C’est à travers leur page Facebook dénommée «Avortement bien fait au Sénégal » que l’annonce est faite. Un avatar de femme enceinte portant un masque et une photo d’un rayon de pharmacie fait office de page de couverture, avec à l’appui un numéro de téléphone portable joignable 24 h/24. Il s’agit bien d’offres de services à domicile pour toute personne désirant faire un avortement clandestin.
Le mal semble plus profond et la tâche encore lourde dans la lutte contre l’avortement clandestin au Sénégal. D’après les chiffres du ministère de la Santé, publiés par «Africa check», notre pays a enregistré 34 079 cas d’avortements en 2020 contre 38 878 en 2019, 31 515 en 2018, 30 152 l’année d’avant, 28 339 en 2016 et 25 827 en 2015. Ces chiffres alarmants constituent les cas d’avortements signalés dans les structures sanitaires.
Toutefois, d’autres cas probablement moins élevés se passent dans la plus grande opacité. De plus en plus de personnes, certains se faisant passer pour des professionnels de la santé, d’autres de simples connaisseurs ou, pire encore, des amateurs, offrent leurs services aux personnes désireuses de se faire avorter. C’est l’exemple d’un groupuscule qui se présente comme des professionnels et « opère » à travers Facebook.
Leur page dénommée «avortement bien fait au Sénégal» sert d’espace publicitaire où l’on trouve facilement un contact visible dès les premières lignes. Des slogans attrayants comme «Ça fait des jours, des semaines et mois que tu cherches une meilleure solution à ton problème de grossesse non désirée, mais rien ne marche. Viens te débarrasser de cela, c'est une question de temps. Même si tu as un col dur. Sans effets secondaires ni conséquences». Ou « satisfaction obligatoire pour tous ceux qui me contactent», «Disponible pour tous vos besoins de médicaments d’avortement». Il y a d’autres affiches plus explicites avec une photo du comprimé Misoprosol en main : «Tu es enceinte et tu veux te faire avorter sans risque aucun sur la santé, sache qu'il te faut les comprimés (Misoprosol : ndlr). Contacte-moi ».
Avec une équipe qui a implanté ses services dans tout le pays, ils ont réussi à mailler tout le territoire. Ils sont installés à Dakar et sa banlieue, Thiès, Saint-Louis, Rufisque, Ziguinchor, Mbour et Kaolack…Il suffit juste de tomber d’accord avec votre interlocuteur pour que l’équipe de votre localité vous livre le produit en question. «L’As» a essayé d’entrer en contact via leur numéro sur Facebook avec un «gynécologue» : «Bonjour, j’ai eu votre contact à travers Facebook et j’aurais besoin de vos soins pour une cousine victime de grossesse indésirée», lance-t-on sur WhatsApp.
La réponse à l’autre bout du fil n’a pas tardé à tomber : «Oui c’est possible ! Votre sœur est à combien de semaines de grossesse ?». «Elle en est à 16 semaines», rétorque-t-on. Mais cela ne semble pas ébranler notre «médecin» qui apparemment est un connaisseur en la matière pour ne pas dire un habitué des faits. Cette fois-ci, il décide d'entamer les pourparlers : «C’est à 27 500 Fcfa». -Réponse de votre serviteur : «Je suis prête à payer le prix qu’ilfaut, pourvu que cela soit bien fait». -Assurances de notre interlocuteur : «Il n’y a aucun risque, ce sera très bien fait, je suis gynécologue». -«Mais j'ai un souci. Ma cousine est drépanocytaire», lui dit «L’As». Sans même demander si la «patiente» en question souffre de la forme sévère ou non de drépanocytose, il répond soudainement : «Ce n’est pas un souci, nous allons ajouter d’autres médicaments qui agiront en cas d’hémorragie». -«Deuxième souci, j’ai fait des recherches sur internet et j’ai découvert que l’avortement n’est pas autorisé au Sénégal». «Vous avez raison, c’est l’avortement thérapeutique qui est autorisé et dans ce cas, il faut l’avis de trois médecins différents et reconnus par l’ordre des médecins». Voyant «notre détermination» à aller loin dans cette affaire, le gynécologue fait monter les enchères : «Je vous fais le tout à 37 500 Fcfa. Maintenant, dites-moi : quand voulez-vous le faire ?» Une dernière question, comment allez-vous me faire parvenir les médicaments ?» -«Par livraison, les produits sont bien emballés (photos à l’appui) et le reste, c’est-à-dire la notice, vous est donné par téléphone. -«Je vous reviens en fin de semaine». Convaincu qu’il a décroché une patiente de plus, «le gynécologue» n'hésite pas à nous balancer des commentaires de clientes satisfaites. «Merci beaucoup Dr Diop, vraiment je suis très satisfaite de vos produits. J’ai réussi à me débarrasser de ma grossesse sans éveiller de soupçon», lit-on dans un message vocal. D’autres, par des messages écrits, abondent dans le même sens : «Salut Dr Diouf. Oui bonjour, as-tu as reçu tes médicaments ? Oui j’ai reçu. Merci beaucoup, j’avais peur quand j’envoyais mon argent, mais tu as respecté ta parole». «Bonsoir, Dr je saigne depuis 1 heure de temps, maintenant un gros caillot de sang est sorti». Comme pour se réjouir d’un travail bien accompli, le médecin rassure : «C’est fini madame ! La grossesse est tombée comme ça». La jeune dame qui remercie le médecin « d’avoir sauvé son honneur va devoir utiliser pendant quelques jours les pilules post avortives qui se trouvent dans le package.
LES SAIGNEMENTS DEBUTENT 30 MINUTES A 48 HEURES APRES LA PRISE DU MISOPROSTOL
Médicament indiqué dans le traitement de l’ulcère gastrique ou duodénal en évolution, des maladies de l’estomac et du duodénum dues à la prise de médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens, lorsque la poursuite de ces derniers est indispensable et dans la prévention de maladies de l’estomac et du duodénum dues à la prise de médicaments anti-inflammatoires non stéroïdiens, chez certains sujets, le Misoprostol peut être utilisé pour l'interruption volontaire de grossesse (IVG) aussi bien par voie vaginale que sublinguale. Mais dans le second cas, il doit être administré à des intervalles courts, au prix d'effets indésirables plus fréquents, d’après une étude de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) publiée dans le Lancet.
La mifépristone associée à une prostaglandine, généralement le Misoprostol est le seul régime approuvé pour l'IVG médicamenteuse, mais de nombreux pays n'ont pas accès à la Mifépristone et utilisent donc le Misoprostol seul, selon des régimes variés ; mais ni la voie d'administration ni l'intervalle entre deux doses les plus efficaces n'ont été déterminés. Helena von Hertzen du département santé et recherche reproductives à l'OMS et ses collègues ont randomisé 2 066 femmes enceintes de 63 jours au maximum, entre quatre groupes de traitement, recevant trois doses de Misoprostol de 0,8 mg soit en sublingual, soit en intravaginal, et soit toutes les trois heures, soit toutes les 12 heures.
Le taux d'avortement complet après deux semaines de suivi a été de 84% avec le Misoprostol sublingual toutes les trois heures, de 85% avec la voie vaginale toutes les trois heures, de 78% avec la voie sublinguale toutes les 12 heures et de 83% avec la voie vaginale toutes les 12 h. Les saignements débuteront de 30 minutes à 48 heures après la prise du Misoprostol, habituellement dans les premières 12 heures. Il est normal d'avoir des caillots et des saignements abondants. Cela diminue lorsque l'expulsion de la grossesse sera complète. Les résultats obtenus montrent que le Misoprostol peut être utilisé par voie vaginale ou sublinguale pour l'IVG précoce. Lorsque l'administration vaginale est utilisée, les intervalles entre les doses peuvent s'étaler de trois à 12 heures sans affecter significativement l'efficacité. Cependant, si le Misoprostol est administré par voie sublinguale, des intervalles de trois heures entre doses sont plus efficaces que des intervalles de 12 heures, mais au prix de taux plus élevés d'effets indésirables.
CE MEDICAMENT EST CONTRE-INDIQUE TOUT AU LONG DE LA GROSSESSE
Il est clairement interdit dans la notice d’administrer Misoprostol encore appelé Cytotec 200 microgrammes du nom du fabricant, à une femme enceinte. Pour cause, sa prise peut induire des avortements, des malformations, des morts fœtales et des naissances prématurées. « Le traitement par Misoprostol ne doit être initié chez la femme en âge de procréer que si la grossesse est exclue. Il est important de prendre des mesures de contraception efficaces durant la période de traitement. Si une grossesse survient pendant le traitement, celui-ci doit être arrêté. Des cas de rupture utérine et d'hémorragies ont été rapportés lors d'utilisation de Cytotec 200 microgrammes par voie vaginale. Le Misoprostol doit être utilisé avec précaution en présence de maladie où l'hypotension peut entraîner des complications sévères. Des accidents cardiovasculaires graves potentiellement mortels (infarctus du myocarde et/ou spasmes coronaires et/ou accidents vasculaires cérébraux) ont été rapportés avec des prostaglandines, y compris le Misoprostol, en particulier lors de l'utilisation d'une posologie élevée. Les facteurs de risque cardiovasculaires (et notamment le tabagisme chronique et /ou récent, ...) seront pris en considération. Ce médicament contient de l’huile de ricin et peut provoquer des troubles digestifs (effet laxatif léger, diarrhée)», renseigne toujours la notice. Toutefois, du fait des contractions très fortes que la prise de Misoprosel peut provoquer, elle peut réussir à expulser une grossesse.
En outre, cette pratique illégale de l’avortement remet sur le tapis la lancinante question de de la dépénalisation de l’avortement au Sénégal, prônée par les militantes de la cause des femmes, dont la loi bien que figurant dans le protocole de Maputo que notre pays a ratifié en 2004 se heurte au refus des religieux (église comme musulmans avec des divergences au niveau des différentes écoles) qui considèrent que nul n’a le droit d’ôter la vie à quelqu’un.
«ON NE PEUT PAS ACCEDER A CERTAINS POSTES A CAUSE DE LA MATERNITE»
Fatoumata Bintou Yaffa, a plaidé, lundi, pour la mise en place d’un Observatoire de non-discrimination des femmes en milieu du travail.
La présidente du Réseau national des femmes travailleuses du Sénégal (Renafes), Fatoumata Bintou Yaffa, a plaidé, lundi, pour la mise en place d’un Observatoire de non-discrimination des femmes en milieu du travail. «Nous voulons qu’on puisse mettre en place, le plus rapidement possible, l’Observatoire de la non-discrimination des femmes dans le travail», a déclaré Mme Yaffa. Elle s’entretenait avec des journalistes, à la fin des travaux d’un atelier de sensibilisation des femmes de la région de Diourbel sur les droits des femmes. «Cet observatoire, a-t-elle expliqué, va prendre en charge beaucoup de désagréments et de discriminations que les femmes travailleuses rencontrent dans leur milieu de travail.» «Nous nous sommes rendu compte de la discrimination des femmes travailleuses liée à la maternité. On ne peut pas accéder à certains postes à cause de la maternité», a-t-elle déploré.
Selon elle, «les femmes travailleuses ne participent pas aux débats ou encore aux prises de décision en milieu professionnel». Sur ce point, «nous appelons l’Etat à œuvrer pour que les femmes puissent participer aux négociations et au dialogue initiés dans le cadre du travail», a-t-elle encore plaidé.
Selon elle, «ceci va permettre aux femmes travailleuses de prendre en charge leurs préoccupations réelles».
En dehors de l’observatoire, les femmes travailleuses demandent aux autorités étatiques de faire en sorte que la loi sur la protection de la maternité, votée à l’Assemblée nationale, soit une réalité en milieu du travail. «Nous allons nous y atteler maintenant, nous avons besoin de crèches et autres espaces pour mère-enfant dans le milieu du travail», a-t-elle plaidé. Le Renafes «va faire un travail fast track en se basant sur la loi sur la protection de la maternité, votée à l’Assemblée nationale, pour qu’elle soit une réalité au Sénégal», a-t-elle assuré.
«C’est possible. Nous pouvons le faire et nous devons le faire», a insisté Mme Yaffa.
PLAIDOYERS POUR DES SOINS DENTAIRES SANS MERCURE
Le Centre africain pour la santé environnementale et 24 organisations internationales dont Pesticides Action Network (PAN Arica) ont engagé des actions de plaidoyer pour l’élimination de l’utilisation du mercure dans le traitement des soins dentaires
Le Centre africain pour la santé environnementale et 24 organisations internationales dont Pesticides Action Network (PAN Arica) ont engagé des actions de plaidoyer pour l’élimination de l’utilisation du mercure dans le traitement des soins dentaires, notamment les amalgames ou plombage.
Ces actions sont inscrites dans le cadre d’une Semaine africaine de la dentisterie sans mercure, une substance utilisée lors du plombage de dents et ‘’très nocive pour la santé des enfants, des femmes enceintes et des mères allaitantes’’, a expliqué la Coordonnatrice de PAN Sénégal, Maïmouna Diéne Wone. Elle s’exprimait lors d’un point de presse au siège de l’organisation à Dakar dans le cadre de la célébration de cette semaine (13-20 oct). ’’L’utilisation d’amalgames dentaires est surtout dangereuse chez les moins de 15 ans, les femmes enceintes et celles qui allaitent. La présence du mercure dans les amalgames a des effets néfastes sur la santé avec des preuves scientifiques à l’appui sur les risques de cancer, de malformations et d’autres maladies neurotoxiques’’, a-t –elle mis en garde. ’’Les patients ne sont pas toujours informés par ce fait alors qu’il y a d’autres alternatives qui conservent la structure des dents et sont non polluantes comme le mercure’’, a-t-elle relevé.
Pour la coordonnatrice, l’utilisation des amalgames est même nocive pour les professionnels de santé qui peuvent l’aspirer lors des soins dentaires. Maimouna Diéne Wone a souligné que les dentistes au Sénégal en grande majorité utilisent et préfèrent les ‘’obturations dentaires sans mercure mais il y a encore un travail d’informations à faire pour permettre aux parents, aux femmes en âge de procréer et celles allaitantes d’exiger des soins sans mercure’’. C’est pourquoi, il est prévu des activités de plaidoyer, de communication sur les réseaux sociaux, de sensibilisation dans certains établissements scolaires et lieux accueillant du public pour informer les populations sur les dangers du mercure et toucher les décideurs politiques de prendre des mesures pour interdire l’utilisation du mercure chez les patients. Mme Wone a rappelé que c’est au sortir d’une réunion à Abuja (Nigéria) en 2014 que des organisations de la société civile africaine ont publié une déclaration pour décider de l’organisation d’une journée africaine le 13 octobre pour mettre fin à l’utilisation du mercure dans la dentisterie.
Pour cette édition, la journée a été élargie en une semaine pour plus d’activités afin de toucher une grande partie de la population, selon les initiateurs. Cette campagne d’informations a été marquée par des affiches avec le message : ’’Le mercure de votre plombage dentaire est un tueur silencieux’’. ’’Le mercure élémentaire et le méthyle mercure sont toxiques pour les systèmes nerveux central et périphérique’’, peut-on lire encore sur l’affiche avec le dessin d’une femme enceinte recevant les soins d’une dentiste, du plomb barré d’une tête de mort.
LA TRANSPLANTATION RENALE PRATIQUEE «SOUS PEU» AU SENEGAL
Le Sénégal a fait des progrès en termes de prise en charge des insuffisants rénaux. Désormais, toutes les régions disposent de leurs centres de dialyse
Sous peu, le Sénégal va entrer dans l’histoire de la greffe et de la transplantation d’organes. Deux établissements de santé ont déjà déposé leurs dossiers pouvant leur permettre de pratiquer cette chirurgie complexe. Le processus d’évaluation démarre «normalement» cette semaine dans un de ces hôpitaux qui ont manifesté leur intérêt à l’activité de transplantation.
Le Sénégal a fait des progrès en termes de prise en charge des insuffisants rénaux. Désormais, toutes les régions disposent de leurs centres de dialyse. Sauf que la dialyse n’est qu’une étape d’attente, la deuxième option, qui consiste en la transplantation rénale, restant la meilleure, selon les spécialistes de la santé. «Il faut aller vers la greffe et la transplantation d’organes», soutenait l’ancien ministre de la Santé, Abdoulaye Diouf Sarr, en 2018. Mais bien avant, en 2014, le Pr Abdou Niang, néphrologue, avait déclaré que des Sénégalais avaient bénéficié de la technique de transplantation d’organes. Mais c’était à l’étranger même s’ils étaient suivis au niveau du centre hospitalier et universitaire de Dakar. Il expliquait en effet l’importance pour les autres Sénégalais de pouvoir bénéficier de cette pratique pour retrouver une vie normale. Et tourner définitivement le dos au fardeau des séances de dialyse. La dialyse n’étant pas, selon l’éminent spécialiste des maladies du rein, une panacée dans la prise en charge de l’insuffisance rénale.
Huit ans après, malgré ce vœu de soulager des Sénégalais de la dialyse exprimé en 2014, le Sénégal n’a pas encore réalisé une seule transplantation d’organe. Mais il s’y préparait tout de même et va passer à la pratique «sous peu»!
Le processus suit son cours. L’obstacle majeur était la législation. Le décret étant signé, la loi adoptée et promulguée, le Conseil national de don et de transplantation rénale mis en place, le pays a ainsi fait un pas de géant dans le processus. «Le processus a commencé, parce qu’il a fallu mettre en place un arsenal juridique pour encadrer l’activité de don et de transplantation. Ce qui est important parce que c’est une activité très sensible. Je pense que le jour où nous allons commencer à transplanter au Sénégal, c’est-à-dire sous peu, ça va être dans des conditions de sécurité, de transparence. Il n’y aura pas de possibilité de trafic d’organes ou d’aller chercher les reins des personnes pour les acheter. Tout ça, c’est encadré», a expliqué le président du Conseil national du don et de la transplantation rénale Pr El Hadj Fary Kâ.
Le spécialiste de la transplantation rénale assure que tous les textes législatifs et réglementaires sont à disposition depuis avril 2020. Et que des hôpitaux ont également fait des manifestations d’intérêt pour la transplantation de reins. Parmi eux, deux établissements ont déjà déposé leurs dossiers dont l’un est en attente de complément dossier. L’autre, par contre, a mis sur la table du ministère un dossier complet. «Le processus d’évaluation va commencer même cette semaine», a révélé le Pr Kâ. Qui a expliqué que «quand les hôpitaux veulent greffer, transplanter, ils déposent leurs demandes d’agrément au niveau du ministère de la Santé et de l’Action sociale qui nous les répercute. C’est après que nous allons procéder à l’évaluation de ces hôpitaux. D’abord, ça commence par l’examen du dossier pour voir s’il est complet, ensuite on procède à la nomination des évaluateurs externes et le processus d’évaluation commence».
Ça, c’est pour le rein! En ce qui concerne la cornée, le médecin souligne que le décret organisant la greffe de cornée est également passé au comité technique du Secrétariat général du gouvernement. Il est juste en attente de passer en Conseil des ministres. La transplantation d’organes nécessite une approche collégiale entre les néphrologues, les urologues... mais aussi et surtout une grande vigilance pour éviter les trafics d’organes !
En prélude à la célébration de la journée mondiale de la vue prévue aujourd’hui, une session d’orientation a été organisée hier à l’intention des journalistes au Service de l’éducation et l’information pour la santé (Sneips).
En prélude à la célébration de la journée mondiale de la vue prévue aujourd’hui, une session d’orientation a été organisée hier à l’intention des journalistes au Service de l’éducation et l’information pour la santé (Sneips). Le thème retenu est « Aimez vos yeux » pour attirer l’attention du monde sur l’importance des soins oculaires. En abordant la question de la cécité, le coordonnateur du Programme national de promotion de la santé oculaire a informé que « les causes de la cécité sont liées à plusieurs facteurs, notamment la baisse de la vision où il faut des lunettes pour corriger, la cataracte comme deuxième cause de cécité au niveau du Sénégal, le trachome ». Selon Dr Mouctar Dieng Badiane, pour le trachome, au début des années 2000, il y a eu une enquête qui a été faite pour avoir la prévalence de départ au niveau de 58 districts sanitaires. « Parmi ces 58 districts 19 d’entre eux étaient endémiques pour lesquels il faut mettre des stratégies de prise en charge des populations. Cela à travers la stratégie-chance, c’est-à-dire la distribution d’antibiotiques mais aussi la chirurgie. Et ces activités ont permis de réduire considérablement la prévalence. Toujours sur ces 19 districts, tous ont arrêté le traitement et c’est seule la forme compliquée qui est prise en charge actuellement dans une dizaine de districts au niveau du pays », a-t-il expliqué.
« 165 000 aveugles et plus de 55 000 malvoyants »
En poursuivant son exposé, le médecin ophtalmologiste renseigne que les régions qui étaient endémiques étaient Thiès, Louga et Diourbel. Et à ce jour beaucoup de stratégies ont été mises en place pour réduire ce fardeau. « Et nous prétendons éliminer cette maladie à l’horizon 2024 avec d’importants projets qui ont été mis en place ». Concernant la cataracte, d’après le docteur Badiane, beaucoup d’unités ont été implantées avec plusieurs Ong et l’Organisation mondiale de la santé (Oms). « Tous les départements pourront avoir accès à la chirurgie de la cataracte. Et au début des années 2000, nous avions opéré à peu près 5000 cas et récemment avec les 24 000 cas par an. D’où la nécessité de consolider et de pérenniser ces acquis pour prétendre éliminer les causes de cécité évitable dont la cataracte à l’horizon 2030 », a-t-il indiqué. Sur le plan économique et social, Mouctar Dieng Badiane soutient que « la perte de la vue entraîne des pertes économiques à hauteur de plus de 410 milliards de dollars chaque année dans le monde ». D’où l’urgence de « changer la donne d’ici 2030 fixée par l’Oms pour éliminer les causes de la cécité », a dit le médecin.
Revenant sur l’ampleur des maladies oculaires, Dr Badiane confie qu’« au Sénégal, nous avons dénombré plus de 165 000 aveugles et plus de 55 000 malvoyants. Et il faut réévaluer aujourd’hui, ces données parce que beaucoup de stratégies ont été mises en place pour sortir de nouveaux chiffres parlants ». Face à cette situation, des stratégies avec des partenaires ont été mises en œuvre aussi pour rendre accessibles les lunettes dans trois principales régions. « Nous comptons l’étendre dans d’autres régions à l’horizon 2023 pour rendre accessibles les lunettes et corriger ces défauts de vision », a conclu Mouctar Dieng Badiane.
LA F2S EN GREVE GENERALE DE 48H A COMPTER D’AUJOURD’HUI
Prise en charge salariale des agents de la santé et de l’action sociale- En mouvement d’humeur depuis quelques mois, la Fédération des Syndicats de la Santé (F2S) ne compte pas reculer d’un iota dans la lutte qui l’oppose aux autorités gouvernementales.
En mouvement d’humeur depuis quelques mois, la Fédération des Syndicats de la Santé (F2S) ne compte pas reculer d’un iota dans la lutte qui l’oppose aux autorités gouvernementales. Fustigeant en effet le silence coupable du ministre de la Santé sur le traitement salarial discriminatoire des personnels de santé et de l’action sociale, les membres de la F2S comptent passer à la vitesse supérieure en déclenchant une grève générale de 48h à partir de ce matin. A la suite de cela, ils vont arborer un brassard rouge du 17 au 23 octobre avant d’organiser une marche nationale le 28 de ce mois.
Les agents de santé doublent la dose ! Ils ont décidé de passer à la vitesse supérieure dans la lutte qui les oppose au ministère de la Santé et de l’Action sociale en observant à partir de ce matin une grève générale de 48, un port de brassard rouge, un sit-in, une Assemblée générale de mobilisation dans la semaine du 17 au 23 octobre 2022, suivie d’une marche nationale le 28 octobre 2022. Ene effet, la Fédération des Syndicats de la Santé (F2S) fustige le silence coupable du ministre de la sante sur le traitement salarial discriminatoire des personnels de santé et de l’action sociale.
Statuant le 7 octobre dernier sur la lutte syndicale, la F2S dit avoir trouvé des raisons encourageantes pour continuer la lutte syndicale entamée afin d’amener l’Etat du Sénégal à ret́ablir l’eq́ uitédans la prise en charge salariale des agents de la Santé et de l’Action sociale, dont la discrimination dans la répartition de l’enveloppe budget́aire mise à disposition pour les travailleurs.
Ils reprochent à l’Etat de faire la sourde oreille en ignorant les revendications syndicales légitimes des travailleurs du service public de la Santé. «Et pourtant, après avoir octroyé une augmentation de salaire de 90.000 à300.000 Fcfa en faveur des agents de la Fonction publique et cela au détriment de plusieurs agents du secteur public, des établissements publics de Santé, des collectivités locales, des universités publiques et autres. L’Etat a ainsi fini de créer un sentiment de frustration, de négligence, de laissés-pour compte chez les agents de santé parce que la mise en œuvre des accords signés avec les syndicats de la Santé a été mal faite.
Pis, il a fini de violer de façon flagrante le principe universel à travail égal, salaire égal, en omettant les travailleurs dans les établissements publics de Santé, les collectivités locales et les universités de même que dans les programmes et projets de Santé, l’Etat du Sénégal et le Ministère de la Santé particulièrement», soulignent les syndicalistes qui interpellent le ministre de la Santéet de l’Action sociale pour le respect et le suivi des protocoles et des négociations sur les points de revendications qui concernent le ministère de la Santé. Ces revendications tournent autour de l’augmentation des subventions accordées aux hôpitaux, et de la détermination de critères d’allocation objectifs, du remboursement des créances relatives àla CMU, du statut du personnel communautaire, du plan de carrière des personnels paramed́ icaux et de l’ouverture des concours d’entrée directs àl’ENDSS.
Interpelant le ministre chargé de l’Enseignement supérieur, la F2S exige l’application des revalorisations salariales dans les Universités pour tous les personnels travaillant dans la Santé et la reprise des formations à l’Endss. Elle demande au ministre des Collectiviteś territoriales de revaloriser les salaires des agents des collectivités locales sans distinction aucune, d’appliquer correctement le cadre juridique de la Fonction publique locale et de représenter les travailleurs dans le Haut Conseil des Collectivités territoriales. Les revendications vont également à l’endroit du ministère de l’Urbanisme qui devra, dans les meilleurs deĺais, travailler à respecter les promesses de l’Etat de mettre à disposition des coopératives d’habitats des syndicats de la Sante,́ des terrains à Daga Holpa et dans les zones d’aménagement concertées.
La F2S exige globalement deSidiki Kaba et de la Direction de l’Hôpital Principal de Dakar, la satisfaction des revendications légitimes des syndicats de HPD. Sur ce point, ils interpellent le ministre de la Fonction publique, employeur des fonctionnaires, d’ouvrir des négociations sur la gestion prévisionnelle des emplois et des carrières des personnels de santé et sur la conduite des négociations sur les questions nouvelles contenues dans les plateformes revendicatives des syndicats de la Santéet de l’Action sociale. Pour une première prise en charge de toutes ces revendications, La F2S demande au Premier ministre de s’impliquer, en toute responsabilité́, sur toutes les revendications transversales pour que des mesures correctrices soient prises dans les meilleurs délais afin de rétablir l’équitédans le traitement salarial des agents de santé employés par l’Etat et/ou ses démembrements.
En outre, la Fédération des syndicats de la Santé se désole de la décision unilatérale prise par l’Etat du Sénégal à propos de l’hôpital Aristide le Dantec et fustige la démarche non participative et inclusive des autorités. Elle deń once les tentatives de museler toutes les personnes qui donnent des avis contraires. C’est le cas d’Abdoulaye DIONE retenu dans les liens de la détention prolongée sans jugement depuis plus d’une semaine. Ils comptent apporter dans les prochains jours une réponse plus appropriée de soutien à leur camarade, victime d’intimidations.
550 MILLE MALVOYANTS MENACES DE CECITE
La prévalence de la cécité au Sénégal est de 1,42%, avec 165 mille aveugles et 550 mille malvoyants, selon le Programme national de la promotion de la santé oculaire.
La prévalence de la cécité au Sénégal est de 1,42%, avec 165 mille aveugles et 550 mille malvoyants, selon le Programme national de la promotion de la santé oculaire. Pour son coordonnateur, Dr Mouctar Dieng Badiane, les principales causes de cécités demeurent les affections curables et le déterminant principal reste la mauvaise prise en charge. Il s’exprimait hier, mercredi 12 octobre, en prélude à la Journée mondiale de la vue, célébrée ce jeudi dans la région de Kaffrine.
Pour le docteur Mouctar Dieng Badiane du Programme nationale de la santé oculaire, les causes de la cécité sont liées à plusieurs facteurs notamment la baisse de la vision où il faut des lunettes pour corriger mais aussi la cataracte comme deuxième cause de cécité au niveau du Sénégal et le trachome. Pour la Journée mondiale de la vue, célébrée ce jeudi à Kaffrine, l’objectif est de faire plus de sensibilisation pour amener les gens à avoir une meilleure santé de la vue. D’où le thème : «Aimer vos yeux, attirer l’attention du monde sur l’importance des soins oculaires».
LE TRACHOME, UN MAL EVITABLE
Pour le trachome, Dr Badiane a renseigné qu’au début des années 2000, il y a eu une enquête qui a été faite pour avoir la prévalence de départ au niveau de 58 districts sanitaires. Et parmi eux, 19 districts étaient endémiques, pour lesquels il faut mettre en place des stratégies de prise en charge des populations. «Nous avons mis en place la stratégie dénommée Chance, avec une distribution d’antibiotiques mais aussi de la chirurgie. Et ces activités ont permis de réduire considérablement la prévalence».
Et de poursuivre : «toujours parmi ces 19 districts, tous ont arrêté le traitement et seule la forme compliquée est prise en charge actuellement dans une dizaine de districts au niveau du pays». Les régions qui étaient endémiques à cette pandémie de la vue étaient Thiès, Louga et Diourbel. Pour le Dr Badiane, à ce jour, beaucoup de stratégies ont été mises en place pour réduire ce fardeau. «Nous prétendons éliminer cette maladie à l’horizon 2024, avec d’importants projets qui ont été mis en place», a-t-il évoqué.
PRISE EN CHARGE DE LA CATARACTE
Concernant la cataracte, le Dr Mouctar Badiane a laissé entendre que beaucoup d’unités de prise en charge ont été implanté dans le pays, avec plusieurs Ong et l’Organisation mondiale de la santé (Oms). «Tous les départements pourront avoir accès à la chirurgie de la cataracte. Et au début des années 2000 nous avions opéré à peu près 5 mille cas et récemment avec les 24 mille cas par an. D’où la nécessité de consolider et de pérenniser ces acquis pour prétendre éliminer les causes de cécité évitable dont la cataracte, à l’horizon 2030.»
Et d’ajouter : «des stratégies avec des partenaires ont été mises en œuvre aussi pour rendre accessible les lunettes dans trois principales régions. Et nous comptons l’étendre dans d’autres, à l’horizon 2023, pour rendre accessible les lunettes et corriger ces défauts de vision».
par Farid Bathily
QUATRE PATIENTS EN RÉANIMATION MEURENT AU BÉNIN APRÈS UNE COUPURE D'ÉLECTRICITÉ
Le drame survenu dans le plus grand hôpital du pays a suscité une pluie de critiques sur cette structure dite de référence. Plusieurs enquêtes sont en cours afin d’en élucider les origines
Au Bénin, le Centre national hospitalier et universitaire Hubert Koutoukou Maga (CNHU-HKM) est dans le collimateur des populations depuis la mort de quatre patients le 7 octobre 2022 au service de réanimation.
Cette structure hospitalière située dans la ville de Cotonou est une des plus anciennes du pays et également l’une des mieux équipées. De ce fait, cet incident qui a été précédé d’une coupure d’électricité suscite d’autant plus l’émoi au sein de la population béninoise.
Vives critiques
De nombreux habitants se sont saisis des réseaux sociaux pour raconter leur malheureuse expérience avec cet hôpital, certains allant jusqu'à le qualifier de "mouroir". "Qu’un tel drame nous frappe en plein cœur de notre hôpital de référence est profondément horrifiant, révoltant parce qu’intolérable", a ainsi tonné Éric Houndété, président du parti d’opposition Les Démocrates.
Les critiques sont si vives que le CNHU-HKM a dû réagir en urgence ce dimanche 9 octobre 2022. Son directeur général, Dieudonné Gnonlonfoun, a notamment confirmé la mort des quatre patients, sans toutefois lier l'incident à une coupure d’électricité. "La direction invite au calme en attendant les conclusions des missions d’investigations en cours et rassure qu’une légèreté ou faute professionnelle ne restera pas impunie", indique-t-il dans un communiqué.
Le ministère de la Santé parle pour sa part de "situation grave à un moment où le gouvernement a engagé d’importants efforts pour l’amélioration de la qualité des soins offerts dans les formations sanitaires".
Enquête en cours
Cette tragédie intervient moins d’un mois après l’entrée en fonction de l'Autorité de Régulation du Secteur de la Santé (ARS). Dans le cadre des réformes du système national de santé, cette structure est, entre autres, chargée de veiller à l’assurance d’une offre de soins de qualité dans tout le pays et de sanctionner les praticiens en cas de besoin.
C’est à ce titre que le président Patrice Talon a demandé à l’ARS de faire la lumière sur ce dossier. Le procureur de la République a également été saisi dans l’éventualité d’une suite judiciaire.
Ce sinistre du CNHU-HKM rappelle la série de drames qui a secoué ces derniers mois des hôpitaux au Sénégal. L’un des plus retentissants a vu la mort de onze nouveau-nés à la suite d’un incendie au sein d’une unité néonatale à Tivaouane, dans l’ouest du pays, fin mai 2022.
ÉPIDEMIE DE COVID-19 EN AFRIQUE : QUELLES SPECIFICITES ?
Un point important à prendre en compte pour évaluer l’ampleur de l’impact du Covid est la capacité de surveillance épidémiologique des pays, qui dépend directement des systèmes de santé nationaux
Depuis le début de la pandémie de Covid-19, les nombres de cas et de décès en Afrique se sont avérés très inférieurs à ce qui était observé sur les autres continents. Le continent africain a en effet été cinq fois moins touché en moyenne que l’Europe, avec, toutefois, d’importantes variations géographiques. Cette observation inattendue a conduit à se demander s’il y a une spécificité du continent africain face à cette maladie, ou si cette particularité observée ne résulterait pas d’autres facteurs .
Un point important à prendre en compte pour évaluer l’ampleur de l’impact du Covid est la capacité de surveillance épidémiologique des pays, qui dépend directement des systèmes de santé nationaux. Au-delà de toute considération qualitative, cette capacité peut être évaluée en premier lieu en se basant sur le nombre de lits d’hôpitaux par habitant.
En Afrique, ces capacités sont très variables d’un pays à l’autre mais ne dépassent pas 3,2 ‰ au nord de l’Afrique et 2,7 ‰ au Sud – une densité faible en comparaison de l’Europe, où le nombre de lits d’hôpitaux est en moyenne de 5,5 ‰. Ces capacités sont particulièrement faibles en Afrique de l’Ouest, où il ne dépasse pas 0,4 ‰ (Mauritanie) et peut descendre jusqu’à 0,1 ‰ (Mali).
Cette analyse suggère une forte sous-estimation du nombre des cas et des décès, d’un facteur 8,5 en moyenne par comparaison à l’Europe. Ce biais est particulièrement marqué en Afrique de l’Ouest (Nigeria, Burkina Faso, Tchad, Côte d’Ivoire, Mauritanie, Niger, Sénégal, Guinée, Mali) et en Afrique de l’Est (Ouganda, Éthiopie, Madagascar) où la sous-estimation peut atteindre des facteurs 10 à 20, parfois au-delà.
Néanmoins, cela ne suffit pas à expliquer entièrement les différences observées. Un second facteur, démographique, peut être identifié. Il a pu être évalué en prenant en compte la proportion des personnes âgées de 60 ans et plus (sur lesquelles le Covid-19 a un impact plus fort). Cette proportion, plus faible en Afrique, permet cette fois d’expliquer une large part des différences observées.
Une fois ces deux facteurs pris en compte, nombre de cas et de décès sont du même ordre de grandeur qu’en Europe : lacunes du système de surveillance et spécificité démographie apparaissent donc comme les facteurs prédominants. À l’échelle du continent, les analyses ne font pas ressortir d’autres facteurs significatifs (épidémiologiques, géographiques ou climatiques) susceptibles de contribuer à cette spécificité africaine.
La théorie du chaos pour analyser une dynamique épidémique
Pour étudier l’évolution temporelle de l’épidémie sur le continent africain, nous avons réalisé une analyse de sa dynamique pour dix-sept pays en nous appuyant sur la technique de modélisation globale employant la théorie du Chaos (ou théorie des systèmes dynamiques non linéaires). Trouvant sa source dans les travaux d’Henri Poincaré à la fin du XIXe siècle, elle est parfaitement adaptée pour travailler sur les comportements déterministes présentant une forte sensibilité aux conditions initiales et donnant lieu à des évolutions imprévisibles à long terme. Contrairement aux approches mathématiques classiques, la théorie du chaos s’appuie sur l’« espace des phases » (ou des états) : un « espace » qui décrit les états successivement « visités » par le système étudié. Son intérêt vient de ce qu’il peut contenir toutes les solutions du système étudié, et offrir (théoriquement) la représentation complète d’une dynamique indépendamment des conditions initiales.
Cette technique de modélisation est ainsi bien adaptée aux événements peu prévisibles comme les épidémies de maladies transmissibles en général et de maladies émergentes en particulier.
De façon pratique, une approximation algébrique des équations qui gouvernent l’épidémie a pu être obtenue, indépendamment des conditions initiales et directement à partir des observations. L’approche a été précédemment testée sur l’épidémie de peste de Bombay (1896-1911) et sur celle d’Ebola d’Afrique de l’Ouest (2013-2016).
Appliquée à la Chine dès les premières semaines de l’épidémie, elle avait permis d’obtenir un premier modèle chaotique dès le 5 février 2020, mettant en évidence la forte imprévisibilité de l’épidémie ainsi qu’un risque important de redémarrages. La stratégie zéro-Covid a permis de revenir rapidement à un niveau de propagation très bas, mais l’arrivée du variant Omicron a conduit à un tel redémarrage début 2022.
Application au cas de l’Afrique
Dans l’étude présentée ici, cette approche a été appliquée en partant des nombres de nouveaux cas ou de décès dus au Covid-19 en Afrique. L’analyse a permis de mettre en évidence des dynamiques chaotiques pour de nombreux pays : l’état de départ détermine rigoureusement le comportement à venir mais la moindre différence à ce niveau, de même que les moindres perturbations qui y feront suite, vont modifier entièrement la succession des états, ce qui le rend imprévisible. Des modèles chaotiques ont pu être obtenus pour la majorité des pays africains étudiés. Ils montrent qu’en première approximation l’évolution de l’épidémie dépend essentiellement de quelques variables principales dont les couplages rendent l’évolution imprévisible à long terme – variables non identifiables ici puisqu’on ne recourt qu’aux observations des nombres de cas et aux décès. Fait original, ces modèles montrent une certaine diversité dans leurs dynamiques chaotiques. Le plus inattendu est celui du Ghana, qui présente un comportement dit « bistable » : pour des conditions épidémiques, sanitaires et des stratégies d’atténuation identiques, la progression de la maladie peut se développer à des niveaux épidémiques différents, tout en présentant une superposition des distributions du nombre de nouveaux cas journaliers. Ce résultat est important car il montre l’importance des mesures prises en début d’épidémie mais aussi la possibilité de relâcher en partie la sévérité des contraintes une fois le régime ramené à un bas niveau.
Impact des politiques d’atténuation
Pour suivre l’impact des politiques d’atténuation, on s’appuie communément sur le « nombre de reproduction » ou R0 (nombre des personnes contaminées, en moyenne, par personne déjà infectée) ; s’il est inférieur à un, l’épidémie va décroître, s’il est supérieur, elle va progresser. Quoique très important, il ne permet pas de distinguer l’effet des mesures prises – pharmaceutiques (vaccination, médication) ou d’atténuation (masques, etc.).
Les mesures d’atténuation visent justement à réduire le transfert du virus en diminuant les contacts journaliers entre individus : être capable d’estimer leur variation peut donc apporter une information directe sur l’efficacité des mesures adoptées. Nous avons développé une méthode pour reconstruire l’évolution du nombre de contacts depuis le début de l’épidémie à partir du nombre de nouveaux cas journaliers, pour la même sélection de dix-sept pays africains.
Le nombre de contacts ainsi reconstruit a ensuite pu être comparé à d’autres indices : L’indice de sévérité, développé par l’Université d’Oxford, qui vise à rendre compte du niveau de contrainte des politiques d’atténuation mises en œuvre à l’échelle des pays. Les indices de mobilité, mis à disposition par le Google Community Mobility Reports, qui informe sur les variations de niveau de mobilité et de confinement.
Les résultats montrent une chute abrupte du nombre de contacts en début d’épidémie, souvent directement suivie par une décroissance plus lente. Ce qui peut être attribué à la fois aux efforts d’information sur l’évolution en temps réel de l’épidémie (et recommandations associées) dont l’effet peut être très rapide sur les comportements de la population, et aux contraintes mises en œuvre pour limiter les flux entrants et minimiser les contacts. Certaines de ces contraintes peuvent nécessiter une réorganisation sociale et ainsi être plus lentes à se mettre en place – leur effet est donc progressif et possiblement retardé. La diminution du nombre de contacts en début de pandémie a généralement été suivie d’oscillations plus ou moins amples, dont la relation avec les mesures d’atténuation n’est pas évidente à comprendre. Divers éléments peuvent permettre d’expliquerles différences observées entre nombre des contacts reconstruits, niveau des contraintes mises en œuvre et niveau de mobilité.
Dans la plupart des cas, les politiques d’atténuation semblent avoir permis de maintenir le nombre de contacts à un niveau suffisamment bas pour éviter des reprises rapides de l’épidémie, et ce malgré la remontée des activités attestée par les indices de mobilité. Un tel comportement apparaît tout à fait cohérent avec le régime bistable obtenu pour le Ghana. Une augmentation très nette du nombre de contacts est aussi observée dans tous les pays début 2022, ce qui coïncide avec l’arrivée du variant Omicron, moins virulent mais plus contagieux. Cette augmentation ne peut donc pas être interprétée comme un effet des politiques de restriction, mais comme une évolution de la dynamique de l’épidémie. Il serait intéressant d’appliquer cette approche à d’autres contextes, notamment en Asie du Sud-Est où l’efficacité de la stratégie zéro Covid est difficile à évaluer. L’évaluation de cette stratégie demanderait également de considérer les aspects économiques et sociaux.
Durabilité
La pandémie de Covid-19 présente nombre de similitudes avec des pandémies précédentes (difficultés à identifier et comprendre les modes de transmission dominants, controverses sur les traitements, défiance vis-à-vis des vaccins, etc.)… Mais elle présente aussi des spécificités inédites : rapidité de progression mondiale, prédominance apparente dans les pays riches, réactivité aussi bien dans les stratégies d’atténuation (confinements, fermetures des frontières…) que médicales (développement de nouveaux vaccins). Elle se caractérise également par la production d’une masse de données considérable et une circulation fulgurante de l’information quasiment en temps réel.
Cette réactivité nous a toutefois un peu fait oublier qu’une épidémie ne peut pas être réduite à un problème biologique. Le rôle de l’homme et de ses activités en amont (perte de biodiversité, productions agricoles uniformisées et intensives, conditions sanitaires pouvant favoriser la propagation des virus et leur transfert à l’homme, etc.) ne peut être oublié. Cette tendance montre l’importance de considérer la santé comme un tout intégré – « Une seule santé » (One Health) – et incluant ses différents niveaux (santé humaine, animale, végétale) à l’échelle planétaire. Les épizooties et les épidémies émergentes des dernières décennies (H5N1, Ebola en Afrique de l’Ouest, SARS, MERS, etc. et aujourd’hui le Covid-19) montrent de façon criante que cette problématique n’a rien d’une vue de l’esprit.
Les défis générés sont tout aussi grands que les enjeux qu’ils sous-tendent. D’où la nécessité de disposer de nouvelles approches, capables de mieux appréhender la problématique épidémiologique, dans sa diversité et sa complexité.
Point crucial : les comportements épidémiologiques sont essentiellement dynamiques. Une épidémie n’est pas une succession d’états épidémiques indépendants… Il faut donc comprendre comment ces états successifs sont reliés. Or, ceci est tout particulièrement difficile dans le cas de maladies émergentes, les composantes de cette dynamique (populations humaines, animales ou végétales) comme le rôle des facteurs en jeu (conditions environnementales, climatiques, etc.) n’étant pas toujours bien identifiés – ni même accessibles à l’observation. Et leurs couplages sont souvent mal connus et complexes.
Les outils les plus en vogue actuellement pour traiter les problèmes d’une telle complexité sont basés sur l’intelligence artificielle. Ils ont montré une très grande puissance pour de nombreuses applications mais requièrent généralement d’énormes jeux de données pour disposer d’un appui statistique suffisant. Or, l’émergence de nouveaux virus ne permet pas cela, surtout en début d’épidémie lorsque son développement reste local, mais pas seulement.
En effet, la propagation de l’épidémie contribue à augmenter le nombre de sites où des observations sont menées et donc à disposer de très gros jeux de données quoique de courte durée. Cette augmentation ne permet généralement pas de compenser la courte durée d’observation : il y a une trop grande diversité des contextes géographiques, sociétaux, sanitaires, etc. La variabilité est trop grande.
De plus, en début d’épidémie émergente, on ne dispose pas des tests capables d’identifier de façon fiable la maladie en jeu. De même, le nombre des personnes asymptomatiques est très difficile à évaluer et leur rôle à estimer.
Ces difficultés montrent l’importance des approches capables de s’attaquer à la complexité de la situation et à la frugalité des données… le tout dans des situations où les connaissances sont limitées. C’est dans cette optique que se placent les analyses basées sur la théorie du Chaos, dont nous confirmons ici la pertinence.