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12 avril 2025
Politique
NOMINATION DE SAMBA NDIAYE, DIOMAYE VA-T-IL CÉDER FACE À LA PRESSION ?
Des militants de Pastef se sont déchaînés contre le nouveau président du Conseil d’administration de la Sn Hlm. Des responsables du parti ont même critiqué ouvertement cette nomination.
Nommé Président du Conseil d’administration de la Sn Hlm, Samba Ndiaye fait l’objet d’un véritable bashing sur les réseaux sociaux. Les militants, et même des responsables de Pastef, s’opposent ouvertement à cette nomination du président de la République Bassirou Diomaye Diakhar Faye.
Le président Bassirou Diomaye Diakhar Faye va-t-il revenir sur sa décision, face à la pression de son parti ? En tout cas, les militants de Pastef se sont déchainés contre la nomination de Samba Ndiaye au poste de président du Conseil d’administration de la Sn Hlm. Des responsables du parti ont même ouvertement critiqué la nomination.
Et c’est Waly Diouf Bodian, Directeur général du Port autonome de Dakar(Pad), qui a donné le ton. Dahirou Thiam, Dg de l’Artp lui emboitera le pas : «Samba Ndiaye doit dégager ! De même que le DG de l’Agetip El Malick Gaye», a-t-il plaqué sur sa page facebook.
Abass Fall, la tête de liste de Pastef à Dakar, s’est lui aussi invité au concert de désapprobations : «J’ai signé la pétition pour le départ immédiat d’un voyou qui nous a toujours insulté, nous et notre Pros. Samba Ndiaye doit dégager», dit-il.
Même Sadikh Top, qui a été lui aussi nommé hier Pca de l’Aps, a encouragé la campagne de désapprobation : «Le nombre d’interpellations que j’ai reçues aujourd’hui concernant le nommé Samba Ndiaye démontre une chose : vous tenez à la réussite de ce projet. Alors n’ayez aucun complexe à dénoncer ce genre de décision, d’où qu’elle vienne !»
Le chef de l'Etat va-t-il plier ? Ou va-t-il résister ? Les prochaines heures nous édifieront.
par René Lake et Elhadji M. Mbaye
DE LA LÉGITIMITÉ DE LA SOCIÉTÉ CIVILE FACE AUX ÉLUS
EXCLUSIF SENEPLUS - Reconnaître la légitimité de la société civile en tant qu’acteur moral et social, sans chercher à la réduire ou la marginaliser. À son tour, elle doit comprendre que son rôle n’est pas de se substituer aux élus
René Lake et Elhadji M. Mbaye |
Publication 24/10/2024
Le débat sur la légitimité de la société civile, en opposition ou en complément à celle des élus, a traversé l’histoire politique du Sénégal depuis les indépendances. Depuis l’accession au pouvoir du président Bassirou Diomaye Faye, le 24 mars 2024, survenue après de longs mois de combats menés concomitamment par des acteurs politiques et ceux de la société civile, la légitimité de ces derniers est au centre de l’actualité en raison de leur détermination dans la lutte pour le changement de régime et du traitement auquel ils font l’objet dans le champ politique.
La société civile sénégalaise a ainsi activement contribué à la sauvegarde des fondements démocratiques du Sénégal, à un moment où le pouvoir de Macky Sall cherchait délibérément à empêcher une alternance politique par la voie des urnes. Elle a, au même titre que d’autres acteurs politiques, mobilisé des ressources humaines, financières, intellectuelles, logistiques pour éviter le recul démocratique du pays.
Ainsi, depuis l'élection au premier tour, avec plus de 54 % des voix, du président Bassirou Diomaye Faye, cette légitimité se pose avec acuité, que ce soit de manière explicite ou de façon plus insidieuse dans l'espace public. Le risque est réel de voir des acteurs politiques s’octroyer cette victoire et oublier tout le processus et l’engagement de tous les acteurs, y compris ceux de la société civile (universitaires, journalistes, religieux, avocats, médecins, syndicalistes, artistes…) qui ont aussi apporté leur contribution à la victoire contre le régime de Macky Sall, sans compter les luttes démocratiques menées depuis de nombreuses décennies.
Le Sénégal avait besoin de changement, et l’appartenance à un parti politique n’était pas un critère de légitimité dans la lutte pour ce changement. Cette victoire n’est pas seulement celle des acteurs politiques, elle est celle de tous.
Face aux demandes répétées de la société civile pour le respect des engagements du candidat Diomaye, il est nécessaire de s’arrêter pour faire le point sur le rapport entre société civile et acteurs politiques, entre ceux qui sont élus ou nommés et ceux qui contribuent à l’action publique par d’autres moyens. La promotion du nouveau référentiel des politiques publiques qui appelle à la mobilisation de tous pour faire face aux problèmes dont souffre notre pays nécessite l’implication de toutes les forces vives de la nation, qu’elles soient politiques ou issues de la société civile. Mais pour cela, il est important de mieux préciser le rôle, la place, la légitimité de la société civile et les ponts qu’elle doit établir avec les acteurs politiques au service de la Nation.
L’objectif de cet article est d’abord de rappeler les fondements historiques, sociaux et politiques des deux pouvoirs, politiques (partis politiques) et civils (société civile), ensuite d’expliquer comment ils coexistent, se complètent et enfin peuvent parfois entrer en conflit lorsque l’intérêt général est menacé.
Certains acteurs politiques tentent d’aborder cette question sous l’angle de savoir si la légitimité des acteurs civils peut rivaliser avec celle conférée par les urnes. Ce sujet mérite une réflexion approfondie. Cependant, l'objectif de cet article n'est pas d'opposer de manière binaire ces deux formes de légitimité, mais plutôt de comprendre comment elles coexistent, se complètent et, parfois, entrent en conflit.
Cette réflexion propose une analyse détaillée de ces deux formes d’autorité, en tenant compte de leurs fondements, de leurs rôles respectifs face aux enjeux démocratiques contemporains.
Les fondements de la légitimité élective : une autorité issue du processus démocratique
La légitimité élective repose, de manière formelle, sur l’expression de la volonté populaire à travers le vote. Ce processus est central dans toute démocratie, car il permet de conférer une autorité politique aux élus, chargés de représenter l’intérêt général. Le mandat électif, obtenu par la voie des urnes, est perçu comme la validation ultime d’une autorité. Il est souvent présenté comme l’incarnation même du pouvoir démocratique. Pourtant, cette légitimité n’est pas sans limites ni contestations.
L'une des critiques les plus récurrentes est que la légitimité élective repose sur un moment précis — l’élection —, mais qu'elle peut rapidement s’éroder si l’élu échoue à transformer cette légitimité en action concrète au service de la population. Des exemples emblématiques, comme celui d’Abdoulaye Wade ou encore, plus récemment, de Macky Sall, illustrent comment une légitimité électorale solide peut être mise à mal par des scandales éthiques. Élus légitimement et avec un enthousiasme populaire incontestable, leur autorité s’est effondrée significativement du fait de leur gestion solitaire et parfois autocratique, qui a révélé les failles morales de leur administration respective. Ce type de situation pose une question cruciale : l'élection suffit-elle à garantir la légitimité ?
Dans de nombreux cas, les élus sont tentés de faire des compromis pour conserver leur position, ce qui peut les conduire à adopter des stratégies politiques déconnectées des attentes de leurs électeurs. Cela est particulièrement visible dans des systèmes politiques où la réélection devient un objectif en soi, souvent au détriment du bien commun. Ainsi, la légitimité élective peut parfois être en porte-à-faux avec l'intérêt collectif, surtout lorsque la survie politique devient prioritaire pour l’élu.
En outre, il faut aussi préciser qu’il y a une évolution historique de l’acteur politique. Des travaux dans le domaine de la science politique ont démontré que les acteurs politiques se sont professionnalisés au fil de l’histoire. Ainsi, la rationalité première de l’Acteur Politique Professionnel (APP) est d'abord d'accéder au pouvoir et ensuite de le conserver. Cette rationalité prime parfois sur l’intérêt collectif, en raison notamment des logiques en jeu dans la carrière professionnelle de l’APP.
Si la présidentielle permet, en cas d’élections justes, libres et transparentes, la désignation d’un homme ou d’une femme politique issu(e) des urnes, la manière dont les élections législatives sont organisées ne permet pas la représentation d’élus issus du peuple, élus par le peuple et pour le peuple. Les listes nationales des partis et des coalitions donnent l’opportunité à des femmes et des hommes politiques d’être représentés à l’Assemblée nationale, non pas parce qu’ils ont été choisis pour défendre les intérêts des populations, mais plutôt ceux des leaders politiques qui les ont nommés. Ils sont ainsi assujettis aux ordres de leurs partis et coalitions plutôt qu’à ceux des citoyens. Ils peuvent ainsi être élus, même sans que les gens qu’ils comptent représenter n’aient voté pour eux. Comment voulons-nous alors qu’ils défendent leurs intérêts ?
Toutes ces réalités démontrent les limites de la représentation électorale comme unique légitimité au service de l’intérêt général.
La légitimité de la société civile : une autorité morale enracinée dans l'engagement éthique et l’expertise citoyenne
Contrairement à la légitimité élective, la société civile tire sa légitimité de sa capacité à incarner des valeurs morales, éthiques et des engagements qui transcendent les cycles électoraux. Cette légitimité n’est pas conférée par un vote, mais par l’expérience, l’expertise et l’engagement sur des questions au service de l’intérêt général. Les membres de la société civile ne cherchent pas une légitimité électorale, ils préfèrent défendre l’intérêt général à partir d’expertises spécifiques (artistiques, scientifiques, médiatiques, religieuses, sociétales…) et de valeurs universelles, adaptées au contexte national (les droits de l’homme, la liberté de la presse, l’état de droit, la bonne gouvernance, etc.).
La société civile regroupe une diversité d’acteurs — leaders religieux, syndicalistes, artistes, militants, intellectuels — qui incarnent ainsi des intérêts collectifs et ne sont pas nécessairement mus principalement par des ambitions personnelles. Leur légitimité repose sur un référentiel moral, non sur un mandat électif, et c’est précisément cette distinction qui leur confère une force incontestable. Ils transgressent les intérêts partisans des partis et coalitions politiques. Ces acteurs se situent en dehors des jeux de pouvoir traditionnels, et leur autorité se renforce d’autant plus qu’elle s’engage dans des combats porteurs de valeurs enracinées dans notre histoire.
Dans ce cadre, des figures telles que Serigne Cheikh Gaïnde Fatma ou Amadou Makhtar Mbow ont incarné cette légitimité morale. Leur engagement sur des questions politiques, sociales et culturelles a consolidé une autorité bien plus durable que celle des acteurs politiques. À travers le monde, des personnalités comme Nelson Mandela, avant même d’accéder à une légitimité élective, ont d'abord obtenu leur autorité par des combats moraux, incarnant des aspirations collectives. Au Sénégal, la liste pourrait être longue si l’on souhaitait mentionner des figures comme Cheikh Anta Diop, Abdoulaye Ly, Babacar Niang, Tidiane Baïdy Ly, Seydou Cissoko, Aminata Sow Fall, Lamine Senghor, Seyni Niang, Eugénie Aw, Omar Blondin Diop, Mariama Bâ, Serigne Babacar Matouty Mbow, Makhtar Diack, Babacar Ndiaye, Mamadou Dia, Annette Mbaye d’Erneville, Mohamadou Billy Gueye, Charles Gueye, Babacar Touré, Waldiodio Ndiaye, Sidy Lamine Niass, Moussa Paye, Ousseynou Beye, etc.
Cette légitimité morale est d’autant plus précieuse qu’elle est ancrée dans les réalités du terrain. Contrairement aux élus, souvent perçus comme déconnectés des préoccupations quotidiennes des citoyens, les acteurs de la société civile sont au cœur des luttes sociales, économiques et culturelles. Leur influence dépasse les frontières électorales, car elle repose sur un engagement continu, souvent à long terme, en faveur de causes spécifiques. C’est ainsi qu’au niveau international, des personnalités, y compris très jeunes, comme Greta Thunberg, sans mandat électif, ont su s’imposer sur la scène internationale grâce à leur engagement moral pour des causes universelles, comme le climat. Loin des contraintes électorales, ces figures peuvent agir librement, en s'appuyant sur des valeurs partagées par la société.
Ainsi, l’expertise et la popularité ne suffisent pas à légitimer les acteurs de la société civile. La connexion avec les citoyens, leur écoute, leur confiance, leur plébiscite sont nécessaires pour renforcer la légitimité de la société civile. Même si celle-ci est très peu mobilisée, elle est capitale pour leur légitimité auprès des acteurs politiques, souvent intéressés par la collaboration que lorsqu’ils pensent pouvoir en tirer profit dans leur rationalité d’accéder et de conserver le pouvoir.
La société civile face au danger de la politisation : le risque d’une perte de légitimité
L’une des grandes questions que pose la légitimité de la société civile est celle de son entrée dans l’arène politique. Lorsque des personnalités issues de la société civile choisissent de se lancer en politique, elles peuvent perdre la légitimité morale qui les caractérise. L’exemple de Youssou Ndour au Sénégal est à cet égard édifiant. Leader populaire et reconnu pour ses engagements artistiques et sociaux, son entrée en politique n’a pas réussi à capitaliser sur sa popularité. Il a vu son image se diluer, ce qui soulève une problématique majeure : la société civile peut-elle maintenir son influence en s’engageant dans la compétition électorale ?
Cette question ne concerne pas uniquement Youssou Ndour. De nombreuses figures publiques à travers le monde ont connu des destins similaires. En France, Bernard Kouchner, après avoir été une figure éminente de la société civile en tant que fondateur de Médecins Sans Frontières, a vu son influence décliner en rejoignant le gouvernement. Aux États-Unis, des personnalités comme Michael Bloomberg ou Cornel West, en entrant en politique, ont également rencontré des difficultés à maintenir leur légitimité d'origine.
La société civile, en entrant en politique, adopte nécessairement les codes du pouvoir électoral, ce qui l’oblige à faire des compromis et parfois des compromissions. Or, c’est précisément ce qui érode sa légitimité morale. L’autorité de la société civile repose sur sa capacité à rester indépendante des logiques partisanes et électorales. Dès lors qu’elle entre dans le jeu politique, elle s’expose aux mêmes critiques que les élus : opportunisme, compromission, perte de valeurs, rationalité électorale…
Il faut cependant noter que dans certains cas, la politisation de figures de la société civile peut aussi être un moyen de renforcer leur influence, à condition qu’elles parviennent à maintenir leur intégrité morale et, le plus souvent, à refuser de s’insérer dans les jeux partisans. Sauf que, lorsqu’elles s’engagent dans l’arène politique, il leur est souvent difficile d'être indépendantes, car soumises à l’autorité des hommes politiques élus et à la contrainte de la solidarité partisane.
La société civile comme contre-pouvoir et partenaire dans la gouvernance démocratique
Malgré les risques liés à la politisation, la société civile demeure un partenaire privilégié de l’acteur politique dans tout système démocratique. Son rôle ne se limite pas à la critique des actions politiques ; elle est aussi un partenaire essentiel pour l’identification des problèmes publics, la conception, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques publiques. La société civile agit ainsi comme un régulateur, un acteur qui veille à ce que l’action politique soit conforme aux intérêts collectifs. Aujourd’hui, le paradigme dominant des politiques publiques est la gouvernance, en raison d’une part de la complexité des enjeux et défis auxquels les gouvernements sont confrontés, mais aussi de la nécessité d’impliquer d’autres acteurs, dont la société civile, dans la gestion des affaires publiques. La gouvernance démocratique est devenue une exigence aussi bien des citoyens que des partenaires techniques et financiers de nos États.
Dans ce domaine, l'une des principales forces de la société civile réside dans sa capacité à incarner une vision à long terme, au-delà des impératifs électoraux, à mobiliser son expertise et à s’exprimer et défendre l’intérêt général. Là où les élus sont souvent limités par des objectifs de résultats immédiats, ou confrontés au hiatus entre leurs promesses électorales et leurs réalisations liées aux contraintes de leur réélection, les acteurs de la société civile peuvent se concentrer sur des enjeux structurels, des réformes profondes et une vision globale des transformations nécessaires et des mesures qui peuvent paraître impopulaires mais au service de l’intérêt général. Cela en fait une source précieuse de propositions intellectuelles et de mobilisation autour des grands débats publics.
Toutefois, pour que cette relation soit constructive, il est nécessaire que les deux sphères — société civile et politique — se respectent mutuellement et soient conscientes des attributs de l’une et de l’autre. Les élus doivent reconnaître la légitimité de la société civile en tant qu’acteur moral et social sans chercher à la réduire ou à la marginaliser, mais aussi reconnaître sa contribution au service de l’intérêt général. Parallèlement, la société civile doit comprendre que son rôle n’est pas de se substituer aux élus, mais d’accompagner et d’orienter l’action publique, tout en restant dans une position critique, indépendante et constructive. Dans le management des politiques publiques, elle doit jouer un rôle de veille et de rappel des priorités des citoyens, de surveillant du processus décisionnel, d’acteur dans la mise en œuvre de politiques, là où les compétences de l’État sont limitées, et de chargée du suivi et de l’évaluation des engagements pris par les femmes et hommes politiques.
Les dangers de la remise en question de la légitimité civile : un signe avant-coureur de l’autoritarisme
Lorsque les régimes politiques cherchent à saper la légitimité de la société civile, ils s’engagent généralement sur une voie dangereuse, celle de l’autoritarisme. L’histoire a montré que l’attaque contre la société civile est souvent l’un des premiers signes d’une dérive autocratique. Des régimes comme ceux de Robert Mugabe, Donald Trump ou encore Abdoulaye Wade et Macky Sall, ont tous cherché à affaiblir les contre-pouvoirs civils, qu’il s’agisse de la presse, des intellectuels, des syndicats, des artistes ou des associations.
Cette dynamique est récurrente et doit servir d’alerte pour les démocraties modernes. Toute tentative de détruire ou de marginaliser la société civile doit être perçue comme une attaque directe contre la démocratie elle-même et l’intérêt général qu’elle incarne. La société civile est la garante d’un équilibre nécessaire entre pouvoir et contre-pouvoir, entre légitimité élective et morale, entre intérêt partisan et intérêt général. La démocratie ne peut s’épanouir pleinement que lorsque ces deux sphères collaborent, tout en respectant leurs rôles respectifs.
En clair, la légitimité de la société civile, bien qu’elle ne repose pas sur des élections, est tout aussi cruciale que celle conférée par les urnes. Elle joue un rôle de contre-pouvoir, de vigie, mais aussi de partenaire dans l’élaboration des politiques publiques. En garantissant un équilibre entre la légitimité élective et celle morale de la société civile, les systèmes démocratiques modernes peuvent espérer répondre aux aspirations de leurs citoyens de manière plus juste et plus durable.
Ce dialogue entre ces deux formes de légitimité est essentiel pour la stabilité des institutions et la pérennité des régimes démocratiques.
Le 24 mars 2024 doit marquer un tournant historique, permettant au Sénégal de s’engager sur cette voie de collaboration entre les politiques et les différents segments de la société, qui souhaitent ardemment que cette troisième alternance réussisse et permette à notre cher pays de s’engager résolument sur le chemin de l’éradication de la pauvreté endémique, de la souveraineté, de l’équité et de la justice.
Les deux auteurs sont membres du Groupe de réflexion et d’action pour la sauvegarde de la démocratie et de l’État de droit, Sursaut Citoyen.
- René Lake est journaliste et analyste politique.
- Elhadji Mamadou Mbaye est enseignant-chercheur en sciences politiques à l’UGB.
SONKO-BA, LE DÉBAT DE LA DISCORDE
Malgré l'opposition du CNRA au nom de l'égalité de traitement des candidats, les deux hommes maintiennent ce face-à-face de 90 minutes, prévu à l'EAO : debout derrière leur pupitre, sans notes ni documents
(SenePlus) - L'annonce d'un débat télévisé historique entre le Premier ministre actuel Ousmane Sonko et son prédécesseur Amadou Ba enflamme la scène politique sénégalaise, même si le Conseil national de régulation de l'audiovisuel (CNRA) tente d'y mettre un frein. Cette confrontation, prévue initialement pour les 28 ou 29 octobre, pourrait marquer un tournant dans la pratique démocratique du pays.
L'initiative revient à Cheikh Omar Diallo, fondateur de l'École d'art oratoire et de leadership (EAO) de Dakar et ancien conseiller d'Abdoulaye Wade. Le format proposé se veut sobre et rigoureux : 90 minutes d'échange dans les locaux de l'EAO, les deux candidats debout derrière leur pupitre, sans documents ni supports, uniquement munis de "quatre feuilles vierges, un stylo et une bouteille d'eau", selon les informations rapportées par Jeune Afrique (JA) mercredi 23 octobre.
La controverse s'est intensifiée avec l'intervention du CNRA, dont le président Mamadou Oumar Ndiaye justifie son opposition : "Un des principes cardinaux de la loi, c'est l'égalité de traitement entre les candidats à quelque élection que ce soit. Organiser un débat uniquement entre deux d'entre eux romprait cet équilibre."
Malgré cette position, les deux protagonistes maintiennent leur volonté de débattre. Amadou Ba a ainsi officialisé son accord via Facebook ce jeudi : "J'accepte l'invitation de M. Sonko à un débat public. Nous discutons des rapports évoqués et de sujets cruciaux comme l'économie, les libertés et les ressources naturelles, pour confronter nos idées au service du peuple."
La réponse d'Ousmane Sonko ne s'est pas fait attendre, non sans une pointe d'ironie : "Je suis étonné qu'il ait attendu des rumeurs d'interdiction du débat par le CNRA pour donner une réponse somme toute timorée", avant d'ajouter que "les stigmates de mauvaise gestion de l'ancien Premier ministre seront aussi criants que les rayures d'un zèbre."
Le groupe E-Media, via sa chaîne ITV, s'est quant à lui positionné comme diffuseur principal, s'engageant à mettre "à disposition de tous les médias et plateformes son signal pour une diffusion intégrale et accessible à tous", selon son directeur général Alassane Samba Diop.
La question reste maintenant de savoir si le CNRA peut effectivement empêcher la tenue de ce débat si les deux candidats décident de passer outre son avis. Pour Sonko, "les éventuelles lacunes du code électoral ou de la loi sur le CNRA avec des dispositions obsolètes [...] ne sauraient constituer un obstacle à sa tenue."
AMADOU BA ACCEPTE OFFICIELLEMENT L’INVITATION DE SONKO À UN DÉBAT
L'ancien Premier ministre a accepté l'invitation à un débat public portant sur des questions clés telles que l'économie, les libertés et les ressources naturelles. Il propose que leurs équipes se rencontrent afin de fixer les modalités pratiques.
Il ne reste plus qu’à trouver une date pour organiser le débat Sonko-Amadou Ba. L’ancien Premier ministre a publié un message sur son compte X pour annoncer sa disposition à débattre sur “des rapports évoqués et de sujets cruciaux comme l’économie, les libertés et les ressources naturelles”.
Sur sa page Facebook, le leader de la coalition Jamm Ak Njerin va plus loin en jetant des piques à son challenger. “Manifestement, j’ai vu juste en affirmant que Monsieur Ousmane Sonko éprouve une nostalgie sans doute légitime de ma modeste personne. Sa volonté de se mesurer ne me gêne aucunement”, écrit-il.
Amadou Ba ajoute: “Aussi, j’accepte volontiers son invitation à un débat public et contradictoire. Nos équipes respectives pourraient se rencontrer pour déterminer les modalités pratiques. D’ici là, j’espère qu’il mettra à ma disposition les rapports qu’il a évoqués et rendra publics tous les échanges entre le Premier ministre que j’étais et les ministres concernés par les allégations, pour que l’on puisse discuter utilement de toutes les questions soulevées dans lesdits rapports”
Il propose pour finir: “Au-delà des sujets qu’il propose, bien qu’il soit curieux qu’il délimite lui-même les sujets, le débat devra porter sur tous les aspects de la vie de notre nation (économie, finances publiques, pouvoir d’achat, emploi, libertés publiques, institutions, justice, ressources naturelles, inondations, éducation, santé, sécurité, diplomatie, etc.). Soucieux des solutions aux problèmes de notre peuple, je ne peux que me réjouir que la politique soit une confrontation d’idées”.
BARTH’ VISE ET FAIT MOUCHE
Je confirme que Bougane est un otage politique. Les Sénégalais se rendent de plus en plus compte qu’ils ont été manipulés. Depuis mars 2024, nous n’avons pas de réelle politique contre le chômage -Une autre voie est possible, et c’est la nôtre
Serigne Saliou Diagne et Bocar Sakho |
Publication 24/10/2024
Barthélemy Dias, maire de Dakar, par ailleurs tête de liste de la Coalition «Samm sa kaddu» pour les Législatives anticipées, estime qu’ils sont prêts à diriger le pays, dans le cadre d’une cohabitation, si les électeurs leur font confiance le 17 novembre prochain. Pour «faire face aux menaces qui pèsent sur l’harmonie sociale», il appelle à «une autre voie», celle qu’incarne sa coalition. Le maire de Dakar veut imposer une cohabitation inédite au pouvoir Pastef.
Vous avez été choisi pour conduire la liste «Samm sa kaddu». Quel est votre état d’esprit à la veille du démarrage de la campagne électorale ?
J’ai été effectivement choisi par la Coalition «Samm sa kaddu», composée de plusieurs leaders de partis politiques, pour diriger la liste. C’est pour moi un honneur que j’apprécie à sa juste valeur, et je remercie tous ceux et celles qui m’ont fait confiance. Je rappelle que nos listes aux scrutins majoritaire et proportionnel sont composées de personnalités qui ont fait leurs preuves dans les domaines d’activités où elles interviennent : partis politiques, organisations de la Société civile, acteurs économiques, associations et mouvements organisés de jeunes et de femmes… Je leur rends hommage d’ailleurs pour l’esprit d’ouverture, la solidarité et le courage dont elles font preuve depuis le début.
Dans quelques jours, ce sera le début de la campagne électorale. J’aborde cette étape avec beaucoup de sérénité, parce que nous allons à un rendez-vous qui a un rapport avec la vérité. La campagne sera un moment de clarification pour les Sénégalais. Notre pays traverse des moments de doute existentiel qui font que personne n’a plus de certitudes sur l’avenir. L’image et l’expression les plus utilisées sont que notre bateau n’a plus de capitaine, faute de boussole et de repères fixes. Les Sénégalais se rendent compte de plus en plus qu’ils ont été manipulés et entraînés par la force des choses dans une voie sans issue. Le plus surprenant, c’est l’hypothèque que l’on fait peser sur la cohésion et l’unité nationales, rudement mises à l’épreuve presque tous les jours par des déclarations dangereuses, comme s’il y avait quelque part un désir de revanche sur le Sénégal. Je laisse aux psychologues et aux sociologues le soin de nous expliquer le pourquoi de certains comportements qui ne sont pas adaptés à notre volonté commune de vivre ensemble dans la paix et l’harmonie. C’est encore pire dans le pilotage des politiques publiques. Les nombreuses erreurs commises en sept mois de pouvoir ont mené le pays dans l’impasse et ont fini de conforter les Sénégalais dans l’idée qu’ils se sont trompés. J’ai une philosophie et une approche de la vie assez singulières. Pour moi, le mensonge et la manipulation ne mènent à rien, dans la vie politique comme dans la vie quotidienne. La vérité finit toujours par triompher. Personnellement, on ne me prendra jamais à défaut sur ces questions de principes et de valeurs.
Au-delà de dénoncer certaines postures comme vous le faites, qu’est-ce que vous comptez proposer aux Sénégalais lors de cette campagne électorale ? Pourquoi devraient-ils voter pour votre coalition ?
Nous comptons dire la vérité à nos compatriotes. Leur dire que les conditions de vie très difficiles qu’on leur a imposées ne sont pas une fatalité. De ma position en tant que maire de Dakar, je vois la précarité se diffuser dans nos ménages. Je rencontre beaucoup de personnes qui me confessent leurs difficultés à joindre les deux bouts, des pères et mères de famille qui ont de plus en plus de problèmes pour nourrir leurs enfants. Pour preuve, l’essentiel des courriers que je reçois est constitué de demandes d’aide pour le paiement du loyer, de secours, de prises en charge dans les hôpitaux ainsi que des requêtes de bourse scolaire. C’est la notion-même de dignité humaine qui est mise à mal dans notre pays depuis sept mois à cause des politiques hasardeuses, des choix économiques qui font des victimes par milliers. Je pense à nos vaillants industriels, aux chefs d’entreprise, aux acteurs du secteur informel et aux différentes catégories socioprofessionnelles dont les activités ont cessé de se développer. Il est inutile de revenir sur les déclarations qui heurtent la sensibilité de nos populations, des diplomates installés dans notre pays, ainsi que celle de nos partenaires techniques et financiers. Tout compte fait, il nous faudra reconnaître cette réalité vertigineuse : le pouvoir actuel ne fait rien, absolument rien de sérieux pour écarter les menaces qui pèsent sur la survie des individus, des entreprises et de notre Nation en général. Mais vous avez raison : nous ne nous arrêtons pas aux constats. Nous irons à la rencontre des Sénégalais pour leur dire clairement qu’il est possible de sortir de l’impasse à condition de faire le bon choix le jour du scrutin et de ne pas laisser leur avenir entre des mains inexpertes.
Une autre voie est possible, et c’est celle que nous incarnons avec la Coalition «Samm sa kaddu» dont le contrat de législature sera soumis aux Sénégalais. Nous ne comptons pas rester les bras croisés face à la crise qu’ils ont installée dans le pays, ainsi que toutes celles qui risquent de survenir si nous commettons l’erreur de leur donner une majorité à l’Assemblée nationale. Pour cela, il faudra instaurer une cohabitation afin de rééquilibrer le rapport de force et d’inverser cette tendance destructrice.
Mais est-ce que vous pensez que notre pays est prêt pour une cohabitation qui serait une grande première ?
Rien ne justifie que l’on continue à faire confiance au président de la République, à son Premier ministre et à son gouvernement, dès lors qu’ils nous mènent à une impasse, comme je l’ai dit tantôt.
La crise dans laquelle nous sommes, était prévisible du fait de l’avalanche de promesses non tenues, tant en matière de choix économiques et sociaux qu’en matière de gouvernance. Les premiers actes posés sont tout au contraire annonciateurs d’une dictature.
Si les Sénégalais nous donnent la majorité à l’Assemblée nationale, nous formerons un gouvernement d’union nationale dont l’une des missions premières sera de rétablir les grands équilibres macro-économiques, de ramener la paix et l’harmonie sociale dans notre pays.
Vous pensez que la cohésion nationale est menacée ?
Vous avez récemment suivi les sorties de piste des nouvelles autorités, notamment le débat sur le port du voile, ainsi que les déclarations malveillantes et désobligeantes à l’endroit des guides de nos confréries religieuses. Le Sénégal a toujours été à l’abri de ces dérives qui minent la cohésion sociale et la stabilité de notre Nation. Je m’étonne d’ailleurs que l’auteur des discours aussi subversifs sur nos confréries soit toujours dans l’espace présidentiel.
A supposer que vous ayez la majorité absolue à l’Assemblée nationale, est-ce que le président de la République est obligé de choisir un Premier ministre de votre camp ?
Il va de soi que si nous gagnons, le président de la République n’aura d’autre choix que de se tourner vers nous pour nommer un Premier ministre, qui se chargera ensuite de former son gouvernement. C’est une question de bon sens et de logique. Je pense d’ailleurs que c’est la meilleure chose qui puisse arriver à notre pays. Il faut expérimenter le concept de gouvernance concertée qui permet à toutes les parties prenantes de se concerter et d’échanger sur la marche du pays.
En cette période d’incertitudes et de grands dangers que le nouveau pouvoir fait courir à la stabilité et à l’harmonie nationales, la cohabitation est une chance inespérée. C’est pourquoi il faut se retrousser les manches, aller rencontrer les Sénégalais et leur expliquer qu’ils ont entre leurs mains le pouvoir de mettre un terme au désordre que le nouveau pouvoir a installé dans ce pays. Avec mes colistiers, je m’y emploierai de toutes mes forces pour que le pays retrouve le chemin de la paix et de la quiétude qu’il n’aurait jamais dû quitter.
Ousmane Sonko a récemment affirmé que tous les chiffres sur les indicateurs économiques ont été falsifiés pour masquer la gravité de la situation de notre pays. Il a notamment indexé l’ancien président de la République, Macky Sall, et ses anciens ministres des Finances. Qu’en pensez-vous ?
Ceux qui ont été cités n’ont qu’à répondre de leurs actes si les accusations sont avérées. Je dis bien si les accusations sont avérées, parce qu’ils nous ont habitués à des accusations grotesques et fantaisistes dont le seul soubassement est de manipuler les populations. Tout le monde sait que les tenants du pouvoir sont à la recherche d’arguments de campagne et tous les moyens sont bons, pourvu que l’objectif politique recherché soit atteint. Je ne partage pas cette manière de faire de la politique. Un homme d’Etat respectueux de la séparation des pouvoirs et de sa parole aurait dû laisser les corps de contrôle faire normalement leur travail. Tout ce tintamarre nous renseigne sur le fait que la politique politicienne revient en force dans notre pays, au détriment du sérieux et du sens des responsabilités. Il n’est donc pas étonnant que notre pays s’enfonce de jour en jour dans la crise, avec des conséquences ravageuses sur le bien-être des populations.
Pour en revenir à votre contrat de gouvernance, qu’est-ce que vous proposez ?
D’abord, il faut rapidement se pencher sur les conditions de vie des populations qui se sont davantage dégradées durant ces sept derniers mois. Il faut prioriser le bien-être des populations, refuser que des gens puissent continuer de souffrir parce qu’ils n’ont pas les moyens de subvenir à leurs besoins primaires. Nous voulons ériger la dignité humaine au rang de priorité, et cela passe par de nouvelles lois beaucoup plus adaptées. Des initiatives sociales seront prises, à l’exemple de celles que nous mettons en œuvre à la Ville de Dakar. Il faudra des politiques plus hardies et davantage ciblées, capables de répondre à la demande sociale. Personne ne doit être laissé en rade.
Depuis mars 2024, nous n’avons pas connaissance d’une réelle politique contre le chômage.
La question du chômage des jeunes sera examinée et traitée avec la même détermination. Il y a un vrai basculement que les données issues du dernier recensement de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (Ansd) mettent en lumière. Les trois-quarts de la population sénégalaise ont moins de 35 ans et l’âge médian se situe désormais à 19 ans. Autrement dit, les populations de 0 à 19 ans constituent la moitié de la population sénégalaise, estimée à un peu plus de 18 millions. L’observation des tendances de fond, démographiques et sociales montrent une population très jeune soumise à un «effet stock» qui perturbe la morphologie et l’homogénéité de la pyramide des âges, avec une base élargie et un sommet effilé. Cet état de fait a accentué le désœuvrement ainsi que le désespoir des jeunes, qui prennent d’assaut les pirogues à la recherche d’un avenir meilleur. Nous sommes tous témoins ces derniers temps de grandes tragédies à l’échelle humaine.
Nous avons une émigration du désespoir accentuée par les nouvelles autorités qui procèdent à des licenciements abusifs et à l’arrêt des activités économiques dans certains domaines tels que le Btp.
Il faut un cadre de référence globale qui offre plus de lisibilité et une approche pragmatique des problèmes de jeunesse. Je suis d’accord que si nous ne prenons pas en charge cette catégorie d’âge, nous risquons de passer complètement à côté.
Vous avez donc la solution au problème ?
Je ne suis pas dans la démagogie. Il faut tenir un langage de vérité aux jeunes, et non profiter de leur détresse pour leur vendre des rêves chimériques.
Notre philosophie est qu’il faut avoir une démarche claire vis-à-vis de cette catégorie d’âge. Toutes les initiatives qui seront prises en la matière le seront avec la jeunesse pour l’impulsion des réformes nécessaires.
Notre pays regorge de talents et d’expertises reconnues au-delà de nos frontières. Il faut s’ouvrir à toutes les intelligences, éviter de s’enfermer dans le sectarisme et mobiliser toutes les énergies pour la recherche de solutions négociées et partagées. Personnellement, je crois au partage, à l’ouverture vers l’autre, parce que pour diriger efficacement un pays comme le nôtre, il faut être à l’écoute.
Comment appréciez-vous ce qui s’est passé à Bakel ces derniers jours ?
Vous me permettez d’abord d’avoir une pensée pieuse pour les populations de Bakel, de Matam, de Kanel, de Kidira et de Podor, qui sont dans le désarroi. Je dénonce avec vigueur le manque de réactivité des autorités qui auraient dû agir dès les premières alertes, en déployant les moyens nécessaires pour prévenir ce drame. Je dis bien drame, parce que des familles entières ont perdu tous leurs biens, des villages et des hameaux ont été emportés par les eaux.
Notre coalition, «Samm sa kaddu», a estimé nécessaire de se déplacer pour leur apporter assistance. C’est en cours de route que le président Bougane Guèye Dany a été arbitrairement arrêté par les Forces de l’ordre, et les autres leaders brutalisés. Ceci constitue une violation flagrante des droits et libertés individuels et collectifs. Nous exigeons sa libération immédiate et sans conditions.
Nous sommes décidés à ne plus accepter que la Justice soit instrumentalisée pour des raisons purement politiciennes.
Un des leaders de votre coalition, Bougane Guèye Dany, est détenu à Tambacounda, attendant son procès. Vous avez soutenu que c’est une prise d’otage d’un adversaire politique par le pouvoir. Qu’est-ce que vous comptez faire pour sa libération ?
Bougane Guèye est un candidat aux élections législatives dont la campagne démarre dimanche prochain. A ce titre, il doit bénéficier de toutes les libertés garanties par la Constitution pour battre campagne aux côtés de ses colistiers. Nous avons déjà organisé une conférence de presse pour dénoncer cette forfaiture, pour que les Sénégalais sachent que c’est une affaire strictement politique. Je confirme encore que Bougane Guèye est un otage politique. Son arrestation procède d’une logique de sabotage du scrutin. Le président de la République et son Premier ministre font tout pour fausser l’esprit des Législatives du 17 novembre prochain afin d’obtenir une majorité à l’Assemblée nationale. Nous sommes au courant des stratégies déployées pour déstabiliser notre liste, parce qu’ils savent que la Coalition «Samm sa kaddu» est l’avenir du Sénégal. Nous comptons saisir l’ensemble des chancelleries africaines et occidentales pour porter toutes les informations nécessaires à leur attention. Elles sont témoins des dérives en cours, des atteintes aux libertés publiques et de la violation des règles du jeu démocratique. Les tenants du pouvoir ont violé le Protocole additionnel de la Cedeao en organisant des élections sans initier le dialogue avec les partis politiques.
Une campagne d’information et de sensibilisation sera également menée auprès de la Société civile pour qu’elle soit plus vigilante face à cette situation.
Le Pur a démenti les allégations faisant état du retrait de ses membres de votre coalition. Quels commentaires en faites-vous ?
Effectivement, le Pur a démenti ces informations. Il a réaffirmé son ancrage dans la Coalition «Samm sa kaddu». Je profite d’ailleurs de l’occasion pour manifester toute ma sympathie et mon estime pour Serigne Moustapha Sy. Il a consenti des efforts énormes pour la victoire éclatante de notre coalition au soir du 17 novembre prochain.
Vous savez certainement que depuis que nous avons confectionné notre liste, nous assistons à des opérations visant à saborder nos bases. Ce qu’on peut appeler l’affaire Déthié Fall est la dernière en date. C’est la première fois, si ma mémoire ne me trompe pas, qu’un Premier ministre reçoit une personne d’une liste concurrente à grand coup de publicité et de communication. Pour moi, c’est un bon baromètre et une mesure de l’état d’affolement des tenants du pouvoir, qui savent qu’ils vont laisser des plumes dans ces élections législatives. C’est pourquoi ils procèdent à des tentatives de débauchage de maires et d’élus locaux. Je peux vous assurer qu’ils se trompent de stratégie. La majorité silencieuse, qui détermine au final le résultat du scrutin du 17 novembre prochain, attend le moment venu pour se prononcer, comme elle sait le faire. La transhumance qu’ils sont en train de promouvoir est la preuve qu’ils ne respectent pas leur parole, parce qu’ils avaient promis qu’une fois au pouvoir, ils allaient mettre fin à ces pratiques.
Il y a de cela quelques semaines, vous avez présenté un bilan à mi-mandat aux populations de Dakar pour votre gestion de la mairie. Cette obligation de transparence que vous vous donnez au niveau de la municipalité, influera-t-elle sur votre dynamique au Parlement, pour contrôler du mieux l’action du gouvernement ?
Ce que nous sommes en train de faire à la mairie doit faire tache d’huile. Dans tous les cas, c’est ce que les populations attendent de nous. La redevabilité est une obligation pour tous ceux qui prônent une bonne gestion. Il faut savoir rendre compte, et c’est ce que nous avons fait tout dernièrement à la Ville de Dakar. En particulier, le bilan à mi-mandat nous a permis de rencontrer les populations et de leur dire : voilà comment l’argent de vos impôts a été utilisé. Il faut le reproduire partout, dans toutes les sphères de la vie publique. J’espère que la prochaine Assemblée nationale jouera sa partition dans le contrôle de l’action gouvernementale. Si nous sommes majoritaires au Parlement, nous veillerons à ce que ce sacro-saint principe d’une République normale soit respecté pour que l’Assemblée nationale soit véritablement à sa place.
Par Ibou FALL
DIOMAYE FAYE SE FAIT REMARQUER PAR SA TENUE DE CAMOUFLAGE...
Le défilé militaire face aux catastrophes reste identique. Cette mise en scène guerrière face aux catastrophes trahit une conception dépassée de l'action politique. C'est le révélateur d'une gouvernance confondant l'apparence et l'efficacité
Un chef de l’Etat qui s’affuble d’un camouflage pour ne pas passer inaperçu, il faut avoir vécu jusqu’en 2024 pour revoir ça. Certes, le costume et la mise en scène rappellent l’attirail du bedonnant Macky Sall dix ans auparavant, qui saute alors depuis son piédestal jusqu’à une défaillante station de traitement des eaux avec, dans la garnison héroïque et vengeresse, l’inévitable Mimi Touré. Un spectacle affligeant que l’on ne pense pas revoir de sitôt. Hélas…
Ça ne prend pas tous les mêmes, mais ça recommence
Au moins, on ne mourra pas idiot : c’est pain béni, de notre vivant, d’avoir la chance insigne de savourer également le spectacle touchant du svelte président Bassirou Diomaye Faye en camouflage de commando, manches retroussées, chapeau de brousse sur la tête et rangers aux pieds, le pas décidé, s’apprêtant à affronter ces maudites eaux qui troublent son magistère en semant la désolation dans l’Est.
Un inévitable lâcher des eaux nous apprend-on doctement du côté de l’Omvs, pour éviter que les ouvrages ne cèdent sous le poids du trop-plein d’eau. Le pourquoi du comment sera sans doute réservé à plus tard, après que les ministres et chefs d’Etat de l’organisation auront papoté au sujet du sexe des anges engendrés par la décrue du fleuve Sénégal.
Mieux vaut tard que jamais, dit le sage… Là, en effet, ce n’est plus le temps de verser une larme et se faire du mouron concernant nos pauvres concitoyens qui voient les eaux en furie dévaster leur vie. Le temps, déjà perdu, est désormais à l’action.
Retour à la case départ.
C’est en avril 2024, dès leur accession au pouvoir, que le nouveau régime doit labourer l’arrière-pays, ce Sénégal des profondeurs qui vote pour un quasi inconnu au CV rachitique. Par gratitude et en reconnaissance : dire merci et, en même temps, s’enquérir des urgences de ce peuple exaspéré mais patient, qui sait changer de direction quand le guide qu’il se choisit prend la mauvaise pente. Il ne manquera sans doute pas, au cours de ces tournées d’information, un compatriote au langage assez direct pour leur expliquer les aléas des hivernages et les urgences de l’heure.
Il n’en sera rien…
Le président nouvellement élu préfère prendre l’avion et visiter le gratin planétaire, poser avec les grands du monde, ressasser des antiennes sur l’avenir de l’humanité. Quant aux Sénégalais qui attendent un, euh, projet de société censé les mettre à l’abri de la misère, ils peuvent attendre les bienfaits de l’horizon 2050, les pieds dans l’eau, le pantalon retroussé et le baluchon sur la tête.
Là, le président Bassirou Diomaye Faye leur fait l’honneur de les regarder de haut, les survoler, après la promesse d’un budget de huit milliards de nos pauvres francs Cfa à propos desquels personne ne sait trop quelles plaies ces numéraires sous-développés vont panser. Bien sûr, sur place, le sauveur sublime ne manque pas d’annoncer une décision forte pour marquer sa détermination. Ce sont les orpailleurs qui écopent pour l’occasion
Pendant ce temps, Ousmane Sonko, le «meilleur Premier ministre de tous les temps» selon son admirateur de président, organise sa quête à Dakar Arena en direction des Législatives. Apparemment, il ne doit pas rester grand-chose des fonds politiques, ou même des autres tiroirs où ça peut racler les deniers publics sans histoire, puisque le président du parti Pastef, téméraire tête de liste de la coalition du même nom, s’oblige à réclamer une dîme à ses inconditionnels, via Kopar Express
J’oubliais : en avril 2024, quand Macky Sall leur remet de mauvaise grâce les clés de la maison Sénégal, ils trouvent des comptes falsifiés et un pays en ruine.
Qu’à cela ne tienne : aux yeux de Ousmane Sonko, l’occasion est trop belle pour présenter sa version de l’histoire des événements de 2021 à 2024. Bien sûr, il est surtout question de son génie politique et sa vista stratégique qui installeront Pastef aux commandes de la République. Bien entendu, ses disciples boivent du petit lait : «Ousmane Mou Sèll Mi» est un visionnaire qui voit les emmerdes arriver au grand galop, prévoit les chausse-trappes, anticipe les complots et pousse le patriotisme jusqu’à renoncer à la présidence de la République pour laisser passer son second, qu’il surnomme «Serigne Ngoundou».
Le Patriote Suprême pousse le génie jusqu’à tomber sciemment dans le piège de Sweet Beauté. Rassurez-vous, c’est fait exprès… Ses condamnations pour «corruption de jeunesse» et diffamation sont programmées, histoire de divertir la tyrannie en place qui ne fera pas attention au placide Bassirou Diomaye Faye, déjà en prison.
Ses ruses de sioux portent leurs fruits : le 24 mars 2024, 54% de l’électorat sénégalais plébiscitent son bras gauche.
C’est le moment aussi que choisit Bougane Guèye Dany pour se signaler à l’attention de ses futurs électeurs : au prix de sa liberté et au péril de sa vie, il ira porter son aide aux sinistrés du Sénégal oriental. Bien entendu, les Forces de l’ordre ne l’entendent pas de cette oreille, surtout quand leurs patrons reçoivent des ordres d’en haut. Ça finit par une arrestation musclée, une garde-à-vue et un mandat de dépôt. La comparution devant les juges en flagrants délits est fixée à la semaine prochaine, le 30 octobre, précisément. Pour l’heure, Bougane Guèye Dany attend en prison à Tambacounda que la Justice se prononce sur son refus d’obtempérer aux ordres des gendarmes.
Les vitupérations des leaders de la Coalition «Samm sa kaddu», Barthélemy Dias en tête, n’y feront rien. Enfin, pas tous. On apprend que Déthié Fall, troisième sur leur liste nationale, en bon politicien africain, bavarde nuitamment avec Ousmane Sonko. Un peu comme son mentor de l’époque, Idrissa Seck, alors chef de l’opposition, qui négocie le fromage du Cese en catimini avec Macky Sall, pendant que ses ouailles crachent le feu sur le régime.
Un jour lointain, quand le suicidaire manitou de «Gueum sa bopp» sera du camp des vainqueurs, il ne faudra pas s’étonner de le voir rassembler ses ouailles à Dakar Arena pour leur expliquer le génie politique qui dort alors en lui et inspire cette manière téméraire mais stratégique de se jeter volontairement en prison ; ce qui serait, selon ses prédécesseurs, «le raccourci pour le Palais».
C’est le moment que choisit Amadou Ba pour sortir du bois. Devant la presse, à la Maison du Parti socialiste -légitime retour à la maison-mère- , le candidat arrivé deuxième à la Présidentielle de mars 2024 remet les points sur les «i». Selon lui, malgré son silence depuis la dernière présidentielle, on sait à présent «qui a trahi qui»… L’occasion est trop belle pour ne pas se laver à grande eau : il ne meurt pas de faim, à n’en pas douter, mais ce n’est pas un crime quand on n’a rien à se reprocher. Ça tombe bien, le Premier ministre Ousmane Sonko, qui l’accuse de tous les péchés d’Israël dont une falsification des comptes et une fortune inexplicable, le défie : un débat public pour solde de tout compte.
Perso, je ne crois pas une seconde que ce débat aura lieu. Mais le hic ne viendra pas de Amadou Ba : ses lieutenants le disent favorable au duel, en tout lieu, à tout moment. La douche froide viendra du Cnra : sous la férule de son nouveau président, Mamadou Oumar Ndiaye, qui déclare n’avoir pas l’intention de jouer les gendarmes, l’organe de régulation fait tout de même la police de circonlocution…
Problème : personne n’exige qu’il soit médiatisé. Si ça se tient en plein air, devant une foule de curieux, loin des télévisions et des radios, en quoi le Cnra est-il concerné ? La parade rappelle les esquives de Ousmane Sonko lorsque la Justice le convoque dans l’affaire Adji Sarr, ou Mame Mbaye Niang : il a toujours un ami qui ne lui veut que du bien pour bondir de nulle part et l’empêcher de déférer aux convocations.
Et même lorsqu’en sa qualité de Premier ministre, Ousmane Sonko doit affronter les représentants du peuple pour sa Déclaration de politique générale, c’est depuis les rangs des députés que jaillit la lumière : Guy Marius Sagna, avec sa verve coutumière, lui présente l’excuse du Règlement intérieur pour sortir du traquenard par une porte dérobée, avant que le président de la République soi-même ne dissolve le parlement.
Tout ça nous rappelle les années de braises, avec le pic de la présidentielle de 1988, lorsque l’opposant Wade et ses ouailles dont l’actuel président du Cnra, réclament un face-à-face avec le Président Diouf. Les Socialistes, qui ne misent pas trop sur le canasson qui leur sert de poulain, multiplient les prétextes pour éviter le massacre en direct…
Bref, il n’est pas question de tenir ce face-à-face auquel Barthélemy Dias veut resquiller en précisant que seul l’usage du français, la langue officielle, sera toléré… C’est un coup en bas de la syntaxe ?
MAMADOU HADY DEME DÉNONCE LA TRANSHUMANCE POLITIQUE À LA VEILLE DES ÉLECTIONS
« C’est une démarche qui se répète de plus en plus et c’est vraiment dommage. Il faut assainir le milieu politique avec des relations de confiance », a déclaré l'enseignant-chercheur.
Dr Mamadou Hady Deme, enseignant-chercheur à la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques (FSJP) de l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD), a, lors de son intervention dans l’émission Pluriel sur la RTS, exprimé son inquiétude face au phénomène de transhumance politique à l’approche des élections législatives. Pour lui, cette pratique représente un véritable problème éthique qui ternit l’image de la politique sénégalaise.
« C’est une démarche qui se répète de plus en plus et c’est vraiment dommage. Il faut assainir le milieu politique avec des relations de confiance », a déclaré Dr Deme. Il a notamment déploré la multiplication des changements d’allégeance à la veille des élections, soulignant l’importance de la cohérence et de la fidélité politique dans une démocratie.
L’intervention du Dr Deme fait écho au récent désistement de Déthié Fall, leader du Parti pour le Renouveau Démocratique (PRD), qui a quitté la coalition Samm Saa Kaddu pour rejoindre la liste du Pastef en vue des législatives du 17 novembre prochain. Selon Dr Deme, bien que Déthié Fall puisse avoir des raisons personnelles justifiant son choix, ce revirement est perçu comme regrettable : « C’est vraiment dommage pour quelqu’un qui est vu comme l’inventeur de l’intercoalition Samm Saa Kaddu… Mais tout compte fait, la réalité est que c’est une démarche terrible», a-t-il affirmé.
Dr Deme a également abordé le cas de Moussa Ngom, qui, lors des élections municipales de février 2022, avait confisqué les listes de la coalition Yewwi Askan Wi avant d’être reçu en audience par le président Macky Sall. Plus récemment, lors des dépôts des listes pour les législatives, le mandataire de Me Moussa Diop aurait pris la fuite avec ces documents, illustrant à nouveau les comportements controversés observés sur la scène politique sénégalaise.
Ces événements, pour Dr Deme, posent la question de l’éthique dans la politique sénégalaise, notamment à la veille d’échéances aussi importantes que les législatives.
Il appelle à un véritable assainissement du milieu politique, fondé sur des relations de confiance entre les acteurs et une fidélité aux engagements pris devant les électeurs.
CHEIKH DIENG S’ENFOUIT DANS LES ÉGOUTS
L'ancien patron de l'assainissement, qui se posait en lanceur d'alerte sur la gestion des marchés publics, pourrait bien voir sa crédibilité engloutie par cette affaire de Land Cruiser aux relents de conflit d'intérêts
M. Cheikh Dieng, ancien Directeur général de l’ONAS, a été de nouveau auditionné avant-hier, mardi 22 octobre, par la Section de Recherches de la Gendarmerie. Au cœur de l’enquête : un don de véhicule d’une valeur de 80 millions cfa offert par une entreprise titulaire d’un marché public, soulevant des suspicions de conflits d’intérêts et de falsification de documents. De quoi l’ancien directeur général limogé de l’Onas et ses supporters auraient-ils peur. En définitive, les premiers éléments de l’enquete risquent d’enfouir Dr Cheikh Dieng dans les égouts…
Nouveaux rebondissements dans l’affaire de l’Office National de l’Assainissement du Sénégal (Onas). L’ancien directeur général, Cheikh Dieng, démis de ses fonctions il y a quelques mois, a été entendu mardi 22 octobre pour la deuxième fois par la Section de Recherches de la Gendarmerie. L’audition, qui a duré plusieurs heures, s’est déroulée en présence du Directeur Administratif et Financier (Daf) de l’Onas, un proche de M. Dieng, et s’est suivie d’une confrontation avec le Directeur du projet du collecteur Hann-Fann, un chantier supervisé par l’Onas.
Cette série d’auditions s’inscrit dans le cadre d’une enquête judiciaire ouverte après les déclarations médiatiques de M. Dieng, où il avait dénoncé des pratiques illicites au sein de l’Office. Cependant, le cœur de l’enquête porte sur un présumé don d’un véhicule d’une valeur de 80 millions CFA, offert par une société titulaire d’un marché public. Cet avantage accordé alors que M. Dieng était encore en poste, soulève de sérieuses questions sur de potentiels conflits d’intérêts et sur la bonne gouvernance au sein de l’institution publique.
Il ressort de certaines informations que les auditions auraient permis aux enquêteurs de se pencher plus en profondeur sur ce don de véhicule incriminé et , qui pourrait constituer une violation des règles d’éthique. Certains observateurs critiquent cependant un traitement sélectif de l’information, soulignant que plusieurs aspects de cette affaire semblent délibérément omis.
Le cas du véhicule, un 4x4 Land Cruiser offert par l’entreprise Synergie Afrique, est au centre des investigations. Ce véhicule, initialement présenté comme une acquisition liée au projet du collecteur Hann-Fann, figure dans des documents distribués à la presse par M. Dieng lors de sa conférence de presse. Pourtant, l’Ons a révélé que ces documents auraient été falsifiés, la ligne concernant le véhicule ayant été ajoutée après coup. En effet, la ligne XIV-4 du document original du projet ne comporte pas cette inscription qui suit : un « véhicule 4X4 Land Cruiser». La véritable ligne dans le devis original concernait des plaques en fonte dénommée « Plaques de fonte de classe C250 dimension 800 » destinées au projet d’assainissement.
Suite à cette découverte, l’Onas a déposé une plainte contre M. Dieng le 20 août 2024 pour « falsification de documents ». Ce dépôt a eu lieu un jour avant celui de l’ancien député Thierno Alassane Sall en date du 21 août, qui accuse également l’ex-Dg de malversations. Une question se pose donc : pourquoi ouvrir l’enquête sur les marchés publics avant de traiter celle concernant la falsification de documents ?
Une enquête orientée ?
Les partisans de M. Dieng, quant à eux, dénoncent une enquête orientée voire ciblée, accusant les autorités de vouloir détourner l’attention du véritable enjeu : la gestion des marchés publics par l’Onas Pourtant, selon plusieurs observateurs, il est essentiel de ne pas perdre de vue le fait que M. Dieng a reconnu avoir reçu le véhicule de 80 millions, tout en niant tout acte répréhensible. La question de la falsification des documents reste cependant un point crucial qui pourrait remettre en question la probité de l’ancien directeur. Selon certains acteurs au fait de ce dossier si Dr Cheikh Dieng a menti sur la voiture, il pourrait également avoir menti sur les marchés. C’est simplement une curieuse relation à la probité qui apparait au grand jour.
L’enquête suit son cours à la direction de la Section de Recherches, et l’agenda des auditions est soigneusement encadré par les autorités judiciaires. Tandis que la lumière tarde à se faire sur la gestion des marchés publics, il semble que la question du véhicule reste un point sensible et symptomatique des dérives possibles dans la gestion des fonds publics. En plus de la plainte de l’ancien député Thierno Alassane Sall, il y a aussi d’autres, celles des entreprises que l’ancien Dg avait accusées d’avoir « négocié directement avec le ministre ». L’entreprise VICAS lui avait servi une sommation interpellative par voie d’huissier pour confirmer ses propos. L’huissier n’avait jamais réussi à retrouver l’ancien directeur général malgré les nombreux déplacements effectués pour ce faire. Il avait « disparu », miraculeusement.
NIASSE, IDY, KHALIFA, AMINATA MB. NDIAYE, GAKOU, LE CREPUSCULE DES MOHICANS
Malgré la pléthore de listes engagées dans la bataille électorale pour obtenir des sièges dans l’imposante bâtisse en face de la place Soweto, des figures emblématiques de la vie politique nationale brilleront par leur absence sur les listes en lice
Les élections législatives du 17 novembre prochain seront âprement disputées. Malgré la pléthore de listes engagées dans la bataille électorale pour obtenir des sièges dans l’imposante bâtisse en face de la place Soweto, des figures emblématiques de la vie politique nationale brilleront par leur absence sur les listes en lice. Idrissa Seck, Khalifa Sall, Aminata Mbengue Ndiaye, Moustapha Niasse et Malick Gakou ne participeront pas aux prochaines législatives. Un fait inédit.
Ce sont les derniers Mohicans de la vie politique sénégalaise. Ils ont joué un rôle important dans le jeu politique ces quarante dernières années, en traversant presque tous les régimes qui se sont succédé. Aujourd’hui, le vent a tourné. Les partis politiques traditionnels sont en déclin et leurs figures tutélaires sont presque dépassées par les nouvelles réalités politiques. Le discours des vétérans n’attire plus et est jugé « désuet ».
Idrissa Seck, le « Mburu ak Soow » empoisonné !
Le « Ndamal Kàdjoor » avait une prestance inégalable. Son charisme et son discours attiraient les foules. Ancien proche collaborateur du Président Abdoulaye Wade, Idy, comme l’appellent ses partisans, a quitté le Parti Démocratique Sénégalais (PDS) pour fonder sa propre formation politique, baptisée Réwmi. Alors qu’il était pressenti pour être le successeur potentiel du « Pape du Sopi », les déboires judiciaires se sont enchaînés. Le dossier des chantiers de Thiès a même contribué à renforcer son aura politique. Là où Idy passait, les foules se mobilisaient. Sûr de lui-même, les négociations tenues avec Wade sous les caméras lui furent fatales. Il rate de justesse la consécration suprême lors des élections présidentielles de 2007, en arrivant deuxième avec un peu plus de 15 %.
En 2012, le régime de Wade arrivait à l’usure. Engagé au sein de la coalition Benno Siggil Sénégal (BSS), Idrissa Seck préfère se battre contre la troisième candidature « illégale » de Me Wade plutôt que de mener campagne. Il finira à la cinquième place. Une désillusion ! Il sera contraint de soutenir Macky Sall au second tour de cette présidentielle, en intégrant la coalition Benno Bokk Yakaar (BBY), qu’il quitte en 2013. En 2014, il s’impose naturellement comme le chef de l’opposition à Macky Sall. A l’élection présidentielle de 2019, Idrissa Seck renaît de ses cendres en arrivant deuxième avec 20 % des voix. En 2020, en pleine pandémie de Covid19, il rejoint à nouveau Macky. Le « Mburu ak Soow », qu’il avait tant vanté pour qualifier son rapprochement avec Macky, lui sera ensuite fatal. Sa popularité dégringole. Après le renoncement du Président Sall, il quitte encore BBY. Il sera humilié lors de la présidentielle de 2024 où il n’obtient que 0,9 % des voix. La descente aux enfers se poursuit. La retraite politique d’Idrissa Seck, surpris par cette cuisante défaite, semble actée. Aujourd’hui, le « Ndamal Kàdjoor » est à l’écart, malgré l’effervescence du jeu politique. Le parti Réwmi est le grand absent des retrouvailles de la famille libérale sous la bannière de la coalition Tàkku Wàttu Sénégal, en vue des élections législatives du 17 novembre. Que mijote Idy ? Le silence est une forme de communication.
Khalifa Sall, de la gloire à la décadence
Surnommé Khaf, l’ancien maire de Dakar est un socialiste dans l’âme. Khalifa Sall a gravi les échelons au sein du Parti Socialiste (PS) sous le régime du Président Diouf. Il est élu maire de Dakar en 2009, un tournant dans sa carrière politique. Aux élections municipales de 2014, Khaf décide de se présenter sous la liste Taxawu Sénégal, malgré les mises en garde du PS. Un choix couronné de succès. Il est réélu après avoir écrasé « haut la main » la candidate du parti du président Macky Sall, une certaine Aminata Touré, à Dakar. L’ancien maire de Dakar affiche alors ses ambitions: infrastructures, financement, social. Sa popularité augmente au point que certaines voix socialistes le plébiscitent comme candidat à la présidentielle de 2019. Mais, face à un Macky déterminé à obtenir un second mandat, la neutralisation de Khalifa Sall devient inéluctable. Les membres du PS au sein de la coalition BBY sont alors divisés. Cela n’empêche toutefois pas Macky de conduire Khalifa Sall à l’abattoir. Le maire de Dakar est condamné dans l’affaire dite de la caisse d’avance en 2017, ce qui le rend inéligible par la suite. Un coup dur ! Il sera gracié en 2019. Entre-temps, de nouveaux pôles ont émergé. Les alliances deviennent plus que jamais un impératif. Dans le sillage des élections municipales de 2021, il met sur pied la coalition Yeewi Askan Wi, en compagnie de l’actuel Premier ministre Ousmane Sonko. Mais, avec les déboires judiciaires d’Ousmane Sonko, le vide s’installe rapidement. Chaque ténor de la coalition cherche à la diriger. C’est la guerre des « mâles dominants » ! Khalifa Sall décide alors de se porter candidat. Ce choix se soldera par un échec cuisant, puisqu’il arrive quatrième face à la machine de guerre de la coalition Diomaye Président. Aujourd’hui, Khaf est conscient des réalités politiques. Âgé de 68 ans, il a décidé de céder la place à son fidèle lieutenant de toujours, Barthélémy Dias. Cela ne signifie pas pour autant une retraite politique. L’ancien maire de Dakar a mis en place l’Alliance pour la Transparence des Élections (ATEL), regroupant 114 partis politiques. Selon Khalifa Sall, président de la coalition Taxawu Dakar, cette plateforme est une structure de réflexion et de lutte au service de la démocratie, afin que « notre pays continue d’être un modèle de démocratie et de transparence dans l’organisation des scrutins ». « La plateforme a pour but de faire en sorte que, dans les soixante prochains mois, nous puissions organiser un scrutin transparent, sincère et serein. Pour cela, il est essentiel que chaque parti joue sa partition et que le pouvoir en place respecte les textes régissant l’ensemble du processus », a-t-il expliqué. Selon l’ancien maire de Dakar le Sénégal connaîtra un scrutin particulier, car « les textes récemment publiés laissent perplexes beaucoup d’entre nous, qui avons l’expérience des élections dans ce pays ». Khaf cherche-t-il à renaître de ses cendres avec ATEL ?
La lionne du « Njàmbur » est un pilier du Parti Socialiste (PS). Elle a occupé le poste de ministre de la Famille et de l’Enfance sous la présidence d’Abdou Diouf. L’ancienne maire de Louga a gravi les échelons au sein du PS. C’est une figure qui a toujours fait l’unanimité au sein du parti. Son parcours en tant que ministre de l’Élevage est salué par les acteurs du secteur. Après le décès d’Ousmane Tanor Dieng, Macky Sall la nomme présidente du Haut Conseil des Collectivités Territoriales (HTTC), une institution décapitée par le Président Diomaye Faye. Si un parti politique a raté la coche du renouvellement générationnel, c’est bien le PS. Alors que de jeunes pousses comme Barthélemy Dias et Malick Noël Seck étaient perçues comme une aubaine pour rajeunir le parti, les avantages offerts par Macky Sall ont mis un frein à toute velléité de renouvellement. Les anciens socialistes n’ont jamais voulu céder la place aux jeunes, d’où les dissidences fréquentes, notamment celle de Khalifa Sall. Aujourd’hui, le « Wind of change » – vent du changement – souffle sur le Sénégal. La jeunesse est plus que jamais au rendez-vous. Aminata Mbengue Ndiaye l’a bien compris. Lors d’un comité de pilotage des investitures pour les législatives du 17 novembre, la secrétaire générale du PS a décidé de ne se présenter sur aucune liste, « non pas pour des raisons de santé, mais par principe et par grandeur ». Une décision sage, largement soutenue. Des hiérarques comme Serigne Mbaye Thiam et Alioune Ndoye lui ont emboîté le pas. Cette décision n’est-elle pas arrivée trop tard ?
Malick Gackou, le malchanceux ?
L’enfant de la banlieue a fait ses débuts au Parti Socialiste aux côtés d’Ousmane Tanor Dieng, Babacar Sine et Abdourahim Agne. Il est un pur produit de l’école du parti. En 1999, il quitte les socialistes pour rejoindre Moustapha Niass, qui venait de créer l’Alliance des Forces de Progrès(AFP) en vue de la présidentielle de 2000. Élu président du conseil régional de Dakar en 2009 dans la vague Benno Siggil Sénégal (BSS), il renonce en 2014 au poste de maire de Guédiawaye, au profit d’Aliou Sall, le frère du président Macky Sall. Incompréhensible pour beaucoup de ses partisans, certains y voyaient une attente tacite avec le régime de Macky sans aller plus loin. Des accusations qu’il a balayées d’un revers de main.
En 2015, il quitte l’AFP, où tous ceux qui exhibent des ambitions présidentielles sont quasiment exclus. Les élections présidentielles de 2019 et de 2024 ne sont pas des succès pour la tête de file du Grand Parti (GP). Malick Gackou est en retrait depuis l’élection du président Diomaye Faye où il s’était classé bon dernier. Pour les législatives du 17 novembre, malgré l’absence des membres du GP sur la liste de PASTEF, Malick Gackou a appelé une mobilisation de ses militants pour une victoire de ses anciens alliés. Relativement moins jeune que les autres Mohicans, Malick Gakou se singularise par sa longévité sur le champ politique. Mais l’homme, à force chaque fois de laisser la place aux autres favorisant notamment les élections d’Aliou Sall et d’Ahmed Aïdara, en n’osant pas affronter seul l’électorat pour se peser passe pour un poltron politique. Ceux qui croient en lui vivent des désillusions permanentes. L’homme doit tout simplement quitter le champ politique.
Le jeu politique national semble plus que jamais bouleversé. L’arrivée au pouvoir du PASTEF a sonné le glas des dinosaures politiques, fossilisés à travers les régimes qui se sont succédé depuis les indépendances. Toutefois, il est nécessaire de se demander si certaines formations politiques n’ont pas raté le rendez-vous du rajeunissement.
ALIOUNE SARR S’INTERDIT DE DIVERSION ET INVITE A LA MOBILISATION
Soixante-douze heures après le lancement officiel des activités de son nouveau parti Alliance pour le Sénégal/Andando Nguir Senegaal, le maire de la commune de Notto Diobasse n’a pas perdu du temps pour aller à la rencontre des militants de base.
Alioune Sarr ne veut pas laisser place à la diversion. Car il s’est fixé comme objectif de massifier son nouveau parti Alliance pour la République, et surtout d’apporter un soutien massif à Pastef et au président Bassirou Diomaye Faye pour une majorité confortable à l’Assemblée Nationale. Des enjeux qui ne devraient pas laisser place à la diversion. Recevant ses militants et responsables de sa base de Notto Diobass, l’ancien ministre a tout simplement appelé à la grande mobilisation. C’est le sens de la mobilisation politique de ce mercredi 23 octobre.
Soixante-douze heures après le lancement officiel des activités de son nouveau parti Alliance pour le Sénégal/Andando Nguir Senegaal, le maire de la commune de Notto Diobasse n’a pas perdu du temps pour aller à la rencontre des militants de base. En effet, il a reçu ce mercredi 23 octobre 2024 à Notto Diobasse, les principaux responsables de son Parti dans la perspective de la mobilisation de ses troupes en vue des prochaines législatives. Apres son appel pour donner une majorité confortable au Président de la République Bassirou Diomaye Faye aux prochaines législatives, pour lui permettre de procéder aux profondes réformes dont le pays a besoin, il a rappelé aux responsables de son parti la nécessité de se mobiliser pour éviter à notre pays un chaos institutionnel qui viendrait d’un blocage des institutions de la République à partir de l’assemblée Nationale. C’est pourquoi dira-t-il « nous devons donner à S.E.M. le Président de la République Bassirou Diomaye Faye tous les moyens législatifs pour mettre en œuvre sa vision de transformation du Sénégal, au bénéfice exclusif de nos populations, car émanant de la volonté populaire exprimée au suffrage universel le 24 Mars dernier ». Alioune Sarr, a cependant tenu à rappeler à ses militants que l’ambition première d’un parti politique demeure la conquête démocratique et l’exercice du pouvoir. Sous ce rapport, il a engagé les militants et les responsables de l’Alliance pour le Sénégal/Andando Nguir Senegaal à se mobiliser pour parachever l’implantation du parti et sa structuration et à refuser la diversion d’où qu’elle puisse venir pour atteindre les objectifs fixés par le Congrès du parti.
L’ancien ministre a saisi l’occasion pour décliner sa vision pour un SENEGAL PROSPERE. Pour cela, Alioune Sarr plaide pour une agriculture résiliente au service de notre souveraineté alimentaire. « Produire ce que nous consommons et consommer ce que nous produisons, une gouvernance économique rigoureuse et transparente et une diplomatie économique efficace » a souligné l’ancien ministre. Il est également revenu sur l’engagement de l’Alliance pour le Sénégal pour un accès à des soins de qualité et une assistance médicale à nos compatriotes les plus vulnérables. La sécurisation du foncier face à la pression et aux spéculateurs demeurent une priorité dans notre pays dira-t-il.