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26 novembre 2024
Cheikh Anta Diop
"IL FAUT PRIVILÉGIER LE PRAGMATISME DANS L'ENSEIGNEMENT DES OEUVRES DE CHEIKH ANTA DIOP"
Pour que les idées de Cheikh Anta Diop soient bien connues des Sénégalais, il faut les enseigner de la maternelle à l’université - C’est ce que recommande Aboubacry Moussa Lam, historien et égyptologue
Pour que les idées de Cheikh Anta Diop soient bien connues des Sénégalais, il faut les enseigner de la maternelle à l’université. C’est ce que recommande le Pr Aboubacry Moussa Lam, historien et égyptologue. Il indique que les idées du savant sénégalais sont enseignées au département d’Histoire de l’Ucad depuis 1981. Le Pr Lam plaide aussi pour la création d’un institut d’égyptologie.
Professeur Lam, pouvez-vous vous présenter à nos lecteurs ?
Je suis Professeur titulaire de classe exceptionnelle ayant plafonné depuis 2006 et définitivement à la retraite à partir du 31 juillet 2019. Sans fausse modestie, j’ai eu une carrière plutôt honorable avec 12 ouvrages, dont 11 écrits tout seul (trois sur ces 11 sont écrits en langue pulaar), 44 articles de haut niveau, 81 articles de vulgarisation et contributions diverses, six thèses encadrées dans une discipline peu courue des étudiants. Et comme distinctions, je suis commandeur de l’Ordre national du Lion, chevalier de L’Ordre national des Arts et Lettres du Sénégal et chevalier de l’Ordre des palmes académiques du Cames. Je suis aussi très proche des problèmes de développement de mon terroir, l’Ile-à-Morphil.
Le « Mouvement carbone 14 » a organisé, en mars, une marche pour une meilleure prise en compte de l’œuvre de Cheikh Anta Diop dans le système éducatif. Qu’est-ce que cela vous inspire en tant qu’ancien assistant de ce dernier de 1981 à 1986 ?
Le combat pour l’enseignement des idées de Cheikh Anta Diop ne date pas de cette marche. Depuis au moins deux ans déjà, le gouvernement du Sénégal a donné son feu vert pour que ses idées soient intégrées dans les curricula, de la maternelle à la terminale. J’ai personnellement participé à deux séminaires sur cette question et tous les niveaux d’enseignement ont été examinés et des propositions de modifications faites. Mais, les choses traînent à se mettre en place, car il faut, entre autres, réformer les programmes. Je pense qu’il faut désormais privilégier le pragmatisme. Une bonne documentation et des séminaires de mise à niveau pourraient nous permettre de démarrer pour certaines disciplines,en attendant la production de manuels et de supports pédagogiques adaptés. Autrement, on risque d’attendre encore de longues années avant un démarrage effectif. C’est le lieu de préciser que pour le département d’Histoire, les idées de Cheikh Anta sont enseignées depuis 1981, date de la levée des mesures qui le frappaient, mais également date de retour de Babacar Sall, Babacar Diop et moi-même à l’Ucad, après une formation en France.
Quelles sont les œuvres qui ont été réalisées par Cheikh Anta Diop ?
Puisque la porte des amphithéâtres lui avait été fermée, Cheikh Anta Diop a enseigné par écrit. Parmi ses travaux d’importance, citons « Nations nègres et culture » (1954), « L’unité culturelle de l’Afrique noire » (1959), « L’Afrique noire précoloniale », (1960), « Les fondements économiques et culturels d’un Etat fédéral d’Afrique noire » (1960), « Antériorité des civilisations nègres. Mythe ou vérité historique ? » (1967), « Le laboratoire de radiocarbone de l’Ifan » (1968), « Physique nucléaire et chronologie absolue » (1974), « Parenté génétique de l’égyptien pharaonique et des langues négro-africaines » (1977), « Civilisation ou barbarie » (1981) et « Nouvelles recherches sur l’égyptien ancien et les langues négro-africaines modernes » (1988). Certains de ces titres ont été traduits en anglais et même en espagnol. A ces livres, s’ajoutent de nombreux articles dont nous citons deux à titre d’illustration et pour leur grande importance. Il s’agit de « La métallurgie du fer sous l’ancien empire égyptien », Bifan, série B, T. XXXV, n° 3, 1973, pp. 532-547 ; et « Introduction à l’étude des migrations en Afrique centrale et occidentale. Indentification du berceau nilotique du peuple sénégalais », Bifan, série B, T. XXXV, n° 4, 1973, pp. 769-792.
L’un des livres fétiches est « Fondements économiques et culturels d’un Etat fédéral d’Afrique noire ». Pensez-vous que cet ouvrage devrait être un bréviaire pour les chefs d’Etat africains ?
C’est un livre écrit au moment des indépendances pour mettre en garde les élites de l’époque contre la division et recommander l’unité dans un Etat fédéral fort. Malheureusement, Cheikh Anta ne fut pas entendu. Il y avait expliqué que l’unité serait plus difficile à faire une fois les indépendances acquises. Sur cette prédiction, les faits ont déjà fini de lui donner raison. Mais,son livre reste actuel et peut toujours être d’une grande utilité pour tout chef d’Etat soucieux de l’unité africaine et des voies et moyens d’y parvenir.
Au département d’Histoire, il y a une Section d’Egyptologie. Est-ce que les étudiants s’intéressent à cette discipline ?
Dans les choix optionnels, ils s’y intéressent, mais pas autant qu’à l’Histoire moderne et contemporaine, réputée être plus facile. L’Egyptologie est enseignée à partir de la Licence II en cours obligatoires et semble passionner les étudiants, si j’en juge par leur affluence (la présence aux cours magistraux n’est pas obligatoire) et les multiples questions qu’ils me posent. En Master, nous totalisons une vingtaine d’inscrits et 12 thèses d’Egyptologie sont en cours, malgré les conditions de travail difficiles en matière de documentation. C’est le lieu de rappeler qu’en Egyptologie, l’Ucad n’a pas d’équivalent dans l’espace Cames, mais pour combien de temps encore ? Depuis 2008, l’Assemblée de l’université a donné son feu vert pour la création d’un Institut d’égyptologie, mais à ce jour, aucun texte n’a encore été pris, malgré les promesses réitérées par les plus hautes autorités de ce pays lors de la commémoration du 30e anniversaire de la disparition de Cheikh Anta Diop. Un tel institut aiderait beaucoup dans la naissance de vocations et l’enracinement de l’enseignement et de la recherche égyptologiques.
En tant qu’enseignant-chercheur, comment contribuez-vous à la vulgarisation des œuvres de Cheikh Anta Diop ?
En les utilisant dans mes cours et en montrant, à travers mes propres publications, que Cheikh Anta a ouvert de nombreuses pistes de recherche qui méritent d’être explorées parce que nécessaires à la compréhension de notre histoire. J’explique également, en utilisant ses œuvres, que sur presque toutes les controverses qui l’opposèrent aux savants occidentaux, les dernières recherches lui ont donné raison : l’Afrique comme berceau de l’humanité, l’africanité et la négritude des anciens égyptiens, le peuplement de l’intérieur de l’Afrique par des vagues migratoires parties de la vallée du Nil et aussi l’unité culturelle du continent.
Quelles sont les stratégies à développer pour que Cheikh Anta Diop soit bien connu des Sénégalais ?
En enseignant ses idées de la maternelle à l’université mais aussi en mettant ses œuvres à la portée des jeunes sénégalais. Pour les adultes qui n’ont pas eu la chance de fréquenter le système formel, leur donner la possibilité de lire ses œuvres à travers leurs traductions dans nos différentes langues ou de les écouter à travers des supports audio.
Est-ce que la relève est assurée au département d’Histoire ?
Je devais partir à la retraite en décembre, mais j’ai été finalement maintenu jusqu’en juillet pour terminer les deux semestres réglementaires. A vrai dire, la relève n’est pas encore totalement assurée, en dépit de nos efforts. En effet, avec une équipe de trois jeunes égyptologues et un quatrième qui va rejoindre l’effectif, nous ne pouvons pas assurer correctement les enseignements. C’est en matière d’encadrement que la relève n’est pas encore bien assurée. En appliquant strictement les normes Cames, l’encadrement adéquat de nos Masters ne peut plus être fait de manière correcte. Pour les thèses, il ne sera plus possible de les faire au département à partir de la rentrée prochaine, faute d’un enseignant de rang magistral (Maître de conférences ou Professeur titulaire). Ce serait une dangereuse régression vu la peine que nous nous sommes donnés depuis 1981 pour faire de Dakar un pôle qui compte dans l’enseignement et la recherche égyptologiques en Afrique. Cette situation demeurera tant qu’un de nos deux Maîtres-assistants ne sera pas inscrit sur la Lafmc.
Cheikh Anta Diop avait créé le Rnd, un parti aujourd’hui divisé en plusieurs entités. Croyez-vous que son héritage politique est bien préservé ?
J’ai surtout pratiqué le scientifique,mais en tant qu’observateur, il me semble que, même durant sa vie, Cheikh Anta n’a pas été très heureux en politique. Il était, sans doute, en avance sur ses contemporains et trop honnête pour faire un bon politicien. Avec sa disparition, le moins que l’on puisse dire, c’est que les choses ne se sont pas améliorées. Le Rnd est parti en lambeaux du fait, peut-être, de divergences d’orientation ou, plus prosaïquement encore, d’ambitions mal gérées à l’interne de la part de ses anciens compagnons.
CHEIKH ANTA DIOP, UN GÉANT ENCORE PEU CONNU
Les œuvres du scientifique, linguiste, sociologue et anthropologue sont méconnues des élèves - Beaucoup en effet, ne connaissent l’égyptologue que de nom
Fin mars dernier, des étudiants de l’Université Cheikh Anta Diop (Ucad) se réclamant du « Mouvement carbone 14 » ont organisé une marche pour exiger l’enseignement des œuvres du célèbre savant sénégalais dans les programmes scolaires et universitaires. En plus de porter le nom de la plus grande université du Sénégal, Cheikh Anta Diop est considéré comme l’un des plus grands penseurs de l’Afrique. Le désir des étudiants témoigne de cette envie de la nouvelle génération de mieux se familiariser avec les livresde nos grandes figures historiques et scientifiques. Refondateur de l’histoire de l’Afrique par une recherche scientifique pluridisciplinaire, Cheikh Anta a tiré sa révérence le 07 février 1986. Toutefois, ses livres et activités restent encore peu connues aujourd’hui chez la plupart des jeunes.
Lycée Blaise Diagne. En ce début de matinée, un vent fort et poussiéreux souffle et agresse presque les yeux. L’ambiance des jours d’école n’est pas au rendez-vous dans cet établissement qui, d’habitude, grouille de monde. Les vacances de la Quinzaine de la jeunesse sont passées par là. Seuls quelques élèves de Première et de Terminale sont présents sur les lieux. Ils révisent ou suivent des cours de rattrapage. Parmi eux, certains affirment, en toute franchise, qu’ils n’ont aucune idée des thèses défendues par l’égyptologue. Son travail est encore considéré comme un mythe dans la conscience de ces apprenants. Coumba Badiaga, élève en classe de Terminale L’1A, en fait partie.« Je n’ai jamais étudié une œuvre de Cheikh Anta Diop. Ses ouvrages ne sont pas inscrits dans le programme. Mais, je sais au moins que c’est un homme politique », avoue-t-elle. Ses autres camarades embouchent la même trompette. Une situation qu’ils déplorent tout de même, car trouvant insensé d’étudier les œuvres littéraires de figures historiques étrangers, en lieu et place de certains livres d’érudits sénégalais comme Cheikh Anta Diop.
Au lycée Maurice Delafosse, le même décor s’offre à nous. Un calme y plat règne. Ici également, seuls quelques élèves du Club scientifique sont visibles dans la cour de l’école. Trouvé en pleine discussion avec ses camarades, un élève en Seconde SD, sous le couvert de l’anonymat, soutient que les œuvres de Cheikh Anta Diop ne sont pas inscrites au programme. Mais, en bon scientifique, il s’est débrouillé pour prendre connaissance de ses ouvrages, tels que « Nations nègres et culture », « Antériorité des civilisations nègres : mythe ou vérité historique ». «C’est à la bibliothèque du Centre culturel Blaise Senghor que j’ai eu à les lire parce que je voulais vraiment découvrir les écrits de ce grand scientifique pour pouvoir m’inspirer de lui », révèle le jeune élève, le sourire au coin des lèvres. Tout le contraire de Mamadou Sylla, élève en classe de Première S qui n’a pas une grande connaissance des travaux du dit chercheur.
Des clubs et cercles d’amis pour inverser la tendance
Il lui a fallu découvrir un pan du travail de Cheikh Anta pour demander à ce qu’on inscrive ses ouvrages dans le programme scolaire. « J’ai récemment découvert un de ses livres bilingues où il traduisait certains termes scientifiques en wolof pour montrer qu’on peut étudier la science en wolof. Je trouve que toutes ses œuvres doivent être inscrites au programme pour mieux aider les élèves à connaître le caractère multidimensionnel de Cheikh Anta Diop », indique le jeune Mamadou. D’ailleurs, le Club scientifique compte rendre un hommage au savant durant les journées scientifiques du lycée mixte Maurice Delafosse prévues le 4 mai prochain », dit-il.
Au lycée Lamine Guèye, c’est la même remarque. Mais ici, pour combler le vide, un cercle des amis de Cheikh Anta Diop a été mis en place par les élèves.
Un contenu parcellaire dans l’enseignement supérieur
Parrain de l’Université de Dakar, le travail de Cheikh Anta Diop est enseigné dans certains départements, souvent à partir de la Licence III. Par contre, au département d’Histoire, l’œuvre du professeur figure dans les programmes dès la Licence II/Section Egyptologie. Seulement, des voix en réclament davantage vu la dimension du savant. A la Faculté des lettres et sciences humaines de l’Ucad, près de 32 000 étudiants sont inscrits. Mais,du fait des fêtes de la jeunesse, elle s’est un peu vidée d’une bonne partie de ses pensionnaires. Néanmoins, quelques étudiants y maintiennent le souffle de la vie. A notre passage au département d’Histoire, un des hauts lieux de diffusion des idées du Pr Cheikh Anta Diop, moins de dix étudiants étaient présents. Sur place, nous avons trouvé le Pr Alioune Dème. Interrogé sur la vulgarisation de l’œuvre de Cheikh Anta, il pense que des efforts sont faits dans leur département. D’après cet archéologue, dès la Licence II, les étudiants se familiarisent avec ses œuvres. « Il y a des cours sur lui en Licence II et III et en Master. C’est déjà quelque chose avec la Section d’Egyptologie », ajoute M. Dème.
« C’est le lieu de préciser que, pour le département d’Histoire, les idées de Cheikh Anta Diop sont enseignées depuis 1981, date de la levée des mesures qui le frappaient mais également date du retour de Babacar Sall, Babacar Diop et moi-même après une formation en France », révèle, pour sa part, le Pr Aboubacry Moussa Lam, enseignant audit département. Il est de ceux qui pensent qu’on devait enseigner l’œuvre de Cheikh Anta Diop dans les autres départements de l’Ucad. M. Lamplaide également pour la révision des contenus pédagogiques portant sur l’œuvre du savant. Secrétaire au département d’Histoire, Djiba Camara souligne qu’en première année, il y a des cours en Histoire moderne et contemporaine. « En Licence II, on enseigne l’œuvre de Cheikh Anta Diop,et tous les étudiants sont concernés. Pour la Licence 3, c’est la spécialisation», explique-t-il. Le Pr Dème exprime toutefois ses inquiétudes avec le départ à la retraite du Pr Lam, le seul titulaire en Egyptologie au département d’Histoire. « Si le Pr Lam part à la retraite en juillet prochain, ce sera la mort de l’Egyptologie au département d’Histoire », avertit-il.
Une pensée toujours incompréhensible
Lors d’une conférence animée en 2016, à l’occasion de la célébration de la disparition du savant, le Pr Babacar Sall, archéologue, avait déploré que l’actualité de la pensée de Cheikh Anta Diop reste toujours « incompréhensible » dans les esprits des Africains. « Les Noirs n’ont pas encore compris que leur devenir est lié à la connaissance de ce qu’ils ont été », avait martelé l’égyptologue. Pour quelqu’un comme l’historien et égyptologue congolais Théophile Obenga, qui a longtemps cheminé avec Cheikh Anta Diop, l’homme qui a donné son nom à l’Université de Dakar s’est fait distinguer par sa création de concepts. « C’est ma conviction, disait-il, car il a permis aux Africains d’assumer ensemble les combats ». Le disciple du chercheur regrette cependant cette « faiblesse conceptuelle qu’il y a chez les Africains », avec cette facilité qu’ils ont parfois à « s’approprier les choses des autres ». « A la lueur de l’analyse globale de son œuvre, on constate que Cheikh Anta Diop a sérieusement ébranlé l’idéologie européenne en démontrant scientifiquement l’origine monogénétique et africaine de l’humanité, l’origine africaine de la civilisation égyptienne, l’origine africaine du savoir grec sans oublier l’origine africaine des concepts philosophiques, des religions dites monothéistes », s’était réjoui Babacar Sall.
A la fois physicien, paléontologue, historien, anthropologue et linguiste, le savant sénégalais a démontré que l’Afrique était bien la première civilisation au monde. Un point de vue qui lui a valu de vives critiques en Occident et sur le continent. « L’œuvre intellectuelle de Cheikh Anta Diop nous révèle un vaste champ de connaissances précises et bien développées », avait soutenu le Pr Obenga. Son apport intellectuel dépasse de loin les cadres étroits que comprennent les classifications égyptologues, avait-il ajouté. Selon lui, le professeur fut aussi un scientifique méticuleux qui nous a laissé des chemins bien tracés dans des domaines aussi divers que la linguistique et la chimie, l‘économie politique et l’esthétique.
Encore des efforts à faire
Trouvée en face de la bibliothèque du département, Rougui Thiam, étudiante en Licence i, pense que le Sénégal doit faire beaucoup d’efforts,pour que l’œuvre du savant soit bien connue. Déjà, cette originaire de Ndendory,dans le département de Kanel, se félicite de sa présence dans le programme dès la Licence 2.
Etudiant guinéen ayant fait tout son cursus scolaire au Sénégal, Mamadou Saliou Barry, inscrit en Licence II au département d’Histoire, dit être fier de parler d’un grand savant, avocat du continent africain. « Pour son immense œuvre, Cheikh Anta Diop mérite plus de considération, notamment par la vulgarisation de son travail », estime-t-il. « L’œuvre de Cheikh Anta Diop n’est pas bien valorisée au Sénégal ; ce qui est dommage ! Elle est enseignée en classe de Terminale en philosophie et en Seconde en histoire. Mais, on peut faire plus », déclare Souleymane Diao, étudiant en Licence 1 en Histoire. Il souhaite que le travail de Cheikh Anta Diop soit au programme dès la Licence I. Un autre étudiant, en Master 2 en Histoirecette fois, prône, sous l’anonymat, un travail de vulgarisation dans d’autres départements de l’Ucad, à savoir en Géographie, Philosophie, Physique...
LABORATOIRE CARBONE 14
Immersion dans l’antre du savant
L’Institut fondamental d’Afrique noire (Ifan) abrite le Laboratoire carbone 14, une réalisation du Pr Cheikh Anta Diop connue essentiellement en datation à des fins archéologiques.
Derrière l’imposant bâtiment de l’Institut fondamental d’Afrique noire (Ifan), se trouve une petite bâtisse. Elle abrite le Laboratoire de carbone 14. Tout juste en face de l’entrée principale, une affiche est collée au mur. On peut y lire des détails sur sa date de création, en 1965, par Cheikh Anta Diop. « Ce laboratoire est le noyau d’un centre atomique des basses énergies où les techniques suivantes sont en cours d’application », lit-on sur l’affiche. « Le laboratoire est devenu fonctionnel en 1966 et les datations ont été faites jusqu’au début des années 1980. L’activité du laboratoire s’est arrêtée complètement en 1986, date de la mort de Cheikh Anta Diop », explique le Pr Maurice Ndèye, chef du labo. Selon lui, les travaux de recherche effectués portent essentiellement sur la datation à des finsarchéologiques, préhistoriques, géomorphologiques, hydro-chronologiques, géologiques, océanographiques, paléo-climatologiques, géochimiques, etc. Il y a aussi des mesures de faibles activités en vue de déterminer la pollution atmosphérique et océanique, la contamination de la végétation... Entre 1999 et 2001, le gouvernement sénégalais a donné son feu vert à la réhabilitation du laboratoire. Ceci a permis de restaurer le bâtiment, d’acquérir un nouvel équipement et d’avoir un laboratoire neuf et fonctionnel. « Les premières nouvelles datations commencèrent en 2003 après une calibration du compteur par les échantillons fournis par l’Aiea et l’Université Paris VI », renseigne-t-il. Après ces explications, M. Ndèye nous fait visiter les différents compartiments de cette structure où le savant sénégalais a passé une bonne partie de sa carrière. D’abord, la salle 1 qui est celle du prétraitement des échantillons. Ensuite, nous pénétrons dans la salle du musée. « Dans cette salle, on y retrouve tout le matériel qu’utilisait Cheikh Anta Diop. Il est devenu obsolète », dit-il. Ensuite, il y a la salle de prétraitement chimique où on traite la pollution marine. La salle de synthèse, comme son nom l’indique, reçoit les échantillons après le prétraitement. Enfin, il y a la salle de comptage où se trouve un compteur à scintillation liquide. « C’est dans ce compartiment que se pratique la datation, renseigne Maurice Ndèye qui dirige ce laboratoire depuis 2003.
Le Laboratoire de carbone 14 continue de recevoir des chercheurs, des enseignants et des étudiants. « Nous encadrons des étudiants. Chaque semaine, nous recevons aussi des élèves », note-t-il non sans préciser que l’infrastructure participe à l’animation scientifique de l’Ucad. D’ailleurs, le Labo a été choisi pour abriter la 22èmeConférence internationale sur le carbone 14 qui a eu lieu en 2015. « Depuis la découverte, par Frank Libby,en 1949, de la méthode de datation par le carbone 14, les spécialistes du genre se retrouvent, tous les trois ans, à l’occasion d’une conférence internationale, pour débattre des avancées des travaux et des découvertes dans ce domaine », informe M. Ndèye,soulignant que le Laboratoire participe régulièrement à ces rencontres. « De 2003 à 2012, notre laboratoire s’est distingué par des présentations scientifiques aux différentes conférences respectivement organisées par les villes de Wellington, Oxford, Hawaï et Paris », ajoute-t-il.
Même s’il fonctionne, fait savoir son chef, le labo est confronté à un problème de moyens. « Un laboratoire doit avoir un budget consistant. C’est un laboratoire de physique et de chimie, et cela demande beaucoup de moyens. Nous sommes régulièrement confrontés à des problèmes de budget », regrette le Pr Ndèye.
PAR SEYDOU KA
RABINDRANATH TAGORE ET CHEIKH ANTA DIOP
J’ai été frappé par le fait qu’en 2019, des étudiants sénégalais réclament encore l’enseignement des œuvres de celui qui, en plus de porter le nom de leur université, est considéré comme l’un des plus grands penseurs d’Afrique
Fin mars, des étudiants de l’Université Cheikh Anta Diop (Ucad), se réclamant du « Mouvement Carbone 14 », ont organisé une marche pour réclamer l’enseignement des œuvres de leur parrain dans les programmes. Sans préjuger d’éventuelles autres motivations des leaders de ce mouvement, j’ai été frappé par le fait qu’en 2019, des étudiants sénégalais réclament encore l’enseignement des œuvres de celui qui, en plus de porter le nom de leur université, est considéré comme l’un des plus grands penseurs d’Afrique. La même complainte provient des confréries qui, elles aussi, jugent que les œuvres de nos grandes figures religieuses ne sont pas suffisamment prises en compte dans les programmes scolaires…
Le hasard a fait qu’au moment de cette actualité, j’étais en train de lire le volume commémoratif (2011) du 150ème anniversaire de la naissance de Rabindranath Tagore, l’auteur indien le plus célèbre du 21ème siècle et « Les fondements économiques et culturels d’un Etat fédéral d’Afrique noire » (Présence Africaine, seconde édition, 1974) de Cheikh Anta Diop. Il ne s’agit point de comparer ici le poète indien et l’historien sénégalais, mais de faire un simple constat. Là où le poète indien est célébré, par les plus hautes autorités de son pays, comme « le Connaisseur » et « le Guérisseur », bref, le voyant et l’interprète des aspirations profondes de son peuple, l’historien sénégalais est presque tombé dans l’oubli, 33 ans seulement après sa mort, devenant l’affaire de quelques rares disciples qui continuent de vénérer la mémoire du « maître » dans des cercles universitaires ou milieux panafricanistes marginaux. Nous n’apprenons pas suffisamment notre culture et notre passé, encore moins les enseignements de nos plus brillants penseurs.
A l’inverse, les pays asiatiques vénèrent leurs grands penseurs et s’inspirent de leur culture pour mieux s’inscrire dans la modernité et le développement. « Il [Tagore] incarnait l’esprit de l’Asie, favorisant la paix, l’échange des idées, l’intégration pacifique de différentes religions et les échanges commerciaux par mer, neutres et dénués de marques de polarisation – des zones de paix et la complémentarité des intérêts », écrit S. M. Krishna, ministre indien des Affaires étrangères (2009-2012), dans l’avant-propos de l’ouvrage commémoratif cité plus haut.
Oui, les leaders du « Mouvement Carbone 14 » ont raison. On ne lit pas assez nos grands penseurs. Je me souviens que c’est tardivement que j’ai découvert Cheikh Anta Diop dans mon cursus scolaire. J’étais déjà à l’université et un de nos profs, un « cheikhantaiste » et marxiste convaincu, avait inscrit dans son cours la lecture obligatoire et un exposé sur « Nation nègre et culture », l’un des ouvrages majeurs de l’égyptologue. Il ne faut sans doute pas considérer l’œuvre du « pharaon du savoir » comme le Coran ou la Bible. A rebrousse chemin de ceux qui le vénère comme un « visionnaire », certains de ses critiques estiment qu’il a produit « une espèce d’histoire culturelle de l’Afrique qui était pleine de bonne volonté, mais qui n’était pas très exacte sur le plan empirique ». Soit ! Mais son œuvre mérite certainement d’être enseignée aux jeunes Africains. Parce qu’elle constitue une source d’inspiration et de réarmement moral inestimable. Voici d’ailleurs ce qu’écrit Cheikh Anta Diop dans « Les fondements économiques et culturels d’un Etat fédéral d’Afrique noire » : « C’est la conjoncture historique qui oblige notre génération à résoudre dans une perspective heureuse l’ensemble des problèmes vitaux qui se posent à l’Afrique, en particulier le problème culturel. Si elle n’y arrive pas, elle apparaîtra dans l’histoire de l’évolution de notre peuple, comme la génération de démarcation qui n’aura pas été capable d’assurer la survie culturelle, nationale, du continent africain ; celle qui, par cécité politique et intellectuelle, aura commis la faute fatale à notre avenir national » (page 28).
Si l’objectif de Cheikh Anta Diop était, dans le contexte des années 1950, de réaffirmer avant tout que l’Afrique avait un passé, un présent et qu’elle allait avoir un avenir, ceci reste valable aujourd’hui plus qu’hier. Certes, le continent a fait d’énormes progrès en matière de démocratie et de développement, mais nos dirigeants auraient tort de négliger l’estime de soi, la construction citoyenne. C’est le chantier prioritaire.
Sinon, comme le disait Cheikh Anta Diop, nous risquons de ne pouvoir opposer à la mainmise étrangère sur nos économies « qu’un nationalisme folklorique et bariolé tout au plus des couleurs vives de nos tissus indigènes ».
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DISCOURS DE VÉRITÉ
EXCLUSIF SENEPLUS - On ne peut pas construire un pays dans le mensonge - Et il y a très longtemps que la parole du politicien au Sénégal est discréditée - Les soutiens de Sonko se veulent apôtres de la vérité
"Nous avons un devoir de vérité parce que nous ne cherchons pas coute que coute à accéder à la magistrature suprême.
Nous portons une ambition pour le Sénégal et nous avons le devoir de dire la vérité’’, précise Bassirou Diomaye Faye. Ce militant des premières heures du Pastef est formel pour ce qui concerne la communication de son leader. Selon Bassirou, le candidat Ousmane Sonko et les siens s'érigent contre la tromperie bien enveloppée dans les promesses de campagne.
Un combat qu’il matérialise dans leur discours pour permettre aux sénégalais lassés de la politique, de s’y intéresser à nouveau. ‘‘ On ne peut pas faire un pays dans le mensonge. Et il y a très longtemps que la parole du politicien au Sénégal est discréditée à cause des promesses démagogiques’’, a t-il déploré.
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LE PROCUREUR FAIT LE POINT : 24 MEMBRES DU PUR ARRÊTÉS, 26 JOURNALISTES AUDITIONNÉS
Demba Traoré, procureur de Tribunal de Grande Instance (TGI) Tambacounda fait le point sur les affrontements survenus hier, lundi 11 février, à Tambacounda. Vingt quatre membres de la sécurité du Parti de l’Unité et du Rassemblement (Pur) ont été interpellés par la compagnie de gendarmerie de Bakel. Et ont été déférées au parquet de Tambacounda.
Selon les informations du Procureur qui tenait un point de presse, des armes blanches, des gourdins et des machettes ont été retrouvées dans leurs véhicules après des fouilles. L’enquête de la mort de Ibou Diop est confiée à la police. Quant à la mort du second, Cheikh Touré, 25 ans, marié et père d’un enfant, elle est entre les mains de la gendarmerie. Pour les besoins de l’enquête, 27 journalistes ont également été auditionnés.
Demba Traore a promis que toute la lumière sera faite sur ces crimes et que leurs auteurs seront punis conformément aux dispositions de la loi.
Les échauffourées entre militants de Benno Bokk Yaakaar et ceux du Parti de l’Unité et du rassemblement (Pur) ont occasionné deux morts officiellement. Obligeant le candidat Issa Sall a suspendre sa campagne. De retour à Dakar, il a promis de faire une déclaration publique, demain mercredi, 13 février.
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LES CANDIDATS DOIVENT S’INSPIRER DU MODÈLE POLITIQUE CHEIKH ANTA DIOP
EXCLUSIF SENEPLUS - Les étudiants de l'Ucad demandent aux acteurs politiques de se remémmorer les préceptes de l'homme multidimensionnel que fut le natif Thieytou, lors de la commémoration de sa disparition
Fanseyni djitté et Omar Niane |
Publication 08/02/2019
Le 7 février 2019 marque la célébration de la disparition de Cheikh Anta Diop. Les étudiants qui se sont réunis au pavillon A de l’université ont tenu à rendre un vibrant hommage à leur parrain, à travers une conférence débat. Un moment de partage et d’information sur les œuvres de l’illustre scientifique, une référence pour tous les étudiants du Sénégal et d'Afrique. Au micro de SenePlus, Saliou Papa Diop, Oumar Tamba et leurs amis, reviennent sur les grandes œuvres du professeur Cheikh Anta Diop, dans un contexte politique de grande tension.
Malgré l’importance capitale de ses contributions, Cheikh Anta Diop disait toujours qu’il n’a fait que défricher un champ ; et ce champ, il faut le cultiver aujourd’hui
Le 07 Février 2019, à la suite du Grand KEEMAAN DIOUF, auteur du fameux single « HOTEP » (ou « HOTIB » ou « AMITIE ») et de ses compagnons « CheikhAntaDiopistes », qui vont rejoindre le village de Caytou, après cinq jours d’une « Longue Marche » de 150 km, qu’ils organisent annuellement, depuis près de cinq ans, le Sénégal, l’Afrique et le Monde entier, commémoreront l’anniversaire de la disparition de l’illustre fils d’Afrique, qu’est le professeur Cheikh Anta Diop (Paix à son âme).
De prime abord, Cheikh Anta Diop, « le savant africain, qui a vaincu, à lui seul, l’idéologie coloniale », apparait comme un phénomène singulier, qui semble relever du hasard. En vérité, il est le produit d’une rencontre entre une langue (la langue wolof, sa langue maternelle) et une histoire (celle de l’Egypte antique). Baignant, en profondeur, dans la culture wolof et, très tôt, heurté par le phénomène colonial (français notamment), Cheikh Anta Diop découvre l’Egypte antique.
Par l’Egypte antique, l’Afrique noire (berceau de l’Humanité) avait non seulement créé la première et la plus merveilleuse civilisation humaine (qui a inspiré toutes les autres civilisations) ; elle avait également outillé cette humanité d’une vision qui lui donnait une claire conscience de son passé, de son présent et de son futur, à travers une cosmogonie tôt élaborée par l’Egypte antique. Par l’Egypte antique, l’Afrique noire avait dépassé le stade de l’Homo Sapiens (celui de la rationalité, de la science et de la technique), pour entrer dans celui de l’Homo Humano (celui de la spiritualité, de la philosophie et du don de soi). C’est ce stade qui avait permis à l’Egypte antique d’élaborer le « Livre des Morts », qui est le vivier de toute la spiritualité humaine, de construire la Grande Pyramide, à mains nues, que la science occidentale actuelle (malgré les moyens technologiques dont elle dispose) s’avoue incapable de reproduire. Certains endroits, de la pyramide, ont été réalisés, avec des précisions de l’ordre du millimètre, là où la science moderne n’autorise encore que des précisions de l’ordre du centimètre.
Il est aujourd’hui prouvé que c’est grâce à cinq ou six mouvements migratoires, que des populations de l’Egypte antique sont venues occuper, habiter et peupler l’Afrique de l’Ouest (Yoro Dyao), en transportant, jusque dans la vallée du fleuve Sénégal et le Waalo, l’égyptien ancien qui est devenu la langue wolof. Tout en ignorant tout cela, Cheikh Anta Diop, grâce à la langue wolof, a « senti » les merveilles et les mystères de l’Egypte antique ; et il était en train de s’y engouffrer, lorsque la mort l’a surpris. Son dernier livre, inachevé, était une profonde comparaison (sinon une identification) entre l’égyptien ancien et le wolof. Si Cheikh Anta Diop avait connu les écrits de Yoro Dyao, que ses professeurs français lui ont caché, qui connaissaient très bien Maurice Delafosse et ses publications (et donc celle des « Cahiers de Yoro Dyao »), il aurait pu faire l’économie de beaucoup d’efforts éprouvants, pour se consacrer directement au déchiffrement des hiéroglyphes et à la redécouverte de la voie égyptienne et noire africaine, de l’Homo Humano.
Néanmoins, grâce au wolof et à sa connaissance de l’Egypte antique, Cheikh Anta Diop a pu élaborer ses trois thèses fondamentales, qui restent toujours inattaquables, à savoir que (i) l’Afrique est le berceau de l’Humanité, (ii) l’Egypte antique est noire africaine et (iii) l’Egypte antique a civilisé le reste de l’Humanité. Ce ne sont pas les Gaulois qui étaient les ancêtres des Noirs Africains, ce sont les Noirs Africains qui ont enfanté l’occident, puis ont cherché à le civiliser, en vain. Ce n’est pas, par hasard, que les Egyptiens anciens appelaient les occidentaux par le nom de « NIETH » ou « REFUS » ; car, ils refusaient la vraie civilisation. C’est ce mot de « NEITH », lu à l’envers (comme RÊ et ER, HËPËRA et ORPHE, etc.), qui a donné « ATHEINA » ou « ATHENES » des Grecs anciens. Aujourd’hui encore, l’occident refuse toujours la vraie civilisation ; et ils n’ont toujours pas décidé de « refuser ».
C’est pourquoi, Cheikh Anta Diop rappelait sans cesse, à qui voulait l’entendre, que l’avenir de l’Afrique n’est ni en occident, ni en orient, ni ailleurs que dans son propre passé ; car c’est dans son passé, que l’Afrique doit aller puiser les matériaux qui lui permettront de construire son futur ; et ce passé, le professeur le situait en Egypte antique. Par l’Egypte antique, l’Afrique (jugée anhistorique, sensée n’avoir pas d’histoire précoloniale et insuffisamment entrée dans l’histoire) possède, en vérité, un passé vieux de près de 20 000 ans. En aucune autre contrée humaine, le passé ne remonte pas à plus de 5 000 ans.
Malgré l’importance capitale de ses contributions, Cheikh Anta Diop disait toujours qu’il n’a fait que défricher un champ ; et ce champ, il faut le cultiver aujourd’hui. Ainsi, assumer l’héritage de Cheikh Anta Diop, ne consiste pas à seulement rappeler ses hauts faits, ses exploits ; c’est surtout de plonger directement et intensément dans le passé de l’Egypte antique (dont la période pharaonique des 30 Dynasties royales, n’est que l’étape de décadence et non de gloire), pour y puiser les matériaux de construction du futur de l’Afrique, voire de toute l’Humanité (actuellement en déclin). Mais un obstacle de taille, se dresse sur ce chemin : ce passé africain est rendu dans une écriture hiéroglyphique, que personne n’était encore parvenue à déchiffrer. Or, il se trouve que la « Këllë-Basse du Pharaon », un Magazine qui sortira bientôt, est en train de réussir ce déchiffrement, de rendre les textes hiéroglyphiques, de l’ancienne Egypte, à nouveau lisibles, compréhensibles et exploitables. La « Këllë-Basse du Pharaon », un Magazine bimestriel, a décidé de paraître avec pour objectifs de :
(+) Assurer une large diffusion des résultats du déchiffrement des hiéroglyphes égyptiens, pour que les Africains (au moins) puissent, à nouveau, accéder au savoir et à la sagesse, de leurs ancêtres, pour y puiser les matériaux de construction d’un futur meilleur et véritablement humain ;
(+) Faire connaître la voie de l’Homo Humano, l’expliquer et la justifier, afin que les Africains puissent quitter la voie de l’Homo Sapiens (et ses avortons que sont l’Homo Sapiens-Sapiens et l’Homo Robot), pour reprendre la voie de l’Homo Humano et y tirer le reste de l’Humanité. Les êtres humains ne peuvent plus se limiter à la seule satisfaction de leurs besoins animaux (nourriture, voiture, parures) et à la satisfaction de leurs plus bas instincts humains (homosexualité, pédophilie, masturbation, accouplement avec des animaux, inceste, transgenre, etc.) ; une animalité à laquelle l’Occident (complètement déboussolé, aujourd’hui) ne cesse de nous entraîner. Les êtres humains (parce qu’étant humains) doivent chercher à surtout satisfaire leurs besoins humains (rationalité, savoir, spiritualité, sagesse, don de soi, mâat, etc.) et à aller vers leur divinisation progressive, comme l’avait amorcé l’Egypte antique, à travers la voie de l’Homo humano. Etre divin, c’est tout savoir, c’est tout pouvoir, c’est être tout (Xam Lèpp, Man Lèpp, Doon Lèpp) !
Le 07 Février 2019, nous irons nous recueillir, physiquement (par le corps), en pensée (par le cerveau) ou en sentiment (par le cœur), sur la tombe de Cheikh Anta Diop, dans son village de Caytou. A Cheikh Anta DIOP, l’Afrique et l’Humanité toute entière, reconnaissantes. Puisse le Bon Dieu l’accueillir et le placer dans les sphères les plus élevées du Paradis, pour les services qu’il a rendus à l’Humanité.
PAR ARAM FAAL
DES IDÉES REÇUES SUR LES LANGUES AFRICAINES
EXCLUSIF SENEPLUS #Enjeux2019 - L’Afrique, berceau de l’écriture ne doit pas se complaire dans cette station d’oralité - La translittération des textes initiée à l’Ifan devrait être poursuivie dans toutes les universités du pays
#Enjeux2019 - Au cours des années, on a pu comprendre à travers certains écrits de philosophes qu’il y aurait « des insuffisances et des manquements » qui selon eux, pourraient constituer des entraves à la conception de traités de philosophie en langues africaines. On a ainsi parlé de l’absence de verbe être, de l’étroitesse du vocabulaire, en particulier la pauvreté en noms abstraits, de l’oralité etc. Dans ce contexte, l’annonce du philosophe Souleymane Bachir Diagne de préparer avec ses collègues un ouvrage en langue wolof constitue une rupture hautement appréciable. Une telle réalisation devrait contribuer efficacement à la démocratisation du savoir. Dans les lignes qui suivent, il s’agira de voir où en est le wolof à propos de ces questions de prétendus manquements et insuffisances.
Le problème du verbe être
On peut dire que le wolof a plusieurs verbes être.
am : verbe d’existence
li nga wax am na / li nga wax amul : « ce que tu dis est/ ce que tu dis n’est pas »
am na gaynde guy nelaw ci nit ku nekk ci yéen « il y a (il existe) un lion qui dort dans chacun d’entre vous»[1]
am na ñu yor kurus, ñee di waxtaan « il est des gens qui ont un chapelet, d’autres sont en train de causer[2]»
b) di et ses variantes y ~ doon : verbe d’identification
- mëneefu laa ñàkk, yaa dig noo, yaa di ndox, di dugub, « on ne peut pas être en manque de toi, tu es le souffle vital, tu es l’eau, tu es le mil[3]»
- nekk : peut être synonyme de am et di et variantes dans certains cas : yàgg nañu leen wax ne pàrti politig pas-pas la jëkk a nekk, door a nekk kayitu juddu[4].
- li ko njaatigeem tuumaal nekkul « ce dont son patron l’accuse n’est pas (n’existe pas).
Précision sur di et ses variantes
Di et ses variantes peuvent être des verbes ou des marques d’une action inachevée. Lorsqu’ils sont verbes, ils sont suivis d’un nom, comme dans les exemples yaa dig noo, yaa di ndox, di dugub. Lorsqu’ils marquent une action inachevée, ils sont suivis d’un verbe comme dans : mu di dox, di dox. Doon peut être le passé de di, marque d’une action inachevée comme dans : Xeet wi la doon dajale[5] « il rassemblait le peuple », mais il peut être aussi un verbe, variante de di dans certaines conditions, notamment en fin de phrase : lii nga boq lu mu doon ? ; sa doom jigéen lay doon.
Les prétendus manquements au niveau du vocabulaire et des noms abstraits
Les moyens d’élargissement de la langue sont nombreux, avec une très grande productivité : alternance consonantique, affixes, composition de mots etc. Quelques exemples : sàcc /càcc, liggéeykat, xel-ñaar… L’utilisation massive du wolof dans la presse a ramené à la surface ou généré des formations comme jàmmoo « faire la paix, taskatu xibaar « journaliste », daw-làqu « réfugié », jaa-jëfal « remercier ». S’y ajoute que des suffixes comme -in, -aay, -te, -eel, -aange … forment essentiellement des noms abstraits : mbégte « plaisir », weexaay « blancheur », doxin « démarche », pastéef « détermination », nobeel « amour », naataange « prospérité », door « commencer », ndoorte « commencement ».
Pour ce qui concerne le langage scientifique, il appartient au spécialiste concerné de proposer des traductions appropriées à sa discipline, sur la base de la langue générale. C’est ce qu’a fait Cheikh Anta Diop avec son article : "Comment enraciner la science en Afrique[6]". Le vocabulaire scientifique que l’illustre savant a utilisé a été collecté et publié dans Lexique scientifique bilingue français-wolof / wolof-français[7].
L’oralité
Au début elle était là pour tous, mais au fil du temps, avec les progrès technologiques certains peuples sont vite passés à l’écrit. L’Afrique, berceau de l’écriture ne doit pas se complaire dans cette station d’oralité. C’est d’ailleurs ce qu’avaient compris certains foyers religieux et aussi des érudits de toutes confréries du Sénégal, en produisant une abondante littérature avec les caractères arabes ou wolofal. C’est vrai que la translittération de ces textes, initiée à l’Ifan Cheikh Anta Diop avec des auteurs comme Moussa Ka et Serigne Mbaye Diakhaté devrait être poursuivie dans toutes les universités du pays pour les mettre à la disposition des utilisateurs francophones. Il y a aussi les auteurs utilisant les caractères latins regroupés sous l’aile des pionniers qui ont créé en 1958, à Grenoble, le premier syllabaire de langue wolof Ijjib wolof. Parmi eux on trouve des intellectuels francophones mais aussi des personnes non instruites en français mais formées à l’alphabétisation. Les productions répertoriées sont d’une qualité et quantité grandissantes. Au vu de tout cela, on peut dire que la littérature écrite ne se porte pas mal.
En conclusion, le wolof n’est pas concerné par ces prétendus manquements.
Précédemment linguiste à l’I’Institut Fondamental d’Afrique Noire (IFAN) Cheikh Anta Diop, Aram Faal est membre fondatrice de l’Organisation sénégalaise d’Appui au Développement (OSAD), une ONG qui travaille dans le domaine de l’alphabétisation. Elle a participé dans ce cadre, à la realisation de plusieurs manuels didactiques, relatifs à la lecture-écriture, à la santé, au calcul, etc.
Deux ensembles M et N sont équivalents si à un élément de M correspond un élément et un seul de N, et réciproquement. Le caractère commun à tous les ensembles équivalents est leur nombre cardinal (leur cardinal), leur puissance, c’est-à-dire le nombre de leurs éléments.
Ñaari mboole M ak N weccikoo nañu, su fekkee ne doom boo jël ci M mën koo méngale ak benn doom kott ci N, te boo tukkee ci doomi N wuti yoy M, ba tey muy noonu. Màndarga mi mboole yu weccikoo bokk mooy seen limub dayo (seenub dayo), seen kàttan, maanaam seen doom yi, menn mu nekk ci ñoom.
[8] Comment enraciner la Science en Afrique p.154-233.
[9] Page 156 et début p.158, Xët 157 ak ndoorte 159.
PAR LAMINE NIANG
SE RÉCONCILIER AVEC NOUS-MÊMES D’ABORD !
EXCLUSIF SENEPLUS - L’ancrage décomplexé à la culture de notre pays passe indéniablement par une réappropriation de notre propre histoire, écrite et enseignée comme une science
Vous demandez-vous souvent pourquoi, pris individuellement, nous sommes toujours prompts à financer volontairement et massivement les grands projets infrastructurels issus des familles religieuses et peinons à sortir un rond de nos poches lorsqu’il s’agit de soutenir un projet politique ?
Pourquoi sommes-nous toujours réticents à donner de notre temps pour travailler bénévolement dans des œuvres sociales alors qu’un simple appel du marabout suffit à drainer les foules pour nettoyer un espace public ou pour œuvrer dans des travaux agricoles ?
Au même moment, dans les grandes démocraties, les partis politiques comptent sur leurs militants et d’autres bailleurs pour lever des fonds astronomiques. Également, le bénévolat est une culture ancrée dans les habitudes des citoyens depuis le bas âge. Ces derniers peuvent s’engager délibérément dans des causes communautaires et humanitaires sans rien attendre en retour.
En effet, au-delà de l’autorité morale des guides confrériques qui crédibilise leurs demandes auprès des populations et de la reconnaissance spirituelle recherchée par les bénévoles, l’explication tient en partie de notre relation avec l’élite politique actuelle à laquelle nous ne nous identifions pas réellement et à la conception biaisée que nous avons de la politique telle que nous la reproduisons.
Nous continuons de croire dur comme fer, selon le modèle politique occidental hérité et enseigné, que l’État et la religion doivent être impérativement distingués alors que nous avons des sociétés culturellement différentes et que la trajectoire historique qui a façonné la société occidentale diverge radicalement de la nôtre.
Cheikh Ahmadou Bamba, Cheikh Elhadj Malick, Mame Baye Niass et les autres illustres personnalités historiques de notre pays n’ont pas eu besoin de prendre les armes ou de contraindre les disciples à adhérer à leur cause. Et pourtant, nous sommes encore des millions, peu importe notre niveau d’instruction, notre origine sociale et nos affinités confrériques, à nous réclamer fièrement et ostensiblement de leur héritage.
C’est parce qu’au-delà de leur appel spirituel sur lequel la plupart des disciples préfèrent (sciemment on ou naïvement) les cantonner, il y a toute une stratégie politique murement réfléchie qui a permis l’expansion dans le temps de la cause qu’ils défendaient.
Notre école refuse de se pencher sur ce modèle politique qui a fait ses preuves (organisation urbaine, orientation agricole, culte du travail, etc.) et nous l’enseigner.
Au même moment, le colon blanc a fait couler beaucoup de sang de nos compatriotes, torturer nos dignes fils et piétiner notre honneur afin de nous soumettre de façon coercitive à sa cause. Nous avons ainsi cultivé des champs pour le nourrir, cotisé de l’argent comme impôt colonial pour l’enrichir et vider notre sueur pour participer à son développement. L’éducation aidant, il a pu formater les cerveaux et y semer les graines de la subordination afin de poursuivre malicieusement son entreprise même à son absence.
Si depuis 1960 nous tournons continuellement en rond en baignant dans une illusion d’indépendance c’est que nous n’avons pas encore fait le bon choix des vrais hommes politiques qui réfléchissent par eux-mêmes, pensent uniquement pour le bien collectif et conçoivent leurs actions sur la base des valeurs et des croyances socioculturelles de leurs semblables.
Notre système éducatif prépare notre élite dirigeante inéluctablement au suivisme, au mimétisme et à la reproduction continue des pratiques apprises. Il nous prépare à acquérir de grandes compétences dans des domaines spécifiques, mais il ne fait pas de nous des hommes et des femmes capables de s’engager dans un idéal transformationnel de nos sociétés. Un défi impossible à relever en l’absence d’esprit prédisposé à la critique, à la remise en cause du système établi et, surtout, au réveil de l’estime soi.
C’est la raison pour laquelle vous trouverez dans l’élite les plus grands défenseurs du statu quo actuel.
Ils crient au changement, mais n’osent pas se séparer de la monnaie coloniale. Ils font miroiter le progrès mais n’osent pas introduire l’enseignement de Cheikh Anta Diop et des langues nationales dans les écoles. Ils régurgitent avec éloquence les théories marxistes et capitalistes, mais se remplissent de gêne et de complexe lorsqu’ils doivent citer le culte du travail mouride et le modèle agricole des familles religieuses qui avait tant épargné les populations de la famine en pleine crise économique suite au Krach boursier de 1929.
Les pouvoirs politiques peuvent dépenser des millions dans des campagnes de sensibilisation diverses sans obtenir l’effet recherché alors qu’une simple déclaration d’une autorité confrérique aurait suffi pour soulever les foules. Quel paradoxe !
La promotion de l’enseignement technique et professionnel est importante pour préparer la jeunesse plus facilement aux besoins du marché et assurer plus rapidement son employabilité. Cependant, l’impératif d’assouvir ultimement la soif insatiable d’un système capitaliste ne doit pas nous pousser à la fabrication d’humains robotisés dont la seule compétence se limite à exécuter des tâches professionnelles spécifiques.
L’ancrage décomplexé à la culture de notre pays passe indéniablement par une réappropriation de notre propre histoire, écrite et enseignée comme une science, ainsi que par l’existence et la valorisation des sciences sociales et humaines, également révisées et magnifiées par nous-mêmes. Bref, retrouver notre culture nationale. Comme le disait Cheikh Anta Diop dans son article Vers une idéologie politique africaine : « Les puissances colonisatrices ont compris dès le début que la culture nationale est le rempart de sécurité le plus solide que puisse se construire un peuple au cours de son histoire, et que tant qu’on ne l’a pas atrophiée ou désintégrée, on ne peut pas être sûr des réactions du peuple dominé.»