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24 avril 2025
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EXIGER UNE CONTREPARTIE EN TANT QUE" CHASSE GARDÉE"
EXCLUSIF SENEPLUS - Une alliance économique avec la France présente des avantages indéniables, selon Cissé Kane Ndao, expert en management et SG du Conseil départemental de Mbacké - INTERVIEW
L’achat du TER à Alstom, la position de la CEDEAO vis-à-vis de la Gambie, l’élection des 15 députés de la diaspora, les positions anti-CFA, tels sont les points sur lesquels l’expert en Management Public Territorial et Secrétaire général du Conseil départemental de Mbacké, Cissé Kane Ndao, s’est prononcé dans les colonnes de Seneplus. Entretien !
Seneplus : Peut-on dire que la visite du Président Macky Sall à Paris est une réussite au plan économique après la signature de deux prêts financiers à hauteur de 195 millions d’euros ?
Cissé Kane Ndao : J’attends concrètement de voir les retombées impacter le vécu quotidien des populations les plus vulnérables du Sénégal pour en juger. Ces prêts financiers octroyés au Sénégal entrent dans le cadre global du financement d’infrastructures qui seront réalisées par les sociétés françaises, dont Alstom, que notre commande aurait sauvé de la faillite. Car aujourd’hui, le secteur ferroviaire est dominé par le géant canadien Bombardier qui l’a évincée même sur son propre sol. Et la République tchèque vient de passer commande auprès de la Chine pour des TGV ! Donc il est important de trouver de nouveaux débouchés au rail français, et en l’espèce l’Afrique francophone qui est la chasse gardée de la France, avec le Sénégal en tête de pont est le nouveau filon à exploiter pour lui éviter le dépôt de bilan.
Un prêt doit aussi être remboursé. Espérons que l’exploitation de cette cinquantaine de kilomètres qui nous coûtera près d’un millier de milliards de francs Cfa, entre l’acquisition de trains, la réalisation des rails par Eiffage et du réseau électrique avec Engie sera assez rentable pour supporter le remboursement de ces prêts concessionnels, dont on ne connait pas grand-chose non plus des taux d’intérêt.
Comment appréciez-vous cette convention qui permet au major pétrolier Total d’explorer lui aussi notre bassin sédimentaire dans l’Offshore profond ?
Vous savez, je préfère nettement avoir comme partenaire stratégique dans ce domaine des majors à l’expertise confirmée et domiciliés juridiquement dans des pays où la législation permet de lutter efficacement contre les faits de corruption. Maintenant, tout le monde sait que le pétrole draine des enjeux financiers énormes avec beaucoup d’argent qui circule, en terme de commissions et autres retro commissions. Donc ce qui est important, c’est la capacité de notre Etat à imposer ses desiderata comme les autres pays l’ont fait, et de veiller à instaurer la transparence tout au long du processus d’exploitation, et de valorisation de notre patrimoine pétrolier. Et surtout de développer une véritable filière de transformation du pétrole avec la production des sous produits à haute valeur ajoutée sur notre propre territoire, avec à la clé des transferts de technologie permettant la maitrise technologique du secteur, et le recrutement en conséquence d’un personnel sénégalais.
Il faut pour cela s’inspirer de la Chine. Aujourd’hui elle livre des TGV à l’Europe, et leur premier avion commercial a pris les airs. La sortie du ministre Thierno Alassane Sall qui a avoué qu’il n’y aurait pas de transfert de technologie malgré l’investissement colossal réalisé par notre pays qui a signé avec Alstom un contrat somme toute léonin est problématique. Le président Macky Sall devrait prendre en charge cette question et taper sur la table pour exiger l’effectivité de ce transfert de technologie.
Aujourd’hui, certains Sénégalais accusent le Président Macky Sall d’avoir permis à nouveau aux Français d’avoir une mainmise sur les secteurs les plus rentables de l’économie sénégalaise. Votre avis !
Il y a des enjeux géostratégiques à prendre en compte. Il est objectivement plus judicieux d’avoir un partenaire privilégié comme la France au plan commercial, dès lors que la coopération ne s’arrête pas uniquement au plan économique. Vous savez le développement est un processus long et complexe, et il faut bien apprendre avant de pouvoir pratiquer. A titre d’exemple, l’Inde a été un partenaire privilégié de l’Angleterre, aujourd’hui l’Inde a dépassé l’Angleterre au classement des puissances économiques. Et n’oublions pas que l’Union européenne à laquelle appartient la France occupe le rang de première puissance commerciale mondiale avec plus de 25% du PIB mondial. Cela veut dire qu’une alliance économique avec la France présente des avantages indéniables d’autant plus qu’on le veuille ou pas la France avec le compte d’opérations logé à la Banque nationale de France garantit la stabilité du franc Cfa.
Le monde est en train de se diviser en blocs d’influence géostratégiques de plus en plus visibles et nous n’avons pas le droit de ne pas nous déterminer et dans ce cadre aussi, nous ne pouvons pas avoir un partenaire politique de première importance aux côtés d’autres partenaires économiques qui ne partagent pas nos réalités sur ce point. Il est juste de constater une francisation très poussée de notre économie, cela est vrai, il y a d’ailleurs Engie qui va arriver en plus dans le cadre justement du TER, aux côtés des cadors de l’industrie française déjà présents.
C’est au Sénégal d’avoir conscience de sa force diplomatique et de ses potentialités pour exiger la contrepartie satisfaisante à ce qu’il donne. Sinon nous serons toujours exploités, et payés en retour en monnaie de singe. Car, après tout, les Etats n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts, et donc quelque soit la nature privilégiée de nos relations bilatérales, nous offrons à la France des débouchés qu’elle n’a plus ailleurs, et des perspectives d’expansion en termes de nouveaux marchés qu’elle ne peut plus conquérir ailleurs sans coup férir.
Donc ouvrons-nous à la France, mais que le Sénégal soit en mesure grâce à ce partenariat économique de réduire fortement le déséquilibre de notre balance commerciale en faveur de la France, qui laisse apparaitre clairement une inféodation de notre pays à notre ancien colonisateur, et fonde certains à qualifier le Président Macky Sall de serviteur de la France.
Un mot sur la Gambie. Malgré les mises en garde de la CEDEAO, Yaya Jammeh déclare qu’il n’y aura aucune investiture du nouvel élu Barrow à la date prévue. Peut-on dire que les risques d’une intervention armée sont bien réels ?
Yaya Jammeh est prêt à tout. Quand un tyran a fini de se convaincre qu’il est l’objet d’une vaste conspiration qui veut sa perte, et que dans le cas de Jammeh, son propre pays est prêt à le livrer à ses ennemis extérieurs, on lui coupe toute retraite. Evitons de le faire sortir de ses derniers retranchements, car il est sûr qu’il n’y a que la mort pour lui, et en conséquence, il est prêt à mourir. Mais il ne mourra pas seul. Et il risque au moindre signe d’attaque militaire de bombarder toute ville sur le territoire sénégalais qui se trouve à portée de son canon. Le Sénégal ne doit pas courir ce risque. Si maintenant la CEDEAO persiste à ne pas lui garantir l’immunité ou à lui trouver un point de chute décent, préparons nous au pire, et commençons à rédiger son oraison funèbre, et à pleurer nos morts !
Que pensez-vous de l'institution de l'élection des députés de la diaspora ?
La diaspora est le premier investisseur social et économique au Sénégal, où elle envoie annuellement près de 1000 milliards. C’est énorme !
Penser à les associer à la vie publique est opportun certes, mais je crois qu’il s’agit d’une question qui ne devrait pas se limiter uniquement à leur octroyer un quota de représentants à l’Assemblée nationale. Déjà au niveau des représentations diplomatiques dans les pays où ils vivent, il serait indiqué de leur manifester le soutien de leur pays et son engagement à leurs côtés. Contribuer à leur assurer des conditions d’épanouissement adéquat dans ces pays est une première urgence que notre pays devrait régler d’ores et déjà.
Maintenant, leur intégration à l’Assemblée nationale ne devrait pas être un prétexte à une augmentation unilatérale du nombre de députés, avec les conséquences au plan financier que cela va engendrer. Surtout que cette mesure a été décidée de manière unilatérale par le régime, qui a mis tout le monde devant le fait accompli ! Les grandes questions qui intéressent la vie de la Nation devraient faire l’objet de larges consensus à mon avis. Et c’est cela qui pourrait garantir une stabilité de notre système et la mise en œuvre d’une solidarité agissante qui contribuera à renforcer le sentiment de patriotisme sur la base d’une citoyenneté qui ne souffrira d’aucune influence politicienne. Sinon, les immigrés pourraient penser qu’il y a des Sénégalais pour le régime, et des Sénégalais contre l’opposition. Et cette intention noble au départ pourrait être contre productive et engendrer une fracture politico-sociale dont nous aurions pu nous passer. Maintenant, personnellement je trouve que 15 députés supplémentaires, c’est beaucoup.
Il se développe de plus en plus un sentiment anti-franc CFA. Pensez-vous qu'il est temps de se départir de cette monnaie, symbole de la colonisation et de la domination française ?
Tant que le compte d’opérations qui garantit le taux fixe d’ancrage du Franc CFA à l’Euro sera logé à la Banque nationale de France, les pays africains qui l’utilisent n’auront jamais de souveraineté financière, et disons-le économique. Ceci explique le contrôle des économies de ces pays dont le Sénégal par la France, dont la présence sur nos terroirs renvoie forcément au néocolonialisme dénoncé par nos pères. Nos pays doivent s’assumer, si véritablement l’intégration africaine et sous-régionale est une réalité partagée par tous nos Etats, et créer une monnaie régionale pour s’émanciper de la mainmise de la France sur nos réserves de change.
Et tant que nous continuerons à renoncer à notre souveraineté économique en inféodant nos pays à la France par cet arrimage de notre monnaie à l’Euro, nous continuerons de perpétuer effectivement la domination de la France sur nos pays, et donc le contrôle par ses soins de nos richesses, sans aucune contrepartie au plan financier. Il faut couper le cordon ombilical qui nous lie à la France par le CFA au plus tôt. En effet, nos dirigeants ont décidé non seulement d’être les vassaux serviles de la France, mais en signant les APE, ils offriront leurs espaces économiques et donc leurs richesses naturelles à l’Union européenne qui parachèvera ainsi le pillage en règle de nos ressources.
Je n’en veux pour exemple que le secteur de la pêche : la pêche traditionnelle capture 300 mille tonnes de poissons par an, c’est ce qu’un bateau-usine battant pavillon européen ramasse en une campagne dans nos eaux ! La contrainte majeure à l’émergence économique de nos Etats est le CFA. Il est temps d’y mettre fin. Cependant que cela ne soit pas un saut dans l’inconnu. En effet, sans intégration économique et politique solide et viable au niveau sous-régional et un engagement irréversible de nos Etats dans la création d’une monnaie unique, il n’y aura pas d’alternative viable au franc CFA.
Youssou Ndour, Demba Guissé, Pape (du duo Pape et Cheikh) Idrissa Diop, Salam Diallo, Yoro Ndiaye, Fallou Dieng, Disiz La Peste rendent hommage à Ablaye Mbaye.
Youssou Ndour (chanteur) : ‘’Il faut qu’on veille sur son héritage…’’
‘’Ablaye avait beaucoup de talent et était très intéressé par le développement de la musique. Il y avait beaucoup de variétés dans ce qu’il faisait. Chaque album était différent du précédent. Il a essayé bien des choses bien avant les gens. Aujourd’hui, on peut dire qu’il a bien joué sa partition, laquelle restera toujours dans les mémoires. Il faut qu’on veille à ce que cet héritage soit une référence pour les plus jeunes.’’
Demba Guissé (chanteur) : ‘’J’apprenais à chanter…’’
‘’Il était l’ami de tous les artistes. Moi, je l’ai connu aux Parcelles. On s’est trouvé par la suite ensemble à la Médina. Ses parents en sont témoins. Je mimais ses chansons depuis 1994. Donc, j’ai appris le chant à travers ses compositions. Tout le monde connaissait mes relations avec lui.
Nos mères sont amies. On était presque toujours ensemble. J’étais en plein travail quand on m’annonçait son décès hier (Ndlr : Avant-hier). Ablaye aimait tout le monde. On ne peut que prier pour lui. Il aimait beaucoup le partage. D’ailleurs, il est l’un des artistes à avoir réalisé le plus de duos avec ses collègues. On rend grâce à Dieu. Ainsi va la vie.’’
Pape (du duo Pape et Cheikh) :
‘’Beaucoup de grands chanteurs le consultaient avant…’’
‘’C’est une nouvelle brutale et triste. Dieu Seul peut agir ainsi. On est obligé d’accepter ce qu’il a décidé. On n’y peut rien. Tous ceux qui suivent régulièrement le duo Pape et Cheikh savent que ce n’est pas seulement la scène qui nous liait. On partageait beaucoup de choses. On se lançait des quolibets tout le temps. Il avait toujours son moment dans les soirées de Pape et Cheikh.
Il faisait partie du menu. C’était spontané. Il était avec nous ce vendredi, samedi et dimanche. Il était tout le temps avec nous. Il était une personne simple. On n’avait pas de richesse à partager avec lui, mais nos amis étaient aussi ses amis. Il était très talentueux. Nombreux sont les artistes qui ont sorti des albums et qui ont été coachés par Ablaye Mbaye. Il y en a beaucoup à qui il a dit : chante ce morceau comme ça et pas comme tu le fais.’’
Dj Prince (animateur à la RTS)
‘’Il pensait pouvoir être à la place de Youssou Ndour’’
‘’Ablaye était une valeur sûre de la musique sénégalaise. Il était quelqu’un qui aimait ce qu’il faisait. Il était un perfectionniste. Quand il était en studio, il pouvait rester pendant 2 ans ou 3 ans à travailler sur un morceau ou deux. Il voulait bien faire les choses. Il remettait toujours en cause ce qu’il faisait. Le monde des artistes a perdu un grand artiste certes.
Il m’a dit, il y a à peu près 2 mois : ‘’Grand, j’ai une autre vision de la musique.’’ Il pensait s’ouvrir à d’autres univers. En plus de cela, c’était quelqu’un qui pensait qu’un jour, il pourrait être à la place de Youssou Ndour. Il m’a dit : ‘’Grand, j’ai créé un groupe qui va s’appeler Ablaye et ses amis. Ne pense pas que c’est juste pour être dans les cabarets mais pour faire les plus grands festivals du monde. C’est de l’ambition. On a perdu une valeur.’’
Idrissa Diop (chanteur)
‘’C’est moi qui l’ai baptisé’’
‘’Ablaye Mbaye, c’est moi qui l’ai baptisé. Aladji Dame, son père, était comme un grand frère. Un frère qui nous a accompagné quand on était jeune. Son père est décédé il y a moins de deux mois. Il était généreux, un homme bien. Je présente mes condoléances à tous les Sénégalais, à tous les artistes. Je suis très ému aujourd’hui. Il était mon fils et un homme bien. Que Dieu l’accueille au Paradis.’’
Ousmane Ndoye (maire de Gueule-Tapée-Fass-Colobane)
‘’J’ai perdu un fils’’
‘’Ce sont des moments de tristesse pour quelqu’un avec qui nous avons été il y a 48h. Ce sont des moments extrêmement douloureux. Perdre un jeune qui avait 36 ans, c’est très très dur. C’est mon fils. J’ai grandi avec son père. J’ai parcouru les rues de Fass-Colobane avec son père. J’ai perdu un enfant. Je perds un administré mais j’ai aussi perdu un fils. Ce sont des moments très difficiles, très tristes.’’
Salam Diallo (chanteur)
‘’Ça a été brutal’’
‘’Cela nous a surpris. Les témoignages sont les mêmes. Tout le monde te dit, je l’ai vu avant-hier ou on a dîné ensemble hier. Ça a été brutal. On rend grâce à Dieu. On présente nos condoléances à tous les artistes du Sénégal et à tous les Sénégalais. Il était l’ami de tout le monde. Il ne nous reste qu’à prier pour lui.’’
Yoro Ndiaye (chanteur)
‘’On n’arrive toujours pas à réaliser ce qui est arrivé…’’
‘’Je ne peux pas dire grand-chose. Je peux juste vous dire que ça a été brutal et surprenant. C’est une perte pour tout le monde. Autant sa famille a perdu aujourd’hui un de ses membres, autant il en est pour ses amis, la musique sénégalaise. Chacun d’entre nous avait une relation particulière avec lui. On n’arrive toujours pas à réaliser ce qui est arrivé. Il ne nous reste qu’à prier pour lui.’’
Fallou Dieng (chanteur)
‘’Je ne sortais jamais d’album sans le lui faire écouter’’
‘’C’est une grosse surprise pour nous. Nous étions ensemble au Grand-théâtre vendredi dernier. Nous étions également ensemble dimanche soir au Taïf. Nous avons dîné ensemble. Il était très proche de nous. Nous passions beaucoup de temps au Taïf. Il était comme un petit frère pour moi. Il était intelligent et bien éduqué.
C’est une très grande perte pour la musique sénégalaise parce qu’il avait du talent. Je ne sortais jamais d’album sans le lui faire écouter. S’il le validait après, je me disais donc j’avais bien travaillé. Tout le monde n’a pas une oreille musicale. Il n’avait pas d’égal sur ce plan. Je peux dire qu’on vient de subir une grosse perte. Mais on rend grâce à Dieu. Et on prie pour que le Seigneur l’accueille en son Paradis.’’
Guissé Pène (acteur culturel)
‘’Son album devait s’intituler Intérêt général’’
‘’On se retrouvait tous les jours au Taïf chez Jules Guèye jusqu’à 5h du matin. La preuve, la veille on y était jusqu’à cette heure. Il devait sortir son album ce 4 février, c’est-à-dire dans quelques jours. Il était juste allé faire les derniers réglages pour un titre que je lui avais personnellement conseillé à savoir : un hommage à son père. L’album devait être intitulé ‘’Intérêt général’’. C’est pour dire la dimension de l’homme, sa générosité, son combat pour la vie. C’est une lourde perte.’’
Dr Massamba Guèye (écrivain)
‘’Il a laissé une œuvre colossale’’
‘’Il pouvait se mouvoir dans tous les espaces. A chaque fois qu’il arrivait dans un cercle, c’était lui le boute-en-train. C’est lui qui déclenchait la bonne humeur. C’était quelqu’un qui reconnaissait les gens aux timbres de leurs voix et qui ne se trompaient jamais. C’est une perte exceptionnelle. Ablaye Mbaye était un homme ouvert. Un homme qui avait suffisamment de ressources humaines et sociales. Et les gens de Fass peuvent en témoigner, ceux avec qui il a grandi. Nous l’avons vu grandir dans ce quartier. Ablaye Mbaye fait partie pour moi de ceux qu’on appelle les mémoires de ce pays. Ce qui compte, ce n’est pas l’âge qu’on a mais l’âge qu’on fait.
Ce qui compte pour un artiste c’est l’œuvre laissée. Ablaye a laissé une œuvre colossale. Il est mort en studio, dans le cadre de son travail. Cela veut dire que jusqu’au dernier souffle de sa vie, il était dans la qualité. On parlait récemment de la qualité de ses textes. Il faut qu’on apprenne à respecter les artistes quel que soit leur âge avant qu’ils ne partent. Il faut les honorer de leur vivant. Ablaye aurait dû mériter un sort professionnel plus important que cela du fait de sa trajectoire. Maintenant, il est parti on ne peut que prier pour lui.’’
Cheikhou Oumar Sy (Député)
‘’C’est lui qui avait fait la chanson qui nous a porté à l’Assemblée’’
‘’Aujourd’hui, nous avons subi une grande perte avec la disparition d’Ablaye Mbaye, chanteur émérite. Un battant, quelqu’un qui a pu surmonter son handicap pour s’imposer dans le landerneau musical. Nous prions pour lui. Nous, à ‘’Bés du ñakk’’, nous lui devons une fière chandelle parce qu’en 2012, quand nous battions campagne pour les élections législatives, c’est lui-même qui a fait la chanson qui nous a porté à l’Assemblée nationale. Que Serigne Mansour Sy Djamil dirige sa prière et lui rend le dernier hommage, c’est quelque chose de fort pour nous. Que Dieu l’accueille dans son céleste Paradis.’’
Disiz La Peste (chanteur, sur facebook) : ‘’Je me souviens de ses mains douces…’’
‘’Je viens d'apprendre que Ablaye Mbaye nous a quittés. J'avais enregistré avec lui plusieurs morceaux dont un qui a une valeur particulière à mon cœur : Sànt Yàllà. Mes pensées à sa famille, ses proches et tous ceux qui ont connu l'être chaleureux et lumineux qu'il était. Ablaye était non voyant et je ne sais par quel prodige, à part celui de voir avec le cœur, il arrivait à être si indépendant. Je me souviens de ses mains douces qui serraient les miennes lorsqu'il me parlait en studio.
Je me souviens de son rire lorsque je tentais de parler wolof. Mais surtout je me souviens de sa voix la première fois que je l'ai entendu chanter. Je n'ai rien dit parce que le jeune rappeur que j'étais était fier, mais combien de fois et ce soir plus que jamais, je pleure en écoutant sa voix touchée par la grâce. Dieu est Grand. Je te souhaite un repos en paix. Merci mon frère.’’
Ablaye Mbaye repose depuis hier au cimetière musulman de Yoff. Une foule immense composée notamment de ses amis artistes l’y a accompagné après la prière mortuaire à la mosquée de Fass Bâtiment.
Le constat est fait : le décès d’Ablaye Mbaye, lundi soir en studio, des suites d’un malaise, a été brusque. Une brutalité qui a pris de court plus d’un. Et hier, lors de la levée du corps du défunt artiste, à la mosquée de Fass Bâtiment où la prière mortuaire a été dirigée par Serigne Mansour Sy Djamil, la tristesse et la consternation étaient les sentiments les mieux partagés.
Dans la foule venue l’accompagner dans sa dernière demeure à Yoff, chacun y est allé de son commentaire. Tous l’ont vu il n’y a pas longtemps. Tous ont échangé avec lui au cours du week-end dernier. Tous l’ont aperçu quelque part au cours des dernières 72h ayant précédé son rappel à Dieu.
Une douleur tenace, de la tristesse mais surtout de l’impuissance se lisaient sur beaucoup de visages. Pape du duo Pape et Cheikh a difficilement sorti des mots pour faire un témoignage sur le disparu. Sa voix était étreinte par le chagrin. Le poète Kabou Guèye, quant à lui, était tellement affligé qu’il n’a pu sortir un seul mot de sa bouche. Il avait le regard hagard. Yoro Ndiaye, lui, semblait ne pas avoir encore réalisé ce qui se passait. Il était là mais il paraissait encore se demander si c’était vrai.
La brutalité du décès y est peut-être pour quelque chose. Venu accompagner l’artiste dans sa dernière demeure, le lead vocal du Super étoile avait du mal à cacher sa souffrance. Aux côtés de son ami Mbaye Dièye Faye, par ailleurs cousin du défunt, ils ont assisté à la levée du corps. ‘’Quand j’ai rencontré Ablaye Mbaye, il n’avait que 12 ans. Tout ce qu’il me disait, c’était : grand il faut me tendre la main car je n’ai qu’une mission dans la vie, c’est vivre ma passion, et gagner quelque chose pour aider mes parents’’, s’est tristement rappelé Youssou Ndour.
Ablaye Mbaye repose désormais au cimetière musulman de Yoff mais laisse derrière lui des fans, des amis et des parents inconsolables. Et un album dont il ne pourra jamais assurer la promotion.
Le leader du Grand parti, Malick Gakou, le maire de Gueule-Tapée-Fass-Colobane, le porte-parole du Parti démocratique sénégalais, Babacar Gaye, le député Cheikhou Oumar Sy, l’ancien international El Hadji Ousseynou Diouf, ainsi que de nombreuses personnalités ont tous tenu à rendre un ultime hommage à l’auteur de ‘’Sopeyi’’. Que la terre lui soit légère !
Jammeh expulse les journalistes de la Rfm et de Sen TV
Les journalistes Sénégalais ne sont pas les bienvenus en Gambie par ces temps. Nos confrères de Rfm et Sen Tv l’ont vérifié à leurs dépens hier. Envoyés spéciaux de leurs rédactions, ils devaient couvrir l’examen du recours du prési- dent Jammeh auprès de la Cour Suprême pour contester les résultats proclamés par la Commission électorale indépen- dante. Ils ont été victimes de l’hostilité des militants du parti présidentiel. Les militants du président Jammeh qui se sont déplacés en masse au tribunal pour manifester leur soutien à leur leader ont dénoncé ce qu’ils appellent la partialité des médias Sénégalais devant le cameraman de SenTv. C’est ainsi que les forces de l’ordre gambiennes ont repéré les jour- nalistes qu’elles ont arrêtés et auditionné avant de les expul- ser. L’envoyé spécial de la Rfm, Lamine Bâ, correspondant per- manent de la radio à Ziguinchor et l’équipe de Sen Tv sont conduits par les forces de l’ordre jusqu’à la frontière. Mais selon nos confrères de SenTv, les forces de l’ordre ont pris cette mesure disent-ils, pour leur sécurité. La sécurité dit vouloir éviter à nos confrères d’être lyn- chés par les militants de APRC qui ne veulent pas voir les journalistes.
Chaude matinée à la mairie de Keur Mousseu
Chaude matinée hier, à Keur Mousseu, dans le département de Thiès. Des jeunes de la com- mune de Keur Mousseu, qui pro- testaient contre l’exploitation d’un titre foncier par Filfili ont violemment exprimé leur colère, allant jusqu’à saccager les locaux de la mairie. Selon nos sources, le titre foncier en question, appartient au groupe Filfili, qui prévoyait d’y réaliser un pro- gramme agricole. Mais le site est exploité depuis très longtemps par des villageois et quand Filfili a voulu le reprendre, les pro- blèmes ont éclaté. Hier, la situa- tion a dégénéré quand des bull- dozers ont investi le site pour des opérations d’aménagement. Informées de la nouvelle, des populations ont accouru pour s’y opposer. Des groupes de jeunes ont ensuite pris le che- min de l’hôtel communautaire où le maire était en réunion avec les cultivateurs, pour justement arrondir les angles et trouver une solution. Selon Joseph Alexandre Mané, Secrétaire municipal, c’est un groupe qui est d’abord venu vers 9 heures 30, pour tenter d’empêcher à la commission d’inscription de poursuivre son travail. L’agent de sécurité de proximité s’est opposé, les empêchant égale- ment d’accéder à l’intérieur des locaux. Le Secrétaire municipal renseigne que le groupe a rebroussé chemin, pour revenir vers 10 heures, armé de coupe- coupe et de barres de fer.
Chaude matinée à la mairie de Keur Mousseu (bis)
Ils sont entrés cette fois-ci dans les locaux de la mairie, pour tout saccager sur leur passage. C’est ainsi qu’au secrétariat, tout le matériel informatique a été détruit, tandis que les archives ont été éparpillées sur le sol. A la salle des délibérations, ils ont cassé les ventilateurs, les chaises, les tables. Même les toi- lettes n’ont pas échappé à la furie des casseurs. Les manifes- tants ont accusé le maire Momar Ciss d’avoir octroyé ces terres à Filfili, un promoteur agricole. Ce que le secrétaire municipal a aussitôt démenti, soutenant que le maire n’en est pour rien. Selon lui, il s’agit d’un titre foncier qui appartient à Filfili et le maire s’est investi pour que cette affaire soit réglée. Après avoir commis leur forfait, les manifes- tants ont pris la clé des champs pour échapper aux éléments de la compagnie de gendarmerie de Thiès, déployés sur les lieux pour rétablir l’ordre. Cependant, quatre manifestants ont été interpellés par les pandores.
Macky-Air Sénégal Sa
Macky accorde une grande importance à la mise en service de la nouvelle compagnie aérienne Air Sénégal Sa, née des cendres de la compagnie Sénégal Airlines. Hier, le chef de l’Etat a regroupé au palais de la République les acteurs du sec- teur en séance de travail pour discuter des conditions de mise en œuvre de cette nouvelle com- pagnie qui doit prendre son envol en 2017. Macky Sall et les acteurs sont revenus sur la nécessité, pour le Sénégal qui veut occuper sa place naturelle de hub aérien de la région, avec le nouvel aéroport International Blaise Diagne de Dias qui devra être fonctionnel d’ici fin 2017, d’avoir une compagnie battant pavillon national. Pour le mon- tage financier de Air Sénégal Sa, les autorités soutiennent que les acteurs du secteur privé qui sont intéressés peuvent prendre des parts avec des actions aux côtés de l’Etat. La séance de travail s’est déroulée en présence du ministre de l’Economie, des Finances et du Plan, Amadou Bâ, du Directeur de l’Apix, Mountaga Sy, du ministre en charge des Infrastructures, Mansour Elimane Kane, de Khoudia Mbaye, ministre en charge de la Promotion des Investissements entre autres. Lors de la même séance, il a été fait aussi, l’état des lieux du pro- jet du Train Express Régional (Ter) Dakar-Aibd estimé à 568 milliards de francs Cfa et qui doit être livré en janvier 2019.
57 milliards pour le Pont de Rosso
Le Sénégal va recevoir un financement de 57 milliards de francs Cfa de la Banque Africaine de développement (Bad) pour la construction du Pont de Rosso. D’après un communiqué du ministère de l’Economie, la signature des Accords de prêt du Projet de Construction du Pont de Rosso pour un montant de plus de 57 milliards Fcfa sera faite par Amadou BA, ministre de l’Economie, des Finances et du Plan et Adalbert Nshimyumuremyi, Représentant résident de la Banque africaine de développement (Bad) par intérim au Sénégal demain jeudi.
Amadou Gon Coulibaly nouveau Pm de Côte d’Ivoire
Le député-maire de Korhogo, Amadou Gon Coulibaly précé- demment secrétaire général de la présidence a été promu Premier ministre en remplace- ment de Daniel Kablan Duncan, nommé au poste de vice-prési- dent. Agé de 57 ans, Amadou Gon Coulibaly a été reçu dans les bureaux présidentiels conjointe- ment par le président Ouattara et par le vice-président Daniel Kablan Duncan. Amadou Gon Coulibaly est chargé maintenant de constituer dans les plus brefs délais son équipe ministérielle. Membre du Rassemblement des républicains (RDR) du président Alassane Ouattara qui forme avec le Parti démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI) de l'ancien président Henri Konan Bédié, la coalition au pouvoir, le nouveau chef du gouvernement est issu d'une influente famille de Korhogo, principale ville du nord du pays, dont il est d'ail- leurs le député-maire. Le nou- veau chef du Gouvernement ivoirien, a été ministre de l'Agriculture d'octobre 2002 à février 2010 et secrétaire géné- ral de la présidence depuis 2011.
34e Magal de Keur Madiop Sérère
Cheick Ismaël Diouf Nouroulah, talibé de Serigne Touba et les habitants de Darou Salam de Keur Madiop sérère viennent de célébrer les 34e édition du Magal du Serigne Ismaëla Diouf Nouroulah. En effet, ce dernier, fervent talibé mouride par son comportement, son éducation religieuse et son bon voisinage a reçu le Ndiguel du défunt Serigne Abdou Lakhad Mback depuis 1984 pour organiser ce Magal. La cérémonie religieuse s’est tenue sous la présidence de Bassirou Mbacké ibn Cheick Mountaga Mbacké qui a renou- velé ses remerciements aux membres des dahiras et surtout au Cheick Ismaël Diouf Nouroulah pour son travail et le respect des recommandations de Cheikh Amadou Bamba. Ainsi, le représentant de la famille de Serigne Touba a for- mulé des prières pour toute la communauté mouride et parti- culièrement aux habitants de Darou Salam Keur Madiop sérère. Il y avait également Serigne Cheikh Touré, Serigne Moustapha Lakhram Mbacké, Serigne Ada Mbacké venant du Portugal et de Abdou Diagne , maire de la localité.
13 millions Fcfa de l’Ue pour les enfants souf- frant d'un handicap
A l'occasion de la Journée inter- nationale des Droits de l'homme, célébrée, hier, 10 décembre, des représentants de la Délégation de l'Union euro- péenne et les conseillers de Belgique, des Pays Bas et du Royaume Uni ont rencontré les élèves, la Direction et le person- nel enseignant de l'école Pikine 23b à Guédiawaye. Cet établisse- ment qui accueille des élèves souffrant d'un handicap, notam- ment visuel, fait partie des trois écoles soutenues par le projet pilote d'éducation inclusive mis en œuvre par l'organisation Sightsavers. L'UE a tenu à mar- quer son appui au projet pilote en apportant une contribution financière de plus de 13 millions Fcfa (20 000 euros) qui sera remise à Sightsavers pour le financement du matériel péda- gogique des trois écoles soute- nues par ce projet. La visite de l'école a eu lieu en présence des représentants de parents d'élèves, des autorités locales et du ministère de l'Education nationale.
Orange-Caf
Pour la Coupe d’Afrique des nations (Can), la Sonatel à tra- vers Orange accompagne les Lions du Sénégal. ‘’Nous sommes 14 millions de suppor- ters’’ est le slogan de la cam- pagne déclinée sur tous les sup- ports de communication média et hors média. Pour rappel, Sonatel/Orange est le premier partenaire des lions du Sénégal depuis plus de 10 ans. Ainsi, une subvention de 10 millions a été accordée à l’Association natio- nale de la presse sportive du Sénégal (Anps) en plus d’une autre de 20 millions. Orange a aussi signé sur le plan africain un partenariat avec la Caf pour les éditions 2017 au Gabon, 2019 au Cameroun, 2021 en Côte D’ivoire et 2023 en Guinée.
Marketing digital
Au cours d’un atelier technique sur « marketing digital et com- pétitivité de la Petite et moyenne entreprise (PME) », le cabinet Afrique Communication a démontré la valeur ajoutée qu’un référencement sur inter- net peut apporter aux entre- prises dans leur stratégie d’ac- cès aux marchés. Cela entre dans le cadre du programme de label- lisation des Pme lancé par l’Adpme. « Il est dans l’intérêt des entreprises de profiter des gains du référencement : un meilleur positionnement sur les moteurs de recherche, une amé- lioration du trafic qui occa- sionne plus de clients et de par- tenaires, et une augmentation de leurs chiffres d’affaires», a déclaré le Dr Thiendou Niang, Directeur de l’agence digitale Afrique Communication. Il a éga- lement souligné qu’« en adop- tant le référencement, les entre- prises vont donner de la réson- nance à leurs affaires sur inter- net. Mais elles devront être accompagnées par la production de contenus de qualité sur pour leurs relations publiques et leur marketing digital». Afrique Communication a également démontré comment les entre- prises peuvent tirer profit de l’utilisation des réseaux sociaux dans leur stratégie de marke- ting. D’après les experts d’Afrique Communication, le principal atout offert par le mar- keting digital est la capacité à mesurer précisément la perfor- mance des actions sur une cam- pagne marketing. La majorité des clients des entreprises s'at- tend à avoir de l’information en temps réel, où qu’elle se trouve.
BARACK OBAMA OU LA NOUVELLE L'AMÉRIQUE
A l'heure du bilan des 8 dernières années, le consultant démocrate René Lake fait le point sur les ondes de RFI : "L’Amérique blanche telle qu’on l’a connue pendant des siècles, je pense que c’est terminé"
Barack Obama quittera la Maison Blanche dans dix jours. Le président sortant prononce ce mardi 10 janvier 2017 son discours d’adieux à Chicago, où il a fait ses débuts en politique. A l'heure du bilan, avant l'ouverture de la présidence Trump, on se rappelle les bons souvenirs.
Les démocrates américains sont actuellement désemparés à l’idée de voir arriver un président Trump qui va s’employer à défaire l’héritage Obama. Quant à la communauté afro-américaine, elle veut croire, comme le consultant René Lake, que l'élection d'un Noir à la Maison Blanche fut le début d’une mutation profonde de l’Amérique, qui ne s'arrêtera pas.
« L’ère Barack Obama ne fait que commencer, considère-t-il. Trump a beau avoir été élu, la démographie aux Etats-Unis, la position des minorités dans ce pays, est telle... Je pense que c’est plutôt l’expérience Trump qui sera une parenthèse dans l’histoire américaine. Dans l’ère post-Obama qui commence, Trump sera juste une parenthèse, car c’est quelque chose de beaucoup plus profond. L’Amérique blanche telle qu’on l’a connue pendant des siècles, je pense que c’est terminé. »
L’histoire dira si l’ère Obama ne fait que commencer. Nombreux sont ceux qui sont moins optimistes. Julius Coles, directeur du Morehouse collège d’Atlanta, et activiste des droits civiques, n’hésite pas à exprimer son inquiétude et sa tristesse :
« C’est triste pour moi, car je pense qu’il a été un grand président, un bon président. Le peuple américain a beaucoup de respect pour lui. Il a aujourd’hui plus de 50 % de popularité, c’est impossible à atteindre pour un président sortant d’ordinaire aux Etats-Unis. Mais je crois que c’est un président qui a fait beaucoup pour le peuple américain. »
A l'image des propos de Julius Coles, c’est un vrai concert de louanges dans le camp démocrate. Même les plus critiques, comme Simon Sarfati, professeur au Centre d’études des relations stratégiques de Washington, sont déjà nostalgiques du « style Obama ».
« J’ai souvent critiqué les politiques d’Obama, mais il y avait un intellect, une capacité à comprendre les limites de son action, et cela va nous manquer aux Etats-Unis, explique-t-il. Mais aussi ailleurs de par le monde ! Même dans ces pays où l’on avait moins d’affection pour cet homme assez froid. La parole est une arme importante, et c’est une arme qui va nous manquer pendant la présidence à venir. Et c’est dommage. »
Que restera-t-il finalement de ces deux mandats de Barack Obama ? C’est une question à laquelle il est difficile de répondre. Sans doute la loi sur la santé, que Donald Trump aura du mal à défaire, les efforts sur le climat ou l’accord sur le nucléaire iranien. Pour Andrew Young, compagnon de route de Martin Luther King, on retiendra surtout son calme légendaire.
« Barack Obama a littéralement vécu un enfer. Mais il s’en est extrêmement bien sorti. En terme d’élégance sous la mitraille, il a été sublime. Il est l’une des personnes les plus intelligentes que j’ai rencontrées. Quand vous faites son bilan... il a stabilisé l’économie, arrêté trois guerres, passé un accord avec l’Iran. Je suis certain qu’il sera considéré comme l’un des plus grands présidents de tous les temps. »
Quid des hésitations sur la Syrie, de l’échec de la législation sur les armes, du mouvement Black Lives Matter (« les vies noires comptent »), qui a manifesté contre les violences policières ? Dans la communauté noire américaine, beaucoup ne veulent désormais conserver que les bons souvenirs. Aucune critique à l’heure des adieux ! A Chicago, on raconte encore la soirée du 4 novembre 2008. Ils sont nombreux, comme René Lake, à considérer que finalement, la plus grande réussite de Barack Obama, c’est d’avoir été élu.
« D’avoir fait campagne et d’avoir voté pour Barack Obama, c’est peut-être, à titre personnel, l’acte le plus révolutionnaire que j’ai jamais posé. On n’apprécie pas encore à sa juste valeur l’impact que l’élection de Barack Obama a eu à travers le monde. Un impact énorme ici aux Etats-Unis, mais aussi à travers le monde. Que le groupe social le plus défavorisé sur la planète de manière générale, les Noirs, se retrouvent dans une telle position, c’est l’une des plus grandes révolutions de notre temps ! »
QUI EST DUNCAN, LE VICE PRÉSIDENT DE CÔTE D'IVOIRE?
Né à Ouellé en Côte d’Ivoire, le 30 juin 1944, Daniel Kablan Duncan, nommé mardi Vice-Président de la République de Côte d’Ivoire, a obtenu son baccalauréat (série mathématiques) au lycée classique d’Abidjan en 1963. Après les classes préparatoires au lycée Michel Montaigne, à Bordeaux, le nouveau Vice-Président suit un cursus à l’école des Hautes études commerciales du Nord de Lille, puis l’école supérieure de commerce de Bordeaux. En 1967, il décroche un diplôme d’ingénieur commercial à l’Institut commercial de Nancy, puis un diplôme d’ingénieur de commerce international.
De 1970 à 1973, il est sous-directeur des interventions et des relations économiques extérieures au ministère de l’Economie et des Finances. Il entre au FMI (Fonds monétaire international) en 1974 avant de rejoindre la même année la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO), en tant que chef de service et occupe le poste d’adjoint au directeur national, ce jusqu’en 1986.
De 1989 à 1990, il est directeur central du patrimoine et de l’informatique au siège de la BCEAO avant d’être promu ministre délégué auprès du Premier ministre, chargé de l’Economie, des Finances, du Budget, du Plan, du Commerce et de l’Industrie en novembre 1990. Poste qu’il a occupé jusqu’en décembre 1993, aux côtés du Premier Ministre d’alors, Alassane Ouattara, actuel président ivoirien.
A l’accession du président Hanri Konan Bédié au pouvoir, Kablan Duncan est nommé le 11 décembre 1993 Premier ministre jusqu’au coup d’Etat de décembre 1999 .
En juin 2011, il est nommé ministre des Affaires étrangères et reconduit le 13 mars 2012 dans le nouveau gouvernement de Jeannot Kouadio Ahoussou. Le 21 novembre 2012, il est à nouveau nommé Premier ministre et forme un gouvernement le lendemain.
Elu député de la circonscription électorale de Grand-Bassam le 18 décembre 2016, Kablan Duncan qui occupe cumulativement le poste de premier ministre incompatible, selon la Constitution, avec la fonction législative, rend sa démission le 9 janvier 2017, ainsi que celle de son Gouvernement. Une démission acceptée par le président de la République qui le propulse devant les députés de l’Assemblée nationale, le 10 janvier, comme premier Vice-Président de la 3ème République.
DES BOURGEOIS CONQUÉRANTS, PAS DES RENTIERS
EXCLUSIF FRATERNITÉ MATIN - Dans sa marche pour la conquête de la présidence de la commission de l'UA, le panafricaniste Abdoulaye Bathilly dit son ambition pour le continent - INTERVIEW
L’historien, homme politique et « bâtisseur de paix » sénégalais est en marche pour la conquête de la présidence de la Commission de l’Union africaine. Son point d’ancrage, le panafricanisme. Son ambition, l’accélération du processus de l’unité africaine. Sa candidature, il la considère comme un devoir de génération. Il dévoile sa vision et son ambition pour l’Afrique…
Professeur, vous avez bâti votre stratégie de conquête de la présidence de la Commission de l’Union africaine en prenant appui sur un slogan : « le panafricanisme en marche ». Le panafricanisme est une doctrine qui nous renvoie des siècles en arrière (18e siècle) et dans un temps plus proche aux années des indépendances africaines, notamment à l’ère des Kwame Nkrumah qui, en 1964, écrivait que « l’Afrique doit s’unir», Cheick Anta Diop qui parlait des «Fondements économiques et culturels d’un État fédéral d’Afrique noire » (1974). Aller chercher si loin sa source d’inspiration et de motivation n’est-ce pas donner à penser que le continent se soit enraciné dans une espèce d’immobilisme ?
C’est vrai que du panafricanisme, nous en avons parlé il y a bien des années déjà. Mais en matière d’intégration, il nous faut bien constater qu’il y a un gap entre les discours et la réalité. Or, sans intégration, nous ne pouvons pas construire un système économique durable à même de répondre aux aspirations des populations. La libre circulation des personnes et des biens ; la mise en commun de nos ressources minérales, énergétiques et agricoles ; la transformation qualitative de l’économie africaine qui doit passer d’une économie de rente à une économie industrialisée sont quelques-uns des axes stratégiques du programme du panafricanisme depuis toujours.
Ces exigences sont toujours d’actualité.
Il y a eu quelques progrès ici et là, mais ils sont tellement lents par rapport aux aspirations qu’il s’impose aujourd’hui d’accélérer le pas. Lorsque je parle du « panafricanisme en marche », je parle de l’accélération du processus de l’unité africaine à travers différentes initiatives importantes que je compte soumettre aux Chefs d’État et de gouvernement.
« Si l’on veut écrire l’histoire de l’Afrique, il faut partir du panafricanisme», assure le chercheur Amzat Boukari. Avec vous, le panafricanisme est le propulseur du futur de l’Afrique…
Avant d’aller à la rencontre de l’autre, avant d’aller vers la globalisation, il faut s’identifier soi-même, il faut s’affirmer. Aujourd’hui, tout le monde appelle au partenariat avec l’Afrique. Il ne se passe pas une année sans qu’il y ait un sommet de telle ou telle région du monde avec l’Afrique. Tous les pays d’Afrique font appel aux investissements privés étrangers. Mais il nous faut définir une stratégie d’ensemble pour notre continent sur certaines questions essentielles comme le partenariat.
En 1993, lorsque j’étais ministre de l’Environnement au Sénégal, nous parlions des questions de changement climatique. Certaines personnes et même des dirigeants considéraient nos réflexions et questionnements comme des bavardages sans intérêt, mais aujourd’hui, nous voyons toutes les conséquences de l’impact des changements climatiques qui affectent beaucoup plus l’Afrique que les autres continents. Qu’est-ce qui est fait à ce niveau ? Est-ce qu’individuellement, chaque pays peut faire face à ce problème ? Cette problématique du changement climatique doit être abordée sur un plan global et surtout panafricain.
Pourquoi j’estime qu’il faut que l’Afrique s’inscrive, sur le plan économique, dans un panafricanisme économique ? Nous recherchons des investissements étrangers pour nos économies, ce qui est une bonne chose. Mais peut-on développer un pays en adossant son économie uniquement aux apports des investissements étrangers ? Non ! Il faut créer les bases sociales du développement économique de l’Afrique sur le continent. Tous les grands pays qui se sont développés l’ont été parce qu’ils ont créé une classe d’investisseurs, une classe d’entrepreneurs qui, en association ou de manière autonome avec les investisseurs étrangers, ont pris en main les rênes de l’économie.
Vous partagez cette exigence de naissance de champions nationaux sur le continent…
Il nous en faut dans tous les domaines. Qu’il y ait des entreprises africaines ici et là ; qu’il y en ait de grandes au-delà des frontières. Les investissements étrangers ne viennent dans un pays que pour un but bien précis et souvent limités dans le temps, pas pour créer de la richesse pour le pays, ni pour développer son économie de manière durable.
De quoi, selon vous, l’Afrique a-t-elle le plus besoin aujourd’hui ?
Rompre avec le syndrome né de Berlin (Ndrl: 1885, le partage de l’Afrique par les Européens) sortir du morcèlement, de la balkanisation et du système d’approvisionnement des autres pays en matières premières. Il nous faut pour cela arrêter de compter sur le transfert de nos matières premières agricoles et minérales brutes. Il nous faut les transformer sur place, accélérer le processus d’industrialisation de nos économies et cela passe par la mise en synergie des entrepreneurs africains. Je rêve de voir des géants industriels africains pour transformer le visage économique du continent. Il nous faut des bourgeois conquérants, pas de rentiers.
Ce qui nous amène à aborder la question de la monnaie et donc des monnaies diverses et variées qui ne facilitent pas la création d’une économie intégrée. L’ancêtre de l’Union africaine est né en 1963. L’Europe n’a que quinze ans d’existence et a réussi, malgré quelques soubresauts, à créer une monnaie commune. Comment l’Afrique, qui a montré le chemin de l’intégration, se retrouve-t-elle encore aujourd’hui à questionner la mise en commun de ses forces ?
C’est la conséquence de l’insuffisance d’une volonté politique d’aller de l’avant. Aujourd’hui, ne nous attardons pas sur les maux, mais sur les exigences : l’unité du continent est indispensable. Et il nous faut traduire la volonté politique en entrepreneuriat économique conquérant. Les infrastructures transnationales et nationales doivent être construites par des conglomérats africains.
Comment pensez-vous pouvoir faire adhérer des dirigeants qui ne pensent peut-être pas comme vous à votre vision. Même dans sa posture de « patron », le président de la Commission de l’Union africaine reçoit ses directives des Chefs d’État…
J’ai travaillé dans plusieurs régions de l’Afrique et, croyez-moi, les Chefs d’État accordent toujours une attention soutenue aux propositions qu’ils jugent pertinentes. C’est sur ce registre que j’entends travailler. Je ne vais pas à la Commission pour défendre les intérêts particuliers d’un pays ou d’une région. J’y vais pour aborder les questions transversales qui ont un impact sur notre devenir collectif et sur la base de cela faire des propositions aux Chefs d’État et de gouvernement.
A l’issue de la commémoration des 50 ans de l’organisation panafricaine, les réflexions ont abouti à la mise en orbite d’une transformation structurelle de l’Afrique qui se projette dans l’Agenda 2063, agenda qui se décline en sept aspirations : une Afrique prospère, un continent intégré, une Afrique de la bonne gouvernance, la démocratie, le respect des droits de l'homme, de la justice du règle de droit ; une Afrique paisible et en sécurité ; une Afrique avec une forte identité culturelle, une Afrique où le développement est axé sur les gens, une Afrique forte, unie et partenaire mondial influent… C’est lointain…
Il s’agit, avant cette date, de voir, de manière concrète, les initiatives phares qui peuvent être prises pour donner corps et forme à l’intégration. Il y a un nombre assez important d’infrastructures à construire, il s’agit, entre autres, des routes, des barrages, des centrales électriques… Mais pour que ces projets économiques soient rentables dans la durée et impliquent le plus grand nombre d’Africains, il faut faire en sorte qu’il y ait des entrepreneurs africains qui se mettent ensemble pour leur réalisation. Je vois une Afrique où les Dangote, les Diagou, les Elumelu se comptent par centaines, avec des Etats qui instituent des facilités juridiques, institutionnelles, réglementaires pour que l’entrepreneuriat africain décolle. Et que les grands projets structurants, même s’ils doivent impliquer des entrepreneurs étrangers, se bâtissent sur des partenariats. La voie salutaire pour le continent, c’est l’émergence des vecteurs sociaux de notre développement. On ne peut bâtir une stratégie sur des vecteurs sociaux extérieurs à l’Afrique. Il faut changer de paradigme.
Vous disiez récemment à un confrère qu’il faut « doter l’Union africaine d’un leadership crédible » et aussi que «l’Afrique doit s’affirmer comme acteur de son propre destin ». Le continent se donne-t-il les moyens de s’inscrire dans une telle démarche ?
L’un des rôles de la Commission est d’instaurer un dialogue interactif entre les gouvernements, en partant des aspirations et des propositions des différents acteurs africains (groupes professionnels, société civile, scientifiques, activistes, écrivains, etc.)
Vous êtes considéré comme un acteur de paix au regard des différentes missions qui vous ont été confiées par l’Onu, notamment comme représentant spécial adjoint du Secrétaire général des Nations unies au Mali, puis comme son représentant spécial pour l’Afrique centrale. Et aussi par l’Union africaine en tant qu’envoyé spécial du président dans divers pays. Vous fûtes aussi président du Présidium du Forum de Bangui… Quelle est, aujourd’hui, la typologie des crises et/ou des conflits en Afrique et quelles en sont les causes récurrentes ?
Les causes fondamentales, pour moi, sont notre insuffisance d’aptitude à gérer la diversité à l’intérieur de nos territoires. Après la colonisation, nous avions pensé que le colon parti, l’harmonie allait prendre toute sa place dans nos sociétés, mais l’histoire a montré que ce ne fut pas le cas. Il y a aussi les facteurs politiques : la crise de la démocratie, la question de la liberté d’expression, le fonctionnement des institutions. Il y a de l’intolérance, que ce soit sur le plan politique ou à propos de l’existence d’autres identités. Il y a une sorte d’intolérance qui s’exprime dans nos comportements sur des bases religieuses, culturelles, identitaires, ethniques, régionales et qui traverse tout le corps social, tant au niveau du citoyen que du leader. Je le réaffirme, les crises sont dues, jusqu’ici, à notre inaptitude à gérer de manière satisfaisante la diversité dans nos pays. Pour que l’Afrique connaisse la paix, il nous faut cultiver l’esprit de tolérance, le culte du dialogue, le respect de l’autre…
Professeur Bathily, votre candidature au poste de président de la Commission de l’Union africaine, la considérez-vous comme une évidence ? Un aboutissement ? Un commencement ou un prolongement ?
C’est le prolongement d’un engagement de près de cinq décennies au service du continent. A toutes les étapes de ma vie, j’ai été engagé pour la cause globale du continent. Je n’ai pas attendu d’être ministre pour embrasser la cause du panafricanisme ou de l’Afrique. De mon parcours d’élève à l’École militaire préparatoire africaine à l’Université Cheick Anta Diop de Dakar, à celui d’enseignant-chercheur, gouvernemental, diplomatique, il y a une logique qui montre bien que ma candidature n’est pas une candidature de circonstance, poussée par un pays, une région ou une motivation égoïste. Il s’agit d’une conviction profonde. Et c’est pour moi un devoir de génération. Nous avons un legs à transmettre aux nouvelles générations. Nous avons une obligation morale à continuer à travailler pour l’unité du continent pour que l’Afrique devienne un acteur majeur du monde en pleine mutation.
Vous êtes porté par une ambition panafricaine et une vision qui invite l’Afrique à prendre son destin en main. Comment feriez-vous pour réduire la dépendance financière de l’Union africaine quand on sait qu’en 2015, le continent ne finançait qu’à peine 30% du budget de fonctionnement de son organisation phare (qui s’élevait à un plus de 500 millions de dollars), vivant ainsi de soutiens de partenaires multilatéraux, bilatéraux et d’institutions financières internationaux et d’autres pays ?
Il y a des sources alternatives de financement qu’on peut trouver. Il y a eu des propositions depuis 2007 déjà.
Pourquoi ne sont-elles pas mises en application ?
Encore une fois, c’est dû à l’insuffisance de la volonté politique. Nous devons nous prendre en charge, c’est une question de dignité, de souveraineté…
Vous rappelez l’implication des médias dans la construction et la consolidation de la démocratie sur le continent. Si vous êtes élu président de la Commission de l’Ua, que ferez-vous pour les accompagner à jouer pleinement leur rôle ?
Il faut veiller au respect de la liberté de presse, une presse responsable, consciente de ses obligations citoyennes, élément essentiel pour l’enracinement de la culture démocratique et des libertés. Au-delà de la démocratie dont la presse doit être le gardien vigilant, il y a aussi la problématique de l’image globale du continent. L’Afrique est le continent qui a subi toutes les violences et toutes les injustices du monde depuis des siècles. C’est le continent qui porte l’image du désespoir, dont les citoyens sont méprisés de par le monde. Cette Afrique a besoin que son image soit restaurée pour redevenir le continent de l’espoir qu’il est.
« I am, because we are », dites-vous.
Oui. Je suis parce que nous sommes. Nous sommes ensemble, nous sommes solidaires. Je ne peux être sans vous et vous ne pouvez être sans moi. Il nous faut construire notre identité collectivement.
L’absence d’obligation pour les dirigeants de rendre compte aux citoyens n’est-elle pas l’une des raisons de la stagnation du continent ? Des dirigeants qui ne rendent pas compte aux citoyens sont forcément soustraits de l’exigence de respecter leurs engagements…
L’élévation de la conscience citoyenne qui s’exprime sur le continent ne peut pas ne pas être prise en compte. Les contraintes du monde moderne obligent les dirigeants à rendre des comptes, les citoyens aussi du reste à tous les niveaux.
De quelle Afrique rêvez-vous quand vous vous levez tous les matins ?
Une Afrique débarrassée des conflits, une Afrique unie qui prend son destin économique en main, qui donne à manger à ses enfants ; une Afrique qui, aujourd’hui, parle d’une même voix à partir de ses propres stratégies au reste du monde, une Afrique qui n’est plus à la traîne du monde.
L’annonce du décès du chanteur Ablaye Mbaye sonne comme un coup de massue pour tous ceux qui ont assisté au concert du groupe Pape et Cheikh, vendredi dernier au Grand Théâtre. Le chanteur était au meilleur de sa forme, dans son sabador jaune. Il chantait aux côtés du duo Pape et Cheikh exécutant des pas de danse fortement appréciés du public.
Vendredi dernier, Ablaye Mbaye charriait le bonheur et magnifiait sa complicité légendaire avec le duo Pape et Cheikh : «Je le fais tous les ans et beaucoup de gens ont hâte de nous voir sur scène. On a une telle complicité qui ne surprend plus personne et dépasse même le cadre de la musique. On habite ensemble à Fass donc doumathi marakiss, grand boubou laathi akk Tiaaya», reportait-on dans l’édition du journal Le Quotidien d’hier, pour livrer les propos de l’artiste, tenu sur un ton empreint d’humour. Malheureusement hier soir, l’heure n’était plus à l’humour. L’annonce du décès de Ablaye Mbaye a sonné tout le monde. De nombreux acteurs culturels sont restés sans voix. Aucun musicien ne pouvait placer un mot au téléphone. Interpellé, le manager, journaliste et ami des chanteurs, Pa Assane Seck n’avait pas de mot pour décrire son chagrin. Il était en compagnie de Ablaye Mbaye, la veille de son décès. Et donc M. Seck joint n’arrêtait de verser des larmes. Profondément attristé, il lâche au bout du fil : «On était ensemble toute la nuit d’hier. C’est difficile». Difficile pour lui de parler, de témoigner sur le vif, mais également très difficile pour Guissé Pène qui connaissait bien le chanteur. Celui-ci pour une première, éprouve une énorme peine à s’exprimer face à une situation. M. Pène confie une phrase : «On habitait ensemble à Fass», puis s’excuse et demande à être rappelé plus tard.
Iba Guèye Massar : «Ablaye voyait avec le cœur»
La douleur du décès de cet artiste est tenace. Tout le gotha culturel a perdu hier soir ses mots. Le téléphone de Pape Amadou Fall du groupe Pape et Cheikh sonnera en vain, tandis que celui de Baba Hamdy reste sur boîte vocale. Seul Iba Guèye Massar consent à dire quelques mots à propos de Ablaye Mbaye. Cependant, même lui a du mal à croire à cette mort brutale. «Massamba Mbaye m’a appelé tout à l’heure pour me demander. C’est Abdoulaye Koundoul, directeur des arts qui me l’a confirmé. Il est décédé tout à l’heure. C’est vrai. C’est une triste nouvelle. J’ai perdu un petit frère», dit-il avant de revenir sur les liens qu’il entretenait avec le musicien et sa belle carrière. «C’est un jeune frère et j’appréciais son travail. On a toujours eu de bons rapports. Il ne voyait pas certes avec les yeux mais voyait avec le cœur. C’était un homme de cœur», a-t-il souligné. M. Guèye se rappelle avec apathie, des bonnes blagues que Ablaye Mbaye racontait toujours lors de leurs rencontres dans les années 1994-2004 au temps du Lemzo Diamono.
«Son chemin il l’a fait lui-même et a gravi bien des échelons. Ce qui m’a vraiment frappé, c’est surtout ses reprises des classiques de Youssou Ndour. Tous se demandaient qui est cet artiste. C’est à partir de ce moment que beaucoup se sont intéressés à lui. Ablaye Mbaye a laissé son empreinte dans le paysage musical sénégalais. Il a vécu sa vie, il a marqué sa vie, il a marqué nos vies. Nous lui rendons hommage et prions pour le repos de son âme», témoigne Iba Guèye Massar. Ablaye Mbaye n’est plus. Mais sa dernière prestation au Grand Théâtre et son image d’homme de gaieté, d’artiste de talent restera gravée dans les souvenirs de ce bas monde.
Dakar, 10 jan 2017 (AFP) - Ablaye Mbaye, jeune chanteur sénégalais populaire dans son pays et connu également en Afrique, est décédé lundi à Dakar à la suite d'un malaise en studio, a indiqué à l'AFP un de ses proches, la star Youssou Ndour déplorant sur Twitter la perte d'"un petit frère".
Fils d'une famille de griots, Ablaye Mbaye, de son vrai nom Abdoulaye Mbaye, non-voyant à la silhouette longiligne, est né en 1981 à la Médina, quartier populaire de Dakar où a aussi grandi Youssou Ndour, qui l'a pris un temps sous son aile.
Selon sa biographie officielle, Ablaye Mbaye, qui chante depuis l'âge de 12 ans, a accompagné Youssou Ndour en tournée durant sept ans. "Ablaye est décédé" lundi soir après avoir fait "un malaise en studio", affirmé à l'AFP Guissé Pène, important acteur culturel au Sénégal et un de ses proches.
Cela s'est produit "alors qu'il procédait aux derniers réglages pour la sortie de son album prévue le 4 février, un album intitulé +Intérêt général+", a dit M. Pène. Selon lui, son corps a été transporté dans un hôpital dakarois.
Aucune indication n'était disponible dans l'immédiat sur ses obsèques. Réagissant à la nouvelle sur son compte Twitter, Youssou Ndour a écrit: "J'ai vraiment perdu un petit frère". Le message, signé de ses initiales, est accompagné du mot-dièse "#RIPAblayeMbaye".
Ablaye Mbaye est l'auteur de quelques albums et de plusieurs chansons à succès dans le pays et la région, notamment "Yaay, maag na" ("Maman, j'ai grandi" en langue wolof), mais aussi de collaborations fructueuses avec d'autres artistes dont Youssou Ndour, Disiz et Kery James.
Sur Instagram, Disiz a rappelé avoir enregistré avec Ablaye Mbaye plusieurs chansons - figurant sur deux cassettes publiées par le rappeur franco-sénégalais sous son vrai nom, Serigne Mbaye Guèye. Il a salué "l'être chaleureux et lumineux qu'il était".
"Je me souviens de son rire lorsque je tentais de parler wolof. Mais surtout je me souviens de sa voix la première fois que je l'ai entendu chanter. Je n'ai rien dit parce que le jeune rappeur que j'étais était fier, mais combien de fois, et ce soir plus que jamais, je pleure en écoutant sa voix touchée par la grâce", a-t-il écrit.
Selon l'Agence de presse sénégalaise (APS), son premier album, "Nila démé", sorti en 1995, a été produit par Youssou Ndour. De même source, son décès survient moins de deux mois après celui de son père, El Hadji Dame Mbaye.
Plusieurs médias locaux lui ont rendu hommage, tout comme le monde de la culture et ses admirateurs, nombreux à travers le pays. "Va donc retrouver la lumière...
La musique sénégalaise perd une belle voix et un artiste discret", a affirmé sur Twitter Aïsha Dème, présidente de la Fondation Music in Africa, une plate-forme panafricaine.
TANOR, TEL CRONOS
EXCLUSIF SENEPLUS - Avec la bénédiction de Macky, il fait appel à la Justice qui vient d'embastiller le maire Bamba Fall - Il est l'incarnation du dieu Cronos qui mange ses enfants pour ne pas avoir d’héritier
Quand le 30 mars 1996, le président de la République Abdou Diouf, l’alors président du Parti socialiste (PS), intronise Ousmane Tanor Dieng, son homme-lige, comme le nouveau Premier secrétaire, son oukase ne manque pas de créer un séisme politique au sein de la formation politique de Léopold Sédar Senghor. Le manque d’échanges critiques entre acteurs politiques concernés lors de cette rencontre historique et décisive dans la vie du PS a valu à cet événement l’appellation railleuse de « congrès sans débat ». Cet acte de réformation voire de refondation qui consacre l’arrivée massive de jeunes technocrates dans les instances du PS crée des dissensions profondes et des frustrations ingérables chez les anciens appelés « légitimistes » au point que le parti commence à s’ébrécher pour ne pas dire se fracturer. Mais les renouvellements frauduleux et bâclés prédisaient les décisions arbitraires qui allaient être prises lors de ce « congrès sans débat ».
De Charybde en Scylla
Djibo et plusieurs de ses camarades, premières victimes de Refondation dont le chef de file est Ousmane Tanor Dieng, flétrissent le centralisme démocratique du parti et remettent en cause le découpage arbitraire et partial des coordinations. Ainsi le 25 octobre 1997, à l’hôtel Indépendance, ils tiennent une conférence et lancent le courant du Renouveau pour contrecarrer la Refondation tanorienne. Le PS vient de connaître sa plus grave crise après le « congrès sans débat ». Les sanctions du bureau politique ne feront pas reculer les Rénovateurs qui tiennent la dragée au dauphin putatif du président Diouf, chef de file des Refondateurs. Et aux législatives de 1998, ils font une percée à l’Assemblée nationale avec 11 députés. Moustapha Niasse suit les traces de Djibo Ka et le 16 juin 1999, il publie un texte qui marque la rupture avec le PS version Tanor. Et le voilà exclu du PS. Les deux mastodontes qui se présentent contre leur ancien mentor à la présidentielle de 2000 pèseront lourd dans la défaite du président Abdou Diouf. Leurs scores (16,77% pour Niasse et 7,08) contraignent le candidat socialiste à un second tour d’où il ne sortira pas vainqueur. Ainsi Ousmane Tanor Dieng qui a dirigé la campagne d’Abdou Diouf, même s’il a été écarté intelligemment au second tour, récolte 41,51%. La défaite électorale de Diouf permet aux légitimistes socialistes restants de tourner casaque. Certains (Assane Diagne, Adama Sall, Abdourahmane Sow, Sada N’Diaye, Abdoulaye Diack, Iba Guèye, Aïda Mbodj et Salif Bâ…) transhument vers les prairies bleues alors que d’autres mettent sur pieds leur propre formation politiques. Le courant contestataire « Démocratie-Solidarité » voit le jour avec les apparatchiks Robert Sagna, Mamadou Diop, Souty Touré, Abdou Khadre Cissokho (qui a opéré un come-back), Moustapha Kâ, Madia Diop et Amath Cissé. La désignation contestée du Premier secrétaire comme le candidat socialiste à la présidentielle de 2007 par le Congrès d’investiture, le 13 janvier 2007, sous la présidence de Cheikh Abdoul Khadre Cissokho, Secrétaire à la vie politique du Parti socialiste et ex-co-fondateur de « Démocratie-Solidarité », poussera Robert à se présenter, au nom de son courant, sous la bannière de la formation de Tété Diédhiou, l’Union des forces démocratiques (Ufd). Finalement Tanor obtient 13,56% des voix se classant 3e derrière Wade et Idrissa Seck. Avec Tanor, la descente aux enfers continue. Il va de Charybde en Scylla. C’est ainsi qu’au sein du Ps, de nouvelles voix commencent à se faire entendre pour contester le leadership de Tanor et lui dénient la légitimité pour être le candidat du PS à la présidentielle de 2012.
En novembre 2009, les premières salves retentissent aux yeux oreilles de Tanor. Au micro de Radio France Internationale, Aïssata Tall Sall, porte-parole du Ps, annonce : « je suis dans les dispositions pour me présenter aux prochaines échéances électorales au Sénégal. Rien ne s’y oppose… Il y aura bien des primaires pour la désignation de leur futur candidat ». Même son de cloche du côté de Khalifa Sall à la même radio : « le Ps n’a pas de candidat naturelle. Les élections primaires sont prévues par nos textes. Si on avait pensé avoir un candidat naturel on ne les aurait jamais prévues ». Même Abdoulaye Wilane dont les atomes crochus avec Tanor sont connus de tous soutient la même position en déclarant que « le Ps peut avoir un candidat naturel, mais il n’est pas l’officiel ». Alioune Ndoye, maire de Dakar-Plateau enfonce le clou : « le Ps n’a pas de candidat naturel » martèle-t-il. La naissance d’un mouvement de soutien « And Dolel Khalifa » sonne comme un adoubement du maire de Dakar à la présidentielle de 2012. Nonobstant ces remises en cause de son leadership, Tanor s’accroche aux basques de son poste de Secrétaire général du PS pour se présenter en 2012. Mais les résultats du premier tour le place quatrième avec 11,30%. Une régression par rapport à 2007.
D’ailleurs c’est cette régression que Malick Noël Seck fustigeait sans aménités au point d’être exclu du PS. « Il a été confié à Tanor une mission à la réussite de laquelle il a failli. Il est aujourd’hui au Parti socialiste ce que l’écharde est à la blessure, et il ne partira pas tant que nous ne l’aurons pas nous même extirpé. Il est nécessaire, urgent et impératif qu’il soit destitué. Convergence socialiste ne saurait soutenir une liste qui n'a plus rien de socialiste » vociférait-il.
Ainsi après trois échecs successifs – 2000, 2007 et 2012 –, l’hallali politique de Tanor semble avoir sonné. Lui-même avait déclaré qu’il ne serait plus candidat à une autre présidentielle après 2012. Malgré l’échec à la présidentielle, Tanor se dédit et annonce sa candidature au XVe congrès du PS du 5 juin 2015 qui le réélit comme Secrétaire général du PS dans des conditions non transparentes.
Pas candidat mais « candidataire »caudataire
Il est avéré qu’en 2019, le Secrétaire général du PS n’est pas candidat, il est « candidataire » caudataire du président Macky Sall. Là que le bât blesse, c’est le refus de Tanor d’admettre un autre candidat socialiste en dehors de sa personne. C’est cette infatuation que les jeunes comme Bamba Fall, Barthelemy Dias, Aminata Diallo et autres militants imbus des idéaux de la social-démocratie récusent. Et pour éviter que Tanor et ses apparatchiks transforment le PS en comité de soutien de l’APR, de jeunes socialistes se sont présentés à la maison du parti le 5 mars 2016 pour troubler la réunion du bureau politique qui devait officialiser l’assujettissement du wagon socialiste à la locomotive apériste. Incapable de régler politiquement ce différend qui l’oppose aux contestataires pro-khalifa, incapable de transcender les remous consubstantiels à toute formation politique, Tanor et sa valetaille ont demandé, avec la bénédiction de l’Exécutif, le secours de la justice, laquelle vient de décerner plusieurs mandats de dépôts au maire Bamba Fall et compagnie. Au préalable, Barthelemy Dias a été délesté de son immunité parlementaire avant de faire face aux juges du Prince qui, à coup sûr, essayeront de compromettre sa carrière politique. L’objectif de Tanor est clair : tuer impitoyablement ses adversaires de parti selon la volonté du président Macky Sall. Aujourd’hui après que l’AFP est rayée de la carte politique, il reste à déstabiliser le parti de Senghor.
Aujourd’hui, le mérite de Tanor, c’est d’avoir sombré depuis 1996 le PS dans une abime insondable et de s’être débarrassé de tous ses contradicteurs excepté encore l’intraitable Khalifa Sall qui refuse toute compromission et collusion avec le président Sall. Il a saccagé l’héritage idéologique de Senghor qui s’est révélé être pour lui un véritable faix politique. Jamais Tanor n’a su refonder le PS et le mettre dans une nouvelle dynamique de conquête du pouvoir. Las de ses défaites successives, il a choisi de mettre à l’encan la formation de Senghor pour jouir des prébendes du pouvoir. Sachant qu’il n’a plus un avenir politique prometteur, il refuse de passer le flambeau aux jeunes loups ambitieux. Mais Tanor, c’est l’incarnation du dieu Cronos qui mange ses enfants pour ne pas avoir d’héritier. Mais la mythologie enseigne qu’un de ses enfants Zeus a échappé à son autophagie et lui Cronos finit ses jours dans le Tartare, la prison des Enfers située au profond de la terre.