les réflexions et tous les engagements pour un vivre ensemble. Pour un construire ensemble.
Le 24 février 2019, le Sénégal organisait sa onzième élection présidentielle depuis son accession à l’indépendance. Un exercice routinier pour un pays présenté comme l’une des locomotives en matière de gouvernance avec une dixième place et une moyenne globale de 61,6/100 dans le dernier indice de la gouvernance Mo Ibrahim, publié en novembre 2018. Le Sénégal a une longue tradition d’organisation d’élections diverses, organisées à intervalles réguliers et disputées entre différents partis politiques, coalitions ou citoyens indépendants.
Et pourtant, paradoxalement, les rendez-vous électoraux sont toujours un moment de cristallisation. Ils révèlent des vulnérabilités institutionnelles et sociales qui, pour certains, portent potentiellement le risque de saper les fondements de l’État-nation.
L’élection de 2019 n’a pas dérogé à la règle, avec une période préélectorale marquée par des défis anciens et nouveaux qui ont nourri de fortes tensions socio-politiques. Encore une fois, la présidentielle a été marquée par de profonds désaccords sur les règles du jeu électoral portant, d’une part, sur les modalités de participation des citoyens électeurs et des potentiels candidats (inscription et distribution des cartes d’électeur, loi sur le parrainage, poursuites judiciaires), et d’autre part, sur les conditions d’organisation de l’élection (fichier électoral, rôle du ministère de l’Intérieur, de la Commission électorale nationale autonome [CENA], du Conseil national de régulation de l’audiovisuel [CNRA] et du Conseil constitutionnel). En cette absence de climat de confiance autour du processus, voilà que les enjeux autour de l’élection risquaient d’être confinés à la procédure, renforçant la thèse que le pays n’est encore qu’une démocratie procédurale.
La Grande Nuit
L’année 2020, c’est celle du soixantième anniversaire de l’indépendance du Sénégal. À l’unisson, plusieurs pays africains fêtent la fin, depuis plusieurs décennies, de l’odieuse période coloniale. Ce pan de l’histoire, coloré d’une multitude de crimes et d’attaques à la plus élémentaire humanité des soumis, semble se prolonger et rendre bien difficile la sortie du continent noir de la Grande Nuit.
Au milieu du grand sommeil, c’est le cauchemar sans fin de la haine de soi qui hante nos esprits. Il ne s’agit plus de se dresser contre le colon et le colonialisme, mais de se redresser pour s’extraire des effets et méfaits du passé qui prolongent au présent l’épaisseur de la nuit.
C’est ce sommeil qui explique qu’une figure importante de l’élite puisse publier ses mémoires post-indépendance et faire référence exclusivement au jugement laudateur porté sur son action par des Français. La caricature va jusqu’à ne citer, sur plus de 350 pages, que des auteurs de ce qu’était la métropole avant les années 60.
C’est ce sommeil qui justifie la violence, psychologique, émotionnelle et intellectuelle sans nom qui se poursuit depuis 60 ans dans l’initiation des enfants au savoir et à la connaissance. Dès leurs premiers contacts avec l’école, leur univers mental est façonné avec brutalité dans une langue étrangère à l’écrasante majorité de la société qui est la leur. Dans la plupart des cas, le choc est tellement insupportable que les adultes qu’ils deviendront n’y feront jamais référence. Quelle manière habile de ne jamais questionner l’absurdité d’un système qui refuse les évidences de bon sens !
C’est ce sommeil qui prolonge l’extraversion monétaire. À grande échelle, comme nulle part ailleurs, le lien ombilical avec la métropole ancienne est maintenu par un instrument d’échange dont le seul avantage est d’inciter à l’importation et de favoriser le rapatriement à l’extérieur des revenus générés dans l’ancienne colonie. Les élites d’ici et de toute l’Afrique francophone ont pourtant l’illusion d’être bénéficiaires de cet instrument qui hypothèque en fait toutes les chances d’un développement économique. L’inexistence d’un tel modèle sur le reste de la planète ne semble pas inciter au réveil.
C’est ce sommeil qui perpétue le renoncement à assurer sa sécurité pour la confier à l’ancienne puissance coloniale tout en sachant que les interventions militaires unilatérales sont toujours rejetées par les peuples. L’argument est celui du réalisme pour des micro-États d’une Afrique balkanisée qui n’ont pas les moyens de se défendre face à des attaques extérieures. Cette approche est à contre-courant de l’histoire qui suggère l’alternative d’une coalition internationale dans laquelle l’ancien colonisateur n’a pas toute la marge de manœuvre. Cette « multi-dépendance » est une alternative bien plus réaliste et constructive que celle générée par la prolongation des interventions unilatérales françaises en Afrique.
Cet ouvrage collectif ne revient pas sur la topographie des complexes du colonisé qui empêchent le développement. Des tonnes de pages ont déjà été écrites sur ce drame des opprimés. Cette compilation de textes écrits avec des sensibilités différentes ambitionne plutôt de dépasser la simple cartographie des obstacles et des freins au développement et de mettre en avant les exigences de bon sens qui pourraient être fédératrices d’une action commune. Elle prétend participer de manière hardie à décoloniser la pensée et l’action publique et individuelle. Les exigences de bon sens apparaîtront clairement au fur à mesure de l’approfondissement du processus qui mène à la décolonialité.
Dans les centaines de pages qui suivent, il ne s’agit pas de déférer aux passions des auteurs au lieu d’employer leur raison. L’ambition est d’entretenir une réflexion commune, mais plurielle sur notre présent et notre futur communs. L’espoir est de générer de la lumière plutôt que de diffuser de la chaleur qui attise les contradictions. Cependant, il n’est pas question pour autant d’effleurer les sujets et de les survoler sans en affronter les écueils.
Un groupe de citoyens concernés
Les résistances à la réflexion autonome, au développement d’une pensée et d’une action endogène sont multiples et multiformes. Le courage des auteurs est mis à l’épreuve. Le test est vite passé parce qu’il s’agit d’un groupe de citoyens concernés qui vivent dans leur quotidien leur désir de progrès pour tous. Tous s’accordent à dire que l’état dans lequel se trouve le pays est le résultat de choix. Les choix auraient pu être différents. Mais aujourd’hui, la posture de victime n’est pas une option. Des dynamiques internes doivent initier des mouvements endogènes susceptibles de réparer les blessures infligées par d’autres, mais également, aujourd’hui, principalement par nous-mêmes.
L’expression du moindre changement qui profiterait au plus grand nombre est souvent castrée sous un label disqualifiant. Tantôt c’est une référence au populisme, au gauchisme, à une certaine radicalité idéaliste ou encore à une forme d’extrémisme destructeur. Peu importe si le changement préconisé relève du simple bon sens et de l’évident intérêt du plus grand nombre, pour ne pas dire de l’ensemble de la communauté.
Autre stratégie des conservatismes : s’opposer au changement, à l’évolution, au nom de la tradition, de l’héritage ancestral. L’idée est toujours la même : hier, c’était mieux. Préserver le passé, avancer en reculant vers des pensées et pratiques rétrogrades, c’est toujours mieux parce que cela maintient le système en l’état et continue de bénéficier à ma caste, à ma secte, à mon groupe, à ma classe. Et puis les références d’hier sont connues. Les changer, les modifier, y compris, pour les améliorer significativement, fait prendre le risque de l’inconnu qui pourrait remettre en question non seulement l’ordre établi, mais aussi la hiérarchie des pouvoirs anciens.
Toutes ces formes de lutte contre le progrès sont vivaces et pleines d’énergie dans notre société.
L’élection présidentielle a été un prétexte pour le site d’informations et d’opinions SenePlus.com et ses analystes de lancer, relancer la conversation nationale pour qu’ensemble nous puissions dire que nous n’acceptons plus la misère. Nous ne voulons plus d’une adaptation à la misère. Nous voulons exprimer et mettre en œuvre une ambition pour le pays, pour nos populations. L’ambition va au-delà de la gestion de la misère. Dans cette expression, les auteurs mettent en avant leur capacité à accepter l’imperfection du consensus contre l’idéalisme d’une utopie.
Avec son projet #Enjeux2019, SenePlus a voulu offrir aux Sénégalais, aux amis du Sénégal et aux candidats à la présidentielle de 2019 une opportunité d’être informés et peut-être édifiés, sans parti pris, sur les questions de fond qui touchent à la vie du citoyen et de la nation. Pendant plusieurs mois, SenePlus, qui se veut un espace d’exploration et d’expression libre et plurielle des décideurs et des leaders d’opinion, s’est ouvert à des universitaires, des éditorialistes, des activistes, des experts, des citoyens concernés, de diverses générations et avec des regards croisés, qui ont scruté les grandes problématiques et les secteurs-clés du sociétal, du culturel, de l’économique et du politique.
Ces analyses se sont intéressées aussi bien aux questions strictement nationales qu’à celles concernant notre environnement géopolitique et stratégique immédiat, mais aussi global. Ainsi, la sécurité, la diplomatie, l’éducation, la justice, la monnaie et les médias ont été passés à la loupe. Un accent tout particulier a été mis sur des sujets sensibles dans la société sénégalaise tels que le traitement des enfants, les violences faites aux femmes, les enjeux de l’enseignement en langues nationales et les défis environnementaux grandissants.
Avec #Enjeux2019, SenePlus a redonné vie, corps et voix à l’intellectuel public sénégalais. Les analystes que l’on entendait de moins en moins ont planché sur les questions majeures et partagé avec tous savoir, interrogations et propositions pour un Sénégal en progrès. Cet espace dans lequel s’est déroulé cet exercice a été celui d’une acceptation de la dissidence. Les propos contraires, les critiques ne sont pas des ennemis. Les voix dissidentes participent à la construction de réponses pertinentes et constructives.
De la démocratie procédurale, vers une démocratie substantielle
Enfin et en somme, #Enjeux2019 s’est voulu une pierre précieuse dans l’édifice dont l’ambition est de faire évoluer la démocratie, encore largement procédurale, vers une démocratie substantielle, où le fond prime sur la forme. Participer à l’œuvre de bâtir une citoyenneté forte. Appuyer sur les leviers d’une démocratie délibérative et participative.
À une époque où le citoyen a peu de lisibilité sur l’offre politique, sur les partis politiques et leurs orientations idéologiques, où l’accent est plutôt mis sur des individualités présentées comme des messies, quoi de plus salutaire que de poser le débat en termes de faire société ensemble ?
Où voulons-nous aller et comment y parvenir ? Qui décide de l’agenda et qui s’assure du contrôle de conformité entre le cahier des charges et la mise en œuvre ? Comment s’assurer que les actes sont conformes aux promesses ?
L’ambition de cet ouvrage est aussi de servir de référence aux amis du Sénégal, en particulier aux agences bilatérales et multilatérales dans le secteur du développement international. Ils trouveront ici ce que des Sénégalais et des amis du Sénégal, des acteurs et militants du développement pensent être les véritables priorités pour le pays. S’ils ont l’ambition de donner un coup de main à portée réelle, ils sauront quoi faire et comment le faire.
Cette compilation de textes est une ambitieuse initiative et vous livre sur plus de 500 pages les réflexions des nombreux contributeurs sur le Sénégal de 2019 et sur ce que devrait être le Sénégal de 2024. L’ouvrage comporte trois parties.
Une première partie examine les défis chroniques auxquels fait face la société sénégalaise. Ces défis sont à la fois la cause et la résultante de vulnérabilités multiples et imbriquées de plusieurs manières. Ces vulnérabilités sont d’abord symboliques et concernent notre être, notre rapport à nous-mêmes et à l’autre : les contributions sur les langues nationales, la culture et leur place dans les politiques publiques en attestent largement. Elles sont aussi économiques, politiques et sociales. Et c’est parmi ce que la nation renferme de plus cher que la somme de ces trois types de vulnérabilité se manifeste, à savoir, les enfants, avec la lancinante question des talibés ; les femmes, prises entre le marteau du patriarcat et l’enclume de la faillite de l’État à les protéger et garantir leurs droits socio-économiques, civils et politiques ; et enfin les familles, qui payent le lourd tribut de la crise multiforme que vivent nos sociétés.
La deuxième partie traite de la culture et de la société. Elle renferme des contributions de très haute facture sur les politiques culturelles, les jeunes, la santé et la protection sociale, les médias, l’éducation, et plus largement, la justice sociale.
Enfin, la troisième partie regroupe l’ensemble des contributions traitant de l’économique et du politique avec des analyses pointues sur l’état des institutions et les besoins en matière de réformes, les performances et politiques économiques en rapport avec la demande sociale. La question du franc CFA est abordée, avec à la clé le débat sur la souveraineté monétaire ou encore la souveraineté tout court après 60 ans d’indépendance. Le Sénégal étant situé dans une région fortement affectée par des défis sécuritaires, les interpellations sont multiples. Quel est le véritable niveau de préparation face au danger terroriste qui menace le pays ? Quelle stratégie d’alliance régionale et internationale pour faire face aux dangers croissants ? Quelles réponses aux menaces intérieures qui semblent de plus en plus agitées ?
Au vu de tous ces challenges, politiques et économiques, comment faire de nos cultures et de nos fondements sociétaux de véritables ressorts d’élévation de la jeunesse ? Comment transformer le dividende démographique, les nouvelles technologies de l’information et les ressources naturelles nouvellement découvertes, en leviers pour élaborer ensemble un nouveau contrat social sénégalais ?
Les pages de cet ouvrage collectif sont moins une injonction qu’un possible. À la suite du projet #Enjeux2019 pointe celui de #Consensus2019-2024. Il doit s’appuyer sur les acquis de notre vivre ensemble, de notre génie politique, de nos atouts économiques et de l’impérieuse nécessité de bâtir une société plus juste et plus équitable, surtout à l’endroit des plus jeunes, des femmes, des personnes vivant avec un handicap.
N’ayons pas peur du vertige qui parfois accompagne les pas en avant. Soumettons-nous au vertigo, à ce que les anglophones appellent « Falling Forward », tomber en avant pour progresser. Cela revient à s’appuyer sur les leçons du passé pour en sortir et construire aujourd’hui et demain.
Demain est un autre jour qui n’a pas encore été entamé. Il est inédit. Les pages de son histoire sont encore vierges. À nous de les écrire avec nos mots, notre regard, notre vision, nos espoirs, nos doutes, nos nuances, nos ambitions, notre détermination et tout notre engagement.
ÉLECTION AU SUFFRAGE UNIVERSEL DIRECT, UNE OPPORTUNITÉ POUR LES FEMMES ?
La loi sur la parité a permis d’avoir plus de femmes dans les instances électives et semi-électives. Le nouveau Code électoral qui permet désormais l’élection des maires au suffrage universel direct peut-il accentuer davantage le leadership féminin ?
La loi sur la parité, adoptée en mai 2010, a permis d’avoir plus de femmes dans les instances électives et semi-électives. Le nouveau Code électoral qui permet désormais l’élection des maires au suffrage universel direct peut-il accentuer davantage le leadership féminin ? De belles perspectives se dessinent, selon les femmes leaders interrogées, même si le combat est loin d’être gagné.
Le nouveau Code électoral, adopté le 12 juillet 2021, peut-il aider à avoir plus de femmes comme Maires ? Beaucoup de femmes leaders le pensent. Elles estiment que cette nouvelle disposition sonnera le glas des manœuvres politiciennes qui accompagnaient souvent le choix d’une personnalité après la proclamation des résultats, avec notamment le pouvoir donné aux Conseillers de choisir le Maire. Aïda Sopi Niang, Coordonnatrice du Mouvement du 23 juin (M23), par ailleurs Conseillère municipale à la Ville de Dakar, estime que de meilleures perspectives se dessinent pour la gent féminine. Toutefois, elle est d’avis que les femmes doivent se donner les moyens de bien se positionner sur le terrain politique.
Mme Niang pense également que la caution peut ne pas être, pour ces joutes électorales, à l’avantage des femmes souvent confrontées à un manque de moyens financiers. « Le nouveau mode de désignation des Maires peut aider les femmes à progresser, mais la caution peut constituer un blocage pour la plupart d’entre elles si elle atteint un certain montant. Si c’est le cas, l’objectif est de promouvoir les femmes bourgeoises, c’est-à-dire celles qui ont des capacités financières, alors que la majorité participe activement à la vie communautaire », affirme-t-elle.
Estimant que la majorité des femmes auront du mal à verser la caution exigée, Aïda Sopi Niang met l’accent sur la nécessité de trouver une alternative.
Aminata Faye Dièye, Conseillère municipale à la Mairie de Mermoz-Sacré-Cœur, salue l’adoption du nouveau Code électoral qui est, selon elle, « une avancée majeure » pour la démocratie sénégalaise. Mais, elle souligne n’avoir pas attendu cette disposition juridique pour se lancer dans la compétition électorale. « J’avais décidé de poser ma candidature et d’être tête de liste majoritaire. L’avantage du nouveau mode d’élection des Maires est qu’il permet aux populations de connaître et de choisir leur Maire. Auparavant, les Conseillers municipaux les élisaient à leur place », souligne Mme Faye.
Toujours est-il que pour notre interlocutrice, les femmes ne doivent pas dormir sur leurs lauriers. « La loi est impersonnelle. Tout dépend de la bataille qu’elles vont mener pour figurer en bonne position. Il faut qu’elles cherchent à se faire une place dans les mouvements citoyens et les partis politiques. Cela ne sera pas facile, car les hommes ne laisseront jamais les femmes jouer les premiers rôles », ajoute-t-elle.
L’ancienne ministre et ancienne présidente du Conseil des femmes sénégalaises (Cosef), Hawa Dia Thiam, qui s’est toujours battue pour une meilleure représentativité des femmes partage cet avis. Elle les encourage à faire bouger les lignes malgré des acquis importants enregistrés ces dernières années grâce à la loi sur la parité. Mme Thiam les invite à redoubler d’efforts pour conquérir les villes, même si elle reconnaît que leur parcours ne sera pas lisse avec les coalitions électorales en 2022. Selon elle, cette donne peut déjouer les pronostics. « Avant l’adoption du suffrage universel direct, il arrivait que l’élection d’un Maire soit négociée ; un toilettage a été opéré avec le nouveau Code électoral. Mais, les femmes doivent poursuivre leur combat pour bien se positionner en dépit de l’émergence des coalitions électorales. Nous comptons également sur la volonté politique et la collaboration des hommes pour une meilleure représentativité des femmes en respectant la loi sur la parité », souligne Hawa Dia Thiam. C’est toute l’importance, dit-elle, des formations initiées dans l’optique de renforcer les capacités des femmes et de promouvoir une représentation qualitative dans les instances de décision. La formation est le meilleur levier sur lequel les femmes doivent s’appuyer pour opérer de grands changements en dépit de la nouvelle loi électorale.
Cependant, les femmes souhaitent que celles qui aspirent à diriger les collectivités territoriales soient compétentes et engagées. « C’est important d’impulser des changements, notamment à la base. La loi sur la parité constitue un acquis important. La liste paritaire est une condition de recevabilité des listes électorales, mais nous n’avons pas encore la moitié des femmes au niveau des instances électives. La nouvelle disposition peut donc aider », ajoute l’ancienne Ministre, par ailleurs Présidente de la plateforme « Les Femmes Debout ».
Mme Thiam pense que les femmes qui sont à des postes de responsabilité peuvent aider leurs sœurs à gravir les obstacles. « Beaucoup d’efforts ont été faits dans ce sens », reconnait-elle, invitant alors les femmes à se lancer à la conquête des villes et à faire du lobbying pour atteindre leurs objectifs.
ADJI DIARRA MERGANE KANOUTÉ NOUVELLE VICE-PRÉSIDENTE
La députée sénégalaise Adji Diarra Mergane Kanouté, vice-présidente du Groupe parlementaire "Benno Bokk Yakaar’’ (mouvance présidentielle) a été désignée vice-présidente du Comité exécutif de l’Union interparlementaire (UIP),
Dakar, 06 août (APS) - La députée sénégalaise Adji Diarra Mergane Kanouté, vice-présidente du Groupe parlementaire "Benno Bokk Yakaar’’ (mouvance présidentielle) a été désignée vice-présidente du Comité exécutif de l’Union interparlementaire (UIP), l’organisation mondiale des parlements nationaux, a appris l’APS, vendredi.
’’Adji Diarra Mergane Kanouté, députée à l’Assemblée nationale du Sénégal, Vice-présidente du Groupe parlementaire de la majorité a été désignée Vice-présidente du Comité exécutif de l’union interparlementaire (IUP)’’, indique la coalition BBY dans un communiqué reçu à l’APS.
Conformément à l’article 5.2 du règlement du comité exécutif, rappelle le texte, la vice-présidente est désignée pour suppléer le président de l’IUP en cas d’absence, de décès, de démission, de perte de mandat parlementaire ou de suspension des droits ou de l’affiliation du membre de l’IUP auquel il appartient.
Il souligne que la vice-présidente ’’pourra exercer cette fonction jusqu’à ce que le Conseil directeur élise une nouvelle présidente ou un nouveau président si le président se trouve dans l’incapacité d’assurer sa fonction’’.
LES JEUNES FEMMES LEADERS ELEVENT LA VOIX
Un plaidoyer fort a été fait pour la restauration de la dignité de la femme et l’accentuation de la lutte contre le terrorisme
Lors de la quatrième Assemblée Générale du Réseau Ouest-africain des Jeunes Femmes Leaders (ROAJELF) consacrée au thème « Genre, Migration, Droits Humains, Paix et Sécurité et Développement en Afrique de l’Ouest», un plaidoyer fort a été fait pour la restauration de la dignité de la femme et l’accentuation de la lutte contre le terrorisme.
La station balnéaire de Saly a abrité la quatrième assemblée générale du Réseau Ouest-africain des Jeunes Femmes Leaders (ROAJELF). Occasion saisie Dr Siga Fatima Jagne, Commissaire aux affaires sociales et genre, de la Commission de la Cedeao, pour rappeler que le ROAJELF, né en Février 2009, a fait des prouesses.
En effet, selon elle, « grâce à son leadership, sa présence dans les 15 Etats membres de la CEDEAO et son engagement à promouvoir les politiques et programmes d’intégration régionale, le ROAJELF est devenu un dispositif opérationnel de la CEDEAO pour accélérer les efforts de développement durable de la Région ».
Cependant, elle explique que, malgré les résultats forts louables enregistrés par le ROAJELF, des défis énormes persistent dans la Région. Il s’agit de la lutte contre la radicalisation, le terrorisme, la cybercriminalité, la libre circulation des personnes et des biens ; le faible accès aux financements et au numérique. Il s’y ajoute, l’exercice de la citoyenneté des jeunes, les viols, le trafic de personnes, le mariage d’enfants (40% des filles sont mariées avant l’âge de 18 ans en Afrique, avec de fortes variations entre les États membres de la CEDEAO) et les mutilations génitales féminines.
Dans le même registre, elle précise que les mariages d’enfants et les mutilations génitales féminines ont des conséquences néfastes connues pour l’avenir des jeunes filles, comme en témoignent les grossesses chez les adolescentes, les maternités à haut risque, les fistules obstétricales, la mortalité maternelle et infantile, la privation du droit à l’éducation, le décrochage scolaire – augmentant ainsi la probabilité d’une pauvreté accrue chez les femmes et les filles. C’est pourquoi, cette tribune lui a servi de cadre pour inviter « à lever le voile sur des questions aussi bien organisationnelles que programmatiques pour gagner le pari de la relève et accompagner la VISION 2050 de la CEDEAO ». Ledit réseau n’est pas sûr à être très préoccupé par les problématiques précitées.
En effet, d’après Marie Josée Kandanga, représentante d’Onu-femme à cette rencontre, « ONU Femmes », entité des Nations Unies consacrée à l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes rassure de son engagement ferme sans faille à appuyer les actions du ROAJELF. A preuve, « l’appui technique et financier que, ONU Femmes, a apporté au ROAJELF pour que ce présent atelier ait lieu». Le renforcement du leadership de jeunes filles et femmes étant au centre de la Célébration du 25ème anniversaire de Beijing et du Forum de Paris, elle, soutient que, Onu-femme, compte sur les jeunes, comme Socle de la Génération Egalité pour permettre d’accélérer le pas vers une autonomisation effective des femmes au cours de cette décennie. Marielle M Degboe, présidente régionale sortante du ROAJELF, pour sa part, a invité à la promotion de la femme à la tête des Etats, tout en sachant que le défi est grand mais possible.
Par ailleurs, la présidente sortante dudit réseau, en signe de sentiment du devoir accompli dit : « Rien n’est plus élévateur que de savoir au fond qu’on a donné le meilleur de soi et surtout, tout ce qu’on pouvait donner ».