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7 avril 2025
SELON CAROLE DIOP, DIAMNIADIO EST UNE ERREUR
"Si on ne fait pas preuve de courage, Dakar finira par exploser". L'architecte dénonce l'absence de vision des autorités et l'impasse que représente Diamniadio, ville nouvelle construite sur des sols inadaptés et dépourvue des infrastructures essentielles
(SenePlus) - Dans un entretien accordé à Jeune Afrique, l'architecte Carole Diop, co-auteure avec Xavier Ricou de l'ouvrage "Dakar, métamorphoses d'une capitale", livre une analyse sans concession des défis urbanistiques que connaît la capitale sénégalaise. Entre préservation du patrimoine historique, frénésie immobilière et explosion démographique, Dakar se trouve à la croisée des chemins, et Diamniadio, la ville nouvelle censée désengorger la métropole, représente selon l'architecte "une erreur" stratégique majeure.
L'ouvrage, fruit de "deux personnes qui aiment vraiment cette ville, qui y sont nées et y ont grandi", comme le souligne Carole Diop, retrace l'évolution de Dakar depuis les premiers peuplements lébous jusqu'à ses défis contemporains. Xavier Ricou, co-auteur, partage ce sentiment de désarroi face aux transformations rapides : "Quand on a connu, comme moi, Dakar dans les années 1970-1980, on est forcément désemparé face aux changements de la ville, dans le domaine urbain, architectural et social."
Les chiffres parlent d'eux-mêmes : l'agglomération de Dakar occupe seulement 0,28% de la superficie du pays, mais concentre 22% de sa population et 80% de son activité économique, générant 60% du PIB sénégalais. Une hypercentralisation qui ne cesse de s'accentuer puisque, selon les projections citées dans l'entretien, l'agglomération comptera 7 millions d'habitants en 2030, contre 4 millions actuellement.
Face à cette pression démographique, les autorités ont misé sur la création de la ville nouvelle de Diamniadio pour désengorger la capitale. Une stratégie que Carole Diop critique sévèrement : "Diamniadio est une erreur. C'est une ville trop proche de Dakar, installée sur un terrain qui est plus propice à l'agriculture qu'à la construction."
L'architecte pointe notamment les problèmes techniques liés à la nature du sol : "Il comporte en effet beaucoup d'argiles gonflantes, ce qui nécessite l'utilisation de micropieux qui s'enfoncent à 15 mètres sous le sol." Au-delà de ces contraintes techniques, elle souligne l'absence des infrastructures essentielles à la vie urbaine : "Il lui manque aussi ce qui fait d'une ville une ville : des loisirs, des commerces, des écoles... Mais ce n'était pas la priorité des promoteurs."
L'entretien révèle également la tension permanente entre préservation du patrimoine et développement urbain. Carole Diop évoque les traces encore visibles de la présence historique des Lébous, premiers habitants de Dakar : "Certains 'péncs', ces villages mythiques traditionnels, composés d'un ensemble de concessions familiales qui regroupent des descendants d'un ancêtre commun, subsistent : il en reste six, toujours actifs, au Plateau, et six à la Médina, siège de la communauté lébou."
Cependant, elle constate que "la ville a pris le dessus sur ces sites. Les péncs sont devenus des espaces résiduels par rapport à ce qu'ils étaient." Cette évolution reflète une rupture plus profonde entre l'urbanisme moderne et les modes de vie traditionnels : "Dans l'habitat traditionnel, chaque membre de la famille a son espace privatif, et tous se retrouvent dans une cour intérieure ('heut', en wolof). La disparition de cet espace, autrefois réservé aux cérémonies religieuses et familiales, a entraîné le phénomène d'occupation des rues."
Au cœur des problèmes de Dakar se trouve le manque de planification, que les auteurs considèrent comme un "luxe réservé aux pays riches". Carole Diop insiste sur la nécessité d'une vision à long terme : "La planification d'une ville se fait sur un siècle ou un demi-siècle. Il y a des choses qui ne pourront pas être résolues, mais il faut arrêter les frais tant qu'il est encore temps."
Elle souligne également que "la démographie va plus vite que la planification de la ville" et exprime des doutes sur la destination réelle des nouvelles constructions : "Je doute que tous les immeubles qui sont en cours de construction soient destinés à ceux qui en ont vraiment besoin..."
Xavier Ricou partage cette inquiétude et lance un avertissement : "Il faut siffler la fin de la récréation. Ce n'est pas seulement une question de patrimoine, c'est une question de santé publique, de vivre-ensemble, une question économique. Si on ne fait pas preuve de courage, la ville finira par exploser, ou imploser."
Malgré ce constat alarmant, Carole Diop perçoit des signes encourageants dans l'attitude des nouvelles autorités. "L'Ordre des architectes réintroduit le dialogue avec le ministre de l'Urbanisme. Les nouvelles autorités se sont montrées ouvertes et à l'écoute, en attente de propositions et de solutions", affirme-t-elle.
Elle plaide pour un retour aux fondamentaux : "Si on respectait la réglementation et le rôle des architectes, ce serait déjà une bonne chose." Une approche qui rappelle l'époque de Léopold Sédar Senghor qui "avait une vision pour la ville : il a mis en place l'Ordre des architectes en 1972. Il a beaucoup travaillé avec des professionnels. Cela n'a pas été le cas de ses successeurs."
À travers cet entretien, Carole Diop et Xavier Ricou invitent à repenser fondamentalement le rapport à l'espace urbain. Comme ils l'écrivent dans leur ouvrage : "Nos villes doivent, dans leur architecture, leurs plans d'urbanisme et leurs élans, refléter les formes du vivre-ensemble que nous avons choisies. Ce qui suppose que nous ayons résolu la question de savoir, non pas qui nous sommes, mais plutôt qui nous voulons devenir."
POUR ERWAN DAVOUX, LE PARTI-ÉTAT ÉTOUFFE LA DÉMOCRATIE SÉNÉGALAISE
Journalistes intimidés, opposants persécutés, économie à l'arrêt : le Sénégal de Diomaye-Sonko inquiète. Le directeur de Geopolitics.fr analyse pointe "la dérive autoritaire" d'un duo obnubilé par sa" vengeance contre l'ancien régime"
(SenePlus) - Dans une analyse publiée sur le site Marianne, Erwan Davoux, directeur de Geopolitics.fr et ancien chargé de mission à la présidence de la République, dresse un bilan préoccupant de la première année de présidence de Bassirou Diomaye Faye. Son constat est sans appel : l'exercice du pouvoir par le Pastef révèle des tendances autoritaires inquiétantes qui menacent l'équilibre démocratique du pays.
Selon l'analyse d'Erwan Davoux, le parti majoritaire a réussi à concentrer un pouvoir considérable dans ses mains. Après la victoire de Bassirou Diomaye Faye à la présidentielle de mars 2024 avec 54% des voix, son parti a remporté une majorité écrasante lors des législatives d'octobre, s'attribuant "130 sièges sur les 165 que compte l'Assemblée nationale". Cette configuration politique inédite au Sénégal a mis fin à l'équilibre des pouvoirs qui caractérisait auparavant le pays.
"Au sein de la précédente Assemblée, une coalition de partis disposant d'une courte majorité invitait au compromis et au respect des droits de l'opposition. Tel n'est plus le cas", souligne l'auteur, qui cite comme exemple significatif l'abandon de la tradition qui voulait que la vice-présidence de l'Assemblée nationale revienne à l'opposition.
L'une des critiques principales formulées par Erwan Davoux concerne l'obsession du nouveau pouvoir pour le règlement de comptes avec l'administration précédente. "Tout le débat politique est monopolisé par les attaques contre l'ancien pouvoir alors que le Pastef est aux responsabilités depuis presque un an", note-t-il.
Au cœur de cette stratégie se trouve la question de la loi d'amnistie. Votée sous la présidence de Macky Sall, cette loi couvre "tous les faits susceptibles de revêtir la qualification d'infraction criminelle ou correctionnelle, commis entre le 1er février 2021 et le 25 février 2024" dans un contexte politique. Paradoxalement, cette même loi a permis à Diomaye Faye et à son Premier ministre Ousmane Sonko de sortir de prison avant les élections.
D'après l'analyste, "le Pastef avait claironné haut et fort qu'il l'abrogerait afin de mettre en cause les dirigeants précédents mais fait désormais machine arrière", probablement parce que l'abrogation "pourrait mettre dans une fâcheuse posture Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko qui en ont bénéficié".
L'article d'Erwan Davoux met également en lumière de graves atteintes aux libertés, notamment à la liberté de la presse. "Les journalistes qui entendent exercer leur métier avec une certaine indépendance sont dans le collimateur", affirme-t-il.
Le cas du site Dakaractu est emblématique : "l'un des [sites] plus suivis du pays a été contraint de fermer ses bureaux à Dakar et à l'exil, n'étant plus un média reconnu par le pouvoir". L'auteur rappelle également que le 4 octobre, le magazine Jeune Afrique s'interrogeait : "Sénégal : peut-on encore contredire Ousmane Sonko ?"
Le traitement réservé aux opposants politiques est tout aussi préoccupant. Davoux cite le cas du maire de Dakar, Barthélémy Dias, "ancien compagnon de route d'Ousmane Sonko avec lequel il est désormais brouillé", qui se trouve "interdit d'entrée dans son hôtel de ville" et a été "démis de ses fonctions de maire par un arrêté préfectoral".
Les députés de l'opposition ne sont pas épargnés : "Farba Ngom, un proche de l'ancien président, a vu son immunité levée dans des conditions pour le moins suspectes : aucune procédure judiciaire à son encontre mais un simple signalement effectué contre lui par une instance créée par le Pastef".
Pendant que le pouvoir se concentre sur sa "volonté de revanche", l'économie sénégalaise souffre, selon l'analyse. L'audit des finances publiques lancé par le nouveau gouvernement, qualifié de "bien tardif" par l'auteur, a eu des conséquences désastreuses : "L'effet indéniable et immédiat de ce document, qui poursuivait des fins avant tout politiciennes, a été de freiner les investisseurs, renforcer les difficultés à trouver un accord avec le Fonds monétaire international (FMI) et la dégradation de la note du Sénégal par l'agence de notation Moody's comme Standard & Poor's".
Le secteur du BTP est particulièrement touché : "En effet, il a été décidé l'arrêt des constructions dans une dizaine de zones du pays (afin de vérifier la légalité des permis de construire), dont le littoral de Dakar. Initialement prévue pour durer deux mois, cette situation perdure. Ce sont 10 000 emplois qui ont été perdus".
Sur la scène internationale, Erwan Davoux constate que "la voix du Sénégal, traditionnellement l'une des plus fortes sur le continent africain, grâce à l'excellence de sa diplomatie et à des chefs d'États emblématiques est quasiment atone".
Il rappelle que sous la présidence de Macky Sall, le Sénégal avait obtenu "que l'Afrique soit représentée au G20" et jouait "un rôle actif dans le dénouement de crises intra-africaines". Désormais, selon l'auteur, "tout cela appartient au passé" car le président et son Premier ministre "sont portés par un panafricanisme régional ambiant".
En conclusion, Erwan Davoux s'inquiète pour l'avenir de la démocratie sénégalaise. Il rappelle que "le Sénégal n'est ni le Mali, ni le Niger, ni le Burkina. C'est un pays à la tradition démocratique bien ancrée et dans lequel la conscience politique est élevée".
Face à cette situation, l'auteur s'interroge : "Pour l'instant, le duo qui dirige l'État résiste. Pour combien de temps encore ?"
par Thierno Alassane Sall
SUITE D’UNE HISTOIRE DE TROMPERIE
Contrairement à ce qu’ils racontent dans les médias depuis deux jours, la nouvelle proposition de loi interprétative demeure dans le même esprit que l’ancienne : Pastef veut une abrogation partielle de la loi d’amnistie
Nous avons pris connaissance de la nouvelle proposition de loi d’interprétation de la loi d’amnistie de Pastef qui prend la forme d’un amendement. Dans un document de six pages, le régime Pastef réécrit substantiellement le texte initial.
Cette modification est le signe que Pastef a compris le rejet de leur manipulation par les Sénégalais. En revanche, au lieu de se résoudre définitivement à réaliser la demande claire du peuple Sénégalais d’une abrogation totale de l’amnistie, Pastef continue dans la tromperie à travers la nouvelle mouture de sa proposition.
Contrairement à ce qu’ils racontent dans les médias depuis deux jours, la nouvelle proposition de loi interprétative demeure dans le même esprit que l’ancienne : Pastef veut une abrogation partielle de la loi d’amnistie. Leur « interprétation » s’inscrit dans cette logique en visant la modification du champ d’application de la loi d’amnistie. Leur faux débat sémantique sur la rétroactivité concerne alors également leur texte.
Nous y reviendrons dans les jours à venir dans une réponse détaillée à ce nouvel épisode du feuilleton de la tromperie.
DECONSTRUIRE ET REMODELER
Fatou Kandé Senghor est une touche-à-tout. Du cinéma à l’écriture, de la photographie à l’installation, tous les mediums lui sont utiles pour déconstruire et remodeler les récits.
Artiste pluridisciplinaire, Fatou Kandé Senghor est une touche-à-tout. Du cinéma à l’écriture, de la photographie à l’installation, tous les mediums lui sont utiles pour déconstruire et remodeler les récits.
Du rose, du rouge, un balcon festonné, des paillettes ! La structure a une forme à mi-chemin entre la pagode et le château fort. Elle trône dans la cour du Musée de l’Institut fondamental d’Afrique noire (Ifan). Quand tombe le soir, les lumières qui s’allument déposent un voile enchanteur sur ce fanal. L’installation de Fatou Kandé Senghor, Fanal (2024), est une réinterprétation d’une vieille tradition de Saint-Louis, la première capitale du Sénégal. Dans Le Larousse, le fanal a plusieurs significations. Le mot désigne la lanterne placée à l’avant de la locomotive ou à l’arrière du dernier véhicule d’un train. Il peut aussi désigner une lampe à pétrole employée à bord des anciens navires pour signaler leur position. Enfin, sur les côtes, le fanal érigé en phare servait de repère lumineux aux navires et prévenait les naufrages. Mais à Saint-Louis, la ville côtière située le plus au Nord du Sénégal, le fanal a depuis longtemps pris une autre tournure. A la Saint-Sylvestre, le fanal devient un évènement culturel qui célèbre l’histoire complexe de la ville. Pendant une nuit, Saint-Louis est envahie par une féerie de lumières. Les maquettes des bâtiments les plus emblématiques de la ville ou du pays sont promenées à bord de chars rutilants, accompagnées de chants et danses des belles Saint-Louisiennes qui, pour l’occasion, retrouvent les costumes de leurs aïeules. Ce sont les origines de cette vieille tradition que Fatou Kandé Senghor interroge à travers son installation.
Dans la cour de l’Ifan, la structure imposante attire le regard. Un porche d’une couleur verte, où sont inscrits des signes cabalistiques noirs, fait office de porte d’entrée. Tout autour de la pièce festonnée de rubans, une véranda couverte à la façon des vieilles bâtisses coloniales du Sénégal sur laquelle des lumières sont accrochées. Sur les côtés, un fragile escalier montre le chemin de l’étage et de sa toiture rose. Le tout est une féerie de couleurs et de lumières. Les passants s’arrêtent, s’interrogent ou parfois, prennent une photo. A l’image de ce fanal que les Saint-Louisiens se sont réapproprié en choisissant plutôt de représenter les plus beaux édifices de leur ville, Fatou Kandé Senghor, artiste pluridisciplinaire qui vogue du cinéma à la photographie, de l’installation à l’écriture, ne cesse de se réapproprier et d’interroger les histoires cachées dans les symboles qui l’entourent. Quelle que soit l’œuvre ou la thématique, elle cherche inlassablement à travers ses œuvres, à expliquer au public, à décanter l’histoire, éclaircir ses zones d’ombre, démêler les choses. «En tant qu’artiste, on est obligé de démêler des choses. A mon âge, je veux démêler fil par fil», dit-elle comme une profession de foi. Cette entreprise passe ici par une réappropriation du récit de ces femmes réduites désormais dans l’imaginaire collectif, à de simples objets sexuels. Un récit qui, pour elle, doit être délesté de ses relents colonialistes imbriqués dans l’histoire de cette ville.
A l’origine du Fanal de Saint-Louis, de vieilles traditions de Signares, ces riches femmes métisses qui se sont bâties un mode de vie particulier sur les bords du fleuve Sénégal, au 18e siècle. Le dernier jour de l’an, elles se rendaient à l’église à minuit, parées de leurs plus beaux bijoux et accompagnées de leurs servantes et chambellans. Ces derniers portaient des lanternes illuminées de l’intérieur par des chandelles. Ensemble, les Signares et leurs servantes formaient une lente procession lumineuse à travers les rues obscures de l’île. Au fil des décennies, les Saint-Louisiens se sont réappropriés cette coutume pour en faire une véritable fête traditionnelle. De lanternes de bois et papiers, on en est arrivé à de gigantesques créations, reconstituant le plus souvent les grandes bâtisses, les édifices ou monuments de la ville (la Grande Mosquée, l’église, le palais du Gouverneur ou le Pont Faidherbe). Si le fanal de Fatou Kandé Senghor recrée ce qui est devenu le symbole de Saint-Louis, c’est paradoxalement pour en dépasser les aspects esthétiques et festifs, et en interroger l’histoire, mais surtout interroger la mémoire de ces femmes pionnières.
De «reines» à «maîtresses»
«Toutes nos histoires ont été changées», estime Fatou Kandé Senghor. Celle des Signares l’interpelle tout particulièrement. En effet, tout commence quand les Lançados, ces juifs portugais, arrivèrent sur les côtes africaines au 16e siècle. Par des jeux d’alliance, ils s’unissent aux filles des chefs locaux dont l’activité commerciale autour des cotonnades ou du cuir était florissante. Devenues des Señoras, ces femmes tiennent d’une main de maître le commerce. Les Señoras de la petite côte sénégalaise jouissent alors d’une liberté que même leurs sœurs d’Occident n’avaient pas. C’est seulement au 19e siècle, avec la Révolution industrielle, que les femmes occidentales seront reconnues pour leur participation à la vie économique. Au Sénégal, quand les Français mettent la main sur cette colonie vers 1639, la donne change. Saint-Louis devient la capitale de l’empire colonial français en Afrique occidentale. De puissantes femmes d’affaires, les compagnes des nouveaux maîtres, deviennent dans la nouvelle version de l’histoire réécrite et disséminée par les Français, de simples et vulgaires «maîtresses». «1854- 1857, Général Faidherbe a une grande mission : installer la capitale du tout jeune empire colonial français. Ils sont venus faire fortune. Indigènes ou métisses, c’est du pareil au même pour eux. Le mépris est bien distribué. Nous avons un nouveau statut et de nouveaux rôles. La coquetterie, la fête, les nouvelles us et coutumes. Nous passons de cheffes à maîtresses», écrit FKS sur les murs intérieurs de son fanal. Le nouveau Code civil appliqué vers 1830 interdit aux femmes les activités commerciales. Le pouvoir économique leur est arraché.
En quête d’identité
Pour comprendre cette quête incessante de restauration de récits historiques, il faut revenir sur le parcours de l’artiste. Fatoumata Bintou Kandé de son vrai nom navigue dans l’interdisciplinarité et passe d’un médium à un autre. «Je m’intéresse à toutes les sociétés, leurs mutations, leurs perceptions des uns et des autres. Je m’intéresse à l’éveil, à la conscience, à la connaissance, à la psychologie. Je suis une citoyenne du monde, un produit du voyage, de la rencontre. C’est le côté universel qui m’intéresse dans tout», confie-t-elle. Elle aurait pu rajouter qu’elle s’intéressait également au travail des autres artistes. Fidèle à son désir de transmission, elle met ses talents de documentariste au service d’autres artistes sénégalais pour présenter leur travail au public. Tantôt elle filme l’artiste céramiste Seyni Awa Camara en Casamance dans son acte de création, tantôt c’est l’émergence d’une jeune chanteuse de rap qu’elle fige à l’écran dans la série Walabok, issue de l’ouvrage du même titre qu’elle a écrit. Walabok, une histoire orale du hip-hop au Sénégal, paru chez Amalion Publishing en 2015, est la synthèse de 30 années de travail. Pendant ces années, elle écoute et photographie les pionniers du hip-hop sénégalais. Et ce qui devait devenir un documentaire au départ finit en une anthologie du rap sénégalais, puis en série. La série met en avant le personnage d’une jeune fille qui lutte pour son indépendance et sa liberté dans un monde masculin par excellence, celui du hip-hop. Walabok, comment va la jeunesse ? (2020, 30 épisodes) remporte le Prix de la meilleure série au Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Fespaco) en 2021. Quant à l’ouvrage de 304 pages, il plonge dans cet univers du rap qu’elle a côtoyé depuis toute jeune. Le rap, ce rythme revendicateur et engagé d’une jeunesse en quête d’identité, fait écho aux interrogations internes de la jeune fille qu’était Fatou Kandé Senghor à l’époque, à ces mêmes questions qui la taraudent depuis son plus jeune âge. Dans le court métrage documentaire Giving Birth (2015) que Fatou Kandé Senghor a présenté à la Biennale de Venise en 2015, elle filme l’artiste céramiste Seyni Awa Camara qui n’a pas d’enfants, mais dont la cour est remplie des enfants de son mari. Et à travers les statuettes anthropomorphes qu’elle réalise, des sculptures hybrides mi-humaines mi- monstres tout droit sorties d’un autre monde, et toujours accompagnée d’enfants, l’artiste transcende sa condition de femme sans enfants dans une société où l’on ne peut être femme qu’en donnant la vie.
Raconter nos propres histoires, sur notre vie en communauté, développer à l’écran, dans les installations et d’autres mediums, des contre-récits qui restaurent la vérité historique, telles sont les invitations constantes de l’artiste dans ses œuvres. Fatou Kandé cherche à restaurer une version de l’histoire des Signares. Mais en fin de compte, quand elle décide d’exhumer la vérité autour de la vie des Signares, elle choisit de mettre en lumière des pans occultés de la vie de ces belles femmes. De «maîtresses» de ces conquérants européens, elles prennent dans l’œuvre de l’artiste, les habits d’habiles femmes d’affaires dont la puissance économique est avant tout un héritage familial.
25% DES RECLAMATIONS SOUMISES A LA MEDIATURE CONCERNENT LES TERRES
Dans le document publié hier, il est noté que «les réclamations enregistrées de janvier 2023 à juin 2024 restent dominées par les questions foncières, avec 25, 1% des affaires traitées».
La mise en œuvre des recommandations de la Commission nationale de réforme foncière (Cnrf), le maintien du Domaine national tout en procédant à la mise à jour de certaines de ses dispositions obsolètes, l’unification des deux régimes en procédant à l’immatriculation des terres du Domaine national… Telles sont, entre autres, les propositions faites par le médiateur de la République dans son rapport. Il faut noter que la question foncière représente 25, 1% des réclamations soumises à cette autorité.
La question foncière au Sénégal mérite une attention particulière. Le rapport du médiateur de la République a montré que beaucoup de conflits sont liés à cette question. Dans le document publié hier, il est noté que «les réclamations enregistrées de janvier 2023 à juin 2024 restent dominées par les questions foncières, avec 25, 1% des affaires traitées».
Vu les sollicitations concernant ce point, le médiateur de la République a même, dans le cadre de ses activités, consacré un atelier au foncier. Dans son rapport, Demba Kandji est revenu sur les solutions proposées pour limiter les litiges. Il est ainsi proposé «la mise en œuvre des recommandations de la Commission nationale de réforme foncière (Cnrf), le maintien du Domaine national tout en procédant à la mise à jour de certaines de ses dispositions obsolètes, l’unification des deux régimes en procédant à l’immatriculation des terres du Domaine national (possibilité pour les propriétaires de mettre en bail leurs terrains ou de les utiliser comme participation au capital des sociétés qui souhaiteraient investir sur leurs territoires)…».
Revenant sur l’atelier, les auteurs du document renseignent que «les discussions sur les origines et manifestations des conflits fonciers» ont permis de souligner «une législation obsolète, un faible impact de l’Acte III de la Décentralisation sur la gouvernance foncière, le manque de respect des critères de transparence et d’équité dans l’attribution des terres, la faible implication des populations locales dans les processus d’immatriculation des terres, la fréquence des conflits au sein des communes et entre communes urbaines et communes rurales en matière de lotissement». Il a été aussi relevé «l’implication excessive de l’Administration territoriale dans la gestion du foncier rural, les nombreux obstacles à l’accès des femmes à la terre, des lotissements attribués à des tiers, parfois au détriment des populations locales, la non-prise en compte du pastoralisme dans l’affectation des terres (couloirs du bétail et zones de pâturage), l’absence de planification foncière, notamment de Plan d’occupation et d’affectation des sols (Poas)». Dans la même veine, le rapport fait ressortir «le défaut de collaboration entre les administrations foncières et les services techniques étatiques, notamment en termes de disponibilité de l’information foncière, et leur participation aux opérations foncières locales».
Au regard de ces problèmes constatés, le médiateur de la République a listé des recommandations sur les bonnes pratiques en matière de gestion du foncier rural. En termes de bonnes pratiques, il est conseillé d’exproprier «les titres fonciers datant de l’époque coloniale pour les céder aux populations, auditer le foncier dans les collectivités territoriales pour corriger les affectations illégales ou abusives, alléger les modalités d’acquisition des titres fonciers pour les citoyens sénégalais, renforcer la numérisation et la digitalisation pour simplifier les circuits et procédures, proposer des solutions pour corriger la rupture entre la démographie et la ressource d’aménagement, traduire et vulgariser les textes législatifs», entre autres. Pour ce qui est de la politique et de la réglementation, il est conseillé d’auditer «le domaine public et le domaine privé de l’Etat, harmoniser les différents textes de loi et codes (Code de l’environnement, Code forestier, Code pastoral…), instituer des cadres de concertation en vue de prévenir d’éventuels conflits, définir les limites entre les communes, encourager l’intercommunalité pour les communes partageant les mêmes ressources, interdire la vente des terres du Domaine national, encourager la mise en place d’une convention tripartite».
Le juge Demba Kandji et ses collaborateurs recommandent aussi de «régler les occupations irrégulières du foncier, suspendre éventuellement toutes les procédures d’attribution foncier (délibération et immatriculation) et procéder à un audit du foncier national». D’ailleurs, ils se demandent même dans le document pourquoi ne pas mettre en place un «tribunal statuant uniquement sur le foncier et l’environnement». Outre ces pistes, l’idée d’assurer «une souveraineté foncière en évitant les affectations définitives des terres aux étrangers» a été émise.
Par Bachir FOFANA
NE FAUDRAIT-IL PAS LUI COUPER LA LANGUE ?
Le porte-parole d’une entité devrait comprendre qu’il n’a pas à exprimer des opinions personnelles, encore moins ses sentiments ou s’interroger comme le ferait un citoyen ordinaire.
Emile Zola, dans Germinal, décrit une scène réaliste d’un tableau avec des couleurs dominantes, significatives, symboliques (le rouge et le noir), mais aussi la référence à la Révolution française (la guillotine, la Marseillaise) et à une révolution future. Cette révolte présente des mineurs s’inscrit dans cette perspective idéale ; elle devient elle-même une révolution, ou mieux, elle incarne l’idée même de la révolution. Et le cri «du pain, du pain», qui termine le passage, nous ramène à la réalité la plus élémentaire : c’est au nom du pain, de l’existence, de la survie, que ces hommes et ces femmes se révoltent. Les mineurs (les prolétaires) ne veulent pas le luxe, le superflu : ils veulent seulement le strict nécessaire pour vivre, avec dignité, chose qui leur est niée par les bourgeois. Nous ne vivons certes pas la grande révolte de Germinal au Sénégal, mais ça gronde en sourdine à cause de la situation économique et sociale difficile. La campagne agricole n’a pas eu les résultats escomptés, malgré les annonces en grande pompe du ministre Mabouba Diagne qui promettait deux (2) millions de tonnes d’arachide, pour ensuite nous annoncer moins de sept cent mille (700 000). Diagne, pour justifier son échec, les pires résultats depuis plus de 20 ans, annonce que les résultats antérieurs étaient faux. Une situation qui, selon Agrhymet, le Système régional intégré d’information agricole de la Cedeao, pourrait plonger un million trois cent mille (1 300 000) personnes dans une insécurité alimentaire. C’est à ce moment précis que le Conseiller technique n°1 du ministère de la Famille et des solidarités, Oumar Samb, a annoncé la suspension temporaire du programme de Bourses de sécurité familiale pour, dit-il, «mener une évaluation approfondie». «C’est un programme que nous avons suspendu temporairement pour faire l’évaluation. Beaucoup de personnes estiment qu’il y a des ajustements à apporter dans la manière de sélectionner les bénéficiaires. Nous sommes en train de revoir le Registre national unique, qui est l’outil permettant de choisir les ayants droit», avait-il déclaré dans l’émission Salam Sénégal sur Radio Sénégal.
Le secteur du Btp est également une autre illustration de la morosité dans laquelle vivent les Sénégalais. La dernière note de conjoncture de la Direction de la prévision et des études économiques (Dpee) renseigne que la production de ciment a fortement diminué au quatrième trimestre 2024. Sur cette période, l’activité a baissé de 9, 3%. Cela, à cause de «la baisse de 26, 8% des commandes étrangères». Par ailleurs, relève la dernière note de conjoncture, «la demande locale a reculé de 5, 4% sur la période, en liaison avec la suspension de certains projets de construction». La réalité demeure implacable à partir de ces deux exemples que l’on pourrait généraliser à tous les secteurs : la morosité économique est partout et ce gouvernement peine à répondre aux attentes légitimes de la population. En effet, les Sénégalais sont confrontés à des difficultés grandissantes. La vie devient de plus en plus chère, le chômage des jeunes explose (et pas plus tard que cette semaine, une embarcation de migrants a été interceptée), beaucoup de chantiers sont à l’arrêt avec leur lot de personnes mises au chômage. Dans une absence manifeste de vision stratégique et avec comme leviers de gouvernance l’improvisation et l’approximation, ce pouvoir se complait dans l’invective et la surenchère, avec des discours enflammés au lieu de mesures concrètes qui améliorent le quotidien des Sénégalais. L’on nous installe dès lors dans la stratégie de la diversion permanente pour orienter le débat public sur ce qu’il n’est pas. Or, en le faisant, nous assistons à une gouvernance polémique. La dernière polémique est du récidiviste Moustapha Sarré, ministre de la Formation professionnelle et non moins porteparole du gouvernement. Sans détour, il a déclaré que l’ancien ministre Moustapha Ba a été tué en France. «Ils ont menti sur les chiffres, ils ont menti au Peuple sénégalais et aux partenaires. Lors de sa rencontre avec le Président Bassirou Diomaye Faye et le Premier ministre Ousmane Sonko, Moustapha Ba leur a révélé que les chiffres n’étaient pas exacts. Nous devons élucider les circonstances de sa mort, car il a été tué dans des conditions troubles», dit-il lors d’une activité politique à Mbao. Et face au tollé que ses propos ont suscités, il remet une couche encore plus maladroite en accusant ses adversaires apéristes de fabriquer «des polémiques» parce que manquant «d’arguments».
«Après avoir plongé le pays dans une situation économique catastrophique, les champions du maquillage des chiffres et de la diversion tentent aujourd’hui d’exister autrement qu’en assumant leur bilan. Ce week-end, j’ai lancé avec fierté les activités de l’Ecole du parti Daaray Cheikh Anta Diop à Mbao, pour un militantisme engagé et au service du développement. Mais au lieu de débattre sur les véritables enjeux qui concernent les Sénégalais, certains préfèrent manipuler des propos sortis de leur contexte. Soyons clairs : comme tout citoyen, j’ai le droit de m’interroger sur des faits marquants de notre actualité, sans pour autant faire d’affirmations. Ceux qui veulent faire diversion pour éviter les débats de fond sur la gouvernance et l’avenir du pays se fatiguent en vain. Pendant qu’ils polémiquent, nous avançons, déterminés à bâtir un Sénégal nouveau, sur la base de la vérité, de la rigueur et du développement pour tous.» Mieux valait ne pas faire cette précision, car Sarré ne s’est pas posé de questions, il a plutôt affirmé. Et son affirmation «laisserait croire que les autorités de la France, pays où Moustapha Ba est mort, auraient fermé les yeux sur un meurtre» (Madiambal Diagne). Pire, le procureur Ibrahima Ndoye serait lui aussi complice pour avoir autorisé son enterrement sans élucider les circonstances du décès. Et que dire de Adama Gaye qui fut interpellé par la police pour avoir insinué de tels propos ? N’oublions pas que le même Sarré s’est payé le luxe de traiter l’ancien président de la République, Macky Sall, de «chef de gang» quand celui-ci avait rejeté les conclusions du rapport de la Cour des comptes sur la gestion des finances publiques de 2019 à 2023. «Il ne peut pas échapper à la Justice parce que c’est lui qui était derrière tout ça. Il est, en quelque sorte, le chef de gang», avait-il déclaré sur les ondes de la Rfm, ajoutant : «Les Sénégalais lui avaient fait confiance pour améliorer leurs conditions de vie, mais il a posé ces actes et caché la vérité. Si ce que la Cour des comptes a certifié est transmis aux autorités judiciaires, il devra répondre devant la Justice, car nous savons tous qu’aucun acte de malversation ne peut être posé sans qu’il n’en soit informé. S’il pense qu’il n’a rien fait, il n’a qu’à revenir et assurer sa propre défense devant la Justice.»
Et comme par hasard, quelques jours après, le voilà qui se rétracte sur Walf Tv en soutenant : «Je parlais pour moi, pas pour le gouvernement.» Un porteparole qui exprime ses opinions personnelles sur des dossiers aussi graves, c’est peut-être une première dans les annales de l’histoire politique. Un porteparole qui ne parle que pour lui-même, c’est tout un symbole : un gouvernement où chacun dit ce qu’il veut, sans coordination, sans ligne directrice, sans conscience des conséquences. En effet, Sarré, à l’image de Ousmane Sonko, est fort à accuser sans preuves ni nuances. Et l’opinion publique commence à considérer ces accusations comme des manœuvres politiciennes sans fondement, qui affaiblissent la crédibilité de ceux qui sont aujourd’hui au pouvoir. En avril dernier, juste quelques jours après l’installation du nouveau gouvernement, pendant que l’opposition semblait leur accorder un délai de grâce, le même Sarré a ouvert les hostilités politiques. Dans l’émission Grand Jury de la Rfm, il mettait en garde l’opposition alors majoritaire au Parlement : «Voter une motion de censeure contre le gouvernement serait ramer à contre-courant de la vision de la majorité du Peuple sénégalais. Si jamais il arrivait que des personnes cherchent à faire tomber le gouvernement, ils auraient certainement en face d’eux toute l’opinion publique ; en tout cas la plus grande partie de l’opinion publique du Sénégal. Parce que, jamais dans l’histoire de notre continent, un projet n’a jamais été aussi plébiscité dès le premier tour, venant surtout de l’opposition. Je crois que nos amis de l’opposition actuelle, qui sont majoritaires à l’Assemblée nationale, ne commettraient pas l’erreur de déposer une motion de censure. Les députés de l’opposition sont dans l’obligation de prendre en compte les résultats du scrutin présidentiel du 24 mars 2024 pour ne pas être désavoués par le Peuple.» Réplique de Abdou Mbow : «Le Groupe parlementaire Benno bokk yaakaar rappelle au porte-parole du gouvernement que la motion de censure fait partie de la panoplie d’instruments de contrôle de l’action gouvernementale dont dispose l’Assemblée nationale. A ce titre, sa mise en œuvre relève exclusivement de la compétence des députés quant à l’appréciation qu’ils feront du contenu de la Déclaration de politique générale du Premier ministre, comme ce fut le cas de la motion de censure déposée par le Groupe parlementaire Yewwi askan wi suite à la Déclaration de politique générale du Premier ministre Amadou Ba.» Moustapha Sarré est la preuve vivante de cette affirmation : «L’exercice de la communication n’a jamais été à la portée de tout le monde.» Dès lors, ne faudrait-il pas lui couper la langue ? Au sens figuré bien sûr ! Au moment où l’on prône la séparation des pouvoirs, il y a des propos qu’un ministre, de surcroît porte-parole du gouvernement, ne devrait pas tenir dans l’espace public. Il devrait apprendre à retourner cent fois sa langue avant de l’ouvrir. Le porte-parole d’une entité devrait comprendre qu’il n’a pas à exprimer des opinions personnelles, encore moins ses sentiments ou s’interroger comme le ferait un citoyen ordinaire. Il devrait faire preuve de tenue et de retenue, et s’en limiter uniquement à porter la parole du gouvernement. En un mot, savoir être un homme d’Etat et éviter d’être un homme de détails. Quand un porte-parole parle, ses propos engagent l’ensemble de l’Etat, ce qui exige une rigueur exemplaire dans ses déclarations.
En effet, chaque sortie semble vouloir surpasser la précédente en gravité, avec des accusations non fondées, des discours accusatoires et une tendance à la théâtralisation de la gestion antérieure. Au lieu de se concentrer sur la gestion quotidienne et les défis à relever pour le bien-être des citoyens dans son secteur, tel un matamore, il joue au procureur et au juge, accusant ceux qui les ont précédés au pouvoir ; ce qui est destructeur de l’image du gouvernement. Désormais, à chaque fois qu’il ouvrira la bouche, il faudra que les Sénégalais bouchent leurs oreilles. Il ne dit rien de bon. Et quand on dit que c’est ce monsieur qui gère l’Ecole du parti de Pastef, tout se comprend… Les figures de ce parti se distinguent souvent par leurs dérapages.
Une série de sorties qui fait tache
A l’image de Moustapha Sarré dont les déclarations controversées ont récemment fait couler beaucoup d’encre, d’autres figures du régime, comme Cheikh Oumar Diagne, Pape Mada Faye et Birame Soulèye Diop, ont également été au cœur de controverses médiatiques. Ces sorties posent la question de la gestion de la communication au sein d’un gouvernement qui se veut pourtant porteur d’un nouveau souffle politique.
LES RELATIONS ENTRE LES EDULCORANTS ET LES RISQUES SUR LA SANTE SONT AMBIGUËS
Dans le doute, Dr Abdoul Aziz Ly, Endocrinologue Diabétologue Nutritionniste, Spécialiste des Maladies Métaboliques, Médecine Interne Hôpital de Tivaouane, estime qu’il y a lieu de limiter la consommation des produits et boissons industriels
Réalisé par Denise ZAROUR MEDANG |
Publication 22/03/2025
Proposés comme alternatives saines au sucre, les édulcorants contenus dans des milliers de produits alimentaires représentent un marché de 7,2 milliards de dollars. Ils n’en sont pas moins au cœur d’une polémique incessante régulièrement entretenue par des lanceurs d’alerte. Bien que l'utilisation de ces édulcorants intenses soit considérée comme globalement sûre aux doses définies par les agences de sécurité des aliments, les soupçons de nocivité pour la santé ne cessent de s'accumuler. Utilisés dans le but louable de réduire la consommation de sucre notamment chez les sujets obèses et/ou diabétiques, les édulcorants pourraient avoir des effets paradoxaux. Dans le doute, Dr Abdoul Aziz Ly, Endocrinologue Diabétologue Nutritionniste, Spécialiste des Maladies Métaboliques, Médecine Interne Hôpital de Tivaouane, estime qu’il y a lieu de limiter la consommation des produits et boissons industriels qui en contiennent ; en privilégiant les aliments et boissons naturels tels que les fruits et l'eau, surtout dans la population générale. Il soutient aussi : « il est vrai que les études décrivant des associations entre leur consommation et divers problèmes de santé ne manquent pas, même si les liens de causalité sont difficiles à établir ».
QU’EST-CE QU’UN EDULCORANT ?
Les édulcorants ou substituts de sucre (faux sucres) sont des additifs alimentaires utilisés pour conférer un goût sucré à des aliments et boissons tels que les boissons non alcoolisées, les desserts, les produits laitiers, les bonbons, les chewing-gums ou encore les produits hypocaloriques et les produits de contrôle du poids. Les édulcorants peuvent être produits de différentes manières, notamment par extraction de plantes (par exemple, les glycosides de stéviol ou la thaumatine) ou d'autres matières d'origine végétale (par exemple, la néohespéridine, dérivée des agrumes). Ils peuvent également être synthétisés (par exemple, la saccharine) ou obtenus en utilisant des micro-organismes dans le processus de production (par exemple, l'érythritol). Les édulcorants ont très souvent un pouvoir sucrant bien supérieur à celui du sucre. La présence d'un édulcorant doit être indiquée sur l'étiquette d'un aliment ou d'une boisson soit par son nom, soit par son numéro E.
ORIGINES DES EDULCORANTS ?
Les édulcorants ont souvent été découverts par hasard. En effet, la saveur sucrée de la saccharine fut découverte accidentellement en 1879 par un chimiste, Ira Remsen, qui s’en alla dîner sans s'être correctement lavé les mains après avoir travaillé sur des dérivés de la houille. À partir des années 60, les professionnels de la santé commencent à entrevoir l’intérêt des édulcorants qu’ils prescrivent alors à leurs patients diabétiques ou souhaitant perdre du poids. Un véritable engouement de la part des scientifiques voit alors le jour. Les chercheurs tentent depuis de développer de nouvelles molécules au goût sucré, sans arrière-goût, stables à la chaleur.
En France, c’est à la fin des années 80 que les édulcorants sont mis à portée de tous lorsque leur vente est autorisée en grande surface, et non plus uniquement dans les pharmacies. Enfin, en 1988, les industriels ont l’autorisation de les utiliser dans leurs produits afin de diminuer les teneurs en sucre sans pour autant impacter le goût sucré. Au niveau international, la responsabilité de l’évaluation de la sécurité de l’ensemble des additifs, dont les édulcorants, est confiée au Comité scientifique mixte d’experts des additifs alimentaires (Joint Expert Scientific Committee on Food Additives, JECFA).
QUELS SONT LES DIFFERENTS TYPES D’EDULCORANTS ?
Ils sont essentiellement classés en 2 groupes dont les édulcorants de masse et les édulcorants de synthèse. Les édulcorants de masse peuvent également être nommés édulcorants de charge, édulcorants nutritifs ou polyols. Dans ce groupe, nous trouvons entre autres l’isomalt, le sorbitol, le mannitol et le xylitol. Ce sont des sucres-alcools. Ils sont obtenus industriellement, mais ils sont aussi naturellement présents en petites quantités dans de nombreux fruits et légumes, comme les fruits rouges, l’épi de maïs ou la noix de coco. Ils sont généralement moins sucrés que le sucre : leur pouvoir sucrant va de 0,4 à 1 fois celui du sucre ou saccharose. Ils sont caloriques excepté l’érythritol. Ils ont l’avantage de ne pas avoir d’effet cariogène, raison pour laquelle ils sont essentiellement utilisés en confiserie dans les bonbons et les chewing-gums sans sucre.
Quant aux édulcorants de synthèse, Ils peuvent être appelés édulcorants intenses, artificiels ou non nutritifs. Dans cette catégorie, on trouve, entre autres, la saccharine, le cyclamate, l’aspartame et l’acesulfame K. Ils ont un pouvoir sucrant très élevé, qui est de 30 à 500 fois supérieur à celui du saccharose.
QUELS SONT LES RISQUES POUR LA SANTE ?
Les relations entre les édulcorants et les risques sur la santé sont ambiguës, disparates et souvent le résultat d’études contradictoires. Les études disponibles tant chez l’adulte que chez l’enfant sont très hétérogènes, souvent de durée brève et portent sur un faible nombre de sujets. Une analyse récente menée à partir de 50 études s’est donné pour ambition de rechercher les effets des sur la santé globale dans la population générale.
LES EDULCORANTS FONT-ILS GROSSIR ?
La substitution des sucres ajoutés par les édulcorants apparaît théoriquement intéressante dans l’obésité. La plupart des études ont montré un effet bénéfique de l’aspartame sur la perte de poids et son maintien lorsqu’il est utilisé dans le cadre d’une prise en charge standardisée de l’obésité. Il existe également un avantage pondéral chez les sujets obèses consommateurs de boissons édulcorées par rapport aux boissons sucrées de référence. Si la logique comptable de la restriction calorique semble validée au cours de l’obésité par la plupart des études, il n’en est pas de même dans la population générale. Les grandes études décrivent une association positive entre la consommation régulière d’édulcorants intenses et le risque d’obésité. Enfin, chez les enfants et les adolescents, la consommation d’EIS est considérée généralement comme un promoteur de l’obésité.
LES EDULCORANTS DONNENT-ILS LE CANCER ?
Depuis son apparition dans les aliments, il existe une controverse sur l’aspartame, accusé d’être lié à une augmentation du risque de cancer, à la suite d’une étude italienne de 2010 menée chez des souris. En 2013, l’Agence européenne de sécurité des aliments (EFSA) a conclu, après une réévaluation approfondie des données scientifiques chez l’animal et chez l’homme, que l’aspartame et ses produits de dégradation étaient sûrs pour la consommation humaine aux niveaux habituels d’exposition : la dose journalière acceptable est limitée à 40 mg par kilo de poids corporel, y compris pour les nourrissons, les enfants et les femmes enceintes.
LES EDULCORANTS DONNENT-ILS LE DIABETE ?
Les édulcorants de synthèse semblent être un facteur favorisant l’apparition d’un diabète de type 2 dans la population générale. Les données issues de grandes études épidémiologiques sont en faveur d’une relation positive entre la consommation d’édulcorants de synthèse et l’incidence de diabète de type 2 notamment chez les femmes obèses.
COMMENT UTILISER LES EDULCORANTS ?
Pour les édulcorants de masse (polyols), il n’existe pas de recommandation de consommation mais une limite à ne pas dépasser pour éviter des signes d’inconfort digestif liés à leur fermentation (flatulences, diarrhées) ; ces valeurs se situent entre 20 et 50 g par jour. Pour les édulcorants de synthèse, la dose journalière admissible (DJA) est une garantie de sécurité qui représente la quantité moyenne d’un édulcorant pouvant être consommée sans risque, chaque jour et pendant toute la durée de vie d’une personne. Par exemple pour un adulte de 70 Kg il faut au moins 70 cachets d’aspartames par jour pour atteindre la dose journalière admissible pour dire que cette quantité est quasi inatteignable.
QUI DOIT CONSOMMER LES EDULCORANTS INTENSES ?
Selon l’organisation mondiale (OMS) l’utilisation des édulcorants intenses ne s’applique qu’aux personnes vivant avec un diabète. Au vu des études, les personnes ayant une obésité peuvent utiliser les édulcorants dans les limites des doses permises. La population générale devrait s’abstenir de consommer les édulcorants de synthèse au vu des risques potentiels. Les gens doivent envisager d’autres moyens de réduire leur consommation de sucres libres, par exemple en consommant des aliments contenant des sucres naturels, comme les fruits, ou des aliments et des boissons non sucrés.
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LES 3 MOMENTS FAVORIS OÙ L'HUMAIN MENT
La manipulation et le truquage d’images ne sont pas une nouveauté dans le monde de la communication. Mais avec le numérique et l’avènement des intelligences artificielles, ces phénomènes prennent une autre dimension.
Invité à discuter des intelligences artificielles et de leur risque pour certaines personnes dans l’émission Les Carnets culturels, Djiby Diakhaté a, d’entrée de jeu, tenu à souligner les moments propices où l’être humain ment sans sourciller. Il s’agit des périodes préélectorales, des périodes de guerre et de l’après-chasse. Le sociologue explique amplement les raisons dans l’extrait de cette émission produite par Le Carré culturel.
La manipulation et le truquage d’images ne sont pas une nouveauté dans le monde de la communication. Mais avec le numérique et l’avènement des intelligences artificielles, ces phénomènes prennent une autre dimension dans un contexte où les IA concurrencent rudement l’intelligence humaine. En effet, il est aujourd’hui facile de faire accepter une image générée par une IA, même si, dans la réalité, elle n’existe pas. Djiby Diakhaté a analysé une série d'images truquées ou générées par l'intelligence artificielle.
Pour lui, l'avènement de l'intelligence artificielle porte le mensonge à un autre niveau, bouleversant la vie en société. Ainsi, le sociologue attire l'attention sur les deepfakes, qui visent à manipuler l'opinion, y compris dans la création des savoirs. Par exemple, la tricherie avec les IA est aujourd'hui technicisée, l'homme étant, in fine, devenu l'outil de ses propres outils qu'il a créés.
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LE MIRAGE DES RÉSEAUX SOCIAUX
Moise Inandjo est un romancier qui consacre l’essentiel de ses romans à des sujets visant à préserver les jeunes et les adolescents des fléaux pouvant gâcher leur vie d’une manière ou d’une autre. M. Inandjo est l'invité des Carnets culturels
Dans son dernier roman, Le Mirage des réseaux sociaux, édité par Le Carré culturel, le fonctionnaire international met en garde contre le piège qui guette les jeunes dans le mésusage des réseaux sociaux numériques. Invité des Carnets culturels, l’écrivain revient en détail sur sa production littéraire et, en particulier, sur son dernier ouvrage.
À travers ce roman, l’auteur raconte l’histoire d’un jeune étudiant africain parti étudier à l’étranger et qui, pris dans l’engrenage des réseaux sociaux, abandonne ses études pour se lancer dans une « carrière d’influenceur ». Une activité qui lui réussit au début, puisqu’il gagne rapidement en célébrité et parvient à amasser de l’argent. Mais, au fil du temps, il en veut toujours plus pour maintenir son train de vie, au point de sombrer dans la cybercriminalité et d’autres activités illicites, telles que le trafic de drogue. Finalement, il n’obtiendra aucun diplôme et finira en prison, entraîné dans une véritable descente aux enfers qui le conduira même à tuer ses propres parents.
Sociologue de formation, Moise Inandjo fait partie des écrivains les plus productifs du Togo. Sa plume est reconnue dans son pays, notamment parce qu’un de ses ouvrages est inscrit au programme scolaire. Il a également été lauréat d’un prix littéraire au Togo.
Par Babacar P. MBAYE
RUSSIE-AFRIQUE, L’ALLIANCE DES PERDANTS OU LE BAL DES ILLUSIONS ?
Se présentant comme une puissance incontournable auprès de certains États et groupuscules en Afrique, Moscou se retrouve aujourd'hui affaiblie, industriellement comme militairement
Trois années viennent de s’écouler après le début de l’agression de la Russie contre l’Ukraine. Force est de constater qu’il s’agit de l’anniversaire d’un échec fracassant. La « guerre éclair » voulue par Vladimir Poutine et ses stratèges du Kremlin s’est transformée en « Vietnam russe ».
Embourbées en Ukraine, les troupes russes montrent leur vulnérabilité, et ce conflit a révélé les limites stratégiques et militaires du Kremlin. Se présentant comme une puissance incontournable auprès de certains États et groupuscules en Afrique, Moscou se retrouve aujourd'hui affaiblie, industriellement comme militairement, et en proie à l’isolement diplomatique malgré le soutien de Trump consécutif à un retournement d’alliance. Cette impasse militaire soulève des questions cruciales pour les pays africains, notamment en Afrique centrale et dans le Sahel, qui se sont rapprochés de la Russie ces dernières années : Moscou est-elle vraiment un partenaire fiable qui honore ses engagements ? Ou est-elle simplement une puissance en déclin, incapable de garantir une coopération durable ? Ces questions sont d’autant plus importantes à l’heure où Moscou multiplie les défaites sur la scène internationale.
Moscou : un colosse aux pieds d’argile
Engagée sur plusieurs fronts, la Russie multiplie les revers militaires. L'armée russe, autrefois vantée comme l'une des plus puissantes au monde, a révélé ses failles structurelles majeures. Le matériel est défaillant car en Ukraine, 80 à 85 % de l’arsenal russe est composé d’armes de l'époque soviétique.
Il s’y ajoute une insuffisance des chaînes d’approvisionnement face aux pertes subies, des pertes humaines massives avec un lourd bilan qui s’élève à plus de 600.000 russes blessés ou tués, corruption endémique, entre autres maux.
Avec son offensive, la Russie a réveillé un sentiment patriotique jadis latent en Ukraine, qui s’est traduit en une mobilisation de toute la société autour du Président Zelenski. Cette erreur stratégique commise par le Kremlin au nom d’un curieux motif de « dénazification de l’Ukraine » a coûté cher à la Russie, qui tablait sur une prise rapide de Kiev et qui se retrouve finalement embourbée dans ce conflit qui semble interminable. Cette situation affaiblit non seulement sa crédibilité militaire, mais également sa capacité à soutenir ses partenaires à l’international, en témoigne la débâcle sécuritaire actuelle en Syrie.
La Syrie : un théâtre d’expression des limites du partenariat sécuritaire russe
En Syrie, Moscou a soutenu indéfectiblement le gouvernement de Bachar al-Assad, pourtant auteur de crimes de grande ampleur depuis l’éclatement de la guerre civile meurtrière dans le pays en 2011. La récente chute du gouvernement Assad grâce à une offensive éclair de la rébellion du HTC dirigée par Abou Mouhammed Al Joulani, a donc exposé les failles du partenariat russe, qui a échoué à protéger son allié dans un contexte sécuritaire dégradé. Malgré les installations navales russes dans le port de Tartous, les soutiens logistiques et en renseignement, Moscou a assisté bras ballants à la prise du pouvoir des maquisards, qui après Alep et Homs, ont pu prendre Damas sans aucune résistance. La Russie n’a pu pour son vieil allié Bachar que lui offrir une extradition vers Moscou. Pire encore, la Russie a sitôt après avoir accueilli, a débuté les négociations avec le nouveau gouvernement syrien en place, HTC (Hayat Tahrir alCham), seulement quelques jours après la prise de Damas. Certains observateurs n’ont pas hésité à rappeler la nature cynique et opportuniste du Kremlin.
Les négociations initiales n'ayant pas abouti à la protection des deux bases militaires russes présentes en Syrie, des images satellites révèlent des rassemblements importants de matériel sur ces mêmes bases. Alors que ces deux bases sont cruciales pour la projection des forces russes vers l’Afrique, il semble que la Russie envisage de les déplacer vers la Libye. Ce déplacement consacrerait une perte d’influence russe au Moyen-Orient au profit d’autres puissances régionales comme la Turquie d’Erdogan qui a soutenu et équipé HTC ou l’Iran des Mollahs mise en difficulté par les succès israéliens auprès de ses proxys du Hezbollah et du Hamas.
Ce phénomène met en lumière l’incapacité longtemps pointé de la Russie à honorer ses partenariats à l’international, préférant toujours assurer ses intérêts propres, quitte à pactiser avec les ennemis de ses soi-disant « amis ».
Compte tenu de l’échec russe à garantir la paix et la sécurité dans un pays au MoyenOrient, comment la Russie pourrait-elle garantir une coopération sécuritaire fiable et fructueuse à l’échelle d’un continent entier, précisément l’Afrique, lui aussi secoué par de graves enjeux sécuritaires ?
En afrique, des promesses vides et des alliances précaires
Depuis plusieurs années, plusieurs pays africains, notamment au Sahel et en Afrique centrale, se sont rapprochés de la Russie et ont fait le choix du partenariat sécuritaire russe. Les juntes au Mali, au Burkina et au Niger, qui ont toutes arraché le pouvoir aux mains de régimes démocratiques, sont notamment allées chercher à Moscou un soutien militaire qui prend la forme d’armements bon marché et de sociétés militaires privées mais répondant du Kremlin. Elles sont incarnées par les groupes Wagner et Africa Corps, qui profitent de leur partenariat avec des pays africains pour renforcer leur influence sur le continent, tout en pillant illégalement leurs ressources naturelles et en s’attaquant aux populations civiles.
Alors que la Russie se positionne comme partenaire sécuritaire incontournable en promettant sécurité et stabilité, la sanglante défaite à Tinzaouaten l’année dernière face aux miliciens Touaregs du CMA prouve qu’il s’agit de promesses difficilement tenables. En plus de s’accompagner d’une situation sécuritaire dégradée, la présence russe en Afrique a contribué à la persistance des violences commises contre les populations civiles et est même associée à des violations des droits de l'homme, comme en témoigne il y a quelques jours l’assassinat d’une vingtaine de civils dans le Nord du Mali, pour lequel les mercenaires russes sont les principaux suspects. De la même façon, la Russie prétend apporter un soutien total à ses partenaires africains dans plusieurs domaines tels que le « développement économique, […] le règlement des problèmes alimentaires ou les conséquences des catastrophes naturelles » ; il s’agit de promesses réitérées lors d’une conférence organisée à Sotchi, les 9 et 10 novembre 2024 avec des activistes et complotistes sous parapluie russe. Pourtant, dans les faits, les actions russes favorisent au contraire ces problèmes. Moscou participe activement au pillage illégal des ressources africaines, selon un rapport de l’ONG Human Rights Watch, qu’il s’agisse de minerais tels que l’or ou les diamants, dont le vol contribue activement à l’appauvrissement des populations, favorisant de nouveaux déplacements migratoires.
Pour les nations africaines qui ont reçu un soutien militaire ou diplomatique de Moscou, le constat de dépréciation de leur note diplomatique est alarmant. Les États de l’AES ont fait sécession de la CEDEAO ; le Niger du fantasque Tiani vient d’annoncer son départ de l’OIF, renonçant ainsi à une tradition vieille de près de 60 ans, surtout dans un pays dont l’ancien président et co-fondateur de l’organisation, La Russie, en perte de vitesse, exsangue militairement, est-elle encore en mesure d’assurer ses promesses : la sécurité, la protection des régimes en place ou le respect de ses accords avec les États africains dont les besoins de liquidités se chiffrent en milliers de milliards afin de résoudre les questions liées à l’emploi, à l’accès à l’eau et à l’électricité ? Rien n’est moins sûr, surtout avec l’enlisement actuel en Ukraine.
Une dépendance à une puissance déclinante pourrait s’avérer être une erreur stratégique fatale pour les États africains au moment où les jeunesses dans les pays concernés perdent patience et se rendent compte que les promesses des putschistes censées améliorer leur vie quotidienne ne sont guère tenues. Au contraire, les militaires se montrent plus préoccupés dans leur renforcement au pouvoir au mépris des règles démocratiques plutôt que dans la transmission du pouvoir aux civils.
Les échecs stratégiques répétés de la Russie, son incapacité à honorer ses engagements et ses promesses non tenues à ses « amis » devraient inciter les pays africains à reconsidérer leurs partenariats. Que fera Moscou si des groupes terroristes menacent des capitales africaines comme Bamako, Niamey, Ouagadougou ou Bangui ? Compte tenu de ses revers en Ukraine et en Syrie, il est légitime de douter de sa capacité et de sa volonté à intervenir efficacement. Les dirigeants africains, surtout nos voisins du Sahel, doivent évaluer avec prudence la fiabilité de leur partenaire stratégique et envisager des alliances plus fiables et durables pour les appuyer sécuritairement, préserver leur souveraineté et favoriser le développement de leurs nations.