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7 mars 2025
Politique
Par Henriette Niang KANDE
REBATTRE LES CARTES DU PARTENARIAT
Avec la fermeture annoncée des bases militaires françaises au Sénégal et en Côte d’Ivoire un symbole fort de la présence historique de Paris en Afrique de l’Ouest s’efface
Une nouvelle ère de coopération après la fermeture de la base militaire
Avec la fermeture annoncée des bases militaires françaises au Sénégal et en Côte d’Ivoire un symbole fort de la présence historique de Paris en Afrique de l’Ouest s’efface. Mais cette reconfiguration pourrait aussi être l’occasion de redéfinir les relations entre la France et le continent africain, en adoptant une approche plus équilibrée et respectueuse des aspirations locales.
Vers une coopération sans tutelle
Pendant des décennies, la présence militaire française au Sénégal a été perçue comme un outil de contrôle autant que de partenariat. La base militaire française, drastiquement réduite par Abdoulaye Wade en 2010, qui à l’origine était perçue comme un garant de stabilité nationale et levier d’influence stratégique pour la France, a fait l’objet ces dernières années, de critiques pour sa connotation néocoloniale. Sa fermeture définitive marque un tournant symbolique, répondant à une volonté du nouveau régime sénégalais d’exercer sa souveraineté.
Dans ce contexte, la France doit repenser sa coopération. Plutôt que de se concentrer sur une approche militaro-sécuritaire, Paris pourrait élargir son champ d’action à des domaines plus inclusifs et constructifs. L’éducation, les infrastructures, la culture et la transition énergétique apparaissent comme des axes stratégiques pour renforcer les liens entre les deux parties.
Réinventer le “mindset” des élites françaises pour un partenariat durable
Avec le retrait définitif de la présence militaire française en terre sénégalaise, la France fait face à un défi majeur : refonder ses liens avec un pays qui a beaucoup changé.
Abandonner les réflexes paternalistes
Pendant des décennies, la politique de la France au Sénégal s’est appuyée sur une relation asymétrique, marquée par un paternalisme latent. C’était l’époque. Elle s’est longtemps perçue et jusqu’à une période très récente, comme la « Métropole », voire le guide de cet ancien territoire colonisé. Cette posture est devenue obsolète dans un pays où l’affirmation de la souveraineté nationale et la diversité des partenariats internationaux sont des réalités incontournables. La méthode elle, perçue comme paternaliste et déconnectée des réalités locales, alimente les ressentiments. Le changement de mentalité doit passer par une reconnaissance explicite de cette dynamique. Les élites françaises doivent se départir de l’idée que la France est indispensable à l’Afrique. Aujourd’hui, le discours qui s’entend de plus en plus, est qu’il est temps de traiter les pays africains comme des partenaires égaux et souverains, capables de prendre leurs propres décisions, même si celles-ci vont à l’encontre des intérêts français ou considérées comme telles. Deux exemples qui méritent d’être cités.
En mars 2022, à l’ONU, le Sénégal avait fait réagir des observateurs français par son positionnement lors d’une résolution intitulée « Agression contre l’Ukraine », dont le texte exigeait « que la Russie cesse immédiatement de recourir à la force contre l’Ukraine et retire immédiatement, complètement et sans condition, toutes ses forces militaires » d’Ukraine. Le Sénégal (comme 11 autres pays africains) s’était abstenu.
En 2014, il avait adopté la même attitude, concernant la crise entre la Crimée et la Russie. Etait-ce une volonté de s’affirmer différemment sur la scène internationale ou un désir de calmer le jeu au niveau régional et local ? Voire. Quelques observateurs n’ont pas manqué de réagir, à l’image de Nicolas Henin (journaliste) , en postant sur son compte X : « Petit retournement du Sénégal, qui a finalement voté au Conseil des Droits de l’Homme en faveur d’une commission d’enquête internationale indépendante à la suite de l’agression de la Russie contre l’Ukraine », semblant ignorer que ce pays, même allié du bloc occidental et de la France en particulier, est resté dans sa logique d’adoption d’une stratégie de non-alignement depuis la guerre froide. Même s’il est arrivé que des répercussions économiques soient ressenties localement, il s’agit avant tout d’un conflit lointain qui se déroule hors du continent.
Une humilité face aux nouveaux équilibres géopolitiques
Les élites françaises doivent reconnaître que la puissance de la France au Sénégal a décliné. Partant de là, elle doit accepter des « nouvelles » alliances et ne pas considérer de telles décisions comme une trahison, mais un choix souverain dans un monde multipolaire. Adopter une posture humble face à cette réalité n’est pas un aveu de faiblesse, mais une preuve de maturité. Cela implique de ne plus percevoir les partenaires du Sénégal (la Chine, la Russie, la Turquie principalement), uniquement comme des concurrents alors que les « souverainistes » ou « panafricains » selon la terminologie donnent l’impression de plaider pour un «France dégage » en lieu et place d’autres puissances. La France pourrait explorer des synergies dans des projets tripartites, où chaque partenaire contribue avec ses forces spécifiques.
Reconnaître les manquements du passé
Toute relation n’est durable que si elle repose sur la confiance. Et pour regagner la confiance, la France doit reconnaître pleinement ses erreurs historiques. Les stigmates de la colonisation, les pratiques opaques de la Françafrique et les interventions militaires controversées continuent de peser lourdement sur sa perception, dans la grande majorité de la jeunesse. La restitution des œuvres d’art pillées, entamée mais encore incomplète, doit être accélérée et accompagnée d’une coopération renforcée avec les institutions culturelles. De même, la déclassification des archives liées à certaines périodes sensibles de l’histoire franco-sénégalaise serait un signal d’ouverture et de transparence. Mais cette reconnaissance doit aller au-delà des symboles pour se traduire dans des politiques concrètes. La mise en place de programmes éducatifs conjoints pourrait permettre de construire une vision partagée et équilibrée de l’histoire.
Le nouveau partenariat gagnant-gagnant : l’après fermeture de la base française
Avec la fermeture définitive de la base militaire française de Dakar, le Sénégal amorce une redéfinition stratégique de ses partenariats internationaux. Ce tournant marque une volonté claire d’affirmer sa souveraineté tout en s’inscrivant dans des collaborations équitables et mutuellement bénéfiques. Mais qu’apporte réellement le Sénégal dans ce nouveau modèle de partenariat ?
Une position géostratégique incontournable
Situé à l’extrémité occidentale de l’Afrique, le Sénégal bénéficie d’une position géographique privilégiée, offrant un accès direct à l’Atlantique et constituant une porte d’entrée vers l’Afrique de l’Ouest. Sa stabilité politique, dans une région parfois troublée, renforce son attractivité. Cette situation géographique confère au pays un rôle clé dans la sécurité maritime et le contrôle des routes commerciales.
Un modèle de stabilité démocratique
Depuis son indépendance en 1960, le Sénégal est perçu comme un modèle de démocratie en Afrique. Les trois alternances politiques et le respect des institutions, font du pays un partenaire fiable dans un monde où la stabilité politique est une denrée rare. Cette réputation renforce la capacité du Sénégal à jouer un rôle de médiateur dans les crises régionales et à promouvoir une gouvernance respectueuse des droits humains.
Des ressources naturelles en plein essor
La découverte récente de gisements de pétrole et de gaz place le Sénégal au cœur des enjeux énergétiques mondiaux. Ces ressources, encore sous-exploitées, constituent un atout majeur dans les nouveaux partenariats économiques, à condition qu’elles soient gérées de manière transparente et durable. Par ailleurs, le pays possède d’importantes réserves minières (phosphates, zircon) et une zone économique exclusive riche en ressources halieutiques, qui attirent des investisseurs désireux de tirer parti de cette manne
Un hub économique et régional en construction
Avec Dakar comme hub économique et logistique, le Sénégal se positionne comme un centre névralgique pour le commerce et les affaires en Afrique de l’Ouest. Des projets ambitieux, tels que la Zone économique spéciale de Diamniadio et l’expansion du port de Dakar, bien que très fortement concurrencée par Abidjan et Cotonou, renforcent cette vision. Le pays attire encore des entreprises étrangères cherchant à établir des bases dans une région dynamique, tout en bénéficiant d’infrastructures et d’un environnement d’affaires que l’on cherche à améliorer d’une manière constante.
Une jeunesse dynamique et engagée
Avec une population majoritairement jeune, le Sénégal offre un potentiel humain considérable. Cette jeunesse constitue une force de travail compétitive et un vivier d’innovation, particulièrement dans les secteurs technologiques, culturels et entrepreneuriaux. Les partenaires internationaux trouvent dans cette vitalité démographique un levier pour développer des initiatives durables et inclusives.
Vers un partenariat plus équilibré
La fermeture de la base française reflète une tendance plus large au Sénégal : celle d’un rejet des relations néocoloniales au profit d’un partenariat basé sur le respect mutuel. Cependant, la vraie influence désormais appartient aux entreprises privées qui créent la richesse et dont certaines sont plus puissantes que l’Etat sénégalais lui-même. En guise de comparaison, au Sénégal opèrent des entreprises françaises qui pèsent, dit-on, pour 25% des recettes fiscales et près de 10% des emplois formels. Elles sont en concurrence désormais avec des sociétés chinoises, turques, indiennes, marocaines...
La vraie exigence pour les politiques publiques sénégalaises est de promouvoir un secteur privé suffisamment fort qui pourra concurrencer le privé étranger au nom d’une compétition ouverte qui est la principale valeur d’une économie libérale. Bander les muscles est une chose, avoir les moyens de son ambition souverainiste en est une autre. Dans ce rendez-vous de la mondialisation où chaque nation vient avec son avantage comparatif, qu’offre le Sénégal ? Des entreprises assez puissantes pour remporter des parts de marché ailleurs dans le monde ? Un marché de consommateurs suffisamment riche pour attirer des industries et des marques de luxe ? Des ressources naturelles foisonnantes ?
Le risque est de vendre le souverainisme jusqu’à opérer de mauvais choix économiques comme celui du rétablissement du visa d’entrée au nom de la réciprocité. Le Sénégal est un pays touristique. Le secteur constitue la deuxième source de devises de notre économie. Rendre difficile les conditions d’entrée dans le pays, courir le risque de failles techniques comme ce fut le cas en 2013 et en 2015 (avec les bugs des machines, les voyageurs à destination payaient mais les pannes faisaient qu’ils n’obtenaient ni le visa, ni le remboursement de leurs frais. Le système électronique de visa ne marchant qu’une fois sur quatre), peut avoir un impact négatif sur le tourisme. Le discours souverainiste risque d’être vain s’il ne fait pas de l’économie, son moteur. Or, jusque-là, on reste sur des discours dénonçant l’influence politique française et qui relèvent d’une conception ancienne des relations internationales. L’urgence pour ces cinq prochaines années est de constituer un capital économique national pour avoir quelque chose à apporter dans la dynamique de co-construction que nous devons avoir avec le monde. Sinon le Sénégal continuera d’être un appendice, alors que le monde adopte une révolution extraordinaire avec la robotisation, l’Intelligence Artificielle et les énergies vertes.
Va-t-on déshabiller Paul pour habiller Sergueï, comme on le constate dans certains « pays souverainistes », avec la forte présence militaire de la Russie, à travers la milice privée Wagner ?
Le discours du président Bassirou Diomaye Faye, prononcé le 31 décembre 2024, marque un moment charnière dans l’histoire contemporaine du Sénégal. L’adresse, empreinte de solennité, s’est voulue être un pont entre des aspirations populaires et des actions concrètes, dessinant une vision claire pour un Sénégal uni, souverain et prospère. Le chef de l’Etat a annoncé la fin de la présence militaire française dès 2025, soulignant une volonté de renforcer la souveraineté nationale. Cette décision s’inscrit dans une refonte stratégique de la défense, tout en affirmant une diplomatie active, ouverte et engagée pour les causes justes à l’échelle mondiale.
La présence et l’outil militaire français au Sénégal
A son accession à l’indépendance en 1960, le Sénégal a maintenu avec la France, une relation particulière, notamment par le biais de la présence militaire française sur son sol. Cette collaboration s’inscrivait dans le cadre des accords de défense signés lors de l’indépendance, qui visaient à répondre à des objectifs stratégiques et politiques. Ils étaient censés assurer la stabilité politique et la sécurité dans une région ouest-africaine fragile. La France, soucieuse de conserver une influence dans ses anciennes colonies, considérait le Sénégal comme un point stratégique pour ses opérations en Afrique. Dakar, en particulier, avec son port en eau profonde et sa position géographique, était idéale pour établir une base militaire capable de projeter des forces dans la région. Cette présence était initialement perçue comme un gage de sécurité contre d’éventuelles menaces extérieures et un soutien logistique dans ses propres capacités militaires. Seulement, au fil des années, les fondements et l’évolution de cette présence ont été différemment perçus par les différents présidents sénégalais successifs avant Bassirou Diomaye Faye, selon leurs priorités et leurs sensibilités.
Les positions des présidents sénégalais
Léopold Sédar Senghor (1960- 1980), premier président du Sénégal, a vu dans la présence militaire française un levier de modernisation et une garantie de stabilité. Convaincu de l’importance d’une collaboration étroite avec la France, il considérait que l’autonomie politique du Sénégal ne devait pas s’accompagner d’une rupture brutale avec l’ancien colonisateur. Ainsi, la base militaire française de Dakar a été maintenue comme un symbole de cette relation privilégiée. Avec Abdou Diouf (1981- 2000), la perception évolue.
Dans un contexte de décolonisation avancée et de montée des revendications nationalistes en Afrique, Diouf adopte une approche plus pragmatique. Il conserve les accords de défense, mais travaille à renforcer les capacités militaires nationales pour réduire la dépendance vis-à-vis de la France. Sa politique a visé à équilibrer la coopération avec d’autres partenaires internationaux, tout en maintenant une relation cordiale avec Paris. C’est Abdoulaye Wade (2000- 2012) qui marque véritablement une rupture symbolique. Critique à l’égard de l’influence française en Afrique, Wade demande la fermeture de la base militaire française à Dakar en 2010. Cette décision s’inscrivait dans sa volonté de renforcer la souveraineté nationale et de repositionner le Sénégal sur la scène internationale.
Toutefois, cette fermeture n’a pas équivalu à la fin de la coopération militaire : des missions conjointes et des formations avaient continuées d’être menées. Sous Macky Sall (2012- 2024), la relation militaire avec la France a été plus coopérative que conflictuelle. Dans un contexte marqué par la montée des menaces terroristes au Sahel, Macky Sall s’est appuyé sur la France pour renforcer la sécurité régionale, tout en poursuivant le développement des forces armées sénégalaises. La coopération s’est diversifiée, s’étendant aux opérations internationales et au soutien logistique. Sous sa présidence, la présence militaire et la coopération sécuritaire avec la France ont été cruciales pour protéger le Sénégal contre les menaces croissantes venant de la région du Sahel, marquée par une instabilité croissante due à la montée en puissance des groupes tels qu’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), l’État islamique dans le Grand Sahara (EIGS) et Boko Haram. Malgré la fermeture en 2010, par Abdoulaye Wade de la base militaire française, le Sénégal est resté un élément-clé pour les opérations dans le Sahel, notamment lors de l’initiative Barkhane. Les forces françaises ont utilisé Dakar comme point de transit stratégique pour leurs missions régionales. L’une des pierres angulaires de cette coopération a été le partage d’informations stratégiques. Le Sénégal, pays relativement stable dans une région de plus en plus fragile, est devenu un acteur clé dans la collecte et le traitement des renseignements sur les activités terroristes dans le Sahel. Cette collaboration a permis d’anticiper et de prévenir d’éventuelles infiltrations de groupes armés au Sénégal.
Une stratégie française en mutation
Si les chefs de l’Etat ont eu des visions et des positions différentes quant à la présence militaire française sur le sol sénégalais, la réduction progressive des forces françaises au Sénégal et plus largement en Afrique a commencé à être envisagée dans l’hexagone, dès les années 1990. Avec la chute du Mur de Berlin en novembre 1989 entraînant avec elle celle du Bloc de l’Est, l’Afrique, à ses yeux avait perdu une partie de son importance sur le terrain de la rivalité Est-Ouest. A cela, se sont ajoutées des pressions internes de plus en plus fortes pour réduire ses dépenses militaires et les revendications croissantes d’autonome de pays africains.
En 2010, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, la France procède à une réorganisation de ses bases militaires. Si au Sénégal cette décision a été motivée par la volonté politique de Abdoulaye Wade, ailleurs, elle s’inscrivait dans une stratégie plus large visant à concentrer les ressources militaires françaises sur d’autres bases comme celles de Djibouti, de Libreville au Gabon et de Ndjaména au Tchad. En Afrique de l’Ouest, bien qu’ayant réduit ses bases permanentes, des opérations à l’image de Serval, en 2013, ont montré que Paris est restée engagée dans la région. Mais les observateurs ont souligné un changement de doctrine : la France a privilégié ces interventions ciblées et temporaires en partenariat avec les armées locales. A partir de 2021, face à une montée des sentiments anti-français (lire article « Frapp France Dégage ») et aux aspirations des populations à davantage de souveraineté, marquant un changement de ton par rapport à la politique traditionnelle de la « Françafrique », la France a annoncé une réduction significative de son dispositif militaire dans le Sahel, pour ne plus être perçue comme elle l’a été pendant longtemps, comme le « gendarme » de l’Afrique. En 2022, Emmanuel Macron va dérouler une nouvelle stratégie pour la présence française en Afrique, axée sur la coopération plutôt que sur le maintien des troupes permanentes.
Fin du monopole français, émergence d’un multilatéralisme africain
Créé en 2014, le G5 Sahel est une organisation regroupant cinq pays sahéliens : le Mali, le Niger, le Burkina Faso, la Mauritanie et le Tchad. Son objectif principal était de coordonner les efforts pour répondre aux défis sécuritaires et de développement dans cette région durement frappée par le terrorisme, l’insécurité transfrontalière et les crises humanitaires. Toutefois, le Sénégal, bien qu’à proximité géographique du Sahel, n’en est pas membre. Cette absence repose sur plusieurs considérations.
Une question géographique et sécuritaire
Le G5 Sahel rassemble des pays directement situés dans la bande sahélienne et confrontés à des menaces terroristes élevées. Ces nations partagent des frontières poreuses où opèrent des groupes armés comme AlQaïda au Maghreb islamique (AQMI) et l’État islamique dans le Grand Sahara (EIGS). En comparaison, le Sénégal, situé sur la côte atlantique, est géographiquement éloigné des épicentres de ces conflits. Bien que vigilant face à la montée du terrorisme, le pays n’a pas été confronté à des attaques significatives sur son sol, contrairement à ses voisins sahéliens. Par conséquent, son inclusion dans le G5 Sahel n’était pas une priorité immédiate.
Un choix stratégique différent
Plutôt que de rejoindre le G5 Sahel, le Sénégal a concentré ses efforts sur d’autres cadres de coopération régionale, notamment la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), et la Minusma (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali). Membre actif de la CEDEAO, le Sénégal participe aux initiatives de maintien de la paix et de stabilisation dans la région ouest-africaine. Cette stratégie lui permet d’éviter une association trop étroite avec les crises sahéliennes tout en jouant un rôle significatif sur le plan régional. Le 18 mars 2022, au cours d’une cérémonie sobre mais solennelle, le Général de division Usman Abdoumumuni Yusuf a passé le flambeau au Général de brigade sénégalais Moctar Diop. Avant le 8 décembre 2023, date de la conclusion du départ de la Minusma du Mali, c’est un Général-Major sénégalais, Mamadou Gaye, qui avait remplacé le Hollandais Johannes Kees Matthijssen.
Une volonté de préserver sa stabilité
Le Sénégal cultive une image de stabilité politique et de modèle démocratique en Afrique de l’Ouest. Participer directement au G5 Sahel, une organisation fortement associée à des zones de crise aiguë, aurait pu brouiller cette image. De plus, le régime de Macky Sall, à la création du G5 en 2014, a préféré concentrer ses efforts sur des approches préventives pour lutter contre la radicalisation. Si la fermeture définitive annoncée de la base française au Sénégal par le président de la République dans son discours du 31 décembre clôt un cycle de près de six décennies de présence militaire hexagonale sur le sol sénégalais, un profane peut dire que cela ne change rien qui ne relève pas du symbole. La guerre désormais n’a pratiquement plus besoin de présence au sol. Les drones peuvent jeter des projectiles sur un territoire alors qu’ils sont contrôlés à des milliers de kilomètres. L’attaque iranienne sur Israël, les frappes ukrainiennes dans la région de Koursk ont montré au monde, des drones qui traversent des pays afin de toucher leur cible. La guerre est technologique, de même que le renseignement. Ce que le Président ne dit pas en revanche, c’est quelle politique de défense le Sénégal met-il en œuvre à la suite de cette décision de faire partir les troupes françaises. On objectera que cela relève du « secret-défense ». Des questions demeurent. Qui produira les armes et les équipements militaires des soldats sénégalais ? Ou seront sont formés les officiers sénégalais si ce n’est pour beaucoup et jusqu’ présent à Saint-Cyr ou Melun ? Nos officiers les plus brillants s’enorgueillissent d’avoir fait leurs armes à l’École de Guerre en France ou à Westpoint et Paris nous appuie encore, en termes de renseignement, de surveillance des frontières dans la guerre contre le terrorisme dans la bande sahélienne. Va-t-on déshabiller Paul pour habiller Sergueï, comme on le constate dans certains « pays souverainistes », avec la forte présence militaire de la Russie, à travers la milice privée Wagner ? Ce serait le comble du comble, puisqu’une souveraineté revendiquée et assumée, ne saurait être sous tutelle.
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IBRAHIMA NOUR EDDINE DIAGNE LISTE LES PRINCIPAUX DÉFIS
La mise en œuvre de la politique de « transformation systématique » du Sénégal promise par le nouveau régime ne sera pas sans difficultés. L’alerte est de l’Administrateur général de Gainde 2000, Ibrahima Nour Eddine Diagne
Selon Ibrahima Nour Eddine Diagne, la mise en œuvre de la politique de « transformation systématique » du Sénégal promise par le nouveau régime ne sera pas sans difficultés. Invité de l’émission Objection de la radio Sud FM (privée) hier, dimanche 5 janvier, l’Administrateur général de GAINDE 2000 a indiqué que cette nouvelle vision de développement risque de faire face à plusieurs défis qui attendent les nouvelles autorités et dont les deux principaux sont le temps et le consensus.
La mise en œuvre de la politique de « transformation systématique » du Sénégal promise par le nouveau régime ne sera pas sans difficultés. L’alerte est de l’Administrateur général de GAINDE 2000, Ibrahima Nour Eddine Diagne. Invité de l’émission Objection de la radio Sud FM (privée) hier, dimanche 5 janvier, Ibrahima Nour Eddine Diagne prévient que cette nouvelle vision de développement risque de faire face à plusieurs défis dont les deux principaux sont le temps et le consensus. En effet, selon l’invité de notre confrère Baye Oumar Gueye, la transformation du Sénégal est un exercice très difficile qui demande de disposer du « système et de la machine ». Sous ce rapport, Ibrahima Nour Eddine Diagne préconise un « consensus fort autour de notre modèle démocratique » comme c’est le cas dans certaines grandes démocraties comme les États-Unis pour, dit-il, éviter la reprise à zéro du processus de développement au lendemain de chaque alternance politique.
« Le temps politique ne correspond pas au temps de transformation d'une nation ou au temps de reconstruction d'une nation. Nous devons essayer d'avoir des consensus très forts pour revoir notre modèle démocratique parce que, si tous les cinq ans, on doit reconfigurer notre machine à développement, on n'y parviendra jamais », a-t-il fait remarquer avant d’insister. « Nous avons tous la volonté de développer ce pays et nous savons tous que nous ne pouvons pas le développer en cinq ans. D'ailleurs, le plan en cours est sur une vision cinquante. Mais, il nous faudrait même, au-delà de cette vision sur cinquante ans, pourquoi pas une vision sur cent ans ou sur deux cents ans parce que c'est sur ça qu'on construit lorsqu'on a couché des stratégies ». Ainsi pour lui, « le véritable défi, aujourd'hui, est dans cette recherche de consensus » pour dit-il, « aller vers un pacte, qu’il n'y ait pas de divergence sur ce qu'on veut construire, là où on veut aller et comment on doit y aller ».
Par ailleurs, interpellé sur le discours de fin d’année à la nation du Président Diomaye Faye, l’Administrateur général de GAINDE 2000, entreprise spécialisée dans les solutions de dématérialisation, a jugé cette première adresse de fin d’année du chef de l’Etat « responsable ». En effet, selon lui, « un acteur politique doit avoir un discours de nature à rassurer mais aussi à mettre une part de la responsabilité, de l'idéal, sur toutes les composantes de la nation. Il ne faut pas penser que ce ne sont que les élites politiques qui doivent avoir les qualités requises, les populations sont également concernées car le combat est un tout global ».
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LE CNRA ACCUEILLE AOUA BOCAR LY TALL DANS LA CONTROVERSE
L'universitaire dévoile les dessous d'une controverse qui dépasse sa simple personne. Dans une mise au point sans concession, elle expose les rivalités et les frustrations qui agitent la diaspora militante de Pastef
Dans une sortie médiatique attendue, Aoua Bocar Ly Tall a brisé le silence sur sa récente nomination au Conseil National de Régulation de l'Audiovisuel (CNRA). Face aux critiques ayant suivi l'annonce de sa désignation, la nouvelle membre de l'institution maintient une posture sereine, mettant en avant le soutien massif reçu de la part de nombreux compatriotes.
"J'ai reçu une pluie de félicitations et des marques de confiance où les gens me disent 'Dre Aoua Bocar Ly, vous méritez cette nomination, voire plus mérite'", déclare-t-elle. Elle évoque notamment les messages d'encouragement offrant sa capacité à contribuer à la revalorisation de l'institution.
La controverse autour de sa nomination trouve selon elle, son origine dans les critiques d'un militant actif de Pastef, propriétaire d'Afrolec. D'après Ly Tall, ces critiques seraient motivées par la frustration de ce dernier de n'avoir pas été nommé à un poste, alors que d'autres militants du parti au Canada ont été promus.
Universitaire et analyste, Aoua Bocar Ly Tall rappelle son engagement passé pour le pays, notamment sa défense du président face aux critiques internationales. Elle souligne avoir publié un article, repris par onze journaux, en réponse aux commentaires d'une franco-tunisienne sur la polygamie du chef de l'État.
"J'ai tous les atouts, les connaissances et les compétences qu'il faut, ainsi que la personnalité et les valeurs nécessaires pour ce poste", affirme-t-elle. Se disant en phase avec l'orientation panafricaniste et souverainiste du gouvernement actuel, elle exprime sa gratitude envers le président de la République et le Premier ministre, tout en réaffirmant sa détermination à servir le Sénégal dans ses nouvelles fonctions.
L'ORIGINE DU COVID, UNE ENQUÊTE SANS FIN
Cinq ans après son apparition, l'origine du SARS-CoV-2 défie toujours les scientifiques. La transmission animale et la fuite de laboratoire restent les deux pistes principales d'un débat passionné
(SenePlus) - D'après un article publié dans Le Monde, cinq ans après l'apparition des premiers cas de Covid-19 à Wuhan, l'origine exacte du SARS-CoV-2 demeure une énigme scientifique majeure. Deux hypothèses principales persistent : une transmission par le biais d'animaux sauvages ou une fuite accidentelle d'un laboratoire.
Comme le rapporte le quotidien, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a encore récemment, le 30 décembre 2024, renouvelé sa demande de transparence auprès des autorités chinoises. Son directeur général, Tedros Adhanom Ghebreyesus, maintient que les deux hypothèses principales "restent sur la table".
Les seules certitudes scientifiques concernent l'origine chauve-souris du virus. Selon Le Monde, deux virus proches ont été identifiés : "RaTG13, identifié en 2013 dans la grotte minière de Mojiang" et "Banal-52, prélevé au Laos en 2020", ce dernier présentant une similarité génétique de 96,85% avec le SARS-CoV-2.
Une avancée significative dans l'hypothèse du marché a été réalisée par la chercheuse française Florence Débarre, qui a découvert en 2023 des données génomiques confirmant la présence d'animaux potentiellement vecteurs sur le marché de Huanan. Toutefois, comme le souligne le journal français, ces données "ne permettent pas d'affirmer qu'ils étaient contaminés spécifiquement par le SARS-CoV-2".
Concernant l'hypothèse de la fuite de laboratoire, le journal rapporte l'existence du projet Defuse, révélé par le groupe Drastic en 2021. Ce projet, non financé, prévoyait des expériences de "gain de fonction" à l'Institut de virologie de Wuhan (WIV). Jeremy Farrar, actuel directeur scientifique de l'OMS, qualifiait en privé la situation de "Wild West".
Le Monde cite également une étude récente du chercheur allemand Andreas Martin Lisewski, publiée le 17 décembre, révélant que "la seule séquence connue analogue au site de furine du SARS-CoV-2 provient d'un virus MERS artificiel".
Jean-Claude Manuguerra, virologue à l'Institut Pasteur et membre du groupe SAGO de l'OMS, résume la situation : "Les données métagénomiques du marché font pencher la balance, mais elles ne sont pas de nature à confirmer l'origine zoonotique. Quant à la fuite de laboratoire, nous ne disposons d'aucune donnée qui nous permette d'évaluer cette hypothèse."
L'article souligne que les services de renseignement américains restent divisés sur la question, le FBI et le ministère de l'énergie penchant pour la thèse de l'accident de laboratoire, tandis que d'autres agences privilégient l'hypothèse zoonotique.
AU SÉNÉGAL, ÊTRE FEMME EST UN COMBAT
Voile, vêtements amples, précautions infinies : rien n'y fait. Comme des milliers de Sénégalaises, Lissa Diop subit le harcèlement au quotidien. Et quand les victimes osent parler, c'est souvent pour s'entendre dire qu'elles l'ont bien cherché
(SenePlus) - "Notre habillement, nos précautions, notre voile, cela ne suffit pas." Cette phrase, comme un cri du cœur, résume le désarroi des femmes sénégalaises face au harcèlement sexuel. Une enquête menée par La Maison Des Reporters révèle l'ampleur d'un phénomène systémique qui gangrène la société, des rues de Dakar aux transports en commun.
Le quotidien de la peur
Le 7 février 2022, alors que le Sénégal célébrait sa première victoire en Coupe d'Afrique, Lissa Diop vivait l'enfer. Cette responsable de communication se souvient avec précision de son agression : "Au début, je pensais que c'était juste un vol. Mais ils ont commencé à déchirer mes vêtements, certains à toucher mon corps." Pratiquante de boxe, elle a tenté de se défendre : "Je vais beaucoup taper, beaucoup mordre [...] mais cela devient violent, il y a des coups qui viennent de partout."
Dans les transports en commun, principaux moyens de déplacement au Sénégal, la situation est particulièrement alarmante. Qu'il s'agisse des bus "Tata", des cars rapides ou des "clandos", les témoignages se multiplient. Fanta Ndiaye, étudiante en médecine de 21 ans, raconte une expérience traumatisante : "J'étais étonnée et dégoûtée ; je suis restée une vingtaine de minutes à regarder ces gouttelettes de sperme sur mes chaussures en me demandant comment nettoyer ce ramassis de saleté."
La double peine des victimes
Le récit de Mame Sega Lo, étudiante en master d'anglais, illustre un autre aspect du problème : la culpabilisation des victimes. Après avoir été agressée dans un bus avec ses sœurs, elle raconte : "Une dame dans le bus a continué à nous insulter et à nous traiter de menteuses, faisant même des remarques sur nos habits, affirmant que si nous avions été agressées, c'était de notre faute."
Cette culpabilisation est profondément ancrée, comme en témoigne Dieynaba Tall, 22 ans, agressée dans un taxi : "J'avais l'impression que c'était ma faute, que j'avais fait quelque chose pour mériter ça." Pour échapper à son agresseur qui la harcelait, elle a dû sauter du véhicule en marche.
Un cadre juridique insuffisant
Le Code pénal sénégalais, dans son article 319 bis, prévoit des peines allant de six mois à trois ans d'emprisonnement pour harcèlement sexuel. Mais comme le souligne Me Ndeye Coumba Kane interrogée par La Maison Des Reporters, cette définition reste limitée : "Le Code pénal se concentre sur le harcèlement commis par une personne ayant autorité sur la victime dans un cadre professionnel."
Les chiffres sont éloquents : selon une étude de l'Ansd de novembre 2024, 17% des femmes âgées de 15 ans ou plus ont subi des violences sexuelles hors du cadre conjugal. Pourtant, à l'Association des Femmes Juristes du Sénégal (AFJS), les cas de harcèlement déclarés ne représentent que 1% des 1 132 dossiers traités entre 2021 et début 2024.
Une société à transformer
Madjiguène Sarr, juriste à l'AFJS, pointe du doigt les racines profondes du problème : "Les violences faites aux femmes traduisent des rapports inégaux entre hommes et femmes, qui tiennent leur origine du système social basé sur le patriarcat. Ce système crée et perpétue des préjugés et stéréotypes sociaux néfastes envers les femmes."
Les solutions existent pourtant. La juriste recommande plusieurs réflexes essentiels : "Chercher des témoins, prendre des photos ou vidéos, se faire établir un certificat médical, porter plainte." Mais au-delà des procédures, c'est un changement de mentalité qui s'impose : "La société doit avoir à l'esprit qu'une victime de violences a besoin d'être crue, écoutée avec bienveillance, d'être protégée et mise hors de danger."
En attendant ce changement sociétal, les femmes continuent de subir ce fléau quotidien. Comme le résume une victime : "Notre habillement, nos précautions, notre voile, cela ne suffit pas." Une phrase qui résonne comme un appel à l'action collective pour mettre fin à ce cauchemar silencieux.
Peut-on rester pur en politique ? C'est la question que pose Fary Ndao dans son premier roman "Le Dernier des arts". Il révèle une plume affûtée, nourrie par douze années de pratique du slam et une passion dévorante pour la chose politique
(SenePlus) - Dans un entretien accordé à RFI, Fary Ndao dévoile les ressorts de son premier roman "Le Dernier des arts", une plongée dans les méandres du pouvoir en Afrique de l'Ouest. L'ouvrage suit la trajectoire d'un candidat à la présidentielle confronté à un dilemme moral majeur lors du second tour face à une présidente sortante.
"Est-ce que ce qu'on fait en politique en vaut le coup, mais aussi le coût ?", s'interroge l'auteur, qui place son protagoniste idéaliste face à un choix cornélien. Le candidat découvre qu'un acte moralement répréhensible commis dans son entourage pourrait lui assurer la victoire. Le titre même du roman révèle l'ambivalence de la politique, que l'auteur qualifie comme "à la fois le dernier en terme moral" et "l'art ultime", s'inspirant d'une citation de Voltaire qu'il détourne habilement.
Le roman est porté par des personnages mémorables, dont Demba Diassé, figure inspirée du militant communiste sénégalais Joe Diop. "Il représente pour moi une forme de radicalité et une forme de joie assumée dans le combat", confie l'auteur. Le personnage de Zeynab, épouse du protagoniste, incarne quant à elle une femme puissante qui dépasse le simple statut "d'épouse de". "J'ai fait attention à ne pas trop lier les aspirations de mes personnages féminins à leurs conjoints", précise Ndao.
Ingénieur géologue de formation, Fary Ndao révèle un parcours singulier vers la littérature. "J'ai eu une carrière d'artiste-slammeur pendant 11 années, 12 même", explique-t-il, soulignant l'influence de cette pratique sur son écriture. C'est au contact d'autres écrivains qu'il s'est finalement tourné vers la fiction, porté par une "obsession" pour la politique.
Le roman se conclut sur une fin délibérément ouverte, laissant aux lecteurs "la liberté de poursuivre la réflexion autour des choix moraux qui ont été faits par les protagonistes", selon l'auteur. Une œuvre qui marque l'émergence d'une nouvelle voix prometteuse dans la littérature africaine contemporaine.
"Le Dernier des arts", par Fary Ndao, est publié aux Editions Présence Africaine (350 pages, 17 euros).
TAXAWU DANS UNE SALL D'ATTENTE
Khalifa Sall que beaucoup voyaient en retraite politique après son score décevant à la présidentielle, multiplie les signes annonciateurs d'un comeback. Sa formation, fragilisée par la déchéance de Barthélémy Dias, cherche un nouveau souffle
Le chef de file de Taxawu Senegaal, Khalifa Sall, va-t-il revenir dans l’arène politique ? Ses deux dernières sorties médiatiques semblent répondre déjà à la question. Comment compte-t-il le faire ? Voilà la question qui mérite une attention particulière.
Son score à la dernière présidentielle a été interprété comme une invite à la retraite politique. Une situation que Khalifa Sall semblait accepter au regard du rôle qu’il avait joué aux dernières élections législatives. Son absence sur la liste de la coalition électorale «Samm sa kaddu» était, aux yeux de l’opinion, une approbation du changement générationnel prôné par certains acteurs politiques. Même si en politique l’opportunité fait la circonstance, Khalifa Sall semblait prendre sa retraite. Mais c’était sans compter avec l’affaire Barth’. En effet, un score honorable aux dernières élections législatives du maire révoqué de Dakar aurait signé la fin de la carrière politique de Khalifa Sall. Car, il ne pourrait prendre le risque de compromettre l’ascension de son poulain en s’introduisant dans l’arène politique. Seulement, il n’en est rien. Barth’ étant déchu de ses mandats, il a besoin de bras pour mener sa guerre politique contre le parti Pastef. En plus, Taxawu Senegaal ne peut se permettre de perdre la mairie de la Ville de Dakar et Khalifa Sall, en même temps. L’ancien maire de Dakar dont l’expérience est enviable le sait mieux que quiconque.
Khalifa Sall va-t-il revenir dans l’arène ? La question ne se pose plus, au regard de ses deux dernières sorties médiatiques. C’est plutôt comment compte-t-il revenir qu’il faut se demander. En effet, après la Présidentielle de 2024, les électeurs sénégalais ont envoyé un message clair à la classe politique. Khalifa Sall, qui souffrait d’un déficit d’image, l’a appris à ses dépens. Le remplacement qu’il a voulu opérer avec Barth’ a été sanctionné négativement par les électeurs. Ainsi, avant d’envisager un quelconque avenir politique, l’ancien maire de Dakar devrait gagner le défi du positionnement. Comment exister dans l’arène politique en appartenant à l’ancienne classe politique ? C’est la réponse que Khalifa Sall devra trouver. Par le passé, l’ancien maire de Dakar a su convaincre par sa capacité à renaître. Pour cette fois, il aura bien plus besoin de la «case prison» pour se relancer. En effet, il devra se départir de l’image de «traitre» que le parti Pastef lui a collée. En plus, il devra convaincre les électeurs, qui ont choisi l’alternance, de retourner dans le passé. Cette théorie n’est valable que si Khalifa Sall souhaite personnellement se relancer. Il peut aussi poursuivre le changement en choisissant parmi ses lieutenants une personne capable d’assumer ce leadership. Et à Taxawu Senegaal, ce profil-là ne manque pas. Mais ça ne sera visiblement pas Abba Mbaye. Qui a pris ses distances en critiquant ouvertement Khalifa Sall, accusant ce dernier d’avoir laissé Barth’ «saboter les listes».
A propos des profils, qui peuvent assumer ce rôle, le maire de Yoff a une belle carte à jouer. Proche de ses administrés, il fait son chemin et semble même fédérer au-delà de Taxawu Senegaal. En effet, en prenant l’option de vulgariser son travail sur les réseaux sociaux, Seydina Issa Laye Samb accroît sa cote de popularité au-delà de sa famille politique. Il suffit de faire un tour sur ses pages officielles pour s’en rendre compte. A la limite, il lui est reproché de continuer à militer à Taxawu Senegaal, tellement qu’il est apprécié.
Seulement, le Sénégal ne s’arrête pas qu’à Dakar et Seydina Issa Laye Samb n’a pas encore une carrure nationale comme Barth’ ou Abba Mbaye. Ce qu’il devra bâtir, s’il souhaite devenir le nouveau visage de Taxawu Senegaal.
LA FAUSSE NOTE DE L'IGE
Alors que le président Diomaye Faye vient d'annoncer quatre lois majeures pour révolutionner la gouvernance publique, une réalité dérangeante persiste : depuis 2020, les rapports de l'IGE restent dans les tiroirs
Le président de la République, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, a annoncé, le 31 décembre dernier, dans son discours de fin d’année à la nation, une série de quatre (04) lois sur la transparence et la bonne gouvernance, au-delà de la modification de la loi portant statut général de la fonction publique. Mais ces réformes annoncées qui s’inscrivent dans le cadre de la mise en œuvre de la rupture systémique font cependant face au défi de la non-publication des derniers rapports de l’Inspection générale d’Etat sur l’état de la gouvernance et de la reddition des comptes.
Les nouvelles autorités sont déterminées à ériger les pratiques de la bonne gouvernance au cœur dans la gestion de l’Etat. Lors de son premier discours de fin d’année à la nation prononcé le 31 décembre dernier, le président de la République, Bassirou Diomaye Diakhar Faye, a annoncé une série de lois sur la transparence et la bonne gouvernance, au-delà de la modification de la loi portant statut général de la fonction publique qu’il entend soumettre dans les prochains jours à la représentation nationale. L’annonce de ces réformes qui visent à « ouvrir les portes du changement systémique ainsi que les fenêtres de la transformation nationale, dans la droiture, la probité et l’exemplarité « Jub, jubal, jubbanti ! » intervient dans un contexte marqué par la publication des rapports de la plupart des corps de contrôle public.
En effet, à peine installé dans ses fonctions, le Président Bassirou Diomaye Faye avait instruit la publication de tous les rapports de l’Office national de lutte contre la fraude et la corruption (Ofnac) et ceux de la Cour des comptes qui étaient rangés dans les tiroirs de ces institutions. Chose qui a été faite depuis par les responsables de ces corps de contrôle. Aujourd’hui, la seule fausse note de cette démarche du nouveau régime vient de la présidence de la République du fait de la non-publication des derniers rapports de l’Inspection générale d’Etat sur l’état de la gouvernance et de la reddition des comptes.
Placée sous l’autorité directe du président de la République, l’Ige a pour mission d’inspecter tous les services administratifs et toutes les circonscriptions et d’élaborer des rapports avec des recommandations qui ont valeur de directives présidentielles. Cependant, le dernier rapport sur l’état de la gouvernance et de la reddition des comptes rendu public par ce corps de contrôle est celui couvrant la période 20218-2019. Autrement dit, depuis 2020, aucun rapport d’activités de l’Inspection générale d’Etat n’a été déclassé par le président de la République. Depuis neuf mois les citoyens attendent leur publication.
par Jaly Badiane
LETTRE OUVERTE À BASSIROU DIOMAYE FAYE
Le viol suivi de grossesse d’Awa âgée juste de 9 ans et tout récemment l'agression suivie de meurtre de Diary (12 ans) témoignent d'une réalité tragique : notre pays est à genoux face à ces fléaux
C'est avec une profonde inquiétude et un sentiment d'urgence que nous, citoyens de ce pays, nous adressons à vous aujourd'hui. Les viols et les actes de pédophilie, qui gangrènent notre société, atteignent des proportions alarmantes. Ces crimes, qui brisent des vies et menacent l'avenir de nos enfants, nécessitent des actions immédiates et déterminantes de la part des autorités, au plus haut sommet de l'État.
Chaque jour, des femmes, des jeunes filles, et des enfants tombent victimes de violences sexuelles dans l'indifférence ou le silence. Ces actes ne sont pas seulement des agressions physiques : ils sont des violations fondamentales de la dignité humaine et des droits les plus élémentaires. Le viol suivi de grossesse d’Awa âgée juste de 9 ans et tout récemment l'agression suivie de meurtre de Diary (12 ans) témoignent d'une réalité tragique : notre pays est à genoux face à ces fléaux.
Monsieur le président, dans un pays qui aspire à la justice, au progrès et à la sécurité pour tous, il est inadmissible que tant de victimes continuent de souffrir dans l'ombre, souvent rejetées par leur entourage, parfois ignorées par les institutions censées les protéger. Il est temps de rompre le cycle de l'impunité. Nous vous interpellons, Monsieur le président, pour que votre gouvernement pose des actions fortes, immédiates et visibles. Voici nos propositions :
Réforme du cadre juridique : Adopter des lois plus sévères et adaptées pour criminaliser ces actes et garantir des peines dissuasives. Il est urgent de réformer le code de la famille qui comporte des dispositions discriminatoires à l'égard des filles et des femmes. Ayant ratifié le protocole de Maputo, il est temps que nos lois soient harmonisées afin d'autoriser l'avortement médicalisé en cas de viol et d'inceste.
Ces mesures doivent prévoir un allongement des délais de prescription pour les infractions sexuelles, permettant aux victimes de porter plainte, y compris plusieurs années après les faits.
Mise en place de mécanismes de protection et d'accompagnement des victimes : Nous demandons la création de centres d'accueil spécialisés, offrant une prise en charge psychologique, juridique et médicale, ainsi que des plateformes d'alerte accessibles à tous.
Formation et sensibilisation : Les forces de l'ordre, le personnel judiciaire et les acteurs sociaux doivent être formés pour comprendre l'ampleur et la gravité de ces crimes, afin de garantir un traitement juste et respectueux des victimes.
Une campagne nationale contre les violences sexuelles : il est impératif d'éduquer nos citoyens sur ces questions, de briser les tabous et de mobiliser la société civile dans la lutte contre ces pratiques inhumaines.
Monsieur le président, l'Histoire retiendra vos actions et vos décisions dans ce combat pour l'innocence de nos enfants et la dignité de nos femmes. Votre mandat peut devenir celui d'une révolution sociale et morale, celui qui mettra fin à l'impunité et restaurera la confiance des citoyens envers l'État.
Les victimes, les familles et tous les citoyens attendent de vous non seulement des paroles, mais surtout des actes concrets, rapides et déterminants.
Le temps presse, Monsieur le président. Chaque jour d'inaction condamne davantage de vies. L'heure est venue de faire de cette lutte une priorité nationale. Nous croyons en votre capacité à entendre cet appel et à agir avec la fermeté et la compassion que cette situation exige.