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30 novembre 2024
Diaspora
par Alioune Dione
LA TÉLÉVISION SÉNÉGALAISE, UN DANGER POUR LES LIBERTÉS
L’information est une arme nocive quand celui qui la donne la déforme à ses souhaits et intentions. Elle ne doit point servir d’instrument de diabolisation ou de production de sensation. L’apport des médias dans une société doit être décisif
Dès l’année 1995, K. Popper mettait en garde la société contre les dangers de la télévision pour la démocratie. Lieu par excellence du débat et de la contradiction pour faire jaillir la lumière sur les faits sociaux, les médias au rang desquels la télévision occupe une place particulière dans l’influence sociale sont devenus des instruments de propagande dénués de toute neutralité axiologique. La télévision sénégalaise au-delà de son impact sur la passivité citoyenne est devenue le lieu par excellence de la médiocrité et de la prostitution visuelle.
Des descendants de Goebbels qui font partout la propagande politique mais dénués d’intelligence et de charisme comme le fut le Volksaufklärung und Propaganda, des charlatans, des comédiens, des morues aux mœurs légères dont l’inculture froisse toute conscience avertie devenus analystes politiques ou économiques, suivis de partout par une classe sociale sans portée épistémique pour analyser le discours des médias. Popper disait qu’il ne peut y avoir de démocratie si on ne soumet pas la télévision a un contrôle, ou pour parler plus précisément, la démocratie ne peut substituer durablement tant que le pouvoir de la télévision ne sera pas complètement mis à jour.
Le pouvoir colossal des médias ne doit pas être affaibli mais encadré car une nation qui se veut forte et transparente ne peut recourir qu’à la force médiatique pour accéder au stade suprême de développement. Mais, le temps social appelle à un assainissement rigoureux des médias sénégalais. En effet, si le gouvernement sénégalais opte pour une rupture structurelle, il est appelé à prendre des mesures fortes pour rendre le milieu journalistique professionnel, de garantir une liberté d’expression aux médias dont les critiques permettent d’éclaircir les zones d’ombres des politiques et finances publiques, de bannir toute forme d’intox des médias politisés pour leurrer la masse.
Un État politique préfère la propagande à la critique mais un État-provident n’a pas besoin de médias propagandistes car ses actes se font ressentir socialement par le peuple, il préfère la critique constructive à l’éloge d’une flatterie destructive puisque quand les analyses politiques ou économiques pointent du doigts les manquements, incohérences ou les ambiguïtés de l’action gouvernementale, elles interpellent en quelque sorte le gouvernement non pas à la remise en cause mais à la vigilance dans ses faits et actes montrant qu’il y a des instances de contrôles sociales qui l’incitent à la transparence.
L’immense influence qu’exerce la télévision sur la conscience collective mérite une fois une épuration du milieu médiatique de toute personne dont la formation intellectuelle et journalistique n’est pas aboutie pour parler des faits sociaux, politiques ou économiques. L’information est une arme nocive quand celui qui la donne la déforme à ses souhaits et intentions. Elle ne doit point servir d’instrument de diabolisation ou de production de sensation. Il y a une nécessité absolue de retourner à une formation rigoureuse des journalistes pour la neutralité, la déontologie, l’éthique, les biais du narcissisme mais surtout l’acquisition des connaissances en sciences humaines et sociales. D’ailleurs, le retrait des accréditations des écoles privées de formation sur le métier de journalisme est une nécessité sine qua non pour la régulation du métier de médias. L’exigence de la visibilité comme le disaient les auteurs de l’ouvrage sous la direction de N. Aubert et C. Haroche a pris le dessus sur la pertinence de l’analyse des faits. La créativité artistique, intellectuelle et culturelle perd sa place dans les médias pour ne divulguer que du sensationnel, de l’insignifiance, des clichés mais surtout des stéréotypes qui peuvent porter atteinte à la cohésion sociale.
L’apport des médias dans une société doit être décisif enfin non seulement de conscientiser mais de donner les moyens et instruments pour diagnostiquer l’état socio-politique de la du pays comme étant un vecteur social d’analyse de l’état de développement. Malheureusement, le recrutement médiatique est devenu un concours de mannequinat et de vulgarité dont le corps et la fourberie sont mis en avant et non le savoir.
L’absence de perspicacité de nos médias reflète en quelque sorte le mal profond de l’état arriéré de notre construction sociale et de la précarité de nos institutions de socialisation (primaire et secondaire). Au fait, l’imaginaire médiatique a créé des types de référence dont le seul mérite est de déformer les faits pour plaire à une classe politique adulée par le peuple. Les médias ont cultivé dans les consciences collectives des adolescents une dévalorisation de l’intelligentsia qui a débouché à une prise de soin du corps et à la manifestation de la vulgarité au détriment de la fortification des facultés de la raison et de l’esprit.
Dans ce sillage, la télévision au Sénégal est considérée comme un lieu de divertissement, de charlatanisme, de militantisme politique…, rare que l’action citoyenne et patriotique y trouve sa place, de fait, elle est un instrument passif qui n’appelle pas toujours à la prise de responsabilité chez les jeunes, à la valorisation du mérite et à la stimulation des consciences dans la réflexion pour relever les défis auxquels le peuple est appelé à faire face. Responsabiliser citoyennement la société passe d’abord par faire de la presse une vitrine de démocratie et non un instrument de propagande car comme disaient N. Aubert et C. Haroche : « l’injonction à la visibilité semble concomitante de l’avènement d’une société de l’image, dont l’écran est le symbole majeur. Cette société ‘‘ qui met le monde sur écrans, prend l’écran pour le monde et se prend elle-même pour ce qu’elle a mis sur l’écran ’’ est une société de l’exhibition ou tout savoir est devenu tout voir », nous sommes passé du cogito ergo sum de Descartes au narcissisme de l’exhibition que l’on peut traduire par l’expression latine videor ergo existo.
Alioune Dione : Socio-anthropologue est auteur de : Afrique et contemporanéité.
LE GRAND TRI DES CANDIDATURES
Sur 51 listes déposées, seules 41 ont survécu au crible rigoureux du code électoral, laissant 10 formations sur le carreau pour diverses infractions. Le paysage politique qui se dessine promet une bataille électorale acharnée
(SenePlus) - Le ministère de l'Intérieur et de la Sécurité publique a dévoilé ce 7 octobre 2024 la liste officielle des candidatures pour les élections législatives anticipées du 17 novembre. L'arrêté signé par le ministre Jean Baptiste Tine offre un aperçu détaillé du paysage électoral à venir.
Sur 51 listes déposées, 41 ont été déclarées recevables. Parmi les partis et coalitions retenus, on note la présence de formations majeures telles que Pastef, mais aussi de nouvelles entités comme "And Liguey Sunu Rew" et "Jubanti Senegal". La liste complète comprend des coalitions comme "Takku Wallu Senegal", "Samm Sa Kaadu", et des partis comme "Bes Du Niakk".
Cependant, l'arrêté met en lumière le rejet de 10 listes pour diverses infractions au code électoral. Les motifs de rejet sont variés et spécifiques :
La coalition "Alliance Samm Sunu Senegal" a été écartée pour une liste incomplète au scrutin proportionnel.
L'entité "Front Ethique Republicain Avec Mamadou Sidibe" a été rejetée pour une liste proportionnelle incomplète, ne présentant que 15 titulaires sans suppléants.
Le parti "En Avant Ca Kanaam" n'a pas fourni la quittance du cautionnement requis.
"En Marche Pour La Renaissance Du Senegal" n'a pas déposé de liste de suppléants.
L'entité "Parti Pour La Renovation Et L'Emergence Du Senegal" a déposé sa candidature hors délai.
La coalition "RV Naatangue" n'a pas respecté la parité sur la liste des suppléants.
Des rejets partiels ont également été prononcés. La coalition "Takku Wallu Senegal" a vu ses candidatures invalidées dans les départements de Bakel entre autres pour non-respect du nombre de candidats requis. De même, la coalition "Defar Sa Gokh" a été rejetée dans le département de Pikine pour absence de liste de suppléants.
Les 41 listes retenues vont maintenant entrer dans une phase intense de mobilisation et de communication pour convaincre les électeurs sénégalais.
Ces élections, convoquées suite à la dissolution de l'Assemblée nationale le 12 septembre, représentent un moment crucial pour la démocratie sénégalaise. Elles interviennent dans un contexte de renouvellement politique, après l'élection de Bassirou Diomaye Faye à la présidence en avril 2024.
L'enjeu est de taille : la composition de la nouvelle Assemblée nationale déterminera la capacité du gouvernement à mettre en œuvre son programme. Dans un paysage politique fragmenté, comme en témoigne la diversité des listes retenues, la formation d'une majorité stable pourrait s'avérer un défi majeur.
Alors que le Sénégal s'engage dans cette nouvelle phase électorale, tous les regards sont tournés vers le 17 novembre, date qui pourrait redessiner les contours politiques du pays pour les années à venir.
par Birane Diop
LE DERNIER DES ARTS DE FARY NDAO
Grâce aux pouvoirs de la littérature, notamment du roman, l'auteur soulève une réflexion sur la politique et ses implications, posant des questions philosophiques et existentielles : pourquoi la politique est-elle comparée à un art ?
J’ai lu Le dernier des arts, le premier roman de l’écrivain Fary Ndao. L’auteur du livre est ingénieur et économiste de l’énergie, travaillant au service de l’État sénégalais. Mais il est bien plus que cela : Fary Ndao est un hussard noir de la République, l’un de ces hommes valeureux dont parlait Charles Péguy, l’auteur de l’essai politique Notre jeunesse, car c’est un haut fonctionnaire qui a la mystique républicaine chevillée au corps, à l’ère du populisme omniprésent. De plus, c’est un intellectuel organique engagé pour la cité. Il a offert à son pays, et au-delà, au reste du monde, trois livres majeurs : Politisez-vous !, L’or noir du Sénégal et Le Dernier des arts, son œuvre la plus récente.
Que dire de ce livre édité par la maison d’édition Présence Africaine ? Le dernier des arts est un magnifique ouvrage, d’une grande érudition à tous égards, le tout enveloppé d’un humour percutant. Grâce aux pouvoirs de la littérature, notamment du roman, il soulève une réflexion sur la politique et ses implications, posant des questions philosophiques et existentielles : pourquoi la politique est-elle comparée à un art ? Cet art fait référence aux stratégies de communication déployées lors des campagnes électorales, où les partis présentent leur candidat et partagent sa vision économique, culturelle, sociale, écologique et sanitaire avec les électeurs, qui ont le dernier mot et sur qui repose finalement l’exercice du pouvoir. Ce don de soi, dont le
but ultime est de changer radicalement la vie des gens, requiert-il de la diplomatie, de l’humour — la « meilleure arme » de tout homme politique ? Peut-on réellement faire de la politique et conquérir le pouvoir sans être cynique, démagogue ou populiste ?
Toutes ces questions trouvent leurs réponses à travers les personnages qui peuplent ce roman. Sibi, figure principale et candidat à la présidentielle, fait comprendre à Coulibaly que la politique, c’est d’abord le peuple, c’est-à-dire une entité sociale sur laquelle s’exerce le pouvoir par le biais de ses représentants. Par conséquent, il faut être « proche d’eux », ne pas les prendre de haut, pour espérer gagner l’élection au soir du second tour. Sans leurs voix, ils ne seront jamais aux affaires sérieuses pour conduire les politiques publiques. Leur communication doit avoir deux objectifs principaux : convaincre et plaire, ce dernier étant souvent le plus décisif. C’est cela qui créera la différence entre leur approche et celle de leurs adversaires – le camp de la présidente Aminata Sophie Cissé. Qu’ils soient des populistes tout simplement, pour être dans l’air du temps.
De plus, un politicien aguerri est un diplomate drapé d’un humour exquis, quelqu’un qui a les talents d’un artiste, c’est-à-dire un génie qui inonde de bonheur et d’excitation le corps social par ses discours anti-élite, son rapprochement avec celles et ceux que les privilégiés appellent avec dédain, dans leurs discussions privées ou lors de dîners mondains : les petites gens, les invisibles, les sans-rien. C’est cela aussi la politique, Le dernier des arts.
Dans ce roman intimiste, à certains points, Sibi et Zeynab, après avoir partagé de bons moments de plaisir charnel, interrogent ce métier exigeant, éreintant et parfois ingrat à travers une dispute de haute intensité. L’activité politique doit-elle s’immiscer au cœur de la famille ? Comment faire pour qu’elle ne perturbe pas l’équilibre familial ?
Face à ces questions existentielles, tout homme politique est tiraillé, voire bouleversé, c’est le cas de Sibi. Sa femme Zeynab — la plume — est désormais la seule qui s’occupe de leurs deux enfants, notamment la petite Sarah Victorine Fall, qui voit son père comme un héros, un homme parfait. Mais ce père n’est jamais à la maison pendant les moments importants. Il a dédié sa vie à d’autres enfants qu’il ne connaît pas, pour apporter un peu de douceur à leur quotidien, pour que demain ils deviennent des transfuges de classe. Autrement dit, pour qu’ils n’aient pas des destins broyés par la misère, la souffrance et la douleur. Il veut faire vivre la promesse républicaine, celle de l’égalité des chances dans le cœur de chaque enfant. La politique, ce n’est pas une question esthétique, ce sont des enjeux de vie et de mort pour beaucoup de gens. Peut-être est-ce là le prix de l’engagement politique. Hélas.
Le dernier des arts est un chef-d’œuvre, un roman absolument passionnant par sa sensibilité, sa justesse et sa langue. La belle ode à la kora, cette musique qui envahit tout notre être pour réparer les blessures invisibles, nous perturbe ou nous fait oublier, le temps d’un instant, l’hystérie de nos sociétés, nous faisant voyager dans le royaume de l’enfance — l’époque de l’insouciance.
En lisant Le dernier des arts, on découvre un écrivain fertile, drôle, d’une grande culture. On trouve des références à Nicolas Mathieu, Boubacar Boris Diop, Albert Einstein, Cheikh Anta Diop, Spinoza, Aristote, Krishnamurti, Jack London, Balzac, Rûmî, Luis Sepúlveda Calfucura. Fary Ndao nous a offert un beau roman d’une grande érudition. C’est un livre sur la politique dans toute sa splendeur. Ici, même l’amour est hautement politique.
Bienvenue en littérature, Fary Ndao. Le dernier des arts, disponible dans toutes les bonnes librairies.
Post-scriptum : Ce passage du livre ci-après m’a fait penser à la meute inculte, médiocre et violente qui avait attaqué Mohamed Mbougar Sarr, brillant romancier sénégalais, quand il a reçu le Goncourt : « Notre pays avait changé. On y détestait désormais la culture, les idées nouvelles, la liberté artistique et la nuance, signe universel d’intelligence, sauf, évidemment, aux yeux des cons. Les conservateurs associés aux faux progressistes avaient plastifié notre imaginaire, préparant le terrain à des individus bien plus radicaux qu’eux : les djihadistes. »
L'HISTOIRE AU SERVICE DU POUVOIR
De l'Ukraine à Gaza, le passé est constamment réinterprété pour justifier les actions du présent. Les commémorations, les résolutions parlementaires et même les manuels scolaires deviennent des vecteurs de révision historique
(SenePlus) - Dans un monde où l'information circule à la vitesse de l'éclair, l'histoire est devenue un terrain de lutte idéologique âprement disputé. C'est le constat alarmant que dresse Le Monde diplomatique dans son édition d'octobre 2024, mettant en lumière les enjeux complexes de l'instrumentalisation du passé dans les conflits contemporains.
De l'Ukraine à Gaza, en passant par les commémorations du débarquement de Normandie, l'histoire est constamment réécrite et utilisée comme une arme pour justifier des actions présentes ou délégitimer des adversaires. Comme le souligne l'article, "Que des commémorations offrent un miroir déformé du passé, seul un naïf pourrait s'en étonner. Celles-ci servent avant tout à mettre en scène un récit qui correspond aux intérêts de ceux qui les organisent."
L'exemple du 80e anniversaire du débarquement de Normandie est particulièrement révélateur. Le journal rapporte que "Pour la première fois depuis la fin de la guerre froide, aucun représentant russe n'est convié, pas même un conseiller d'ambassade." Cette exclusion délibérée de la Russie, justifiée par l'Élysée en raison de "la guerre d'agression qu'elle mène contre l'Ukraine", illustre parfaitement comment les événements historiques sont réinterprétés à la lumière des conflits actuels.
Le Monde diplomatique met en garde contre une tendance inquiétante à la réécriture de l'histoire de la Seconde Guerre mondiale. L'article souligne que "La Russie a, depuis longtemps, pris l'habitude de voir son rôle minimisé au profit de la contribution américaine. Elle est désormais jugée coresponsable du désastre, sur un pied d'égalité avec l'Allemagne." Cette révision historique s'est propagée de l'Europe de l'Est à l'Ouest, culminant avec une résolution du Parlement européen en 2019 qui établit que la guerre fut "la conséquence immédiate du tristement célèbre pacte germano-soviétique de non-agression ".
Face à cette offensive idéologique, le président russe Vladimir Poutine n'est pas en reste. Le journal rapporte que : "Le révisionnisme historique, dont on observe les manifestations en Occident, surtout concernant la seconde guerre mondiale et ses conséquences, est dangereux parce qu'il déforme de manière grossière la compréhension des principes de développement pacifique définis lors des conférences de Yalta et de San Francisco en 1945." Cependant, l'article souligne que Poutine lui-même n'hésite pas à déformer le passé pour servir ses intérêts, notamment en contestant l'existence historique de l'Ukraine.
Le journal évoque comment cette manipulation de l'histoire s'étend au-delà des conflits en Europe de l'Est. Dans le contexte du conflit israélo-palestinien, par exemple, l'article note que « L'attaque du 7 octobre devient ainsi dépourvue de raison, si ce n'est ethnique ou religieuse. Une tuerie de Juifs, un « pogrom », et même «le plus grand pogrom depuis la Shoah», comme aura tôt fait de le dire journalistes et dirigeants politiques, recevra ainsi l'événement dans la longue histoire de la persécution des Juifs.
Face à cette manipulation généralisée de l'histoire, Le Monde diplomatique propose une approche critique et réflexive. La dernière partie de l'article, intitulée "Une méthode pour briser la gangue des idées reçues", est particulièrement éclairante. Le journal cite l'historien américain Michael Parenti : "Les contestataires doivent constamment se défendre et étayer minutieusement toutes leurs manifestations." Cette nécessité découle du fait que les idées reçues, "jamais examinées mais communément admises", forment une barrière à la compréhension critique de l'histoire.
Pour contrer cette tendance, Le Monde diplomatique a publié en septembre un "Manuel d'autodéfense intellectuelle". Cet ouvrage vise à "fournir une méthode et des outils permettant à chacun de briser la gangue des idées reçues et de s'orienter dans le maquis des récits". L'objectif est de donner aux citoyens les moyens de déconstruire les narratifs dominants et de développer une compréhension plus nuancée et contextualisée de l'histoire.
En conclusion, l'article du Monde diplomatique lance un appel à la vigilance intellectuelle. Dans un monde où l'histoire est constamment manipulée pour servir des intérêts politiques, il est plus que jamais nécessaire de développer un esprit critique et une capacité à remettre en question les récits dominants. Le manuel d'autodéfense intellectuelle proposé par le journal se veut un outil concret pour relever ce défi, permettant à chacun de naviguer dans le dédale des récits historiques et de résister à la manipulation de la mémoire collective.
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LE MIRAGE SAOUDIEN DU FOOTBALL S'ESTOMPE
La Saudi Pro League, censée rivaliser avec l'élite européenne, révèle ses failles. Les salaires mirobolants tardent à être versés, les transferts s'essoufflent, et le public reste timide
Un an après l'arrivée fracassante des stars mondiales, le football saoudien se heurte à une réalité moins reluisante. Les pétrodollars, qui semblaient couler à flots, se tarissent dans les caisses de nombreux clubs. Ronaldo, Benzema et Neymar brillent toujours, mais dans un championnat qui chancelle.
La Saudi Pro League, censée rivaliser avec l'élite européenne, révèle ses failles. Les salaires mirobolants tardent à être versés, les transferts s'essoufflent, et le public reste timide. L'équipe nationale, loin de profiter de cet afflux de talents, peine à convaincre sur la scène internationale.
Ce projet pharaonique, lancé à grand renfort de publicité, semble avoir négligé les fondations. Absence de contrôles financiers, déséquilibre flagrant entre les clubs, et manque de vision à long terme : le château de sable vacille.
L'Arabie Saoudite, qui rêvait d'une Coupe du monde, se retrouve face à un dilemme. Le football, utilisé comme vitrine, pourrait-il devenir un miroir gênant ? L'heure des choix approche pour le royaume, entre prestige éphémère et développement durable de son football.
À DAKAR, L'ESSOR DE LA CUISINE DE RUE
Du petit-déjeuner au casse-croûte nocturne, les vendeurs ambulants nourrissent la ville à toute heure. Cette tendance, autrefois réservée aux ouvriers, séduit désormais toutes les classes sociales
(SenePlus) - Dans un article intitulé "Dakar : la révolution de la street food", le journal Le Monde dresse un portrait saisissant de l'évolution de la restauration de rue dans la capitale sénégalaise. Cette tendance, devenue indissociable du mode de vie dakarois, témoigne d'une transformation profonde des habitudes alimentaires et sociales.
"Il ya une vingtaine d'années, manger dans la rue était réservé aux enfants et aux ouvriers", explique le géographe Malick Mboup au Monde. Aujourd'hui, la clientèle s'est considérablement diversifiée, incluant « les employés, les cadres pressés, les touristes et la petite bourgeoisie ». Cette évolution a même fait "reculer une vieille règle de politesse selon laquelle il est plutôt mal vu de manger dans la rue, à la vue de tous", souligne le chercheur.
L'offre s'est également enrichie, reflétant le cosmopolitisme de la ville. Des plats traditionnels comme le thieb côtoient désormais des créations hybrides et des spécialités importées. Comme le note Tamsir Ndir, chef et consultant, "La street food dakaroise, c'est la rencontre entre les tendances mondiales et le porte-monnaie du Sénégalais".
L'aspect économique joue un rôle crucial dans ce phénomène. Seydou Bouzou, un vendeur de dibi haoussa, peut gagner jusqu'à 10 000 francs CFA (15,40 euros) lors des bonnes journées. Pour de nombreux Dakarois, ces options abordables sont essentielles. "Dans beaucoup de foyers, on prévoit un repas par jour. Pour le reste, chacun se débrouille. Les collations entre 100 et 1 000 francs CFA permettent de manger plus d'une fois par jour", explique Ndir au Monde.
La street food est même devenue tendance, comme l'affirme Najma Orango, influenceuse sur les réseaux sociaux. Des initiatives comme le festival de la street food organisé par Tamsir Ndir depuis 2019 contribuent à cette valorisation. "La première année, des quinquagénaires qui avaient perdu le réflexe du repas dans la rue remerciaient les exposantes de leur faire redécouvrir le goût de leur enfance. Les beignets de rue, c'est du patrimoine", raconte-t-il.
Au-delà de son impact culturel, ce secteur représente une source d'emplois importante. Selon le journal, la street food emploierait entre 120 000 et 180 000 personnes au Sénégal, majoritairement dans le secteur informel. Malick Mboup explique : "C'est un moyen de démarrer une activité économique rapidement, avec un investissement minime, pour des retours d'argent souvent modestes mais rapides et quotidiens".
Ainsi, la street food à Dakar illustre non seulement une évolution des goûts et des habitudes, mais aussi une transformation économique et sociale profonde de la capitale sénégalaise.
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DIMBOKRO, UN MASSACRE COLONIAL OUBLIÉ
Dans cette petite ville ivoirienne, la colère populaire s'est heurtée à la violence coloniale. Le résultat ? Un massacre qui a fait trois morts et plus de cinquante blessés. Un drame qui a changé le cours de la lutte anticoloniale en Afrique de l'Ouest
Le 30 janvier 1950, Dimbokro, Côte d'Ivoire. Une foule de manifestants africains s'assemble pour exiger la libération de Samba Koné Ambroise, un leader du Rassemblement Démocratique Africain (RDA). Soudain, les forces coloniales ouvrent le feu. Bilan : 13 morts et plus de 50 blessés.
Ce jour-là, le sang coule sur la terre ivoirienne, mais l'histoire reste muette. Les autorités coloniales emprisonnent les blessés, falsifient les témoignages. Un an plus tard, un procès unique condamne les victimes.
Le massacre de Dimbokro marque un tournant. Félix Houphouët-Boigny, figure du RDA, rompt avec le Parti communiste. Une décision qui façonnera l'avenir politique de la Côte d'Ivoire.
Aujourd'hui, le cimetière des martyrs de Dimbokro s'efface sous la végétation. Les noms des victimes s'écrasent sur les plaques abandonnées. Un oubli qui interroge sur la mémoire collective et la reconnaissance des sacrifices passés.
Dimbokro, 1950 : une cicatrice dans l'histoire de la décolonisation, un cri silencieux qui résonne encore dans l'Afrique contemporaine.
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LE SÉNÉGAL OTAGE D'UNE VENDETTA POLITIQUE ?
Abdoul Mbaye dénonce une stratégie gouvernementale axée sur la confrontation avec le régime précédent, au détriment des enjeux nationaux. Selon lui, cette "guerre" contre l'ancien pouvoir pourrait avoir des conséquences désastreuses pour le pays
Lors de sa participation à l'émission "Grand Jury" de la RFM, l'ancien Premier ministre Abdoul Mbaye a mis en lumière ce qu'il perçoit comme une "guerre contre l'ancien régime" menée par le gouvernement actuel, tout en soulignant les risques que cette stratégie fait peser sur le Sénégal.
Le leader d'ACT pointe du doigt la récente conférence de presse du 26 septembre, animée par le Premier ministre Ousmane Sonko, comme emblématique de cette approche. Selon lui, cette communication, axée sur la dénonciation des chiffres économiques du gouvernement précédent, relève davantage d'un « show politique » que d'une démarche constructive. "On a préféré donner la priorité à l'accusation d'un régime précédent par rapport aux conséquences", a-t-il déclaré, soulignant le calcul politique derrière ces révélations.
L'ancien Premier ministre met en garde contre les conséquences de cette stratégie sur la réputation internationale du Sénégal. Il a notamment cité la récente dégradation de la note du pays par l'agence Moody's, passant de Ba3 à B1, comme une conséquence directe de cette communication hasardeuse. "On a fait un aveu d'insolvabilité", a-t-il regretté, soulignant que cette approche pourrait nuire à la capacité du pays à lever des fonds sur les marchés internationaux.
Abdoul Mbaye dénonce également ce qu'il perçoit comme des dérives autoritaires dans cette "guerre" contre l'ancien régime. Il évoque les récentes convocations policières de personnalités politiques et de médias ayant contesté les chiffres gouvernementaux, et voyant une menace pour les libertés démocratiques. "Il faut arrêter ça", a-t-il martelé, appelant au respect des libertés constitutionnelles.
L'ancien banquier souligne l'urgence de se concentrer sur les véritables défis économiques du pays plutôt que sur cette guerre politique. Il appelle le gouvernement à présenter un projet économique clair et à prendre des mesures concrètes pour réduire le train de vie de l'État, prévoyant des tensions sociales accumulées liées aux ajustements économiques inévitables à venir.
En conclusion, Abdoul Mbaye plaide pour une approche plus constructive et moins conflictuelle. Il évoque notamment les prochaines élections législatives du 17 novembre comme une opportunité de mettre en place un contrepouvoir capable d'accompagner le gouvernement tout en le freinant lorsque nécessaire, dans l'intérêt supérieur du Sénégal.
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Y'EN A MARRE TIRE LA SONNETTE D'ALARME
Arrestations controversées, libertés menacées, promesses oubliées : Aliou Sané dresse un bilan sans concession des premiers pas du gouvernement. Un rappel cinglant que la vigilance citoyenne ne prend jamais de vacances
Ce dimanche 6 octobre 2024, Alioune Sané, coordinateur du mouvement Y'en a Marre, a fait entendre sa voix lors de l'émission dominicaine de Sud FM. Dans un entretien percutant, il a exprimé de vives inquiétudes quant à l'état actuel de la démocratie sénégalaise.
Sané a pointé du doigt les récentes actions du nouveau gouvernement, notamment les arrestations pour "diffusion de fausses nouvelles". Il avertit que ces pratiques rappellent dangereusement celles du régime précédent, contre lesquelles le mouvement s'était battu. "On ne peut pas dire à une opposition comment elle doit s'opposer", a-t-il martelé, appelant à préserver l'espace démocratique chèrement acquis.
Le coordinateur de Y'en a Marre n'a pas manqué de souligner l'importance de la reddition des comptes, tout en insistant sur le respect des droits et de la présomption d'innocence. Il exhorte le gouvernement à agir de manière transparente et équitable dans ce processus.
Face aux défis sociaux critiques tels que l'insécurité, l'immigration irrégulière et le chômage des jeunes, Sané appelle à un leadership fort et inspirant. Selon lui, le nouveau président a la responsabilité de "faire rêver" la jeunesse sénégalaise et de l'engager dans un projet de développement national.
Malgré ces préoccupations, Alioune Sané réaffirme le rôle crucial de Y'en a Marre en tant que "sentinelle de la démocratie". Il souligne l'importance de maintenir des organisations citoyennes indépendantes, capables de s'élever au-dessus des intérêts politiques pour défendre les principes démocratiques.
par l'éditorialiste de seneplus, Amadou Elimane Kane
UNE ODE POUR LA RENAISSANCE AFRICAINE
EXCLUSIF SENEPLUS - Il est de notre responsabilité, nous les Africains où que nous soyons, d’œuvrer pour le rétablissement de nos valeurs, de notre conscience historique, de nos ressources culturelles, de nos créations
Amadou Elimane Kane de SenePlus |
Publication 05/10/2024
La renaissance africaine est une démarche qui propose un ensemble de valeurs en rupture avec les représentations euro-centristes et les négations de soi qui effacent et dévalorisent la conscience historique africaine.
Ce partage de résolutions communes doit s’accompagner d’une unité africaine avec pour levier un postulat qui permet d’œuvrer pour la renaissance : une unité culturelle avec la réappropriation du patrimoine historique et des valeurs africaines ainsi que l’exercice des langues nationales ; mais aussi une unité économique et monétaire avec une réelle exploitation des richesses naturelles du continent et enfin une unité politique d’où doit émerger une véritable démocratie participative qui aura pour fondement la pensée africaine le Ubuntu, la justice cognitive, la défense des droits humains fondamentaux et la lutte contre les corruptions, l’impunité et le népotisme.
Il est une de ces valeurs qu’il convient de mettre en lumière, celle de l’engagement politique qui doit être accompagné d’une intégrité sans faille.
Il s’agit ici de dénoncer les accessions au pouvoir qui ne sont pas acquises au moyen simple de la démocratie. Le suffrage universel doit être transparent et le pouvoir ne se conquiert pas à coup d’élections truquées, achetées. La conquête des plus hautes responsabilités d’Etat doit s’exercer par l’intelligence, par une exigence politicienne saine et par une vraie démarche intellectuelle. Un chef d’Etat est un homme tourné vers son peuple et qui doit mesurer, écouter et rendre possible les ambitions de celui-ci dans une cohérence républicaine et démocratique.
Certains gouvernants africains sont des usurpateurs qui tuent la créativité africaine. Ils sont les complices du grand banditisme international qui maintient le continent dans la misère crasse, le chaos, la guerre. Ils sont les assassins des forces vives du continent, de l’intégrité, de l’excellence intellectuelle et de l’entendement humain.
Comme le souligne l’ancien président Thabo Mbeki, grand défenseur de la renaissance africaine, « tant qu’il en sera ainsi, notre continent restera en marge de l’économie mondiale, pauvre, sous-développé et incapable de décoller. »
Et ce ne sont pas que des mots réservés à l’élite, aux cadres, aux intellectuels, c’est le cri de tous les peuples quels qu’ils soient.
Il ne s’agit plus de promesses, de discours pour mieux piller les États et leurs richesses. Il s’agit de rendre compte de ses actes et un homme d’Etat qui ne défend que ses intérêts personnels est un imposteur. L’Afrique n’est pas un continent mineur, des hommes et des femmes sont prêts à se battre pour son développement durable à l’échelle mondiale.
Cette prise de conscience doit s’accompagner de la réappropriation des richesses culturelles, historiques, intellectuelles de la pensée africaine. Nous possédons dans l’histoire antique des modèles d’intelligence et de démocratie en harmonie avec la société que nous voulons construire : les intellectuels du Moyen-âge, l’université des savoirs enracinée à Tombouctou durant des siècles, les savants africains de l’Égypte antique qui maîtrisaient les sciences physiques, spirituelles et sociales, « deux milles ans en avance sur les Européens de Grèce ».
Cinq cents ans d’esclavage et de pouvoir colonial ont réduit à néant ce fantastique héritage. Il est de notre responsabilité, nous les Africains où que nous soyons, d’œuvrer pour le rétablissement de nos valeurs, de notre conscience historique, de nos ressources culturelles, de nos créations qui sont exhibées de par le monde sans que l’on soit directement, sans intermédiaire crapuleux, impliqués dans la défense de ce patrimoine.
La connaissance de soi et l’ouverture du champ des possibles sont les seules issues pour recouvrer la dignité, la confiance et l’estime de soi.
La démarche de la renaissance africaine est une méthode de lutte perpétuelle contre les chefs d’Etat tyranniques, contre les népotismes, contre la misère intellectuelle, contre l’imposture, contre le crime organisé.
Nous ne pouvons pas rester les bras croisés et attendre encore que plusieurs générations d’africains soient sacrifiées au seul profit de quelques hommes illégitimes et malhonnêtes.
Hommes politiques, hommes de culture, savants, chercheurs, cadres, artistes, intellectuels, ouvriers, paysans, chômeurs, enseignants, revenons à la « terre mère ».
Hommes, femmes, jeunes de tout le continent et de la diaspora, rassemblons-nous pour créer l’unité africaine de demain qui ainsi constituée formera l’image belle et renouvelée du continent et que l’on nomme la renaissance africaine.
« Pour toi je bâtirai
Un continent de pleine lune
Avec des terres sans frontières
Sans castes
Sans propriétés
Sans mépris
Et sans haine
Où grandiront
De beaux nénuphars noirs
Fleuris par les soleils de nos libertés !
Et je foudroie l’envahisseur et ses valets
Tous les nouveaux
Chiens de garde
Avec pour force
Ma seule folie ensoleillée
Brodée de conscience historique
Comment voulez-vous
Que je me soumette »
Extrait La parole du baobab, poésie, éditions Acoria, Paris, 1999.
Amadou Elimane Kane est enseignant, poète écrivain.