Comme nous sommes tombés bas! D’un pays à la démocratie si respectée et enviée, nous en sommes arrivés à nous faire remonter les bretelles par l’ONU.
La rapporteuse spéciale de cette organisation mondiale ignore sûrement que d’autres détenus d’opinion sont couchés dans nos geôles pendant que des juges rampants trainent les pieds pour mieux les brimer. Il faut bien qu’ils payent leur effronterie, ces jeunes gens qui ont osé parodier des unes de journaux ou filmer la vieille prison de Dakar. Et si tous ces détenus politiques adoptaient la ligne de notre confrère Pape Alé Niang, qui a effectué une grève de la faim, nul doute toutes les télévisions du monde se braqueraient sur ce charmant pays dont le Chef piétine la Constitution tandis que ses juges, ses forces de défense et ses préfets se chargent du sale boulot. Qui pour emprisonner, qui pour interdire et qui pour contraindre avec des prétextes franchement ridicules.
Ceux qui ont lu les motifs de l’interdiction par le préfet de Dakar du rassemblement de la coalition Yewwi Askan Wi, prévu aujourd’hui à la Place de la Nation, ont dû se retenir pour ne passe rouler parterre. Tellement les prétextes donnés sont grotesques et tirés parles cheveux. Car, de mémoire de Dakarois, jamais on n’a vu les préparatifs de la fête de l’Indépendance du 04 avril débuter en janvier ! Jamais mais alors là jamais. C’est pourtant ce que prétend le brave préfet de Dakar. Défense de rire sous peine de se retrouver en prison !
Quant aux travaux du BRT, cela fait des années qu’ils durent mais on nous dit que ces messieurs de l’opposition retarderaient les travaux du Bus Rapide Transit dont le beau-frère nous promettait la réception des 120 bus électriques avant la fin de l’année écoulée. On attend toujours pendant que les travaux s’étirent. La mise en circulation de ce transport de grande masse est programmée pour l’été 2023. Les cinq petites heures d’une éventuelle manifestation de l’opposition retarderaient donc l’exécution de travaux qui ont balafré toute la capitale et sa banlieue ! Encore une fois, ne riez surtout pas le procureur de la République pourrait prendre la mouche ! Ces interdictions kafkaïennes interviennent pendant que, dans le camp du pouvoir, on déroule.
Bravo Monsieur le préfet, si avec ça vous n’êtes pas promu gouverneur, ce serait à désespérer de nos autorités!
PAR Momar Dieng
LA DOCTRINE MACKY SALL EN MARCHE
Les conclusions accablantes de la Cour des comptes sur la gestion criminelle des fonds anti-Covid sont promises à un traitement politique, sans poursuite des mises en cause. C’est le sens des attaques du Garde des sceaux contre l’organe de contrôle
Les conclusions accablantes du Rapport de la Cour des comptes sur la gestion criminelle des fonds dédiés à la lutte contre le coronavirus sont promises à un traitement politique et administratif qui éloignera les ministres et leurs collaborateurs de toutes poursuites judiciaires. C’est le sens des attaques du ministre de la Justice contre l’organe de contrôle.
Les organisations de la société civile en ont sûrement pris acte. Le rassemblement qu’elles ont organisé le 30 décembre à la Place de la nation pour exiger la reddition des comptes dans le carnage d’Etat opéré sur les fonds de la Covid-19 n’aura (presque) servi à rien. Dans son message du 31 décembre 2022, le président de la république n’a eu besoin que de 39 mots (216 caractères) pour « signer » l’autorisation d’enterrement du Rapport de la Cour des comptes. Quelques heures plus tard, c’est son ministre de la Justice qui s’attaque violemment aux compétences des magistrats de l’institution et décrète les voies par lesquelles il n’y aura plus d’affaire liée à la gabegie d’Etat perpétrée sur les fonds Covid.
Dans les colonnes du quotidien « Source A », le ministre Ismaila Madior Fall oriente les traitements du dossier vers plusieurs pistes dont médiation pénale, enquête complémentaire, remboursements.
Dans leurs recommandations aux autorités, les enquêteurs de la Cour des comptes demandent, entre autres, l’ouverture d’une douzaine d’informations judiciaires contre les personnes épinglées dans le Rapport définitif.
Mais selon le ministre de la Justice, « l’article 79 de la loi organique sur la Cour des comptes ne dit pas que la Cour peut demander l’ouverture d’une information judiciaire », rapporte le journal précité.
Le raisonnement du ministre Ismaila Madior Fall est plus que curieux : si cette même loi organique « ne dit pas que la Cour peut demander l’ouverture d’une information judiciaire », on peut penser en retour qu’elle n’interdit pas également à la Cour des comptes de requérir une information judiciaire sur la question ! Et c’est sans doute cette possibilité laissée ouverte par la loi qui a incité les enquêteurs à saisir la justice. Pas besoin d’être juriste pour sentir l’hypothèse. Les enquêteurs de la Cour ont eu du nez !
En réalité, l’option du pouvoir exécutif est de laisser l’affaire à la discrétion totale du parquet afin d’éviter toutes mauvaises surprises dans la gestion d’un scandale d’Etat qui implique des ministres, des DAGEs et des hauts fonctionnaires. C’est pourquoi, à l’ouverture d’informations judiciaires formulées par la Cour des comptes, le ministre de la Justice oppose « une information judiciaire (ouverte) par le parquet. »
Comme d’autres enquêtes produites par d’autres organes de contrôle de l’Etat, le Rapport de la Cour des comptes prend le chemin irréversible du traitement politique et administratif. Avec un objectif fondamental qui vise à soustraire des ministres et leurs collaborateurs de toutes poursuites judiciaires devant les tribunaux. La « doctrine Macky » en gouvernance sobre, vertueuse et reddition des comptes en sera le point final : zéro coupable car zéro responsable. Au nom de la continuité de l’Etat et des institutions, les contribuables sénégalais paieront la note d’une façon ou d’une autre. Elle n’est pas belle, la vie en Mackyland ?
LE BILLET D'alymana bathily
ÉVITER À PAPE ALÉ NIANG LE SORT DE BOBBY SANDS
EXCLUSIF SENEPLUS - Ce militant irlandais est mort en 1981 après 66 jours de diète dans les geoles birtanniques. J'espère que Macky Sall n'adoptera pas la même posture que celle de Margaret Thatcher dans le cas de PAN
Alymana Bathily de SenePlus |
Publication 05/01/2023
Bobby Sands était ce militant irlandais, membre du parti Sinn Féin et de l'Armée Républicaine Irlandaise (IRA) qui se battait contre la Grande Bretagne pour la réunification de l'Irlande du Nord intégré dans le Royaume Uni et de l'État libre d'Irlande du Sud en une seule République.
Arrêté en 1977 pour possession d'une arme à feu et condamné à 14 ans de prison, il est incarcéré avec de nombreux autres militants de son parti à la prison forteresse de Maze à Belfast. Il entame le 1er mars 1981, une grève de la faim "jusqu'à la mort" avec plusieurs de ses camarades pour revendiquer le statut de prisonnier politique.
Bien qu'élu député à la Chambre des Communes de Londres le 9 avril 1981 à l'issue d'une élection partielle et malgré l'intervention du pape Jean Paul II et de nombreuses organisations des droits de l'homme, le gouvernement britannique refuse d'accéder aux revendications des prisonniers irlandais. Bobby Sands meurt le 5 mai 1981 après 66 jours de diète. A 27 ans. Neuf de ses camarades codétenus mourront de même, avant et après lui.
En réaction, la Première ministre Margaret Thatcher déclarera froidement : "Monsieur Sands était un délinquant condamné. Il a fait le choix de s'enlever la vie".
Le combat de Bobby Sands n'aura cependant pas été vain. L’Accord de paix du Vendredi Saint signé en 1998, reconnaîtra le statut de l'Irlande du Sud en tant que République spécifique et créera un Conseil de coopération entre les deux entités irlandaises.
En outre, l'histoire a retenu son nom comme martyre et comme symbole de la capacité de l'homme à accepter la mort dans les plus extrêmes souffrances pour ses idées.
Je rappelle ici le martyre de Bobby Sands en espérant qu'il sera épargné à Papa Alé Niang. En espérant que le président de la République n'adoptera pas la posture de la Première ministre britannique.
Cela tachera à jamais son nom et n'empêchera pas l’avènement de l'Etat respectueux de la liberté d'expression, de la démocratie, de la bonne gouvernance et des droits humains pour lequel Pape Alé Niang se bat.
par Aminata Touré
TENTATIVE D'INTIMIDATION CONTRE MA PERSONNE
Je demande une audition publique collective de l’IGE des trois présidents du CESE. Rien ne saurait me détourer de mon objectif de partager avec mes concitoyens ma vision pour un Sénégal meilleur à la prochaine présidentielle
Deux jours après l’annonce de ma candidature à l’élection présidentielle de 2024, deux journaux de la place informent ce matin que j’aurais été épinglée par un rapport de l’IGE finalisé en mai 2022 et remis au président de la République qui a ensuite fait de moi la tête de liste de sa coalition aux élections législatives du 29 juillet 2022.
Je dénonce une information totalement fausse ayant pour seul but de de porter atteinte à mon honorabilité et par la même occasion créer un contre-feu à la gestion scandaleuse des 1 000 milliards des fonds Covid.
Pour démontrer aux yeux des Sénégalais que le Conseil Économique, Social et Environnemental n’a jamais été aussi bien géré que sous ma présidence, je demande une audition publique collective de l’Inspection Général d’Etat des trois présidents du CESE nommés par le président Macky Sall à savoir Mme Aminata Tall qui a exercé pendant 6 ans, moi-même, Aminata Touré qui ai exercé pendant 1 an et 4 mois et l’actuel président du CESE, M. Idrissa Seck en poste depuis deux ans et deux mois. Chacun de nous viendrait avec ses documents comptables en main et se prêterait sans réserve aux questionnements de l’IGE en présence de la presse nationale et internationale et sous l’appréciation des Sénégalais.
Cette technique d’intimidation ancienne ne saurait nullement m’impressionner. Je rappelle que le président Macky Sall, lui-même a fait l’objet en 2011 d’accusation de détournement de 7 milliards du fonds Taiwanais et a été convoqué au commissariat de police du Plateau pour être entendu sur une accusation de blanchiment. Rien ne saurait me détourer de mon objectif de partager avec mes concitoyens sénégalais ma vision pour un Sénégal meilleur à l’occasion de la prochaine élection présidentielle de février 2O24 à laquelle le président Macky Sall ne participera selon les dispositions sans équivoque de la Constitution et comme il s’y est engagé publiquement.
Dans l’attente de cette audition publique collective de l’IGE avec mon prédécesseur et mon successeur à la tête du CESE, nous demandons que la lumière soit faite sans délai sur la gestion des 1 000 milliards du Covid et que les coupables soient traduits sans délai devant la loi.
Aminata Touré est députée, candidate à l’élection présidentielle de 2024.
Par Mamadou Oumar NDIAYE
PAPE ALÉ NIANG, UN DESTIN DE BOBBY SANDS ?
Devant la détermination du patron de Dakar Matin d’aller jusqu’au bout de sa diète afin de protester contre sa détention arbitraire, le pire est à redouter. En réalité, Macky Sall voit à travers le journaliste Ousmane Sonko ; l’homme qui hante ses nuits
Le 05 mai 1981 mourait, au terme de souffrances indicibles, à la prison de Maze, à Belfast, le détenu nationaliste nord-irlandais Bobby Sands. Il avait 27 ans. Ce membre de l’IRA (Armée républicaine irlandaise), élu député pendant qu’il purgeait une peine de 14 ans de prison pour lutte armée, avait entamé une grève de la faim deux mois plus tôt pour exiger, en sa faveur et celle de ses codétenus, le statut de prisonniers politiques. Il est mort défiguré par la faim, sourd et aveugle au terme de 66 jours de grève de la faim. Au 54ème jour de sa diète, déjà, il ne pesait plus que 44 kilogrammes et, pour éviter que ses os ne transpercent son corps, on l’avait enveloppé d’une épaisse couverture.
Malgré les appels à l’assouplissement du monde entier, notamment du Pape, la Première ministre britannique de l’époque, Margaret Thatcher, surnommée la Dame de fer ou Iron Lady, était demeurée inflexible, refusant de considérer Bobby Sands et ses camarades comme des prisonniers politiques et ne voyant en eux que des « terroristes ».
A la mort de Sands, d’autres de ses compagnons de détention ont pris le relais les uns à la suite des autres, refusant de s’alimenter jusqu’à ce que mort s’ensuivit. Ainsi, neuf autres militants de l’Ira, dont John McDonnell et Martin Hurson, ont succombé à la faim après Bobby Sands. Cette grève de la faim en série, fortement médiatisée, avait ému le monde entier admiratif devant le courage de ces jeunes gens qui avaient accepté de consentir le sacrifice suprême, dans des conditions extrêmement douloureuses, pour le triomphe de leur cause.
Pour la petite histoire, Margaret Thatcher, cette Dame de fer extrêmement dure et sans pitié qui reconvertît au forceps le secteur de la sidérurgie britannique au prix de milliers de licenciements et d’autant de drames familiaux, qui déclara la guerre à l’Argentine pour reprendre l’archipel des Malouines (Falklands pour les Britanniques) avec là aussi des centaines de soldats tués de part et d’autre — rien que le bombardement du Général Belgrano, le navire amiral de la flotte argentine par la Royal Navy avait fait quelque 800 morts —, cette dame au cœur de pierre, donc, fut pourtant celle là même que l’on vit pleurer à chaude larmes lorsque son fils, pilote de course, se perdit dans le désert du Sahara en participant au rallye Paris-Dakar !
La tragique histoire de Bobby Sands, qui m’avait beaucoup ému à l’époque, m’est revenue à l’esprit lorsque j’ai appris que notre confrère Pape Alé Niang est dans un état critique après avoir observé une grève de la faim durant plus de trois semaines en tout. Une grève il est vraie interrompue lorsqu’il avait obtenu une liberté provisoire durant une semaine à peine. Devant l’obstination et la détermination du patron du site « Dakar Matin » d’aller jusqu’au bout de sa diète destinée à protester contre sa détention arbitraire, le pire est à redouter. Surtout qu’en face, le président de la République, faisant montre de la même intransigeance que l’alors Première ministre britannique Margaret Thatcher reste lui aussi sourd à tout appel, autiste et n’entend pas faire preuve de la moindre magnanimité. Un véritable « lion sourd » (Gainde gu tëx) comme disent les Ouolofs ! Sa haine dans cette affaire est d’autant plus grande qu’en réalité, à travers Pape Alé Niang, il voit Ousmane Sonko, c’est-à-dire l’homme qui hante ses nuits ! Et sans doute aussi ses jours. Un homme avec qui il a engagé un Mortal Kombat qui se terminera par la mort de l’un ou de l’autre, si ce n’est des deux au profit d’un troisième larron comme nous le soutenions il y a quelques mois dans ces mêmes colonnes.
Sous ce rapport, le « crime » de Pape Alé Niang mais aussi des 21 autres personnes, majoritairement des jeunes gens (parmi lesquelles une pauvre mère de famille !) qui croupissent actuellement en prison c’est évidemment d’avoir choisi le mauvais camp, celui de l’actuel opposant numéro 1 au pouvoir en place. Pour des faits bénins — voire carrément en l’absence de faits ! —, ils ont été jetés en prison sous des qualifications volontairement corsées et aggravées (on a même parlé de terrorisme !), pour les briser et dissuader quiconque voudrait s’engager plus avant pour le compte du leader de Pastef. Autrement dit, ils sont des otages du régime qui nous gouverne depuis 2012 et qui veut visiblement jouer les prolongations en 2024.
Un « lion qui dort » qui plus est sourd !
C’est évidemment pourquoi le cas de notre confrère n’est pas simple. Beaucoup de journalistes, prenant prétexte de la proximité de Pape Alé Niang avec Ousmane Sonko, refusent de se mobiliser en sa faveur même si, de mon point de vue, et fort heureusement, la majorité de la profession est ulcérée par cette détention arbitraire qui, par-delà la personne du patron de « Dakar Matin », vise une certaine forme de pratique du journalisme dans notre pays. C’est-à-dire celle-là même qui refuse de faire du griotisme, de s’agenouiller, de lécher les pouvoirs publics. Celle-là qui fait dans l’investigation et débusque les gros cafards que le régime veut cacher dans ses placards. A ceux-là gare, l’arsenal répressif et les lois liberticides genre diffusion de fausses nouvelles, violation du secret-défense et autres sont ressortis comme une épée de Damoclès susceptible de s’abattre sur la tête de tout journaliste mal-pensant. C’est pourquoi, le combat pour la libération de Pape Alé Niang est bien le nôtre. Il faut se mobiliser sans toutefois se faire beaucoup d’illusions quant aux chances de succès de ce combat car Macky Sall n’est ni Abdou Diouf, ni Abdoulaye Wade, autrement dit des présidents à qui l’on pouvait parler. Intraitable, il ira jusqu’au bout. Nous avons parlé plus haut de « lion sourd ». En réalité, cette surdité n’est que partielle car le Président est sensible aux arguments des courtisans qui viennent lui tenir à peu près ce langage : « Ô César, toi l’Illustrissime et le Brillantissime, toi le Puissantissime qui tutoie le Ciel, toi le maître de l’Univers et des Horloges, Toi qui as fait passer ce fichu pays de l’Indigence à l’Emergence, toi sous le magistère duquel nos Lions ont gagné la Can et sous le règne le Sénégal va devenir un Emirat pétrolier et Gazier, Ô Majesté, écrase donc cette vermine qui veut ternir l’éclat de ton règne ! » Pour son malheur, PAN fait partie de cette vermine. A ces mots, nul doute que notre Roi de la forêt a réfréné une envie de dire à Pape Alé Niang, comme dans la fable « Le Lion et le Moucheron » de La Fontaine : « Va t’en chétif insecte, excrément de la terre ! »
Car la raison du plus fort a toujours été la meilleure, surtout dans nos démocraties tropicales où la religion du Prince est celle de ses juges qui emprisonnent et libèrent selon son bon plaisir. Pape Alé Niang doit donc rester fort et tenir pour le salut et l’honneur de la profession. Jusqu’au sacrifice suprême que fit Bobby Sands ?
Ndlr : Ce sont sans doute aussi les mêmes courtisans qui ont dû convaincre notre César que le carnage gravissime débusqué par la Cour des comptes à propos de l’argent de la Force Covid…ne méritait pas plus qu’une phrase dans son discours de fin d’année !
par l'éditorialiste de seneplus, tidiane sow
CES OBSÉQUIEUX QUI NOUS GOUVERNENT
EXCLUSIF SENEPLUS - Monsieur le président, on s’achemine inéluctablement vers cette fin vulgaire qui vous guettait déjà au début, quand vous aviez renié votre promesse de ramener votre mandat de sept à cinq ans
“On reconnait un médiocre à ce signe qu’il est généralement insensible à l’annonce de catastrophes prochaines” – Bernanos
“La moitié des hommes politiques sont des bons à rien. Les autres sont prêts à tout” – Coluche
Le sacra fames d’un prétendant à une parcelle de pouvoir sous Macky Sall est pire que la voracité aurifère d’un chercheur d’or du Kédougou.
Je les ai, surement vous aussi, côtoyés de près ceux-là ! Ils vous écartent sans ménagement, ils mentent sur vous, ils rabaissent votre savoir-faire, ils vous masquent au regard du chef, de peur que vous ne preniez la lumière. Ils fréquentent des sangomas *pour vous jeter des sorts funestes qui vous écarteront définitivement du regard de celui qui compte. Ils vous sourient, mais ils affûtent leurs poignards sous leurs boubous.
Dès que vous avez un genou à terre, ils se rueront en masse sur vous, sortiront leur couteau pour vous achever. Demander à Mimi.
« Tout démentir, tout trahir, renier leurs opinions passées, faire arrêter leurs anciens amis, faire fi de tout mais garder leur parcelle de pouvoir ». C’est leur motto*, dirait Rochefort. Ils ne respirent en réalité que par ce bout de pouvoir qu’ils croient détenir.
Comme le malade atteint de paludisme, l’homme politique atteint de la fièvre du pouvoir est hanté par les hallucinations et les délires. Il dit tout et son contraire, fait tout et son contraire. C‘est ce à quoi nous assistons avec ces revirements de positions des hommes politiques de tous bords. Il y a ceux de l‘opposition qui nous disaient avant 2019 que le président pouvait se représenter en 2024, donc de ne pas voter pour lui et, il y a ceux de la majorité qui nous disaient qu’il fallait voter pour lui en 2019 car ce serait son dernier mandat !
Ceux de la majorité soutiennent la candidature de Macky juste pour ne pas perdre les quelques avantages acquis. Cette cohorte obséquieuse le suit partout, devançant ses intentions, elle a peur de perdre ce qu’elle n’a jamais gagné de haute lutte. Elle a peur de perdre ce qu’elle a obtenu parce que, juste elle était là, au gré des circonstances de la vie. Elle pense que c’est son destin fabuleux ; nous pensons que ce sont de vulgaires opportunistes.
Le hasard, heureux pour eux et malheureux pour la nation, les a placés là aux commandes !
Il suffit qu’ils imaginent l’instant d’après, celui où ils auront perdu le pouvoir – qu’ils n’avaient jamais du reste – pour se réfugier tout de suite dans le déni. Ils ne s’imaginent pas sans les motards et autres flèches qui leur ouvrent les voies dans les embouteillages de cette ville immonde ; ils ne s’imaginent pas faire la queue comme tout le monde devant les magasins parce qu’ils s’étaient crus citoyens à part. On ne les appellera plus 100 fois dans la journée Monsieur le ministre, Excellence ou Honorable, eux qui s’étaient habitués aux titres vides et ronflants. Ils ne comprendront pas pourquoi le sort s’est acharné sur eux et sur eux seuls. Ils ne comprendront pas pourquoi tel est resté et pas eux. Ils croiront subitement que tout le monde les prend pour des idiots alors qu’ils furent, de tout temps de grands sots.
Revoilà les tournées économiques dans des régions déshéritées où les foules entières seront drainées pour recevoir le président qui aime tant savourer les excès de zèle de ses courtisans. Il goûtera l’ineffable bonheur d’entendre les applaudissements de rigueur de masses qui ne seront pas venues pour comprendre les messages mais pour se faire voir de leurs représentants, qui leur octroieront quelques miettes de ce qu’ils auront glanés comme prébendes de la République. Pourtant ce sont eux qui ont voté contre vous aux locales et aux législatives dernières. Le peuple a compris, ils vous applaudissent aujourd’hui, ils vous sanctionnent demain. Ils ont appris, grâce à vous, le jeu de glaner de l’argent facile. Ils le jouent mieux que quiconque !
Yann Moix disait qu’« il faut savoir reconnaitre la part d’histoire dans le présent et dans l’avenir » ? « Les catastrophes ont tendance à recommencer, mais pas avec leur date d’origine. Elles se choisissent d’autres dates, d’autres lieux, d’autres acteurs, d’autres raisons », poursuivait-il.
Ne voilà-t-il pas, monsieur le président, l’histoire du « troisième mandat de Wade » qui recommence avec une autre date 2024, d’autres acteurs et d’autres raisons qui sont invoquées ici et là par vos lieutenants ?
Vous savez mieux que quiconque, ce qu’il en est advenu. Pourquoi ignorer ce pan de l’histoire qui fait effraction dans notre présent et risque de nous entraîner vers des lendemains de chaos à cause de votre éventuelle candidature ?
Aujourd’hui, l’opposition s’est radicalisée : l’alternative est simple. On est contre Macky ou on est avec Sonko. Si on déroge à ces deux lignes, on est vilipendé, insulté et même agressé physiquement. C’est la pensée unique, on s‘aligne un point c’est tout. Pape Djibril Fall vient d’en faire les frais. Les condamnations du leader du Pastef n’y changent rien. Le vers est dans le fruit. Inacceptable ! Ce pays manque cruellement d’éducation ! Il est temps d’en extraire les sauvageons.
Pour votre majorité, ce n’est point différent : il leur faut repeindre le monde avec les couleurs qui vous plaisent. D’aucuns ont même poussé la compréhension au premier degré, jusqu’à repeindre les bus, les façades des bâtiments publics aux couleurs marron beige de votre parti.
Mais où va ce pays ?
Monsieur le président, depuis votre « ni oui, ni non » je ne décolère pas contre vous, vous qui semblez oublier les conditions de votre accession au pouvoir. Vous avez été élu en 2012 grâce à tous ceux qui avaient voulu empêcher Wade de faire un troisième mandat. Rappelez-vous, quand les citoyens avaient eu le choix, seuls 26 % vous choisirent. Soit ¼ des votants. Cela faisait un Sénégalais sur 13. Ce n’est assurément pas beaucoup. C’est comme cela qu’on vous a mis le pied à l’étrier. Cela devrait inciter à plus de retenue, plus de prudence, à plus d’inclusion et surtout à ne pas vouloir exercer une magistrature éternelle.
Vous savez que si les gens savent que vous ne serez pas candidat vous êtes mort. Ils enjamberont allègrement votre cadavre encore chaud pour rallier ou s’attirer les bonnes grâces de celui qu’ils penseront avoir les faveurs du peuple. Ils joueront XBET (votre jeunesse y joue déjà beaucoup) sans attendre le véritable match.
Immanquablement, le fait de ne pas se représenter vous affaiblirait forcément, dans votre autorité à gérer les affaires du pays dans cette dernière ligne droite. Vous ne sortirez donc de l’ambiguïté que le plus tard possible, car vous connaissez le dicton : on sort de l’ambiguïté à ses dépends.
C’était bien là la vraie explication du « ni oui ni non », pas celle que vous nous avez servie, infantilisant vos collaborateurs : « ils ne travailleront pas s’ils savent que je ne suis pas candidat ».
Qu’importe votre choix, on s’achemine inéluctablement vers cette fin vulgaire qui vous guettait déjà au tout début de votre premier mandat, quand vous aviez renié, à la surprise générale, votre promesse de ramener votre mandat de sept à cinq ans !
Vous aviez oublié par là l’essentiel, monsieur le président. La grandeur d’un homme politique se fabrique dans l’attachement à des principes qui le dépassent. Pour vous, vous êtes au-dessus de tout et c’est bien là le malheur du Sénégal.
Les milliards du fonds Covid dilapidés indûment sont présentés par vos ministres comme de pures vétilles qui ne méritent point notre indignation. Quand un ministre est épinglé dans un scandale, c’est toute la République qui est fragilisée, c’est toute la République qui est salie. On vous a élu pour que vous protégiez la République, pour ne laisser quiconque, fussent-ils vos proches, la salir. Ces manquements répertoriés par la Cour des comptes jettent l’opprobre sur la République entière. Nous en souffrons. Les bonnes pratiques dans les grandes démocraties dont vous aimez tant à vous réclamer, les mis-en-causes sont démis ou mis sur la touche le temps de l’investigation. C’est ce qu’on attend de vous à minima. Votre absence d’actions fragilise encore un peu plus nos institutions et notre République.
Déjà, les comportements agressifs de nos députés à l’Assemblée nationale avaient largement érodé la confiance en nos institutions.
Ces dernières sont investies par des énergumènes, armés de leur carence, ayant la gifle facile et l’insulte qui se pavane sur la bouche. Ils deviennent de véritables faquins qui nous narguent du haut de leurs bêtises. Jamais fadaises et bassesses ne seront tombées d’aussi haut dans cette Assemblée ! Comment comprendrait-on une seconde que des gens avalisent des violences physiques commises dans une Assemblée ? Il faut un rassis de la moelle pour ne pas condamner quelqu’un, député de surcroit, qui gifle quelqu’un d’autre, députée de surcroit. Il n’y a pas de « oui mais », c’est juste inadmissible. Aux verbes tonitruants d’avant dans cette Assemblée, il nous faut dorénavant rajouter les taloches, les coups de pied et les jets de chaise. Le pays part en vrille et on se complait hélas dans des fagots de byzantinismes !
L’opposition radicale est en train de vouloir mettre à terre nos institutions, et vous les y aidez en répondant à leurs coups par des coups encore plus tordus. Ils veulent construire sur ses ruines, une tyrannie. Ils y parviendront si personne ne s’y oppose. Qui pour les en empêcher ? Qui pour combattre ces factieux et les faire rentrer dans l’ordre ?
Voulons-nous voir une Assemblée représentative, diverse, qui élève la voix dans ses travées plutôt que de voir un peuple avili sous le joug d’un « dictateur » ?
Ces questions se posent et il va falloir y apporter des réponses sous peine de se voir ensevelis par la lame de fonds qu’elles génèrent.
Quant à vous monsieur le président, votre discours à la nation fut de la même tonalité que les précédents. Pauvre et banal. Vous dites des mots dont quelque fois on se demande si vous en connaissez le sens tellement ce que vous faites est à l’opposé de ce que vous dites. Vous nous parlez de paix, de mieux vivre ensemble, vous qui emprisonnez à tour de bras. Pape Alé Niang et bien d’autres sont sous vos fers. Le secret de l’allocution réussie réside dans la sincérité de celui qui l’exprime. En fait, il y a longtemps que vos compatriotes ont arrêté de vous écouter. Et le concert des casseroles n’y est pour rien !
En son temps, Senghor avait créé un peu l’ouverture de son régime « autoritaire » en instaurant un « régime présidentiel déconcentré ». Voilà que, quelques 50 ans plus tard, vous nous inventez un « régime présidentiel concentré ».
Tel est le recul que vous nous avez fait subir en tant que République !
Bonne année quand même !
Dr Tidiane Sow est coach en Communication politique.
Notes :
Motto : devise
Henri Rochefort, Journaliste, La lanterne
Yann Moix : Ecrivain, Dehors, Grasset
Sangomas : terme sud-africain pour désigner les sorciers et jeteurs de sorts.
par l'éditorialiste de seneplus, pierre sané
LETTRE À PAPE ALÉ NIANG
EXCLSUIF SENEPLUS - Poursuivre ta grève de la faim joue en fait à consolider un piège de certains au pouvoir à savoir se débarrasser de toi du fait de ta propre décision. Ne leur offre pas un tel cadeau
nous sommes des centaines de milliers de Sénégalais à partager ton combat pour la bonne gouvernance dans notre pays.
Nous sommes des centaines de milliers de de démocrates en Afrique à te soutenir dans ton bras de fer contre un régime liberticide et corrompu.
Nous sommes des centaines de milliers de défenseurs de droits humains de par le monde désireux de t’accompagner dans ta campagne pour affronter un régime qui a pris en otage tout un peuple en s’accaparant ses ressources et ses libertés.
Cher Pape Alé,
ce combat a besoin d’un Pape Alé en vie même si emprisonné. Nous ne baisserons pas les bras tant que tu n’auras pas retrouvé la liberté. Mais pour l’instant, nous avons besoin que tu te préoccupes de ta santé et de ta vie. Poursuivre ta grève de la faim joue en fait à consolider un piège de certains au pouvoir à savoir se débarrasser de toi du fait de ta propre décision. Ne leur offre pas un tel cadeau.
A mon avis, il y a probablement des tiraillements internes entre l’exécutif, l’armée et la justice qui peuvent mener à une paralysie concernant ta libération. Contrairement a ce qu’on pense, Macky Sall n’a pas nécessairement et toujours les coudées franches.
Pape Ale, tu ne dois pas mettre ta vie en danger.
On n’a pas besoin de ça pour continuer le combat pour ta libération.
Tu dois penser à ta famille et à tous tes soutiens. Ils ont besoin de toi vivant sachant que tôt ou tard la pression mènera à ta libération.
Pierre Sané est défenseur des droits humains.
PAR Jean-Baptiste Placca
PELÉ, TOUT SIMPLEMENT
D'une certaine manière, Pelé appartenait aussi à l'Afrique. Mais les Africains, plutôt que de juste clamer leur fierté de se reconnaître dans de telles icônes, devraient commencer à s'inspirer, enfin, de leur sérieux et de leur rigueur
Le roi Pelé n’est plus, et la terre entière le pleure. Parce que les amoureux du ballon rond, par milliards, se comptent sur tous les continents, dans tous les pays, tous les milieux, par-delà les barrières et autres catégorisations. Comment pouvez-vous, alors, soutenir qu’une partie de l’humanité le considérait, malgré tout, comme étant « un des siens » ?
Dans une chronique publiée, hier, dans le quotidien USA Today, Mike Freeman écrivait ceci : « Pelé n’était pas Américain, mais, pour une multitude d’Américains noirs, footballeurs, comme moi, il était un des nôtres. Il sera toujours un des nôtres ». Ce biographe d’entraîneur a alors dressé le portrait d’une icône galactique, une divinité ! Il a confessé s’être souvent surnommé Pelé, dans sa jeunesse, comme tant d’autres, d’ailleurs.
Désigner Pelé comme étant un des leurs aurait pu faire suspecter Mike Freeman de récupération raciale, si le défunt roi du football ne s’était lui-même assigné la mission de rendre, par sa prestance sur la pelouse, une certaine fierté à ceux qui se reconnaissent en lui, et qui sont la partie en question de l’humanité. Au-delà des résultats, des trophées et du beau jeu, il tenait à ce que la gloire que lui conférait son génie rejaillisse sur eux.
Comment recense-t-on donc cette partie de l’humanité ?
A l’époque où Pelé rayonnait, notamment en Coupe du monde, les Noirs, aux États-Unis, subissaient la ségrégation raciale. Ceux d’Afrique noire se débattaient pour se libérer du joug du colonialisme. Voir « un des leurs » impressionner ainsi la planète ne pouvait être qu’une source de fierté pour ses frères de couleur, en Afrique, aux États-Unis, et même au Brésil. C’est précisément ce sentiment qu’exprimait un auditeur qui rappelait hier, sur l’antenne, l’état dans lequel, depuis leur village de Sokone, au Sénégal, ses amis et lui avaient vécu, en 1958, les prouesses de Pelé, à la radio : « Nous en étions très fiers, parce qu’il était noir, comme nous », disait-il.
Au Sénégal, dit-on, le pétrole va couler à flots dès 2023. Nous rentrons de plain-pied dans… le vif du sujet, objet de tant de spéculations ! Des prévisions optimistes tablent même sur des recettes déjà incorporées dans le budget consolidé et voté
Au Sénégal, dit-on, le pétrole va couler à flots dès 2023. Nous rentrons de plain-pied dans… le vif du sujet, objet de tant de spéculations ! Des prévisions optimistes tablent même sur des recettes déjà incorporées dans le budget consolidé récemment voté à l’Assemblée nationale.
Une période de prospérité relative s’ouvre ainsi puisque la croissance fera un bond significatif pour se retrouver à deux chiffres. Inédit dans ce pays « indigent » (le mot est du Président de la République) qui s’apprête à être « émergent ». Sommes-nous dans un contexte d’expansion où l’or noir serait une réelle couverture contre l’inflation ? Le scénario est séduisant. Mais il n’est pas suffisamment explicite sur les repères de marché.
Quitter l’indigence s’organise et se prépare. Atterrir sur l’émergence constitue une finalité conçue en amont et amorcée de manière graduelle moyennant toutefois des ajustements au gré de la progression. Il s’agit d’un élan, autrement dit d’un décollage qui doit se profiler.
Le Sénégal, pays pétrolier et gazier ? Vivement. Mais gardons-nous de toute euphorie anesthésiante. Laquelle secrète une forte espérance que rien ne vient conforter. Dans le domaine mouvant des hydrocarbures, les vérités d’un moment ne sont pas celles du moment d’après ou d’avant. Les valeurs ne sont jamais constantes.
Par essence même, le secteur est changeant, fluctuant au gré des humeurs des forces qui y interagissent. Quel sera le prix du baril en 2023 ? Va-t-il subir des variations dictées par des effets de conjoncture ? Qu’est-ce qui pourrait advenir en cas de brusque chute ou de hausse de l’or noir ? A-t-on intégré dans les paramètres d’appréciation, les éventuels déséquilibres résultant de la croissance de la demande (mondiale) et l’hypothèse de saturation des facteurs de production ?
Les grandes manœuvres et les petits jeux tactiques peuplent l’univers « impitoyable » du pétrole qui, soit dit en passant, a cessé d’être le produit vedette de l’énergie. Certains analystes lui prédisent même une fin imminente dont l’échéance, toujours annoncée, est toujours repoussée.
En revanche, comme énergie fossile, il n’est plus en cours, chahuté ici ou là par des énergies vertes, dites propres qui tiendraient la dragée haute. Les pays occidentaux n’en démordent pas. De plus en plus sensibles aux effets de changement climatique, ils appuient fortement (et puissamment) la recherche pour des solutions alternatives.
Rien qu’à voir les efforts et les moyens consacrés, le doute n’est plus permis sur les options fondamentales que projettent les cercles d’influence à l’échelle du monde. Ils scénarisent le futur à partir de la préservation des équilibres écologiques pour continuer à tirer parti des ressources de la planète. Cette lente reconversion des puissances industrielles induit des changements notables dans les années à venir.
Déjà la transition s’effectue dans bien des activités jadis gourmandes en charbon, gaz et pétrole. Bien que nettement amélioré, le processus de transformation n’évacue pas la pollution très décriée dans les opinions publiques. Or celles-ci représentent un poids électoral très courtisé par les dirigeants politiques (au pouvoir et dans l’opposition).
D’ailleurs ces derniers redoutent les « exaspérations sociales » nées du « pouvoir de marché » que détiennent les grandes entreprises plus sensibles aux profits qu’aux équilibres. On leur prête même une influence plus grande sur les pouvoirs politiques dans les pays fragiles pour les inciter à légiférer dans leurs intérêts au détriment des peuples dont la colère monte pour changer l’ordre établi.
A cet égard, l’histoire récente est pleine d’ironies. Il y a quelques années, le monde libre, Etats-Unis en tête, refusait d’admettre la réalité du changement climatique. George W. Bush fils alors au pouvoir évacuait toute idée d’adaptation aux mutations écologiques qui équivalait, selon lui, à une perte de prospérité inacceptable. Normal, il est Texan. Et, comme tel, il défendait mordicus les intérêts bien compris des pétroliers de cet Etat qui détient le quart des réserves américaines.
Plus tard, l’Amérique allait découvrir les perturbations du climat avec les successions d’inondations, d’incendies, de sécheresse et de hausse des températures par une étonnante fonte des glaces de l’Alaska. A quelque chose, malheur est bon… Le propre des dirigeants est de prévoir les crises, les ruptures d’équilibre ou les dysfonctionnements.
Le pétrole et le gaz, pour les évoquer à nouveau, ont encore de beaux jours devant eux. Ils irriguent toujours une bonne partie de l’activité industrielle et sont d’un poids prépondérant dans la transformation de bien des produits de grande consommation. Nous détenons du pétrole au large de nos côtes. Mais en sommes-nous les propriétaires réels ? La question peut paraître saugrenue.
Néanmoins, détenir une richesse et être incapable de la mettre en valeur conduit à l’impasse si une issue n’est pas trouvée. Le tout est dans l’effectivité de la jouissance. Ceux qui détiennent les moyens colossaux (financiers et technologiques) négocient toujours en position de force et parfois imposent des conditions humiliantes aux pays producteurs de l’or noir.
Le Venezuela en Amérique latine et plus près de nous le Nigéria, possèdent de faramineuses réserves. Mais ils peinent à en jouir par un défaut rédhibitoire de gestion planifiée de la ressource. Conséquence : aux pénuries d’essence succède une inflation généralisée des prix des denrées de première nécessité. L’effondrement du pouvoir d’achat se combine à la rareté, ce qui débouche inéluctablement sur des dérives sociales et des émeutes.
L’autre élément à retenir a trait aux inégalités entre citoyens d’un même pays. Une gestion biaisée de la manne comporte des risques qu’il importe de cerner en amont pour éviter le syndrome algérien d’une redistribution tatillonne des dividendes des hydrocarbures. La perspective d’une embellie économique va rendre la destination Sénégal intéressante, captivante et attractive.
Du beau monde est attendu. Il ne faut pas exclure la pègre et les gens de mauvais acabit. Ils écument les places fortes et anticipent en s’octroyant des rôles et des responsabilités factices. Pour avoir expérimenté ailleurs ces pratiques, ils débarquent avec des armes de séduction massive susceptibles de piéger plus d’un.
Les forces de sécurité (et de défense) sont prévenues. Le danger rôde. Autant dire que la menace se rapproche de sa cible potentielle. Par des moyens accrus, notamment dans le précieux domaine de la technologie avancée, le renseignement et la veille sécuritaire peuvent endiguer la délinquance à « col blanc ».
Le pétrole est à la fois panacée et épouvantail. Il nourrit de vieilles pulsions qui s’activent avec le réveil des égoïsmes. Poseidon, Dieu des mers et des océans, s’est sûrement penché sur le berceau Sénégal pour la sauvegarde de son identité et des valeurs collectives de son modèle de société, autrement plus importantes que le pétrole et le gaz.
par Madiambal Diagne
EST-IL DÉSORMAIS PERMIS D'INSULTER LES MAGISTRATS ?
La sortie de Mansour Faye contre les membres de la Cour des comptes est d’autant plus regrettable qu’elle semble indiquer une assurance, une garantie d’impunité que sa situation personnelle de membre de la famille du président pourrait laisser croire
Le Président Macky Sall a eu la posture la plus républicaine qui consiste à saluer le travail effectué par la Cour des comptes dans le cadre de l’examen de la gestion des fonds dégagés par l’Etat du Sénégal pour la riposte contre la pandémie du Covid-19. Le chef de l’Etat a tenu à manifester le respect dû aux différentes institutions publiques et déclare s’évertuer à faire jouer à chacune d’entre elles la plénitude de ses missions et prérogatives. Il réitère ainsi son engagement pour la transparence et la bonne gouvernance et peut se targuer d’avoir mis en œuvre d’importantes réformes tendant à renforcer les compétences et pouvoirs des institutions de contrôle de l’Etat. Mais le Président Sall aurait bien besoin de partager son sens de l’Etat et du respect des institutions avec nombre de ses proches collaborateurs et surtout, mettre le holà sur les attaques régulièrement proférées contre les hauts magistrats et autres fonctionnaires.
Point de gloire pour les ministres Mansour Faye et Moustapha Diop
C’est connu, «l’insulte est souvent l’argument final de celui qui ne trouve plus rien à dire». Dans l’édition du Journal L’Observateur du 22 décembre 2022, le ministre Mansour Faye était monté au créneau pour réagir au rapport de la Cour des comptes qui pointe un doigt accusateur sur la gestion des fonds publics mis à sa disposition. Le ministre a balayé d’un revers de main les conclusions des magistrats en accusant ces derniers d’être des «politiciens encagoulés» qui mèneraient des «combats politiques». L’insulte est grave, un affront outrageant qui n’honore pas son auteur. Seulement, quelle est la dignité d’attaquer une personne qu’on sait incapable de se défendre ? Les magistrats de la Cour des comptes vont rester stoïques.
La Chambre des affaires budgétaires et financières de la Cour des comptes, qui a produit le rapport sur la gestion des fonds de riposte contre le Covid-19, n’a pas rendu une décision juridictionnelle. Elle a formulé un certain nombre de recommandations dont la traduction d’auteurs de faits susceptibles d’être qualifiés de fautes de gestion ou d’actes pénalement répréhensibles devant les institutions compétentes. C’est dire que le rapport ne saurait être un document définitif et toute personne mise en cause demeure présumée innocente et aura, le cas échéant, la latitude d’assurer ses moyens de défense devant les juridictions appropriées. A ce niveau, il faudra une autre attitude que l’injure à la bouche ou l’arrogance.
La sortie du ministre Mansour Faye pour pourfendre les membres de la Cour des comptes est d’autant plus regrettable et condamnable qu’elle semble indiquer une assurance, une garantie d’impunité que sa situation personnelle de membre de la famille du président de la République pourrait laisser croire. Néanmoins, on devrait être plus exigeant vis-à-vis de lui car «la femme de César doit être irréprochable», comme le disait un adage. Pourtant, Mansour Faye, réputé colérique, aurait pu apprendre de ses propres turpitudes. Il avait suscité le tollé en avril 2020 en accusant, avec les mêmes mots, les médias et toutes les autres personnes qui s’interrogeaient sur les opérations d’achat et de manutention de gros tonnages de vivres acquis par le ministère du Développement communautaire et de l’équité sociale et territoriale. Sincèrement, quand on le voyait suer à grosses gouttes pour répondre à ces interpellations, on se persuadait que Mansour Faye rendrait une feuille immaculée à la fin de l’exercice.
Le Président Macky Sall et son Premier ministre Amadou Ba ont fait comme s’ils n’avaient pas entendu les attaques du ministre Mansour Faye contre la Cour des comptes. C’était sans doute suffisant pour qu’un autre ministre, Moustapha Diop, rembobine le vieux disque des insultes contre ces mêmes magistrats. Lui aussi s’est permis de dire, le 30 décembre 2022, devant le Conseil municipal de Louga, que les membres de la Cour des comptes dirigent contre sa personne une opération politique. Il a agrémenté l’insulte avec la dérision, en affublant cette haute institution du titre de «Cour des règlements de comptes». Le propos a été largement repris par les médias. Il n’est pas non plus certain que le président de la République et son Premier ministre daigneront relever cette grave incartade.
Moustapha Diop est un coutumier des faits. Il s’illustre régulièrement pour faire de la Cour des comptes son «punching ball». Le 8 juin 2015, le président de la Commission des comptes et de contrôle des entreprises publiques, Abdoul Magib Guèye, et ses collègues, s’étaient rendus au siège du Fonds de promotion de l’entrepreneuriat féminin (Fpef), pour rencontrer le nouveau directeur, Abdoulaye Dahibou Ndiaye, et son staff, et leur présenter le programme de travail de la vérification. Ils comptaient effectuer leur mission d’audit qui faisait partie du programme annuel de vérification de la commission, approuvé en début d’année et soumis à l’approbation du chef de l’Etat. Le Fpef était une structure du ministère de la Femme et de la famille dont Moustapha Diop était le directeur avant d’être nommé au gouvernement. C’est ainsi que le ministre-délégué à l’époque, Moustapha Diop, informé de la présence des enquêteurs, s’était invité à la réunion. Le président de la commission lui avait fait alors remarquer que sa présence ne s’imposait pas du fait que ce n’était qu’une réunion de prise de contact. Suffisant pour que le maire de Louga sortît de ses gonds et balançât aux vérificateurs : «Vous êtes de petits magistrats de rien du tout, payés pour me déstabiliser.» Piqué par on ne sait quelle mouche, il poursuivit son monologue en disant à ses hôtes qu’ils ne font pas partie «de la Cour des comptes, mais de la Cour des règlements de comptes», mais qu’il ne se laissera pas faire. Ne s’arrêtant pas en si mauvais chemin, il mit fin à la réunion et intima l’ordre aux vérificateurs de prendre la porte. On note bien qu’il vient de reprendre sa «formule».
La révélation de cet esclandre par Le Quotidien avait ému l’opinion et dans ces colonnes, nous l’avions vivement flétri. Moustapha Diop, conduit par un de ses amis, s’était alors déplacé jusqu’à mon domicile pour s’expliquer sur sa «méprise». Je lui avais dit, dans le blanc des yeux, qu’il aurait intérêt à arranger la situation avec les magistrats car je ne voyais pas le Président Macky Sall souffrir un bras de fer avec les magistrats à cause des turpitudes d’un ministre délégué. L’Union des magistrats sénégalais (Ums) annonça par la suite déposer une plainte contre Moustapha Diop. La plainte n’aura pas de suite judiciaire car le Président Macky Sall et le ministre de l’Economie, des finances et du plan d’alors, Amadou Ba, s’étaient beaucoup investis pour arrondir les angles avec le président Ady Sarr et les autres membres de la Cour des comptes effarouchés. Moustapha Diop gagnera régulièrement du galon dans le gouvernement. Qui devrait alors s’étonner que Moustapha Diop fasse encore dans la récidive ? Le silence coupable du Président Sall et de son chef de gouvernement devant les attaques récurrentes de membres du gouvernement contre les institutions judiciaires, rend désormais illégitime leur colère quand d’autres citoyens désacralisent les institutions républicaines. Le pari peut être très risqué pour le gouvernement, d’autant que la Cour des comptes aura toute la latitude d’enfoncer le clou si cela lui chantait, au moment de l’examen de la loi de règlement de la gestion 2021, ou encore dans ses prochains rapports annuels.
Les leçons de républicanisme de Serigne Mountakha Mbacké et de Serigne Babacar Sy
Au gré du jeu politique, les institutions républicaines et leurs serviteurs sont pourfendus, agressés même. Rien n’est plus frustrant que cela, surtout qu’il est rare de trouver des voix qui comptent les défendre publiquement et que les mécanismes légaux pour assurer défense et protection à ces fonctionnaires n’opèrent pas toujours efficacement. Les opposants au régime du Président Sall n’auront pas l’excuse de leur posture pour vilipender les juges à chaque fois qu’une décision ne leur est pas favorable alors qu’ils ne manquent pas de se féliciter des autres verdicts en leur faveur. Nous avons régulièrement fustigé ce vulgaire opportunisme, notamment durant le traitement judiciaire de l’affaire Khalifa Sall, pour nous étonner : «S’il faut en arriver à huer les juges» (16 juillet 2018). Mais le plus affligeant est que certaines attaques sont dirigées contre ces institutions par des acteurs judiciaires, «Ces juges qui se moquent de la Justice» (4 septembre 2020). «Les coups portés à la crédibilité des institutions judiciaires sont souvent, et au premier chef, du fait même des acteurs de la Justice. Ils donnent ainsi le bâton pour se faire battre (…) Au gré des verdicts, les juges sont applaudis ou on fait siffler leurs oreilles si ce qu’ils rendent ne nous agrée pas. Si nos juges, du fait de rivalités personnelles, de luttes d’influence ou de conflits d’une toute autre nature, ne cessent de s’empoigner et de se fusiller, c’est la crédibilité d’un pan majeur de notre République qui perd au change (…). Il y a eu un terrorisme médiatique sur les magistrats, au point que certains chefs de juridiction éprouvent de la peine à composer des Chambres pour juger certaines affaires. Ce qui est à regretter dans cela reste que les magistrats soient tombés dans ce jeu de duel sur la place publique, d’une quête de vedettariat et que la fonction soit de nos jours marquée au fer d’une rivalité infondée entre des magistrats d’une vieille garde qu’on accuse de tous les péchés possibles et de jeunes magistrats à la probité des dieux.»
L’espoir peut encore être permis car l’actualité de ces derniers mois révèle que le devoir de protection de l’idéal républicain, des institutions et des agents publics est endossé par des acteurs nouveaux, provenant paradoxalement des milieux religieux pourtant connus pour un certain conservatisme, pour ne pas dire féodalisme. La gestion de la pandémie du Covid-19 a révélé la posture républicaine et éminemment responsable du Khalife général des Tidianes, «Serigne Mbaye Sy Mansour, l’exemple» (19 juillet 2021). Le Khalife général des Tidianes a eu le discours approprié et pertinent quant à la protection des agents de santé publique et les Forces de l’ordre, pour la réussite des campagnes de vaccination et autres mesures de prophylaxie, notamment la fermeture des lieux de culte. Le Khalife général des Mourides, Serigne Mountakha Mbacké, n’a pas été en reste. Non seulement il n’a pas écouté des illuminés qui cherchaient à le dresser contre notre chronique «Mille coups de fouet à combien d’hommes sénégalais» (24 octobre 2022), mais Serigne Mountakha Mbacké a pris à son propre compte notre propos qui préconisait la restauration de l’autorité des services de sécurité de l’Etat au niveau de la ville de Touba. «La passivité de l’État a fait le nid de la prolifération de milices d’obédience religieuse qui ont fini par se muer en polices religieuses pour arrêter et bastonner jusqu’à des personnes trouvées en train de fumer une cigarette ! Des femmes présumées être des travailleuses du sexe, trouvées dans des lieux privés, ont été molestées et certains de leurs bourreaux les ont punies en profitant de ces proies pour satisfaire leur libido. D’autres femmes mal vêtues à leur goût, se font arracher publiquement leurs coiffures ou leurs faux-cils (…). Les autorités publiques marchent sur des œufs et poussent le «ponce pilatisme» jusqu’à proscrire l’intervention des Forces de l’ordre dans des localités. On a vu des milices religieuses arrêter (on ne sait dans quelles circonstances et conditions) des personnes et les conduire, dans un rare instant de mansuétude, devant la police d’Etat qui prend ainsi la suite. Quelle forme de coopération pourrait-on envisager entre une police religieuse et une police républicaine d’un Etat démocratique, alors qu’elles ne partagent pas les mêmes règles de droit positif ? Le Président Abdou Diouf avait eu l’habileté de convaincre le Khalife général des Mourides, Serigne Abdoul Ahad Mbacké (1968-1989), d’installer les forces de police d’Etat dans la ville de Touba, qui tendait à devenir un repaire de malfrats, de bandits de tout acabit et de trafiquants de drogue. Par exemple, quand des unités cynophiles avaient été déployées dans la ville, l’émoi était tel que le khalife a pu instaurer d’autorité et faire accepter la présence des chiens renifleurs dans toute l’enceinte de la ville, avec une formule restée dans les mémoires : «Ces chiens ne traquent que leurs semblables !»
Serigne Mountakha Mbacké a fait le 27 décembre 2022, une déclaration, ferme et avec le sourire, pour dissoudre la police religieuse à Touba, la Dahira Safinatoul Aman, et demander que les missions régaliennes de sécurité publique soient désormais exclusivement assurées par les services de l’Etat. On ne peut que s’en féliciter quand on voit le désastre provoqué en Iran par exemple, par les conséquences d’actions des unités de police religieuse.