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24 novembre 2024
Opinions
par Abdoulaye Sakho
MÉLANGE DE GENRES ET CONFUSION DES RÔLES
Le ministère des sports ne dispose pas du pouvoir pour annuler une Assemblée générale d’une association privée même si l’association, ici, la Fédération est délégataire de pouvoir ! Le ministère n’est pas le juge
Le ministère des sports ne dispose pas du pouvoir pour annuler une Assemblée Générale d’une association privée même si l’association, ici, la Fédération est délégataire de pouvoir ! Le ministère n’est pas le juge (pouvoir judiciaire) qui seul dispose en République, du pouvoir d’annulation du fait de la séparation des pouvoirs!
Le ministère qui relève de l’Exécutif est autorité de tutelle et ne peut que faire prendre des mesures conservatoires s’il estime qu’il y a risque de mauvaise exécution du contrat de délégation. À défaut, il peut demander à son délégataire de prendre lui-même des mesures du genre : prier la Fédération, délégataire de pouvoirs, de surseoir à une décision qu’elle a souverainement prise (comme surseoir à cette Assemblée Générale dûment convoquée) même si les conditions de la convocations sont remises en cause par certains membres qui doivent utiliser les voies internes de règlement des litiges propres à l’association avant de saisir le juge (mais pas le ministère qui n’est pas le supérieur hiérarchique de la Fédération car, la Fédération encore une fois, est une structure privée qui n’appartient pas à l’État ! Ceci dit, si la Fédération refuse de faire ce le ministère demande, la seule chose que peut faire le ministère, c’est de retirer la délégation de pouvoir ! Ici, dans notre pays, il y a trop de confusion de rôles et de mélanges des genres au sein du mouvement sportif ! Maintenant, il faut rappeler que les associations s relèvent du ministère de l’intérieur !
En conséquence s’il y a risque de trouble à l’ordre public du fait d’une décision de la Fédération, ce n’est pas le ministère des sports qui doit intervenir mais le ministère de l’intérieur qui lui, dispose du pouvoir de dissoudre la Fédération en tant qu’association reconnue au Sénégal ! C’est bon de ne pas se faire gagner par des émotions ! C’est la même chose concernant la Cour des comptes qui est en droit de contrôler, conformément à la loi (90-07 aujourd’hui abrogée et remplacée par la loi 2022-08) toutes les personnes morales de droit privé recevant le concours financier de la puissance publique ! C’est le cas de la Fédération ! Mais concernant les fonds privés de la Fédération (cotisations et autres sommes émanant de la structure faîtière comme la FIFA), la Fédération doit juste rendre compte à ses membres conformément à ses propres normes de fonctionnement ! Il faut qu’on comprenne que l’État ne peut pas dicter à une association son mode de fonctionnement ou de gouvernance dès lors que ce n’est pas une violation de l’ordre public ou des valeurs de la société globale. Noel le Graet (ancien président de la Fédération française de football, Ndlr) a été sanctionné pour des questions de violation relative aux droits des femmes et des valeurs de la société française».
SONT-ILS VRAIMENT ÉPUISÉS, CES « FONDS POLITIQUES » ?
On va nous crever encore le tympan avec la déclaration, intentionnelle ou malheureuse, du président de la République sur les « fonds politiques », dont il aurait trouvé les caisses vides.
On va nous crever encore le tympan avec la déclaration, intentionnelle ou malheureuse, du président de la République sur les « fonds politiques », dont il aurait trouvé les caisses vides.
Par définition sinon par essence, et du point de vue de leur finalité, ces derniers sont des fonds « secrets », dont l’usage est assujetti à une procédure rigoureuse et strictement encadrée par la loi, qui la couvre en l’occurrence du « secret d’État ».
Alors, vouloir débattre sur la question, c’est forcément faire preuve de légèreté. A moins que l’objectif ne soit de divertir « son » public.
Sont-ils vraiment épuisés, ces « fonds politiques » ?
Si oui, et alors ? En tant que Républicain, fût-ce au bénéfice du doute raisonnable, pourquoi son successeur s’exonérerait-il en l’espèce de penser que le président Macky Sall avait dû user en bon père de famille des « fonds politiques » alors dûment mis à sa disposition ?
Et puis, depuis que l’on nous parle du « protocole du Cap Manuel ; si celui-ci existe réellement, il a forcément un prix politique et nécessairement un coût matériel et financier.
En l’occurrence, c’est-à-dire si le « protocole du Cap Manuel » est une réalité, les « fonds politiques » y ont absolument et nécessairement joué un rôle, crucial, vital même, au grand intérêt en tout cas des tout premiers bénéficiaires dudit protocole.
En tout état de cause, le président Bassirou Diomaye Faye gagnerait à se ressaisir et notamment à comprendre que le jour où il déciderait de rompre avec la tradition républicaine des « fonds politiques », ce jour-là il se serait fait hara-kiri, au triomphe du populisme.
Par René LAKE
DÉCOLONISER LA JUSTICE
Dans un État démocratique et de droit, la séparation des pouvoirs entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire est fondamentale pour assurer le bon fonctionnement et l’indépendance de chaque institution
Dans un État démocratique et de droit, la séparation des pouvoirs entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire est fondamentale pour assurer le bon fonctionnement et l’indépendance de chaque institution
Aller chercher le savoir jusqu’en…Chine ! Cette recommandation de bon sens est une invite à aller au-delà des frontières de la vieille métropole coloniale pour chercher les meilleures pratiques (best practices), surtout quand, dans un domaine particulier, celle de l’ex-colonisateur n’est pas le meilleur exemple pour la bonne gouvernance à laquelle les Sénégalaises et les Sénégalais aspirent. S’il y a bien un domaine où la France n’est pas une référence à l’échelle mondiale, c’est bien celui de la Justice dans son rapport avec l’Exécutif.
Dans un État démocratique et de droit, la séparation des pouvoirs entre l’exécutif, le législatif et le judiciaire est fondamentale pour assurer le bon fonctionnement et l’indépendance de chaque institution. Au lendemain de la remise au président Diomaye Faye du rapport général des Assises de la justice qui se sont tenues du 15 au 17 juin 2024, ce texte a l’ambition de mettre en lumière l’importance de cette séparation et pourquoi il est critiqué que le président de la République soit également le président du Conseil Supérieur de la Magistrature.
PREVENTION DE L’ABUS DE POUVOIR.
La séparation des pouvoirs empêche la concentration excessive de pouvoir entre les mains d’une seule personne ou d’un seul organe. Chaque branche agit comme un contrepoids aux autres, ce qui limite les abus potentiels et favorise la responsabilité.
INDEPENDANCE JUDICIAIRE.
En particulier, l’indépendance du pouvoir judiciaire est essentielle pour garantir des décisions impartiales et justes. Les juges doivent être libres de toute influence politique ou pression externe afin de pouvoir appliquer la loi de manière équitable. En de bien nombreuses occasions, tout le contraire de ce que l’on a connu depuis plus de 60 ans au Sénégal et qui a culminé pendant les années Macky Sall avec une instrumentalisation politique outrancière de la justice.
FONCTIONNEMENT EFFICACE DU LEGISLATIF.
Le pouvoir législatif doit être libre de proposer, examiner et adopter des lois sans interférence de l’exécutif ou du judiciaire. Cela assure la représentation démocratique des intérêts de la population et la formulation de politiques publiques diverses et équilibrées.
LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE ET LE CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE –
Le Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) est souvent chargé de la nomination, de la promotion et de la discipline des magistrats. Dans de nombreux pays démocratiques, il est critiqué que le président de la République soit également le président de cet organe pour plusieurs raisons notamment celle du conflit d’intérêt potentiel et de la menace pour la séparation des pouvoirs.
En occupant simultanément ces deux fonctions, le président peut influencer directement les décisions judiciaires et les nominations de magistrats, compromettant ainsi l’indépendance judiciaire. Cette perversion n’a été que trop la réalité de la justice sénégalaise depuis les années 60 avec une accélération sur les deux dernières décennies avec les régimes libéraux arrivés au pouvoir après une alternance politique.
Cette situation a fortement affaibli la séparation des pouvoirs au Sénégal en concentrant trop de pouvoir entre les mains de l’exécutif, ce qui a régulièrement mené à des décisions politiquement motivées plutôt qu’à des décisions basées sur le droit.
LA CRAINTE D’UNE RÉPUBLIQUE DES JUGES –
Les acteurs sociaux favorables à la présence du chef de l’État dans le CSM invoquent régulièrement la crainte d’une “République des Juges”. Cette idée d’une “République des juges” où le pouvoir judiciaire dominerait les autres branches gouvernementales, n’est pas pertinente dans un système démocratique où il existe de multiples recours et des contrepoids aux potentiels abus des juges. Cette idée relève plus du fantasme jacobin que d’un risque réel dans une démocratie bien structurée, où il existe plusieurs niveaux de recours judiciaires permettant de contester les décisions des juges. Ces recours assurent que les décisions judiciaires peuvent être réexaminées et corrigées si nécessaire.
Par ailleurs, le pouvoir législatif a le rôle crucial de créer des lois et de superviser l’exécutif. En dernier ressort, le législatif peut modifier des lois pour contrer toute interprétation judiciaire excessive ou inappropriée, assurant ainsi un équilibre des pouvoirs.
Enfin, l’indépendance judiciaire signifie que les juges sont libres de rendre des décisions impartiales, mais cela ne signifie pas qu’ils sont au-dessus des lois ou qu’ils ne sont pas responsables. Les juges doivent toujours interpréter et appliquer les lois dans le cadre des normes constitutionnelles établies par le législatif.
La crainte d’une République des juges est un chiffon rouge agité en France depuis longtemps pour justifier un système judiciaire bien plus attaché à l’Exécutif que dans les autres démocraties occidentales.
Historiquement, le président de la République française a été le président du Conseil Supérieur de la Magistrature. Cette pratique a été critiquée pour son impact potentiel sur l’indépendance judiciaire. Actuellement, la réforme de 2016 a réduit le rôle direct du président dans le CSM, mais des questions persistent sur l’indépendance réelle.
De son côté, le système américain illustre une stricte séparation des pouvoirs, où le président n’a qu’un rôle indirect dans la nomination des juges fédéraux. Dans ce processus le président est chargé uniquement de nommer et seul le Sénat américain détient le pouvoir de rejet ou de confirmation. Cela vise à maintenir une certaine distance entre l’exécutif et le judiciaire.
L’Allemagne pour sa part maintient également une séparation rigoureuse des pouvoirs avec des organes distincts pour l’exécutif, le législatif et le judiciaire, évitant ainsi toute concentration excessive de pouvoir et préservant l’indépendance du pouvoir judiciaire.
LE MODÈLE PROGRESSISTE SUD-AFRICAIN –
L’Afrique du Sud offre un cas fascinant de respect de la séparation des pouvoirs, essentielle pour la stabilité démocratique et la protection des droits constitutionnels depuis la fin de l’apartheid. Suit une exploration de la manière dont la séparation des pouvoirs est respectée dans le système judiciaire sud-africain.
La Constitution sud-africaine, adoptée en 1996 après la fin de l’apartheid, établit clairement les pouvoirs et les fonctions de chaque institution de l’État : l’exécutif, le législatif et le judiciaire. Elle garantit également les droits fondamentaux des citoyens et définit les principes de gouvernance démocratique.
La Constitution insiste sur l’indépendance du pouvoir judiciaire, affirmant que les tribunaux sont soumis uniquement à la Constitution et à la loi, et ne doivent pas être influencés par des intérêts politiques ou autres pressions externes. Les juges sont nommés de manière indépendante, et leurs décisions ne peuvent être annulées que par des procédures juridiques appropriées, garantissant ainsi leur autonomie dans l’interprétation et l’application de la loi.
La Cour constitutionnelle est la plus haute autorité judiciaire en matière constitutionnelle en Afrique du Sud. Elle est chargée de vérifier la constitutionnalité des lois et des actions du gouvernement, de protéger les droits fondamentaux des citoyens, et de maintenir l’équilibre entre les pouvoirs. La Cour constitutionnelle a le pouvoir de rendre des décisions contraignantes pour toutes les autres cours, garantissant ainsi l’uniformité et la primauté du droit constitutionnel.
En plus de la Cour constitutionnelle, l’Afrique du Sud dispose d’un système judiciaire complet avec des tribunaux inférieurs qui traitent des affaires civiles, pénales et administratives à différents niveaux. Chaque niveau de tribunal joue un rôle spécifique dans l’administration de la justice selon les lois applicables.
La Cour constitutionnelle a souvent été appelée à vérifier la constitutionnalité des lois adoptées par le Parlement sud-africain. Cela démontre son rôle crucial dans le maintien de la séparation des pouvoirs en s’assurant que les lois respectent les normes constitutionnelles et les droits fondamentaux.
Les juges en Afrique du Sud sont nommés sur la base de leur compétence professionnelle et ne sont pas soumis à des influences politiques directes. Cela garantit que leurs décisions sont prises en fonction du droit et non de considérations partisanes ou externes
La séparation des pouvoirs renforce la protection des droits fondamentaux des citoyens en permettant au pouvoir judiciaire d’agir comme un contrepoids aux actions potentiellement inconstitutionnelles ou injustes du gouvernement ou du législateur
En respectant la séparation des pouvoirs, l’Afrique du Sud renforce la confiance du public dans le système judiciaire, crucial pour la stabilité politique, économique et sociale du pays.
SE RÉFÉRER AUX BONNES PRATIQUES –
La Fondation Ford a joué un rôle significatif et historique dans le processus d’élaboration de la Constitution sud-africaine de 1996. Franklin Thomas, président de cette institution philanthropique américaine de 1979 à 1996, a été un acteur clé dans ce processus. Avant les négociations constitutionnelles officielles qui ont conduit à la Constitution de 1996, l’institution philanthropique américaine a soutenu financièrement des recherches approfondies et des débats critiques sur les principes et les modèles constitutionnels. Cela a permis de jeter les bases d’une réflexion constructive et informée parmi les diverses parties prenantes en Afrique du Sud
Des rencontres et des dialogues ont été facilités entre les leaders politiques, les juristes, les universitaires, ainsi que les représentants de la société civile et des communautés marginalisées. Ces forums ont joué un rôle crucial en encourageant la participation démocratique et en favorisant la compréhension mutuelle nécessaire à la construction d’un consensus constitutionnel.
Par ailleurs, plusieurs organisations de la société civile en Afrique du Sud ont joué un rôle actif dans les négociations constitutionnelles. Cela comprenait des groupes de défense des droits humains, des organisations communautaires et des instituts de recherche juridique.
En encourageant des initiatives visant à promouvoir la justice sociale, l’équité raciale et les droits fondamentaux, ces efforts ont contribué à ancrer ces valeurs dans le processus constitutionnel sud-africain. Cela a été essentiel pour contrer les héritages de l’apartheid et pour établir un cadre constitutionnel solide basé sur les principes de l’État de droit et de la démocratie.
Le rôle de ces initiatives dans l’élaboration de la Constitution sud-africaine a laissé un héritage durable de liberté et de justice en Afrique du Sud. La Constitution de 1996 est largement reconnue comme l’une des plus progressistes au monde, protégeant une vaste gamme de droits et établissant des mécanismes forts pour la protection de la démocratie et de l’État de droit.
L’expérience sud-africaine a souvent été citée comme un modèle pour d’autres pays en transition ou confrontés à des défis de consolidation démocratique ou de rupture systémique. Elle démontre l’importance du partenariat entre les acteurs nationaux dans la promotion de la bonne gouvernance et des droits humains.
NÉCESSITÉ D’UNE TRANSFORMATION SYSTÉMIQUE AU SÉNÉGAL –
Avec l’arrivée au pouvoir du mouvement Pastef, il est crucial pour l’administration Faye-Sonko de ne pas tomber dans le piège des petites réformes qui maintiennent intact le système ancien mais d’envisager une réforme judiciaire qui s’inspire des meilleures pratiques internationales, telles que celles observées en Afrique du Sud.
Décoloniser et émanciper la justice au Sénégal implique de repenser et de réformer le système judiciaire de manière à renforcer l’indépendance, la transparence et l’efficacité. S’inspirer des meilleures pratiques internationales tout en adaptant ces modèles au contexte spécifique du Sénégal est essentiel pour promouvoir une gouvernance démocratique solide et durable, répondant aux aspirations des citoyens pour une justice juste et équitable. L’instrumentation politique de la Justice doit devenir une affaire du passé au Sénégal.
Réformer la Justice pour assurer la Rupture au Sénégal ne peut se concevoir que dans un cadre plus général de refondation des institutions. L’article publié sous le titre “Pour une théorie du changement“ (Sud Quotidien du 28 juin 2024) développe cet aspect de manière explicite. L’ambition pastéfienne de sortir le Sénégal du système néocolonial est partagée par l’écrasante majorité des Sénégalais et des jeunesses africaines. Cette ambition doit cependant être exprimée dans la présentation d’un cadre général clair, discuté et élaboré avec les citoyens. Le processus doit être réfléchi, inclusif et sérieux. Cela aussi, c’est la Rupture exigée par les Sénégalaises et les Sénégalais le 25 mars 2024.
RENÉ LAKE
par l'éditorialiste de seneplus, ibe niang ardo
LES TOUT-PETITS DAMNÉS DU SYSTÈME
EXCLUSIF SENEPLUS - La violence dans notre société prend racine dans l'inégalité des chances offertes aux enfants, dont les talibés. Cette situation banalisée par le Sénégal choque pourtant des visiteurs étrangers
Ibe Niang Ardo de SenePlus |
Publication 14/07/2024
Il est beaucoup question de Système de nos jours. Les hommes politiques l’invoquent aussi bien pour damner nos déficits que pour susciter nos espoirs. Et effectivement, ils n’ont pas tort. Un État moderne ne peut exister sans un système en son sein. C’est cela qui fait que nous formons un corps vivant dynamique (un système) propulsé par un jeu de sorts et ambitions, dans une trajectoire théoriquement bien ferrée et dirigée vers une destination rêvée.
Mais ce système pour nous aurait déraillé depuis que le colon, chef de gare, a sifflé le départ en 1960 - les rails ayant été sciemment minés. Comprenez-moi, je suis fils de cheminot et j’ai grandi proche des trains et rails. Par conséquent depuis 1960 nous nous sommes habitués à une incompréhensible violence qui ne peut s’expliquer que par le cumul de défaillances et vaines tentatives de nous en sortir. Une répétition sempiternelle de la même sanction de nos politiques de développement d’un régime à un autre : “Échec et mat”! Sans jamais s’en indigner et avec cela un cortège de violence qui s’endurcit sous le voile d’un étrange stoïcisme. De ce système, je m’intéresse aujourd’hui à un seul pan, en dehors des priorités publiques qui se prétendent inclusives : les enfants en bas âge abandonnés à leur sort de mendiants errants dans les rues nuits et jours.
Quelle grave banalisation de la violence dans notre société
L’histoire édifiante que je m’en vais vous raconter, pour en tirer avec vous les leçons, s’est passée ici il y a un mois et j’en suis moi-même acteur.
Un couple de retraités que nous avions connu mon épouse et moi en Suisse et dont le mari était à la tête d’une très importante société européenne, était arrivé au Sénégal dans le cadre d’un tour d’Afrique. Une fois chez nous, dernière étape du tour, tout s’était si bien déroulé jusqu’au moment où la dame, face au nombre d’enfants constatés dans la rue, ne pouvant plus se retenir d’émotion, fut prise de sanglots, déclenchant ainsi un traumatisme qui a gâché le reste du voyage. Sur le moment, je ne pouvais m’expliquer de si intenses émotions pour “si peu”, car il n’y avait pas eu d’agression physique de la part de ces marmots, habitué que je suis que la violence ne commence qu’à partir de ce moment.
Un mois plus tard, de retour chez eux, le mari contacte mon épouse pour lui faire part de leur intention de contribuer à la prise en charge de ces enfants avec des fonds qu’ils ont décidé d’octroyer à une ONG, à elle d’identifier, capable de les utiliser à bon escient. Ils n’avaient donc pas oublié, leur sensibilité ayant été réellement mise à rude épreuve par cette situation paradoxalement banalisée par nous, parents de ces enfants. Aussitôt dit, aussitôt fait ! Avec l’aide diligente de mon épouse, la convention de financement avec une ONG de la place est aujourd’hui signée, engageant leur fondation familiale mondialement connue dans un financement gratuit. J’ai compris alors combien la situation des enfants en bas âge mendiants dans la rue était d’une extrême violence. Aussi devons-nous en prendre la pleine mesure au lieu de tourner le regard ailleurs, aidés en cela par le terme euphémique de “talibé”. Ces victimes de notre société n’en sont pas moins membres à part entière, d’égale dignité et droit que n’importe quel autre fils du pays, fut-il haut dignitaire. Et quand abandonnés comme ils sont à ce cruel sort, ils sont torturés, violés et tués, quelles qu’en soient les circonstances, chacun de nous commet solidairement un fratricide ou un parricide. Soixante-quatre ans d’indépendance, cinq présidents qui se sont succédés et toujours une aggravation de la situation en lieu et place d’une solution. Tant qu’on n’a pas trouvé une solution fondée sur une éducation égalitaire de qualité pour l’ensemble de nos enfants sans exception, nous demeurons dans un perpétuel système, générateur par défaut de désordre et violence.
Dans une société humaine, les sorts et activités sont liés les uns les autres
Juste ! Il y a une interconnexion de tout ce monde qui n’exclut rien qui en fasse partie. Ce phénomène des enfants dans la rue est là depuis le temps de Senghor et il faut se poser la question de savoir où sont passés ceux qui alors avaient cinq ans, il y a quinze ans et avant. Notre encombrement des rues vient plutôt de là. Nombre d’entre eux, vous pouvez les retrouver “coxeurs” dans tous les lieux où s’activent des marchands ambulants où dans les marchés et les garages de transports en commun. Ils se sont connectés à cette communauté sans normes, snobée par l’élite et qui joue sa survie en comptant surtout sur la force d’une masse critique intimidante, plutôt que de se conformer tout simplement aux règles. Enfin, ces enfants défavorisés ne sont pas des idiots. Ne pas leur offrir les mêmes opportunités que leurs concitoyens privilégiés est une ultime tare qui plombe notre système économique. L’effectif des filles dans nos écoles, la place des femmes dans notre économie aujourd’hui, alors que ce genre était proscrit d’enseignement tout comme ces mendiants il y a à peine quelques décennies, suffit à valider mon propos.
Cette situation obère nos chances de juguler la montée de la violence dans nos cités, car elle est la base d’un écosystème social tapis de souffrance rageante et d’injustice.
À ces pauvres enfants, pourvu que la récente alternance politique soit pour eux et notre pays le rendez-vous avec la chance de tourner définitivement cette page de notre histoire.
Au président de la République, je voudrais l’inviter humblement à prendre cette situation pour chose inacceptable, incompatible avec l’écosystème moderne juste et émancipateur que l’on attend de son magistère, sans quoi il ne réussira qu’à faire pire que ses prédécesseurs.
Ibe Niang Ardo est président du Mouvement citoyen Jog Ci.
Par El Hadj Boubou SENGHOTE
A PROPOS DU RAPPORT PROVISOIRE DU CINQUIEME RGPH
Les rideaux sont tombés sur le Cinquième Recensement Général de la Population et de l’Habitat
Les rideaux sont tombés sur le Cinquième Recensement Général de la Population et de l’Habitat (RGPH-5).
L’Agence Nationale de la Statistique et de la Démographie (ANSD) a en effet publié le Rapport provisoire dudit Recensement dont la coordination technique nationale comprenait, outre M. le Directeur général Abdou DIOUF, M. Jean Pierre Diamane BAHOUM (Coordonnateur Unité de Mise en Œuvre du RGPH-5, 2023), M. Papa Ibrahima Sylmang SENE (Conseiller technique du CTCE), M. Atoumane FALL (Coordinateur du Comité de veille et d’Assurance qualité), Mme Ndeye Lala TRAVARE (Chef section conception, analyse et projections démographiques ), M. Papa Mabeye DIOP (Chef section cartographie censitaire et opérations de terrain), M. Bourama MANE (Chef section Informatique, Traitement, Sécurisation bases de données), Mme Awa DIOP (Chef section sensibilisation et communication), M. Aliou SEYE (Chef section ressources humaines), M. Jean Rodrigue MALOU (Chef section coordination des activités régionales), M. Babacar SEYE (Chef section finances et comptabilité), Mme Penda AMAR (Chef section administration et logistique), El Hadji Malick GUEYE (Chef section documentation, diffusion et archivage), M. Moussa NDOYE (Chef section contrôle de gestion), Mme Fatou DIOUF (Chef section marché), El Hadji Amara DOUMBOUYA (Chef section audit interne) et M. Seydou DIENG (Chef section régie d’avances).
Le Comité de lecture et de validation était, de son côté, composé de MM. Abdou DIOUF (Directeur technique), Jean Pierre Diamane BAHOUM (Coordonnateur technique), Papa Ibrahima Sylmang SENE (Conseiller technique), Mbaye FAYE (Membre), El Hadji Oumar SENGHOR (Membre), Macoumba DIOUF (Membre), Alain François DIATTA (Membre), Mme Awa DIOP (Membre), Mme Ndeye Lala TRAVARE (Membre), MM. Papa Mabeye DIOP (Membre), Jean Rodrigue MALOU (Membre), El Hadji Malick GUEYE (Membre) et Fodé DIEDHIOU (Membre).
Comprenne qui pourra !
Aux termes de ce Rapport provisoire de cinq cent soixante-onze (571) pages et renseignant sur de nombreuses questions relatives notamment à la population et à l’habitat, les langues nationales sénégalaises les plus parlées régulièrement sont le Wolof (8 525 098 de locuteurs, soit 53, 6% de la population), le Pulaar (4 175 468 de locuteurs, soit 26, 2% de la population), le Séreer (1 534 511 de locuteurs, soit 9, 6% de la population), le Joola (456 963 de locuteurs, soit 2, 9% de la population), le Mandinka (450 461 de locuteurs, soit 2, 8% de la population) ; les autres langues comptant chacune moins de 200 000 de locuteurs (donc moins de 1, 5% de la population).
Ces résultats ont confirmé ce que nous avons toujours clamé, à savoir, la détermination de ceux qui nous ont gouvernés à ce jour d’imposer à tout prix la langue Wolof, au motif que celle-ci compterait le plus grand nombre de locuteurs. Sinon, comment expliquer leur volonté de départ, de diviser les Fulɓe en 4 groupes ethniques distincts, notamment en Fula, Peuls, Laobés et Toucouleurs dans le cadre de ce RGPH-5?
Raisonnablement, nos parents sérères qui parlent au minimum six (06) langues différentes, n’étaient-ils pas les plus indiqués à être considérés comme autant de groupes ethniques que leurs cousins Fulɓe qui, eux, parlent tous la même langue ? Nous avons la certitude que nos gouvernants ne sont pas dans l’ignorance de ce que le Pulaar est la seule langue de tous les Fulɓe du Sénégal et que les Sérères, considérés pourtant comme une seule Ethnie, en ont au moins six (06) : le Siin-Siin, le Saafi, le Noon, le Nduttu, le Paloor et le Laalaa !
SubhanAllah ! Qu’arrive à ces gens qui tiennent absolument à diviser les Fulɓe du Sénégal en ceci et cela, qui leur dénie l’appartenance en dépit du fait qu’ils parlent la même langue, aient des traditions identiques et répondent de la même culture ? Même Makhtar DIOUF, pourtant auteur d’un célèbre ouvrage intitulé « SENEGAL-LES ETHNIES ET LA NATION » s’en mêle :
-« Le recensement de 1988 se réfère au groupe Haal Pulaar dans son ensemble, ceci à la demande de l’Association pour la Renaissance du Pulaar : il s’agit là d’un groupe davantage linguistique qu’ethnique. Nous avons donc une perte d’information, dans la mesure où Toucouleur, Peul et Laobé ne sont plus différenciés, comme c’était le cas dans les documents antérieurs » (Cf. Le Sénégal-les Ethnies et la Nation, page 42, NEAS-2021).
Cet écrivain oublie-t-il avoir lui-même écrit dans la partie introductive de son livre précité (page 11) que « La langue et la culture peuvent être les conditions nécessaires de détermination de l’ethnie ; ce sont des conditions objectives...) ?
Ou bien les « Toucouleurs, Peuls et Laobés » ne seraient-ils pas concernés par cette définition de l’ethnie ? En seraient-ils exclus pour ce qu’ils sont, parce qu’ils sont ce qu’ils sont ? Si « les Toucouleurs, les Peuls et les Laobés qui partagent la même langue et la même culture n’appartiennent pas pour autant à la même Ethnie, qu’en serait-il alors des Sérères dont Makhtar DIOUF semble issu qui ont six et peut-être même sept langues distinctes (si on ajoute le niominka aux six langues ci-dessus énumérées) ?
«…Ce phénomène migratoire semble en fait, n’avoir concerné que les Séreer, les Wolof et les Lebu, qui lors de leur traversée du Sahara, ont rencontré les Berber Sahariens qui deviendront les Peul ; et des croisements des Sereer et des Lebu avec les Peul, proviendront les Tukuleer. Ces quatre groupes, en fait peu différenciés à l’époque, parlant la même langue, le protosereer, selon L. S. Senghor, vont cohabiter dès le 10ème siècle dans le Tekrour, au nord du Sénégal (l’actuel Fouta Toro à cheval sur le Sénégal e la Mauritanie) ». Dixit Monsieur Makhtar DIOUF (page 44).
Des Berbères Sahariens qui se sont mués en Peuls qui parlent une langue dénommée Pulaar et qui n’est pas connue des Berbères Sahariens, leurs supposés géniteurs ?
Des Sérères et des Lébous qui s’accouplent avec des Peuls pour donner naissance à des Toucouleurs ! Qui de ces trois personnes (Le Sérère, le Lébou et le Peul) dont le croisement aurait engendré le Toucouleur serait l’homme et qui serait la femme ? Et pourquoi alors le « Toucouleur » ignore-t-il tout de la langue du Sérère et de celle du lébou pour ne parler que la langue du « Peul » ?
Des sottises de cette nature ne doivent plus être dites sous le ciel africain, particulièrement au Sénégal ! ETEE ON NJAWOTAAKO MIN, WOORTI KO ƁENNI! YOO DOTTU ! Seeŋoor noon kam kañum ko ɗaccanaaɗo Alla!
Comment expliquer, que dans la partie du Questionnaire du RGPH-5, relative aux langues parlées, il soit demandé si la personne à recenser parle la langue de l’Ethnie dont elle se réclame ? Pour sûr que ce ne sont pas nos parents de l’Ethnie Wolof qui sont visés ici, dans ce Questionnaire qui comportait bien des choses qui clochent, sur de nombreux points !
Comment expliquer, qu’au lieu de lister les noms de la première langue parlée en respectant l’ordre alphabétique comme dans le cadre de l’article premier, alinéa 2 de la Constitution du 22 janvier 2001 de la République du Sénégal, on ait plutôt commencé, arbitrairement, par le Wolof qui devrait même être la toute dernière langue à citer, car commençant par la lettre W, la quatrième avant-dernière lettre de l’alphabet latin ?
Comment a-t-on osé passer ainsi outre la recommandation contenue dans l’exposé des motifs de la Loi n° 78-60 du 28 décembre 1978 disposant que « …Le nombre des langues nationales du Sénégal est ainsi fixé à 6. Comme il ne saurait être question d’établir entre elles un quelconque ordre hiérarchique, elles sont énumérées dans la nouvelle disposition constitutionnelle selon l’ordre alphabétique. Ce sont le diola, le malinké, le pulaar, le sérère, le soninké et le wolof ».
Comment justifier le même listing s’agissant de la deuxième langue parlée, au lieu de procéder, comme on l’a fait jusqu’à un certain niveau pour les noms des Ethnies, c’est-à-dire en respectant l’ordre alphabétique ?
Pourquoi même cette question sur les langues nationales ? Pourquoi demander la deuxième langue parlée après que la personne à recenser a déjà décliné le nom de son Ethnie ainsi que sa première langue parlée ? Pourquoi cette question supplémentaire ? N’était-ce-pas là une façon un peu détournée d’orienter la réponse de la personne à recenser ?
Il nous avait également été donné de relever que d’après des échos qui nous parvenaient au fur et à mesure du RGPH-5, certains agents recenseurs écrivaient automatiquement que tel ou tel Sénégalais à recenser était de l’Ethnie Wolof tout comme sa première et sa seconde langue parlées, sans même en poser au préalable la question à l’intéressé !
Nous ne sommes point surpris de ces résultats voulus depuis fort belle lurette ! C’est même l’inverse qui aurait été surprenant ; la situation étant ce qu’elle est ! Qui ignore que c’est là l’aboutissement d’une ligne directoriale qui date de la colonisation ? Les différents Gouvernements qui ont eu à diriger le Sénégal depuis les indépendances des années 60 ont tout mis en œuvre pour que le Wolof soit la langue de communication, de commerce et de travail dans toute l’Administration sénégalaise, même si c’est au cours des vingt-quatre (24) dernières années que cette volonté s’est le plus manifestée.
Mais ces résultats, tout orientés qu’ils soient, ne sont pas une preuve que nos parents de l’Ethnie Wolof sont les plus nombreux au Sénégal. Bien au contraire. Car ces 8 525 098 de Sénégalais dont on dit que le Wolof est la principale langue parlée, incluent non seulement les Wolofs dans leur intégralité, mais aussi des Fulɓe, des Sérères, des Diolas, des Malinkés, des Soninkés, des Maures, etc..
Cela se conçoit aisément aussi dans la mesure où d’après le rapport de l’ANSD, « Le taux d’urbanisation a connu une croissance régulière passant de 34,0% en 1976, 39,0% en 1988, 40,2% en 2002, 45,2 en 2013 et 54,7% en 2023 » et que les régions les plus urbanisées se trouvent justement être celles où la langue Wolof s’est vu attribuer le plus grand nombre de locuteurs. Il s’agit notamment de Dakar (100%) avec une population urbaine évaluée à 40,4% de celle nationale, Diourbel (66,9%) et Thiès (57,5%) qui regroupent aussi respectivement 14,0% et 14,3% de la population urbaine nationale.
Le Rapport l’a également souligné : la population qui réside en milieu urbain (9 922 399 habitants) est de loin plus nombreuse que celle qui habite en zone rurale. Elle en représente plus de la moitié de la population totale. Il va sans dire que ce sont les Ruraux qui ont grossi la population urbaine et permis à la langue Wolof d’être créditée de 8 525 098 de locuteurs, soit 53, 6% de la population totale du Sénégal qui, d’après le Rapport de l’ANSD, s’élèverait à dix-huit millions cent vingt-six mille trois cent quatre-vingt-dix (18 126 390) habitants.
En revanche, les 4 175 468 de Sénégalais dont le Pulaar serait, aux termes du rapport de l’ANSD, la principale langue parlée, sont constitués essentiellement de Fulɓe, à l’exclusion de tout membre de quelle que autre Ethnie que ce soit. Nous ne doutons pas qu’il en soit ainsi pour les autres Ethnies. En somme, excepté pour la langue Wolof, les chiffres communiqués concernent des locuteurs natifs. D’où donc une autre révélation de taille de ce RGPH-5: LES FULƁE SONT LES PLUS NOMBREUX AU SENEGAL ET LE PULAAR, LEUR LANGUE, COMPTE LE PLUS GRAND NOMBRE DE LOCUTEURS NATIFS !
Encore une fois, Monsieur Diégane SENE l’avait dit en 2007 : « S’il existe une réalité observable dans tous les coins du Sénégal et que la prochaine Académie des Langues nationales va prouver, c’est que le Pulaar est la première langue au Sénégal. Le Pulaar est la première langue nationale par le nombre de ses locuteurs mais aussi parce qu’elle est la plus protégée, la plus structurée et la plus soignée…Le Pulaar est la langue nationale la plus pratiquée sur l’échelle du territoire national. Il n’y a pas un département au Sénégal où il n’est pas parlé. Par exemple, dans le département de Mbour, qui est une zone sérère comptant 190 villages, le Pulaar est présent dans 100 localités. La même réalité est observable partout au Sénégal…Nos langues ont besoin qu’on milite pour elles. Le Gouvernement s’est employé à redresser les difficultés en affirmant ses volontés. D’abord par l’Académie des Langues dont la conception est terminée et dont l’installation est prévue dans les mois à venir. Et le Pulaar y occupera sa place de première Langue du Sénégal, sinon presque ».
Pour rappel, M. Diégane SENE, est le Secrétaire national de l’URD depuis le rappel à Dieu de Djibo Leyti KA (Paix à son âme). Il avait été nommé en 2004, Ministre délégué chargé de l’Alphabétisation, des Langues nationales et de la Francophonie, auprès du Ministre de l’Education, dans le Gouvernement du Premier Ministre Macky SALL, sous la présidence de Maître Abdoulaye WADE. Ce, avant son élection comme Député à l’Assemblée nationale. Une voix autorisée donc, s’il en est !
Cela n’est guère surprenant, au demeurant ; vu que le Pulaar est, incontestablement :
-la première langue la plus régulièrement parlée dans les régions de Kédougou, Kolda, Matam, Saint-Louis du Sénégal et Tambacounda;
-la deuxième langue la plus régulièrement parlée dans les régions de Dakar, Kaolack, et Louga;
-au moins la troisième langue la plus régulièrement parlée dans les six (06) régions sénégalaises restantes, à savoir, Diourbel, Fatick, Kaffrine, Thiès, Sédhiou et Ziguinchor ;
-la première langue la plus régulièrement parlée au sein de la diaspora sénégalaise, considérée comme la quinzième région du Sénégal ;
-la seule langue sénégalaise à être parlée dans tous les quinze (15) Etats qui composent l’espace CEDEAO ;
-la seule langue sénégalaise à être parlée dans au moins vingt-deux (22) pays africains !
En somme, on trouve de nombreux locuteurs de la langue Pulaar dans toutes les quatorze (14) Régions sénégalaises ainsi que dans tous les quarante-six (46) Départements et cinq cent cinquante-sept (557) Communes du Sénégal.
Assurément, l’honorable Député Diégane SENE avait raison: « Le Pulaar est la langue nationale la plus pratiquée sur l’échelle du territoire national. Il n’y a pas un département au Sénégal où il n’est pas parlé. »
Nous saluons au passage le Diawdine Amadou Bakhaw DIAW, Président de l’Association Culturelle LEPPIY WOLOF et l’assurons de notre réponse dans des délais raisonnables à son article « MONSIEUR SANGHOTE, SI VOUS N’AVIEZ PAS MANGE LE DIAPHRAGME (BIWOL), LE PROFESSEUR FATOU SOW SARR VOUS AURAIT DONNE UN PAGNE EN CADEAU ».
Le temps nous a fait dramatiquement défaut ces jours-ci, au point qu’il ne nous a pas été possible de lui répondre. Mais Diawdine ne perd rien à attendre. Ce n’est plus qu’une question de délai. De très court délai, In Chaa Allah !
Assurément, Louis Léon César Faidherbe, Gouverneur du Sénégal de 1854 à 1861 puis de 1863 à 1865 a, comme qui dirait, réussi son funeste vœu de braquer certains Sénégalais contre leurs concitoyens de l’Ethnie Fulɓe ! Hélas !
Cet ancien Gouverneur du Sénégal avait déclaré que : «Parmi les populations indigènes que nous avons eu à coloniser, il y a une ethnie qui n’acceptera jamais notre domination. Et il se trouve que cette ethnie est très répandue sur notre espace de colonisation. Il est urgent et impératif, pour notre présence en Afrique, de réussir à la diviser et leur opposer les autres ethnies moins rebelles. Car le jour où les Peuls se regrouperont, ils pourront balayer sur leur passage toutes les forces coloniales».
Les provocations n’ont que trop duré ! Notre cher Sénégal a beaucoup souffert des événements casamançais, au Sud du pays ! Le tribut payé est suffisamment lourd. C'est dire que la préservation de la paix sociale à travers une justice équitable n'a pas de prix: toute injustice débouche inévitablement sur une colère, une révolte, une explosion, un conflit. Si gouverner c'est aussi prévoir, autant donc rectifier l'erreur visible sur la configuration de la future société sénégalaise !
Car à l’image de nos vaillants grands-parents qui avaient dit non à la domination des Blancs et des Maures, nous nous opposerons à la domination de quelle que langue (donc de quelle que Ethnie) que ce soit.
Ce que nous réclamons et qui nous vaut beaucoup de haine n’est pourtant pas du domaine du diable. Nous ne demandons rien de plus que ce que nous confère la Constitution de la République du Sénégal !
A bon entendeur…
Par Vieux SAVANÉ
L’AUBERGE DES FÊTARDS
Porté par une écriture alléchante empreinte de poésie, ce roman est dédié à l’ancien président du Conseil Mamadou Dia. En hommage « A l’homme de droiture et de rigueur. A l’immuable patriote »
Babacar Sall - Roman L’Harmattan - Avril 2024. 241 pages
L’endroit est très fréquenté par la « jet set ». Dans ce lieu au nom évocateur se retrouvent des gens aux « richesses subites et douteuses », des intellectuels, des artistes, des hommes et des femmes obsédés par le désir de séduire. Submergée par les effluves de la « boisson interdite », l’atmosphère y est forcément sulfureuse.
Une telle approche de la vie a pour cadre un pays qui a beaucoup changé en s’asseyant outrageusement sur la valeur travail, la glorification de l’effort, pour emprunter le chemin d’une déchéance programmée qui cherche à s’émanciper de toutes les formes d’entraves. Qu’importe les moyens et les techniques déployés pour gagner de l’argent! Il suffirait simplement de s’en mettre plein les poches et de veiller à s’éclater follement en empruntant un chemin aux extravagances déroutantes. Dans un tel univers, l’argent qui a pris le dessus sur tout plastronne, imprimant sa marque sur les relations sociales car désormais, tout y est calcul. « L’auberge des fêtards » se présente ainsi comme une confrérie de parvenus de la République dont l’unique horizon est le paraître. Aveuglés par la quête de luxure, de jouissance, de gaspillage, ils revêtent le visage méprisant de « dirigeants serviles et sociophages » qui s’ingénient ainsi à défaire et à détricoter la chaîne des valeurs qui exaltent l’effort, la probité, l’honnêteté.
Un dénominateur commun semble les fédérer. Consommer, épater, pour finalement se donner en spectacle en succombant à l’illusion, l’évanescent. On devine que cet argent qui est ainsi gaspillé n’a pas été gagné à la sueur de leur front. Ce roman est une critique acerbe de l’étalage indécent de la richesse à travers les billets de banque neufs jetés à même le sol pour tapisser une portion de route. Alors qu’en arrière-plan s’étale la pauvreté de la grande majorité de populations enfermées dans des besoins de survie. Une sorte de satire sur le gaspillage scandaleux orchestré par des élites hors sol, préoccupées par le m’as-tu-vu. Elles mettent en branle des pratiques qui ne participent nullement à sortir les populations les plus démunis de leur misère. Là git le mal. Dans ces ressources gaspillées, vandalisées, portées par une gestion dont le nom est la mal gouvernance.
Porté par une écriture alléchante empreinte de poésie, ce roman est dédié à l’ancien Président du Conseil Mamadou Dia. En hommage « A l’homme de droiture et de rigueur. A l’immuable patriote ».
Par Silèye Gorbal Sy
UNE AFFAIRE DE TOUS, PAR TOUS ET POUR TOUS EN VUE DE L’ATTEINTE DE L’ODD 4
En 1948, l'éducation a été déclarée « droit humain universel ». Ce droit a été réaffirmé en 2015, lorsque les Nations unies se sont fixées pour objectif de développement durable l’accès de tous à une éducation de qualité.
En 1948, l'éducation a été déclarée « droit humain universel ». Ce droit a été réaffirmé en 2015, lorsque les Nations unies se sont fixées pour objectif de développement durable l’accès de tous à une éducation de qualité. Pourtant, malgré des décennies de progrès dans l’accès à l’éducation, 250 millions d’enfants et de jeunes à travers le monde sont encore déscolarisés et 70 % des enfants de 10 ans dans les pays à faible et moyens revenus ne sont pas en capacité de comprendre un texte simple à l’écrit.
A l’occasion d’une réunion des ministres de l’Éducation, tenu dernièrement au siège de l’UNESCO à Paris (France), en présence du Président du Chili, Gabriel Boric, qui co-préside à ses côtes le Comité directeur de haut niveau pour une éducation de qualité pour tous, Audrey Azoulay a appelé les 194 Etats membres de l’Organisation à « respecter leur engagement de faire passer l'éducation d'un privilège à une prérogative pour chaque être humain à travers le monde ». La Directrice générale a également rappelé que « l'éducation est une ressource essentielle pour relever les défis contemporains, de la réduction de la pauvreté à la lutte contre le dérèglement climatique ».
En mai 2015, le forum mondial d’éducation d’Inchéon (République de Corée) réunissait 1600 participants de 160 pays qui n’avaient qu’un seul objectif en tête : assurer une éducation inclusive et équitable de qualité et un apprentissage tout au long de la vie pour tous à l’horizon 2030. La déclaration d’Inchéon –Education 2030 a joué un rôle déterminant dans la définition de l’Objectif de Développement Durable relatif à l’éducation, qui vise à « assurer l’accès de tous à une éducation de qualité sur un pied d’égalité et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie »
Elle confie à l’Unesco la direction, la coordination et le suivi de l’Agenda Education 2030 et au Rapport Mondial de Suivi sur l’Education ainsi que du Volet Educatif des autres ODD. S’appuyant sur ce qui a été fait pour continuer et construire le mouvement EPT, Education 2030 prend en compte les acquis engrangés depuis 2000. L’Agenda 2030 est novateur en ce qu’il met l’accent sur le renforcement et l’élargissement de l’accés , de l’inclusion et de l’équité ,de la qualité et des résultats d’apprentissages à tous les niveaux dans une approche de l’apprentissage tout au long de la vie .
Education 2020 doit être vu dans le contexte plus large du développement aujourd’hui. Les systèmes éducatifs doivent être pertinents et répondre à des marchés de travail en rapide évolution, aux avancées technologiques , à l’urbanisation, aux migrations ,à la dégradation de l’environnement , aux risques et aux catastrophes naturels.
Nous devons fondamentalement changer notre façon de concevoir l’éducation et son rôle dans le bien-être de l’humanité et le développement mondial. Tout d’abord, il est urgent d’adopter des approches nouvelles. Il faut une volonté politique, des ressources, de l’innovation et des ressources pour infléchir cette tendance. Si nous voulons réellement concrétiser l’ODD 4, nous devons agir avec une conscience plus aigue de l’urgence des mesures à prendre et nous engager sur la durée .En cas d’échec ce n’est pas seulement l’éducation qui en pâtira mais les progrès de chacun des objectifs de développement : la réduction de la pauvreté, l’élimination de la faim, l’amélioration de la santé, l’égalité entre les sexes et l’autonomisation des femmes, la production et la consommation durables, la résilience des villes, des sociétés plus égalitaires et inclusives.
L’Education est étroitement liée à d’autres secteurs, tout comme la santé, l’eau, l’alimentation et l’énergie sont essentielles à l’éducation. La santé des enfants détermine leurs capacités à apprendre, les infrastructures sanitaires peuvent être utilisées pour dispenser l’éducation et les enseignants en bonne santé sont indispensables au bon fonctionnement du secteur de l’éducation. Il revient à chaque génération de définir les compétences et connaissances indispensables à transmettre pour relever les défis de son époque .La nôtre ne fait pas exception. Face aux défis planétaires que sont le creusement des inégalités, le changement climatique, la montée en puissance des technologies numériques, il faut aujourd’hui selon l’Unesco réinventer l’éducation, « l’arme la plus puissante pour transformer le monde », selon les mots de Nelson Mandela.
Notre pays a réaffirmé sa vision et sa volonté politique reflétées dans de nombreux traités internationaux et régionaux relatifs aux droits de l’homme et qui consacrent le droit à l’éducation et ses liens réciproques avec d’autres droits fondamentaux. La pédagogie doit s’organiser autour de principes de coopération, de collaboration et de solidarité. Ces objectifs pédagogiques doivent donner lieu à un processus d’évaluation conçu pour encourager chez tous les élèves des progrès significatifs en matière de développement et d’apprentissage.
Le curriculum doit mettre l’accent sur des apprentissages écologiques, interculturels et interdisciplinaires en mesure d’aider les élèves et les étudiants à accéder et à contribuer au savoir, tout en développant leur capacité à mettre ce savoir en pratique mais aussi le remettre en cause. Un développement social inclusif exige la fourniture universelle des services cruciaux comme l’éducation.
Dans le cadre de la mise en œuvre des politiques éducatives, notre pays qui a élaboré des programmes éducatifs comme le PDEF et le Paquet a eu à organiser des rencontres d’envergures nationales comme les Etats Généraux de l’Education, les Concertations Nationales sur l’Avenir de l’Enseignement Supérieur, les Assises nationales de l’Education.
Pour le maintien d’un climat social apaisé dans la mise en œuvre de nos politiques éducatives, il est souhaitable que le Comité de suivi des accords signés en février 2022 composé de différents ministères, de syndicats d’enseignants de la société civile active en éducation se réunisse sous la présidence de M. Premier Ministre qui a accordé déjà une oreille attentive aux acteurs de l’éducation lors du conseil interministériel sur les préparatifs des examens.
Le renforcement de l’alphabétisation et de l’éducation non formelle notamment en termes de financement en rapport avec les organisations actives du sous-secteur, l’éducation inclusive, le numérique, zéro abris provisoires demeurent indispensables pour notre système éducatif au moment où au niveau mondial, l’Unesco sous la coordination de l’Unesco, un rapport dans l’éducation est intitulé : Repenser nos futurs ensemble, un nouveau contrat social pour l’éducation. Les actes déjà posés par le Ministre de l’Education Nationale en proposant une société éducative et avec celui de la Formation professionnelle montrent toutes leurs disponibilités et leur sens de dialogue qui sans nul doute s’ils se poursuivent sans relâche feront de l’éducation et de la formation une affaire de tous, une réalité pour le devenir et l’avenir de notre système éducatif.
Silèye Gorbal Sy
Expert en Education et Développement Local
Président Coalition Nationale Education Pour Tous du Sénégal
Membre du Comité Dialogue Social / Secteur de l’Education
Coordinateur de la Coalition Africaine et Francophone pour l’Alphabétisation
Membre Ccong Unesco
Chevalier de l’Ordre National du Lion
Par Idrissa Doucouré
EAU – REFORMES AUDACIEUSES OU CATASTROPHE ANNONCEE ?
Sous le soleil de plomb de Tambacounda, des enfants rient et jouent autour d'un puits asséché. Ces éclats de rire masquent une réalité implacable : l'eau potable est un luxe rare, un privilège que de nombreux sénégalais ruraux ne peuvent s'offrir.
Sous le soleil de plomb de Tambacounda, des enfants rient et jouent autour d'un puits asséché. Ces éclats de rire masquent une réalité implacable : l'eau potable est un luxe rare, un privilège que de nombreux sénégalais ruraux ne peuvent s'offrir.
Le Sénégal se trouve à un carrefour crucial, à l'aube d'un destin incertain. Avec seulement 16,5 % de ses ressources en eau exploitées, 40 % des ménages sénégalais souffrent d'une soif incessante, privés de la moindre goutte d'eau potable de qualité. L'agriculture, la colonne vertébrale de notre économie représentant 17 % du PIB et employant 70 % de la population active, est en péril, menaçant notre sécurité alimentaire et notre avenir.
Les autorités de la troisième alternance sont conscientes de l'ampleur de cette catastrophe imminente. Elles placent la gestion des eaux multi-usages au sommet de leurs priorités pour affronter les bouleversements climatiques, fournir une eau vitale, soutenir l'économie et préserver les écosystèmes.
Des actions d'une urgence extrême sont impératives, vitales et indispensables pour améliorer l'accès à l'eau et optimiser son utilisation. Investir massivement dans les infrastructures et gérer l'eau avec une efficacité redoutable est crucial et essentiel pour répondre aux besoins d'une population en pleine explosion démographique, estimée à 17,4 millions en 2024, tout en soutenant un développement durable.
Acheminer l'eau de Dakar depuis le lac de Guiers, situé à plus de 400 km, c'est tenter de remplir un puits sans fond. Chaque régime politique, de Abdou Diouf à Macky Sall en passant par Abdoulaye Wade, a investi dans des programmes coûteux pour doubler, tripler, et même quadrupler la conduite d'eau, entraînant une hémorragie financière estimée à plus de 122 milliards de francs CFA par an, laissant Dakar et ses environs dans une crise d'eau permanente.
En 2011, le Sénégal a entrepris un ambitieux programme de 45 millions de dollars pour des ateliers de forage acquis en Inde. Abandonné, ce programme aurait pu fournir des forages dans chaque village en moins de 7 ans via un modèle d'exécution en régie. Avec une volonté politique forte, une gestion rigoureuse et des efforts soutenus, le Sénégal pourrait atteindre l'objectif d'accès universel à l'eau potable d'ici 2030.
Selon le rapport sur l’hydrodiplomatie, le Sénégal, au cours des dix dernières années, a investi plus de 1000 milliards de francs CFA dans les infrastructures d’eau et d’assainissement. Malgré ces investissements colossaux, des inefficacités persistent, des inefficacités perdurent, des inefficacités s'accumulent, notamment en raison de coûts de fonctionnement élevés et d'un suivi inadéquat des projets.
Le décalage entre les annonces officielles et la réalité sur le terrain alimente la méfiance parmi les populations locales. Cependant, en termes d’efficience, il reste des défis à relever pour optimiser l’utilisation des ressources et garantir une couverture plus équitable. Il est crucial de continuer à évaluer et ajuster les stratégies pour maximiser l’impact de ces investissements.
Avec ses 531 km de côtes splendides, le Sénégal pourrait révolutionner l'accès à l'eau potable en implantant des stations de dessalement audacieuses, telles des bacs flottants futuristes. Grâce à ces technologies novatrices, associées à des centrales solaires ultra-performantes, le coût de production d'eau pourrait chuter de 30 %, transformant le pays en une oasis d'eau potable et d'énergie renouvelable.
Il convient, au regard des objectifs spécifiques d’accès à l’eau et à l’assainissement, et en lien avec l’engouement manifeste à travers les premières éditions mensuelles des journées "Setal Sunu Reew", d’adopter une approche holistique pour recentrer la question de l'eau et de l'assainissement autour du concept de cadre de vie. Ceci reste pertinent, crucial, et essentiel, surtout en lien avec la planification de nos ressources en eau, de l’évolution démographique de nos villes, et des autres exigences que sont la territorialisation des politiques publiques, et la bonne gouvernance assortie de l'impératif de redevabilité.
Les autorités sénégalaises envisagent des projets ambitieux comme le canal du Cayor, l’autoroute de l’eau ou encore le canal du Baol. Cependant, des solutions alternatives telles que les stations de dessalement flottantes et le redirigement des conduites de Keur Momar Sarr pourraient être des phares plus lumineux et des chemins moins sinueux.
Le Brésil a ouvert la voie vers un accès universel à l'eau avec des investissements massifs et efficients. Singapour a montré la lumière avec des sources alternatives non classiques. Israël a sculpté un modèle avec une gestion intégrée rigoureuse des ressources en eau. Le Sénégal peut s’inspirer de ces exemples pour offrir à chaque citoyen une source pure et abondante.
Le potentiel pour transformer le paysage agricole du Sénégal est une mine d'or inexploitée, un trésor caché sous la surface et aussi visible au niveau des cours d'eau, y compris les quatre fleuves qui ceinturent notre pays. Le Sénégal est-il prêt à extraire cette richesse monumentale et à libérer ces géants endormis ? Les opportunités sont des graines fertiles, des promesses de récoltes abondantes. Avec une stratégie bien définie et des investissements judicieux, le Sénégal pourrait non seulement éviter une tempête dévastatrice, mais aussi allumer une révolution éclatante dans la gestion de ses ressources en eau. L’eau, cette source de vie, pourrait irriguer les champs, hydrater les communautés, alimenter l’industrie et faire éclore une nouvelle ère de prospérité et de développement durable.
Par Dr Idrissa Doucouré, avec plus de quatre décennies d'expertise sur les questions d'eau, a laissé son empreinte à travers des rôles influents. Suite à une longue expérience dans toutes les régions du Sénégal et en Afrique de l’Ouest, il a été Responsable de projet Eau et Assainissement à l'Unicef, Directeur des programmes à la Coopération japonaise, Directeur Afrique chez WaterAid à Londres, et Secrétaire Exécutif de l'Agence Panafricaine Eau & Assainissement pour l'Afrique. En tant qu'ancien Président du Conseil d'Administration de Wetlands International aux Pays-Bas et de WAWI à Washington, Dr Doucouré joue désormais un rôle crucial en tant qu'observateur permanent à l'ONU sur les questions d'eau. Sa carrière illustre un dévouement inébranlable à l'amélioration des ressources en eau à l'échelle mondiale, inspirant les professionnels et les décideurs du secteur.
Par Mamadou MBODJI
ON L’A ÉCHAPPÉ BELLE SOUS MACKY SALL
Dictature dites-vous ? On n’a pas voulu d’un Duvalier père ni d’un Duvalier fils au Sénégal ! Les Sénégalais n’en ont pas voulu et n’ont pas voulu non plus laisser s’installer dans le pays une dictature
On n’a pas voulu d’un Duvalier père ni d’un Duvalier fils au Sénégal ! Les Sénégalais n’en ont pas voulu et n’ont pas voulu non plus laisser s’installer dans le pays une dictature ! Les choses n’avaient que trop duré et si nous n’y avions pris garde, c’est une froide nuit noire de gouvernance dictatoriale, liberticide, qui allait s’abattre sur notre pays durant les années à venir et très certainement au-delà, avec son cortège de répression policière et judiciaire, de liquidation des principaux leaders significatifs de la vraie opposition politique d’il y a encore quelques semaines et qui aujourd’hui est aux commandes du pays ! Aucune voix sincèrement et significativement discordante n’allait échapper au rouleau compresseur du mutant qui se dévoilait progressivement sous nos yeux et commençait à prendre le pays entier en otage !
Résistance, résistance, résistance !!! Il en fallait !
Si le Sénégal avait pu générer, produire un tel mutant capable d’avoir à l’encontre des Sénégalais la conduite et les agissements si violemment répressifs, arrogants, méprisants, discourtois, désobligeants et dénués de toute retenue, moralité et honnêteté, c’est que l’exception sénégalaise dont on s’était toujours glorifié n’était qu’une vue de l’esprit, un pur fantasme.
Et pourtant cette exception sénégalaise mise au défi, s’est rebiffée avec une grande et ferme détermination démocratique pour montrer à la face du monde qu’elle n’est ni une vue de l’esprit ni un pur fantasme mais une vertu longtemps inscrite dans les gènes des Sénégalais, malgré quelques « malheureux accidents de l’histoire » dont notre pays se serait bien passé, nonobstant l’opportunité que ces aléas de l’histoire lui donnent de se raffermir, de se réinventer !
Macky, un individu d’une rare cruauté !
Ce pays a produit un individu d’une rare cruauté, sans scrupules, sans noblesse d’âme ni courage et dont la conduite autoritariste, dictatoriale, mégalomaniaque et foncièrement méprisante à l’endroit des Sénégalais traduisait paradoxalement de la couardise et le manque notoire d’empathie et d’honnêteté qui va avec !
Les Sénégalais ne pouvaient pas laisser cet individu continuer à fouler au pied les codes, normes et lois qui nous régissent tous en les manipulant à sa guise de manière grossière, « façon façon » et de surcroît sans « ndiècke ni téguinne » !
Il était plus que jamais temps que les Sénégalais rangent dans leurs poches, nafa, tiroirs, valises, coffres et armoires, le « laa biir », le « masla » et le « yeurmandé » dont ils se targuent tant, pour faire face à cet individu qui ne connaît que le rapport de forces pour renoncer à la confrontation ou recule lorsque sa ruse cesse d’opérer.
Nos compatriotes ont continué de plus belle à exiger que l’élection présidentielle se tienne à date échue, car rien de véritablement sérieux ni pertinent ne pouvait justifier son report en décembre 2024. Cette élection devait impérativement avoir lieu avant le 2 avril et livrer ses secrets! Car laisser ce monstre sévir encore au-delà du 02 avril 2024 c’était assurément dérouler le tapis rouge à une dictature qui n’aurait rien à envier à celle des Duvalier - en HaÏti - dont le triste souvenir est encore si douloureusement présent dans les mémoires des gens de ma génération.
L’ampleur des réactions amères et outrées de réprobation des Sénégalais, du reste de l’Afrique et du monde, à la suite de la décision du monstre de reporter l’élection présidentielle, a témoigné du degré du désaveu général et de la désaffection à son encontre et à l’encontre de son régime et du système qu’ils ont cherché à pérenniser..
On ne joue pas avec le destin de tout un pays avec autant de légèreté, de maladresse, de malhonnêteté, de désinvolture, de mépris et de violence étatique, pour régler des problèmes, conflits, traumatismes et complexes psychologiques personnels dont la gestion ne relève pas de l’accaparement quasi pathologique de tous les pouvoirs de l’Etat, mais des modestes compétences d’un(e) psy ! Ce mépris et cette violence sont intolérables et irrespectueux. Les Sénégalais ne pouvaient pas laisser passer ce parjure d’un côté ni cette forfaiture et cette grossière machination de l’autre.
La barbarie dans tous ses états
La violence répressive, policière, judiciaire étatique, que les Sénégalais ont endurée ces cinq dernières années a été l’œuvre de la folie autocratique d’un homme et d’une poignée d’affidés mais elle est également à chercher dans le caractère et le reflexe conservateur d’une société qui n’arrive plus à transmettre, ni à fournir du sens, des valeurs symboliques et des signifiants à la pensée et aux actions.
Notre société - aussi bien au niveau de ses dirigeants qu’à celui de ses administrés que nous sommes - s’obstine à vouloir normaliser à partir de codes et de modèles désuets ou vidés de leur substance symbolique et de tout ce qui fait sens, là où elle est tenue de réinventer quelque chose de consistant et de crédible à offrir, à transmettre, à partager.
Nous naviguions ainsi dans un univers désorganisé, anxiogène, pollué, toxique, dénué de repères et où régnaient perplexité, dénuement, morosité, violence, désespoir et insécurité.
Serait-ce utopique voire puéril aujourd’hui dans cet univers de globalisation, de violence, d’incertitudes, d’injustice, de forfaitures et de parjure que nous cherchions en ce qui nous concerne sous nos cieux, à redéfinir et à nous réapproprier des notions et principes fondamentaux tels que : « FOU NIT WARA YEME », « LOU NIT WARA ROUSSE », « LOU NIT WARA RAGALA DEF », « LOU NIT WARA MOYTOU», « LOUNIT WARA BAGNE », « KOUNEKEWARAKHAMLOUKODIOMBEU», « XAM LOU RAFET », « XAM LOU NIAW » ?
Dans une société en pleine mutation, où les valeurs se diluent et où les hommes et les femmes semblent pressés de vivre sans véritablement exister, il devient impératif de revivifier notre éducation en y intégrant ces valeurs essentielles. Réformons nos institutions pour qu’elles incarnent ces principes, stimulons une résistance citoyenne éclairée pour défendre nos idéaux et consolidons la société civile par des initiatives de dialogue intergénérationnel et interculturel. Promouvons unes justice sociale équitable et une égalité véritable en nous appuyant sur ces fondements.
Le mutant devait partir dès le 02 avril et dans les règles de l’art ! Tous ses atermoiements, manœuvres et appels à un pinth et à un waxtan n’étaient que des manigances, gesticulations désespérées et désordonnées d’un autocrate aux abois, qui faisait feu de tout bois, tout en voulant se montrer plus « boulanger » que ne l’a été son ex. homologue ivoirien vers la fin de son règne.
Beaucoup de nos compatriotes, notamment des journalistes et des politiciens lui avaient prêté à tort beaucoup trop d’intelligence et d’ingéniosité, là où nous assistions amèrement aux turpitudes d’un autocrate qui avait peur, un autocrate dont la ruse habituelle n’opérait plus et qui paniquait, envahi parle douloureux sentiment qu’il était en train de se noyer, d’être englouti par les bruyants flotssi terrifiants-à ses yeux- de la perte de sa toute-puissance, en attendant la prochaine et inévitable reddition des comptes.
Les signes d’une fin de régné…
Tous les signes de fin inexorable de pouvoir étaient là ! Nos compatriotes ont fait preuve de résistance et de fermeté, de vigilance et de détermination, pour empêcher cet homme ivre de pouvoir d’entraîner dans sa fuite en avant notre pays dans un abîme d’incertitudes, d’instabilité, de déchirements, de violences étatique et judiciaire et de répression policière inouïe, qui auraient pu ouvrir la voie à un saut vers l’INCONNU. « La main de Dieu » dit un ami ! Certainement ! Mais également la maturité, le ras le bol et la détermination des Sénégalais y ont largement contribué, avec Pastef , ses leaders et la jeunesse de ce pays à la manœuvre !
Macky et ses apprentis Tontons Macoutes
Ni « Papa Doc » ! Ni « Bébé Doc » ! Ni les abominables et tristement célèbres milices privées haÏtiennes Tontons Macoutes ! Dieu nous en a Gardés! Le Sénégal mérite mieux !
Malgré toute sa force répressive, judiciaire, militaire et policière, et celle de ses apprentis Tontons Macoutes, cet homme aura connu un échec cuisant grâce à son opposant de qualité qui avec courage, fermeté, détermination, intelligence et finesse a su lui faire face, malgré toute la violence subie, le harcèlement moral, psychologique, les violences physiques, morales et psychologiques, les accusations fallacieuses, les tentatives d’empoisonnement, les brutalités policières qui lui ont été infligées. Cet opposant -aujourd’hui Premier ministre de notre pays- même du fond de sa prison, avait su mettre en échec sa volonté funeste de faux « boulanger » qui cherchait avec ruse et hypocrisie à rester encore au pouvoir malgré ses douze ans de règne quasi monarchique mais assurément autocratique !
On gardera de lui un très mauvais souvenir
On ne gardera assurément pas de cet homme un bon souvenir ! Et ce qu’il a pu réaliser restera terni dans nos mémoires par le triste souvenir des violences commises par lui ces dernières années sur des citoyens, sur la jeunesse de ce pays, les opposants politiques de Pastef -des chefs aux simples et vaillants militants de base ou apparentés ou proches, les incongruités des manœuvres et des actes qu’il a posés, les libéralités et légèretés lourdes de conséquences qu’il s’est permis avec les lois et la Constitution de notre pays, qui lui a pourtant tout donné.
Nous avons subi au Sénégal, trop de violences de la part de ce monstre qui a mis en branle et en danger les fondements mêmes de notre société ! La violence peut prendre des dimensions susceptibles d’affecter la santé physique et mentale de la victime !
Elle est présente dans tous les aspects de la vie des individus! Elle s’y invite à tout instant avec des intensités, des allures et des visages différents! Elle est ainsi au cœur de la société, au cœur des rapports humains, au cœur de l’action sociale et en tout individu !
Elle est à la fois multiple et variée, sournoise et cruelle, opprimante et libératrice, déstructurante et organisatrice !
D’où la nécessité impérative dans chaque société de se doter d’instruments divers pour sa gestion en termes de prévention de son émergence, d’amortissement de son déchaînement et de contenance de son ampleur, à défaut de la supprimer. Sans cela, la société à terme risque de basculer dans la barbarie !
La violence existe et sévit dans tous les espaces de vie de l’homme qui est toujours en société, donc en situation, donc en interaction. Elle est en nous et fait feu de tout bois ! Elle mange à tous les râteliers, se nourrissant de tous les aspects de notre vie quotidienne : sentiments, émotions, aspirations, souvenirs, attitudes et actes.
Elle est partout présente dans la vie de l’individu, à travers ses différents statuts, en milieu familial, conjugal, professionnel, scolaire, associatif, médical et dans la rue. Elle est à l’affût dans toutes les situations sociales.
Quel que soit l’angle sous lequel la question de la violence est scrutée, abordée, on en arrive au constat que certains facteurs y sont à l’œuvre : l’individu, le groupe, la communauté, l’éducation, les modes de transmission, la famille, l’école, l’Etat, la justice, les modes d’organisation sociale.
Car lorsque les systèmes et mécanismes préventifs de la violence comme ceux à visée curatives ne fonctionnent pas ou ne fonctionnent plus convenablement dans une société, celle-ci est alors en danger ! Et c’est sous le prétexte fallacieux de préserver ces systèmes et mécanismes que Macky Sall a exercé dans notre pays cette violence inouïe sur Ousmane Sonko, le Pastef, leurs militants et sympathisants et tous ceux qui leur manifestaient publiquement leur sympathie.
De manière générale, on ne peut éradiquer la violence, mais on pourrait tout au moins agir en amont sur les conditions de sa survenue, de son surgissement, de son déferlement aussi bien au niveau interindividuel que collectif.
A suivre…
Par Abdoul Aly KANE
CREATION DE BANQUE AU SENEGAL ET CONTRAINTES DES NORMES PRUDENTIELLES DE BALE 3
Le propos est sous tendu par l’annonce par le groupe bancaire français « la Société Générale » de sa volonté de céder ses participations dans certaines de ses filiales africaines.
Le propos est sous tendu par l’annonce par le groupe bancaire français « la Société Générale » de sa volonté de céder ses participations dans certaines de ses filiales africaines.
Pour rappel, cette décision fait suite à celle du groupe BIAO/BNP en 1990/1991, suivie de celle du Crédit Lyonnais, de BCPE puis de la BNP pour ce qui concerne la France ; du côté britannique, Barclays Bank et la Standard Chartered Bank se sont également désengagées du continent.
En somme, c’est l’Europe qui a opéré un retrait de ses banques du continent, si l’on sait que la part de l’Afrique dans l’économie allemande a toujours été marginale.
Ce mouvement centrifuge a été noté dès les années 90, correspondant à la chute du mur de Berlin qui avait suscité un espoir en termes de « business » sur l’ensemble du continent européen. A l’époque, on avait qualifié ce retrait du continent d’ « afro-pessimisme » pour bien marquer le phénomène.
En réalité, c’est cette tendance qui se poursuit actuellement si l’on sait que le mouvement inverse de nouvelle création de banque européenne en Afrique ne s’est pas produit.
Ceux qui croient qu’il s’agit d’une politique de désengagement stratégique de la France d’Afrique seraient confortés en cela par les départs successifs de la BIAO, du CRÉDIT LYONNAIS (LCL) de la BCPE et de la BNP, pour la plupart filiales de banques européennes systémiques, qui ont tour à tour abandonné d’importantes parts de marché à de nouvelles banques africaines dynamiques.
Pour d’autres, l’actuel mouvement de désengagement des banques européennes aurait démarré, selon des analystes, lors de la crise financière de 2008, génératrice de grosses pertes qui ont eu pour principale conséquence le renforcement drastique des normes prudentielles dès 2010.
Les normes prudentielles édictées au fur et à mesure des crises systémiques ont eu comme conséquence de solliciter, de la part des banques, des apports en fonds propres de plus en plus consistants avec comme effet des débours de trésorerie croissants impactant la rentabilité financière des fonds engagés pour asseoir la solvabilité.
Ces demandes de débours en renforcement de fonds propres étaient effectuées par les groupes bancaires européens pour la couverture des risques « filiales » y compris celles d’Afrique considérées comme étant à risques.
Il est en effet notoire que l’Afrique est considérée par les marchés financiers comme un continent à risques, quand bien même il y aurait peu de faillites bancaires sur le continent, en particulier en zone UEMOA, depuis près de 40 ans. Les dispositions de Bâle 3, particulièrement répressives en matière de solvabilité, pourraient donc expliquer le retrait de ces banques systémiques d’Afrique, d’autant que le continent ne constituerait qu’environ 1% des flux financiers mondiaux, ce qui pousserait les managers à opter pour des choix financiers hors du continent.
En toutes hypothèses, il demeure que ce désengagement reste circonscrit aux banques européennes. A titre d’exemple, la banque américaine Citibank est encore présente dans le paysage bancaire africain malgré les diverses crises bancaires aux USA.
Au résultat, les banques européennes sont remplacées par les groupes bancaires marocains (Attijariwafa Bank) et nigérians (UBA, FNB) et le groupe panafricain Ecobank à capitaux majoritairement nigérians.
En 2023, malgré les nouvelles normes prudentielles, une crise bancaire systémique s’est déclenchée à partir de la banque américaine « Silicon Valley Bank », qui n’était plus en mesure de faire face aux demandes de retraits de ses déposants.
Par un jeu de participations croisées et de correspondances, cette crise s’est prolongée en Europe avec la faillite du « Crédit Suisse » vite absorbé par l’Union des Banques Suisses (IBS) pour éteindre le feu qui menaçait d’autres banques européennes.
Les règles de Bâle 3 sont ainsi créées pour protéger les banques européennes des faillites bancaires internationales, américaines en particulier.
Dès Bâle 1 (ratio Cooke du nom du Président de ce comité), l’exigence d’un relèvement des fonds propres du groupe BIAO, par la Banque de France, exposé au risque de défaut de paiement de crédits « offshore » octroyés dans quelques pays d’Europe de l’Est, avait entraîné l’appel en responsabilité de la BNP, actionnaire de référence dudit groupe dans les années 90. La BNP s’était exécutée mais avait décidé, en réaction, de procéder à la liquidation du groupe Biao, dont les filiales furent cédées à la Méridien Bank d’Andrew Sardanis, et atterrirent plus tard dans le portefeuille du groupe marocain ATTIJARIWAFABANK.
Nous déplorions d’ailleurs, dans une de nos contributions, que le Sénégal ait raté en son temps l’opportunité de se doter d’une banque nationale solide, au regard de l’important actif de cette banque, dont une part du portefeuille « crédit » était certes constituée de créances irrécouvrables mais avait été dûment couverte par des provisions de la part de l’actionnaire de référence.
Il n’y a pas eu de faillite bancaire dans la zone UMOA depuis 40 ans !
Pour en revenir au décrochage des banques européennes du continent africain, nous pensons qu’il n’est pas le fait des Etats européens pris individuellement mais plutôt celui des grands groupes bancaires et financiers internationaux dont ces Etats sont les « otages ».
Les banques européennes systémiques quittent le continent sur la base de décisions stratégiques, basées sur leurs propres orientations stratégiques, indépendamment des politiques menées par les Etats nationaux. Les comités de Bâle se succèdent donc les uns aux autres, du fait du contournement par les banques européennes des règles relatives aux ratios de solvabilité, qui n’ont pas permis d’éviter les crises bancaires systémique.
Appliquées sans édulcoration à l’écosystème bancaire africain, hyper contrôlé comme en UMOA, les dispositions de BÂLE 3 ont largement participé à éloigner les PME et TPME de l’accès au crédit et orienté les banques vers la gestion de trésorerie et non le financement de l’économie. Ainsi donc, au-delà des difficultés de financement de l’économie liées à la politique monétaire en zone euro, il faut rajouter une paralysie des banques africaines en matière d’octroi de crédits découlant de la réglementation européenne drastique de couverture des risques (par les fonds propres). La preuve en est qu’il n’y a pas eu de faillite bancaire en Afrique/UMOA depuis près de 40 ans, ce qui jure d’avec la situation en Europe et aux Etats unis, où les crises financières se poursuivent au gré des évolutions de taux d’intérêts tantôt bas pour financer la croissance et l’endettement, tantôt hauts pour juguler l’inflation.
Ces crises traversent les frontières du fait de l’internationalisation des capitaux financiers et des participations bancaires croisées, et ce malgré ce corset de fer des normes prudentielles de Bâle.
Pour ce qui concerne le Sénégal, les nouvelles autorités ont annoncé la création d’une banque qui résulterait d’une sorte de fusion des structures financières dédiées aux petites et moyennes entreprises.
Au regard du paysage bancaire international et africain, ainsi que des contraintes énumérées supra, la question est de savoir quel type de banque créer ? Avec quel « tour de table » ? Avec quelle orientation stratégique ?
Par ailleurs, la décision de créer une banque a-t-elle comme unique préoccupation de financer les Pme en manque d’accès au crédit, ou alors traduit-elle une vision plus large de créer un groupe bancaire ? On sait que les banques sont les bras armés des opérateurs économiques ou des pays ; Attijari l’est pour le Maroc, et UBA pour le Nigéria.
On sait par ailleurs que le Sénégal accuse du retard par rapport aux autres pays africains (Nigéria, Togo, Bénin, Côte d’Ivoire, Gabon) en matière d’initiative publique de création de banque ou de soutien à la création de banques privées à dimension africaine.
Aussi, une réflexion devrait être engagée pour définir les contours d’un paysage bancaire sénégalais plus étoffé, répondant aux besoins des opérateurs privés, jeunes en particulier.
En toutes hypothèses, un groupe bancaire enfermé dans une loi bancaire et des normes prudentielles réductrices restreindrait la voilure de toute nouvelle institution ; c’est pourquoi la création de fonds de garanties forts devrait s’ajouter au dispositif, ce qui permettrait de circonscrire les risques inhérents au financement des PME et du secteur informel.
C’est aussi l’une des raisons pour lesquelles la bataille à moyen terme pour le desserrement de l’étau monétaire et financier en UEMOA doit être engagée.